Indociles, 15 juin 2007.
(...) Le soir de la présidentielle, Romain manifestait. Il était resté pacifique. Il avait gardé ce pavé dans la main tout en se promenant avec Marie, allant d’un côté à l’autre de la place de la Bastille. Ouvrant la porte de la salle d’audience, un gendarme a signalé aux familles et aux proches qu’elles pouvaient entrer.
Romain s’est levé. Vous êtes condamné à quatre mois de prison ferme, a dit le président. « Il est devenu blanc tout d’un coup » se souvient Frédérique, la copine de Martial. Romain n’a pas dit un mot. Il s’est levé. Les gendarmes lui ont fait signe de le suivre. (...)
Ce tribunal définit sa propre jurisprudence d’exception. René Grouman est un magistrat de convictions. Un défenseur de l’ordre public. Par le passé, il l’a revendiqué ouvertement. Cela remonte à 2003.
J’ai regardé dans un dossier de presse pour retrouver ses propos exacts. En octobre 2003, il est procureur au procès d’Alain Juppé dans l’affaire des emplois fictifs du RPR. Les journaux le surnomment « le procureur de Juppé ». Il a requis huit mois avec sursis contre l’ancien premier ministre et demandé au tribunal de Nanterre de ne pas lui infliger d’inéligibilité. A l’époque, cette mansuétude surprend - le tribunal condamnera Juppé à 18 mois avec sursis et dix ans d’inéligibilité. Dans les couloirs du Palais de justice, on s’interroge. On parle de Grouman tant et si bien, qu’un rapport des renseignements généraux refait surface à son sujet. Explosif. « Le procureur de Juppé fiché à l’extrême droite ». (...) On apprend aussi que le futur substitut avait coutume de se rendre aux cérémonies d’anniversaire de la mort de Franco en Espagne. Le Parisien vérifie auprès de l’intéressé. Et Grouman confirme. (...)
Une semaine plus tard, le Canard enchaîné révèle la promotion de Grouman au poste de vice-président du Tribunal de grande instance de Paris. « Au moment de requérir avec modération, il savait qu’il allait être nommé à Paris » commente le Canard. (...)
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L’usine à gaz Sarkozy, par Michel Husson.