Monsieur le Président,
Il y a cinquante ans, le 3 février 1962, le Président J.F.Kennedy instaurait officiellement le blocus contre Cuba. C’était une mesure criminelle, car la grande île des Caraïbes dépendait largement des Etats-Unis, tant pour ses importations que pour ses exportations.
Faire plier Cuba avait été un enjeu de la campagne électorale pour la succession du président Eisenhower, où R. Nixon et J.F. Kennedy rivalisaient d’ingéniosité pour lui succéder. Pour les Etats-Unis, il s’agissait de « liquider le foyer d’infection révolutionnaire qui risquait de faire métastase au corps latinoaméricain ».
Le terrain de la lutte anticastriste avait bien été préparé par Eisenhower. Treize jours après l’attentat de la CIA contre le navire français « la Coubre », qui avait fait une centaine de morts dans le port de la Havane, ce Président donnait son accord écrit, le 17 mars 1960, à l’ouverture de camps d’entraînements anticastristes. A quelques mois de son départ de la Maison Blanche, son gouvernement envisageait, en avril 1960, de « réduire les revenus monétaires et les salaires réels et provoquer la famine, le désespoir et le renversement du gouvernement ». En juillet il passait aux actes, décrétant l’embargo sur le pétrole et les produits sucriers cubains, et en octobre, il imposait un embargo partiel interdisant toute exportation des Etats-Unis vers Cuba à l’exception des médicaments et produits alimentaires non subventionnés. La suite, nous la connaissons, et les Cubains la subissent depuis un demi siècle.
Honnêtement, Monsieur le Président, nous espérions de votre part une politique en rupture avec celle de vos prédécesseurs. Il n’en a rien été, chaque année, vous avez voté la poursuite du blocus contre Cuba, au mépris de l’opposition de la presque totalité des pays du monde. Vous avez essayé d"˜asphyxier Cuba par tous les moyens, sans même respecter les lois internationales. La convention de Genève interdit l’embargo sur les médicaments, même en temps de guerre, mais votre pays refuse la vente de médicaments à Cuba.
L’hostilité des Etats-Unis envers Cuba n’a pas cessé depuis plus de cinquante ans. Cette politique agressive a causé de grands dommages au peuple Cubain. Les Cinq, Gerardo Hernández, Antonio Guerrero, Fernando González, Ramón Labañino et René González ont aidé leur pays à déjouer les plans machiavéliques tramés depuis les plus hautes instances de votre pays. Vous n’avez à ce jour pas levé le petit doigt pour rendre la liberté à ces patriotes Cubains. Leur condamnation est une monstruosité d’un cynisme total.
Cette obsession des gouvernements des Etats-Unis à détruire le régime cubain, explique d’ailleurs pourquoi, quand la presse des Etats-Unis se réfère aux Cinq, il est toujours écrit : « les cinq espions Cubains », formule révélatrice de la duplicité notoire entre les organisations terroristes et le gouvernement des Etats-Unis. Cette duplicité est dénoncée dans chacune des plaidoiries des Cinq, après leurs verdicts, en 2001.
Voici un extrait de celle d’ d’Antonio Guerrero : « … Cuba n’a jamais porté atteinte à la sécurité nationale des Etats-Unis, n’a jamais commis une seule agression ni un seul acte de terrorisme contre ce pays-ci. Elle aime profondément la paix et la tranquillité et souhaite les meilleures relations entre les deux peuples. Elle a prouvé son admiration et son respect du peuple nord-américain. « Cuba n’est pas un danger militaire pour les Etats-Unis », a déclaré devant cette chambre l’amiral Carroll. Le danger militaire que représente Cuba pour les Etats-Unis est « nul », a témoigné le général Atkinson. Ma patrie -à l’instar de tout autre pays- a le droit le plus incontestable de se défendre contre ceux qui tentent de faire du tort à son peuple. Et s’il a été complexe et difficile de freiner ces actes terroristes, c’est parce que leurs auteurs ont bénéficié de la complicité ou de la tolérance indolente des autorités. Mon pays a fait l’impossible pour avertir le gouvernement nord-américain des dangers que représentaient ces actions, et il l’a fait par des voies officielles, discrètes ou publiques. Mais il n’a jamais pu obtenir en retour la moindre coopération. Dans les années 90, stimulés par l’effondrement du camp socialiste, des groupes terroristes ont intensifié leurs activités contre Cuba. L’heure tant attendue avait enfin sonné, selon eux, pour créer le chaos final, terroriser le peuple, déstabiliser l’économie, nuire à l’industrie touristique, précipiter la crise et porter le coup de grâce à la Révolution cubaine. Que pouvait donc faire Cuba pour se défendre et être prévenue des plans terroristes tramés contre elle ? Que pouvait-elle faire pour éviter un conflit de plus grande envergure ? Quels choix s’ouvraient devant elle pour sauvegarder la souveraineté et la sécurité de ses enfants ? L’une des façons d’empêcher éventuellement les actions brutales et sanglantes, d’éviter que toujours plus de morts causent toujours plus de souffrances, est d’agir en silence. Il n’existait pas d’autre choix que de pouvoir compter sur des hommes qui -par amour d’une cause juste, par amour de leur patrie et de leur peuple, par amour de la paix et de la vie- étaient prêts à accomplir volontairement ce devoir digne contre le terrorisme : alerter d’un danger d’agression… »
Monsieur le Président Obama, l’attitude des Etats-Unis envers Cuba doit changer. L’heure est venue de tourner définitivement cette page peu glorieuse de l’histoire des Etats-Unis. Cuba est un pays souverain, n’en déplaise à quelques nostalgiques de l’avant Révolution.
Un acte de réciprocité humanitaire est possible pour amorcer de nouvelles relations entre vos deux pays. Il vous suffirait pour cela, de renvoyer les Cinq dans leur pays en échange de la libération d’Alan Gross. Les cinq ont déjà payé le prix fort, avec plus de 13 ans de prison. Alan Gross, condamné à 15 ans de prison pour espionnage est emprisonné quant à lui, depuis deux ans à Cuba. Un tel geste, Monsieur le Président, honorerait votre pays qui a déjà tellement bafoué la souveraineté de Cuba.
Recevez, Monsieur le Président, l’expression de mes sentiments humanistes les plus sincères.
Jacqueline Roussie
à
Monsieur le Président Obama The White House
1600 Pennsylvania Avenue N.W.
Washington DC 20500
Copies envoyées à : Mesdames Michelle Obama, Nancy Pelosi, Hillary Clinton, Kathryn Ruemmler, Janet Napolitano, à Messieurs. Harry Reid, Eric Holder, John F. Kerry, Pete Rouse, Donald, Rick
PS : Je viens d’apprendre que Roberto González, frère de René était très gravement malade. Monsieur le Président, autorisez René à aller voir son frère