Cette femme l’a dit et répété : elle aurait voulu travailler !
Pourtant, au moment même où elle prononce ces mots, elle est censée avoir un emploi. Un poste d’assistante parlementaire à temps complet depuis des années.
Faut-il que son mari la tienne en si peu d’estime qu’il ne l’ait même pas informée ? Fait-elle à ce point partie des meubles ? Quels boniments lui a-t-il servi pour qu’elle signe les contrats de travail ?
C’est un rôle effacé de femme au foyer qu’elle évoque toujours : "nous ne parlons jamais de politique à la maison", "les gens savent que je ne m’implique pas dans l’action politique de mon mari", "je n’ai jamais été son assistante ou quoi que ce soit de ce genre", "je dis ce que je pense mais je ne pense pas qu’il écoute", "si je n’avais pas eu le dernier, je serais sans doute allée chercher un travail" ...
Sans doute que François Fillon l’a dissuadée de chercher un emploi afin de pouvoir mener sa carrière à lui sans souci des enfants ou des tâches domestiques, pour la garder sous son emprise, mais surtout parce qu’elle avait déjà un autre emploi, qu’elle ignorait peut-être.
Pas besoin de s’étendre sur l’escroquerie (peut-être légale, ce qui est encore pire !) qui a consisté pour le châtelain Fillon à s’enrichir grassement avec des contrats d’assistants parlementaires pour femme et enfants, la "cagnotte" du Sénat, sa société de conseil aux profits mirifiques qui a tout du conflit d’intérêt, son richissime ami qui finance à prix d’or la prose de son épouse ainsi que sa responsable de campagne, son IRFM (Indemnité représentative de frais de mandat) dont on peut se demander à quoi elle sert vu que sa permanence est "au manoir" etc ...
Pas besoin non plus de rappeler à quel point notre pays fait figure d’exception avec un personnel politique aussi corrompu et l’absence de contrôle de l’argent public qui leur est distribué.
Quelle que soit la décision de la Justice les faits, eux, sont là !
Mais si on a découvert un Fillon, menteur, arrogant, secret, obnubilé par l’argent, sans aucune empathie, on a aussi, au passage, démasqué le misogyne, le macho.
On s’interroge parfois pour savoir si les femmes qui se couvrent la tête, le corps, le font volontairement ou sous la pression d’un homme, un époux le plus souvent. On voit bien, dans la triste histoire de Pénélope, que dans tous les milieux l’asservissement des femmes est toujours au programme.
Le "voile" de Pénélope c’est cette cage, dorée certes, dans laquelle son "chrétien" de mari l’a enfermée : le manoir, l’argent ... mais aussi le mépris affiché par celui qui n’a vu en elle que l’épouse, la mère, la femme dont il s’est servi, sans doute à son insu, pour ses petites combines.
Et qu’il semble décidé à laisser se débattre dans l’arène médiatique, politique et judiciaire quelles qu’en soient les conséquences pour elle.
Claire Vérilhac
Pénélope – miniature illustrant le traité De muleribus claris (Les femmes célèbres) de Bocage (XIVe) – manuscrit qui met en avant Pénélope comme l’image de l’épouse chrétienne discrète et obéissante (BNF).