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Les politiques ne meurent jamais

Récemment, un proche me demande si, selon moi, on reverra Sarkozy dans le paysage politique. Pour moi, aucun doute. Un exemple canonique : alors qu’il est âge de près de 90 ans, Antoine Pinay, 250 fois ministre, président du Conseil, membre pendant un an du Conseil national de Vichy, est approché par des ingénieurs et un ancien agent du SDECE qui a financé des opérations de déstabilisation dans des pays de l’Europe de l’Est par le biais de communautés religieuses locales (ohé, Wojtyla !). Il s’agit cette foi de promouvoir et de financer les avions renifleurs car, en France, si on n’a pas de pétrole, on a des idées. Se laisse-t-il abuser, est-il complètement excité par le peut-être dernier grand rôle politique de sa vie, Pinay s’embarque dans cette galère ridicule ? Il est vrai qu’il lui reste treize ans à vivre et que le temps passe vite.

J’évoquerai ici le cas d’un personnage beaucoup moins connu et qui eut la malchance d’être le cadet d’un frère brillantissime : Olivier Giscard d’Estaing. Á 86 ans, cet homme d’affaires de haute volée (comme Trump, il ne partait pas de rien puisque la famille avait depuis longtemps fait fortune dans les mines puis le nucléaire) s’était montré plutôt discret en politique, se contentant de la mairie du village d’Estaing et d’un siège de député pendant cinq ans dans les Alpes Maritimes. C’est une manie dans la famille : on a toujours besoin d’un hochet. L’aînée des enfants d’Estaing, Sylvie, épouse d’un comte de Las Cases, fut pendant vingt-sept ans mairesse de Prinsuéjols, village de l’Aubrac de 153 habitants.

Olivier a soudainement été pris d’un prurit qu’une application d’éosine n’aurait pu soigner : sauver Vierzon du stalinisme. Possédant une maison dans cette sous-préfecture du Cher depuis une cinquantaine d’années, il décida de figurer sur la liste UDI-UMP de Stéphane Mousset lors des élections municipales de 2014 pour mettre fin au « règne » du maire communiste Nicolas Sansu. Promettant de faire jouer ses réseaux au service de la ville, il appela les électeurs à saisir « la chance unique de se débarrasser d’une municipalité communiste qui entraîne Vierzon dans la déchéance ». Olivier appela le maire sortant à « renoncer à la mairie pour se consacrer à son mandat de député ». Dans un tract, il lança ce vibrant appel : « Notre liste mène à Vierzon un combat qui mérite d’être connu de tout le pays. C’est le combat de l’esprit d’entreprise, le combat du libéralisme contre le totalitarisme étatique. Le stalinisme a encore des fidèles ! À Vierzon, c’est Nicolas Sansu, et à Paris, nous avons Marie-Georges Buffet et Jean-Luc Mélenchon. Des dictateurs, qui stérilisent les territoires et dupent les électeurs. Le mur est tombé à Berlin. Il doit aussi tomber à Vierzon ! ».

T’as des mecs à particule (“Monsieur de Puipeu”, comme De Gaulle avait surnommé son ministre des Finances) qui, jusqu’à leur dernier souffle, vivront en 1788 !

Las ! Trois fois las ! La liste d’Olivier fut devancée par celle des couteaux entre les dents, par une autre liste de droite et par celle du FN. Que des gueux. Sans pouvoir se maintenir. Par la grâce d’une triangulaire, les Bolchéviques l’emportèrent au second tour.

En broutant à la recherche d’Olivier et de ses frasques municipales, je suis tombé sur ce désopilant article d’Alex Térieur (un pseudo ?), du blog LerrybéRit en date du 19 mars 2014, preuve qu’il est des manants irrévérencieux :

Valéry Giscard d’Estaing, l’ancien président de la République, se faisait passer pour son frère Olivier à Vierzon

Valéry Giscard d’Estaing, l’ancien président de la République, se faisait passer pour son frère. L’Ex a profité de l’absence d’Olivier Giscard d’Estaing, parti une année entière dans un monastère bouddhiste en Amérique latine, pour prendre sa place et tromper, sans le moindre problème, tout l’entourage d’Olivier. L’ancien président e la République, prit le doigt dans le pot de confiture, a avoué avoir monté ce stratagème, "par ennui" car, a-t-il ajouté aux enquêteurs, "la vie d’ancien président est parfois monotone".

Parmi ces faits d’arme, Valéry Giscard d’Estaing a réussi, au nom de son frère Olivier, à rejoindre une liste de droite aux élections municipales de Vierzon dans le Cher. Ainsi, a-t-il fait croire aux trente-quatre autres colistiers, qu’il allait chasser les élus communistes de cette ville. Sa déclaration, au soir de la présentation de la liste sur laquelle Valéry Giscard d’Estaing s’est inscrit au nom de son frère, a même été reprise, via une dépêche de l’Agence france presse, dans de nombreux médias.

Ainsi, l’ancien président de la République quittait régulièrement son Puy-de-Dôme pour venir s’installer quelques jours, tout au plus, dans la demeure familiale d’Olivier, située à Vierzon, sur les hauteurs d’un quartier prénommé Chaillot. Dans la peau de son frangin, l’Ex a même fait croire que, grâce à son carnet d’adresses, il pourrait faire venir des entreprises à Vierzon, si sa liste était élue. "J’ai vu que ça marchait super bien alors j’ai continué. Et une fois pris dans l’engrenage, je n’ai pas pu reculer". Tout a été découvert lorsqu’Olivier, revenu de sa retraite bouddhiste, en début de semaine, a découvert, stupéfait, les nombreux articles de presse, tracts de campagne et ses déclarations qu’il n’a jamais faite.

Un musée Lady Di à Vierzon

C’est dans un brouillon de profession de foi, qu’Olivier a découvert d’où venait la supercherie car il était question de créer, à Vierzon, un musée dédié à la princesse Diana, avec, la reconstitution du pont de l’Alma, l’exposition du carrosse royal et une inauguration en grande pompe avec la reine d’Angleterre. Dans une lettre manuscrite, l’ancien président de la République avait même imaginé léguer le château de son frère à une œuvre caritative de Vierzon.

Dans l’impossibilité de joindre Valéry Giscard d’Estaing qui fait dire qu’il est parti en voyage pour six mois, Olivier a donné une conférence de presse dans laquelle, il explique, que pour rendre service, il restera sur la liste de Vierzon pour ne pas la mettre dans les difficultés. Il espère que les colistiers comprendront son désir de ne pas être élu et de n’assumer aucune responsabilité politique.

Le 1er avril, Olivier Giscard d’Estaing s’envolera pour trois mois à New York pour une série de conférences sur le thème de la famille. "La difficulté d’être un frère de l’ombre", "Comment vivre avec un nom connu", "si ce n’est donc toi c’est donc ton frère", "mon frère, ce président de la République" seront les quelques thèmes développés pendant ce cycle de conférences. Olivier a même prévu un code secret avec son proche entourage et ses gens de maison afin que la supercherie ne se reproduise plus.

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Bernard GENSANE
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