Mon journal local m’a informé ce matin qu’avec la mort de Kadhafi, le "peuple libyen peut enfin tourner la page de 42 ans de brutale oppression."
L’oppression a commencé quand Kadhafi a libéré la Libye de la tyrannie de la marionnette qui dirigeait le pays, le roi Idris 1er, dont le drapeau est devenu la bannière des rebelles.
Elle s’est poursuivie avec l’expulsion par Kadhafi des bases militaires étrangères et sa nationalisation du pétrole libyen.
L’oppression s’est accentuée lorsque les Libyens, sous la direction de Kadhafi ont commencé à jouir du niveau de vie le plus élevé d’Afrique.
Et le combat de Kadhafi contre le groupe armé islamique libyen - dont les membres se sont battus en Afghanistan et en Irak et ont lutté avec Oussama ben Laden contre les Soviétiques en Afghanistan - a certainement ajouté à l’oppression.
Le leader de ce groupe, Abdel Hakim Belhaj, qui a été autrefois emprisonné aux USA pour terrorisme, est maintenant le chef militaire de Tripoli.
La manière dont Kadhafi a tenu tête aux dirigeants des compagnies pétrolières et aux officiels du Département d’Etat étasuniens pour "Libyaniser" l’économie libyenne (pour que les investissements étrangers profitent aux Libyens) a augmenté encore d’un cran l’oppression.
Et l’aide généreuse de Kadhafi aux mouvements nationaux de libération des pays d’Afrique sub-sahariens a étendu son oppression au monde entier.
Quelles sont les forces pro-démocratiques qui ont combattu ces multiples oppressions ?
- Le Qatar, une monarchie absolue qui a envoyé des armes et des munitions aux rebelles.
- Les monarchistes, toujours furieux que leur roi ait été renversé.
- Les islamistes, qui tentent depuis des années d’instaurer un régime islamiste à Tripoli.
- Les dissidents liés à la CIA qui détiennent désormais les postes-clés du Conseil National de Transition et qui ont promis aux compagnies pétrolières étrangères les premiers droits sur les concessions pétrolières.
- L’OTAN dont les avions et les forces spéciales ont joué un rôle décisif dans le renversement de Kadhafi.
Ces dernières semaines, les avions de l’OTAN se sont consacrés à la destruction totale de la ville de Syrte - au nom de la protection des civils. Il semble que l’OTAN ait le droit de bombarder des civils tandis que les leaders de pays indépendants n’ont pas le droit de combattre les soulèvements qui ont lieu dans leurs pays.
Pendant que ces forces s’unissaient pour combattre les oppressions de Kadhafi, les tanks saoudiens fournis par les USA entraient au Barhein pour écraser un soulèvement populaire, le président du Yémen soutenu par les USA, Ali Abdullah Saleh, faisait tirer sur son peuple et le régime de Moubarak se perpétuait en Egypte par l’intermédiaire des hommes de main de Moubarak avec l’approbation des USA.
Ces événements - qui impliquent tous des alliés des USA - ont été plus ou moins passés sous silence par les médias. Et ce qui est plus important encore, aucun n’a fait l’objet d’une intervention militaire ni d’une inculpation par la Cour Pénale Internationale, ces attentions ayant été réservées uniquement à Kadhafi.
Il est exact que le peuple libyen peut tourner la page sur ces 42 ans, mais ils ont été 42 ans d’indépendance et non d’oppression brutale.
Par contre, ce qui les attend, ce sont les bases militaires de l’OTAN, une économie au service des compagnies pétrolières occidentales et le joug oppressif de l’impérialiste étasunien.
Stephen Gowans
Pour consulter l’original : http://gowans.wordpress.com/2011/10/21/gaddafi%E2%80%99s-oppressions/
Traduction : Dominique Muselet pour LGS