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Le voile gris - Résistons ensemble, N° 55, juillet 2007.



RESISTONS ENSEMBLE / bulletin numéro 55 / juillet 2007
Le voile gris


 Le voile gris
 « Vérité et justice pour Lamine Dieng ! »
 Enquête sur des citoyens au dessus de tout soupçon
 Un adolescent fauché par une voiture de police
 Bordeaux : morts en série au commissariat central
 Défenestrés
 Le libraire du « Monte-en-l’air »...

 [ S U R L E V I F ]
« Yohan ou Cruelle Justice »

 [C H R O N I Q U E D E L "A R B I T R A I R E]
Liberté pour Paco et Damien !
Liberté pour Nathalie Ménigon !
Une peur bleue
Outrage à La Rumeur
La vérité crue constitue une « offense » !
Légitime défense
Résistance à Belleville
Buffalo Grill


Pour télécharger ce bulletin mis en page au format pdf :
http://resistons.lautre.net/


Le voile gris

Un voile gris tombe sur le pays, il nous étouffe, il nous colle à la peau. La liste de ceux dont la mort est liée à la police ces dernières semaines s’allonge. Ecrasé par une voiture de police, mort dans un fourgon, dans une cellule de dégrisement, tombé de la fenêtre d’un commissariat, noyé dans une rivière, retrouvé pendu dans un centre de rétention... Puis, le pouvoir rafle partout, dans les cafés, devant les écoles, arrache une dame âgée de sa baignoire... Mais pourtant le régime ronronne. Les partis politiques et les syndicats ont eu leur Canigou. Le président les reçoit, les consulte, ils sont « considérés », il y a des ministres de gauche. C’est du jamais vu en France. Les médias, plus soumis que jamais, adorent le président « actif » et son gouvernement d’ « ouverture ».
L’anesthésie générale cache la montée triomphante d’un Etat policier qui montre ses dents et s’en sert sans vergogne. Tout ce qui reste de la sécu, du droit de grève, des retraites, de l’éducation, du droit à une vie décente... passera à la trappe si on laisse faire la violence étatique. Pour le moment on mate les minorités, les plus démunis mais ce n’est qu’un début. La croyance en un Etat « démocratique », « moderne et réaliste » paralyse les partis politiques et les syndicats. L’histoire a pourtant montré que finalement eux aussi vont se retrouver derrière les barbelés.
Mais, à Belleville, une foule de 200 personnes s’est dressée contre la police et ses grenades lacrymogènes pour s’opposer à une rafle, dans l’avion pour Bamako les passagers en colère ont empêché une expulsion d’une violence rare, la marche des fiertés a été interrompue par une centaine de militants pour en expulser les gays de l’UMP. Il est possible de sortir de l’anesthésie.


« Vérité et justice pour Lamine Dieng ! »
Lamine Dieng, un jeune homme de 25 ans, a trouvé la mort, entre les mains de la police le dimanche 17 juin au matin à Paris 20e, dans des circonstances mystérieuses. La famille prévenue au bout de 36 heures n’a toujours pas les informations qu’elle réclame sur les circonstances du décès.
Une marche silencieuse qui regroupait entre 800 et 900 personnes a eu lieu le dimanche 24 juin, plus de 500 personnes se sont rassemblées, le samedi 6 juillet, place Gambetta à Paris. La famille et les amis veulent comprendre « comment Lamine Dieng a pu monter dans le fourgon vivant et en ressortir mort ». Elle a porté plainte contre X afin qu’une instruction soit ouverte et qu’elle puisse avoir accès au dossier. Un appel à témoin est lancé : 06 50 62 38 27, contact : collectif-laminedieng@jubii.fr ; blog : http://coucxx.skyrock.com/




Enquête sur des citoyens au dessus de tout soupçon
Le 18 juin, lors d’un contrôle, Elmi Mohammed, 23 ans, s’est jeté dans la Saône et s’est noyé devant les policiers. La famille n’a été prévenue que 48 heures après les faits. Pour le MRAP, compte tenu des informations dont dispose la famille, cette affaire relève incontestablement d’une non assistance à personne en danger, les policiers n’ayant ni tenté de le sauver, ni appelé les secours, le jeune homme a pourtant eu le temps de se déshabiller avant de sauter à l’eau. On s’interroge sur le fait qu’ils n’aient pas engagé des recherches afin de retrouver le corps, qui n’a été découvert que vendredi 22 juin. Plus fort encore, ce sont ces mêmes policiers du 1er arrondissement qui sont en charge de l’enquête dans laquelle ils sont impliqués. Source http://rebellyon.info


Un adolescent fauché par une voiture de police
L’adolescent de 14 ans, fauché le samedi 23 juin par un voiture de police alors qu’il traversait en poussant son vélo sur un passage piéton dans le quartier Saint-Joseph à Marseille est mort le lendemain à l’hôpital. Selon des témoins, les policiers seraient passés au rouge sans avoir actionné ni leur sirène, ni leur gyrophare pour prévenir. Le policier conducteur devait se rendre d’urgence à l’hôpital pour... prendre une relève de garde. Mis en examen « pour homicide involontaire avec la circonstance aggravante du délit de grande vitesse » il a été placé sous mandat de dépôt avant d’être rapidement libéré... Le 30 juin une marche silencieuse à la mémoire de l’adolescent a réuni plusieurs centaines de personnes.


Bordeaux : morts en série au commissariat central
Mardi 12 juin, Monsieur Ait Brahim Moulay Mohamed, âgé de 27 ans s’est suicidé au centre de rétention de Bordeaux. Désespéré par l’annonce de son expulsion imminente vers le Maroc, le jeune homme s’est pendu dans les douches. Cela se passe de commentaire.
Quelques jours plus tard, c’est un homme mis en cellule de dégrisement qui devait trouver la mort dans ce même commissariat. La mort pourrait être la conséquence d’une hémorragie due à un choc à l’arrière du crâne sans que l’on sache encore si cela était dû à une chute avant son entrée dans les locaux de la police ou à une toute autre cause.
Qu’importe puisque le Directeur Départemental de la Santé Publique attendait « sereinement les résultats de l’enquête ». C’est vrai que lorsqu’on se balade dans cette ville, patrimoine mondial, on n’a pas envie de croiser des étrangers et des poivrots. C’est à ce prix, madame, qu’on mange des petits fours à la mairie !
http://tinyurl.com/352g97

Défenestrés
Jeudi 14 juin, Dominique Pasqualaggi, indépendantiste corse soupçonné de participation à un attentat contre le Trésor public en 2006 à Aix-en-Provence, s’est grièvement blessé en se jetant par la fenêtre du troisième étage de la sous-direction antiterroriste de la PJ à Paris.
Le mardi suivant un homme s’est suicidé en se jetant par la fenêtre du quatrième étage du commissariat central de Lyon. L’homme allait être placé en garde-à -vue alors qu’il avait reconnu sa participation à une escroquerie.

Le libraire du « Monte-en-l’air »...
a été convoqué au commissariat pour une « audition » au sujet d’une affichette annonçant la première réunion du comité de soutien à Lamine Dieng, « mort dans un fourgon de police », ainsi que d’une affichette « maison » proclamant « Ici on meurt dans des fourgons de police ». Soutien : lemontenlair@free.fr




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« Yohan ou Cruelle Justice »
« Je suis la mère de Yohan Lavigne mort à l’âge de vingt ans en prison en 2004, et je lance une pétition pour éclaircir les circonstances plus que suspectes du décès de mon fils, je ne veux que la vérité mais toute la vérité. Pourquoi la justice n’a jamais recherché à qui était la seconde écriture sur la soit disant lettre d’adieu ? Pourquoi alors que j’ai maints témoignages écrits des coups qui déforment le crâne de Yohan, le juge refuse de les voir ?... »
En 2004, la mère de Yohan se porte partie civile, depuis la justice ne lui a amené aucune réponse, fin 2006 elle a porté plainte pour assassinat à l’encontre de son fils Yohan et attend encore la réponse de la justice. La pétition : http://www.altermonde-levillage.com/spip.php?article10516 - infos : http://helenebourt.unblog.fr/.




> [C H R O N I Q U E D E L "A R B I T R A I R E]

Liberté pour Paco et Damien !
Paco et Damien, deux chômeurs, ont été incarcérés le 13 mai. Damien, 20 ans, est accusé de « tentative de dégradation par incendie » (l’affaire du Fouquet’s), Michel Gaucher, dit Paco, 50 ans, de « complicité de dégradation par incendie ». Damien d’abord, puis Paco ont finalement obtenu la liberté provisoire, mais sous les conditions restrictives.
« Ce qu’on réprime aujourd’hui, c’est son droit d’être libertaire ? » a demandé leur avocate Me Irène Terrel. Une nouvelle campagne hystérique est en train d’être montée contre les « groupes violents d’extrême gauche » qui ont été (danger suprême !) rejoints lors la manifestation du 16 mai par « une poignée de jeunes de cité » (le Figaro du 8 juin)
Alliot-Marie lance de son côté la curée sur Canal+ : « Notre priorité sera la traque à ces mouvances extrémistes nouvelles et dangereuses ». Où sont les protestations de la gauche officielle, des démocrates ?

Liberté pour Nathalie Ménigon !
La demande de libération conditionnelle de Nathalie Ménigon était examinée le 28 juin, par la chambre d’application des peines de la Cour d’appel de Paris. Le Parquet fait tout pour la maintenir en prison. Décision le 19 juillet. info : http://nlpf.samizdat.net

Une peur bleue
Deux rapports sur les relations entre les habitants des quartiers populaires et la police : LDH, Syndicat de la magistrature, Avocats de France et l’Institut d’études sur la sécurité rattaché au ministère de l’intérieur disent la même chose : la population n’a plus confiance en la police, elle en a même une « peur » bleue. La police est souvent jugée « irrespectueuse » et « partiale »  ; la démultiplication des contrôles et des interpellations sans fondement, les « charges brutales », la violence des conditions d’arrestation, l’absence d’anticipation voire la non assistance à personne en danger... font qu’on « angoisse » même à l’idée de rencontrer la police et qu’on « panique » quand on la rencontre. « Pour les enfants, l’uniforme d’un policier est devenu le signe d’un danger » relève le rapport LDH-SM-SAF et certains parents constatent même une « politisation » précoce de leurs très jeunes enfants (8-10 ans) avec manifestations et slogans anti-police. Solution préconisée : plus de proximité de la police, des commissariats ouverts la nuit... A ce rythme les enfants ne pourront plus jouer au gendarme et au voleur faute de volontaires pour endosser le rôle du premier... Faut-il s’en plaindre ?

Outrage à La Rumeur
« Tu connais La Rumeur, sous ses faux airs, frère ! Sous surveillance des RG et ce quoi que nous fassions » mais on va quand même vous rappeler l’affaire... En 2002, plainte de Sarkozy pour diffamation envers la police, le texte incriminé parle des « centaines de frères abattus sans qu’aucun des assassins n’ait été inquiété » et des « humiliations policières régulières » dans les quartiers populaires. Lors du premier procès en 2004, le groupe de rap choisit une défense politique ; des témoignages confirment que les violences policières sont bien réelles et que leur texte reflète bien « le sentiment général » ; première relaxe donc. Mais le pouvoir fait appel : relaxe confirmée en juin 2006. Le pouvoir se pourvoit alors en cassation (fait rarissime et infondé : aucun élément de droit n’est en jeu et la cour de cassation ne juge qu’en droit). Le 13 juin, l’avocat général de la cour de cassation fait appel de la relaxe. Nouveau jugement le 11 juillet prochain. On dirait qu’en ce qui concerne les quartiers populaires et la police, ceux qui « préfér(aient) l’excès de liberté d’expression à l’excès de censure » préfèrent cette fois l’excès de mensonges à l’excès de vérité.

La vérité crue constitue une « offense » !
Le journal anti-carcéral l’Envolée poursuivi pour diffamation contre l’administration pénitentiaire à été condamné à 3000 euros d’amende avec sursis et 500 euros de dommages et intérêts. En tout quatre plaintes visaient des témoignages de prisonniers publiés dans le journal, violence des IRIS, quartier disciplinaire, malades en détention... Le tribunal de Beauvais a déclaré ne pas remettre en doute les violences dénoncées mais motive sa condamnation considérant que la diffamation « était constituée dans la forme et par les mots employés »...
« Si, pour des journaux à grand tirage, 3000 euros ne représentent presque rien, ces frais hypothèquent notre existence ; pour sauvegarder notre indépendance nous avons fait le choix de ne pas être subventionnés [...]. Cette épée de Damoclès, au-delà d’une attaque sur la liberté d’expression et de la presse, est une censure à peine déguisée. »
Source : https://paris.indymedia.org

Légitime défense
Salif Kamaté a la cinquantaine. Double peine il a subi une expulsion d’une violence telle, qu’inconscient, les yeux révulsés, policiers et passagers l’ont cru mort pendant un instant (voir RE no 54). Roué de coups au ventre, il avait mordu le bras qui l’étranglait. Le 29 juin le tribunal de Bobigny l’a reconnu coupable de « soustraction à l’exécution d’une mesure de reconduite à la frontière » et « entrée ou séjour irrégulier », mais n’a pas suivi le procureur qui demandait six mois de prison pour « violences sur dépositaire de l’autorité publique » reconnaissant la légitime défense. Le parquet a annoncé son intention de faire appel.

Résistance à Belleville
« Il y avait trois clients dans mon bar quand, tout d’un coup, une vingtaine de policiers sont entrés pour les contrôler. Ils ont embarqué un client qui n’avait pas de papiers (...) ensuite ils ont fait pareil dans l’épicerie juste en dessous. Ils ont pris un sans-papiers qu’ils ont traîné dans un fourgon ». Mercredi 20 juin la police rafle à Belleville. Sauf que cette fois-ci elle s’est retrouvée face à une foule de 200 personnes hurlant contre elle, cette résistance a obligé les policiers à appeler des renforts et disperser la foule à coups de grenades lacrymogènes


Buffalo Grill
Mardi 3 juillet la police a expulsé du parking du restaurant de Viry-Châtillon qu’ils occupaient depuis un mois plusieurs dizaines de sans-papiers licenciés par la chaine Buffalo Grill. Une vingtaine de ces sans-papiers vient d’être régularisée et réembauchée, ce qui est une victoire très partielle, mais ternie par le rejet de la régularisation et de la réembauche de 12 autres sans-papiers qui avaient tenu dans la presse des propos que l’enseigne a estimés « diffamatoires », elle leur reproche des « accusations d’exploitation raciste voire négrière ». Camara, 40 ans, un de ces sans-papiers déclarés persona non grata affirme que « Tout ce que nous avons dit, c’est la réalité ». Quant à la CGT de l’Essonne elle lâche les plus exposés dans la lutte et dédouane l’enseigne en admettant « que les accusations portées contre Buffalo Grill sont en l’état infondées ».





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