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Le désespoir règne dans les territoires palestiniens occupés (Al Jazeera)

Nous, Palestiniens, ne pouvons pas continuer à vivre ainsi. Nous devons passer à l’action, sinon nous disparaîtrons dans l’abîme.

Aujourd’hui, près de cinq millions de Palestiniens qui vivent en Cisjordanie occupée et dans la bande de Gaza assiégée tentent de survivre au jour le jour, sans espoir, ni projets d’avenir. Pendant les 25 années qui se sont écoulées depuis la signature des Accords d’Oslo et la création de l’Autorité palestinienne, Israël a étendu et enraciné son contrôle sur la vie des Palestiniens de toutes les manières possibles et imaginables et, maintenant, pour parachever sa brutale entreprise, il veut anéantir à jamais tout espoir palestinien de vivre dans un État souverain dans les frontières de 1967 ou de devenir un citoyen à part entière dans un seul État binational.

Une Cisjordanie divisée

Avec la prolifération des colonies exclusivement juives, des postes de contrôle permanents et des routes réservées aux colons, la Cisjordanie n’est plus une unité cohérente. Le nettoyage imminent des communautés bédouines, comme Khan Al-Ahmar, est un signe supplémentaire de la volonté israélienne de rendre irréversible l’atomisation de la Cisjordanie.

Toutes les routes qui relient les grandes agglomérations de Cisjordanie sont aujourd’hui contrôlées par entre trois et cinq postes de contrôle permanents. Le trajet entre les villes, d’Hébron et Ramallah (43 km) par exemple, prend un minimum de deux heures pour un Palestinien à cause de la mauvaise qualité des routes que nous sommes autorisés à emprunter. A titre de comparaison, un Israélien parcourt la même distance sur des routes larges, sûres et bien éclairées en deux fois moins de temps.

Avec l’expansion prévue des colonies de peuplement dans la zone E1 (Jérusalem), les Palestiniens seront bientôt contraints d’utiliser des routes de contournement encore plus éloignées et plus dangereuses. Ces routes passent par Al-Mu’arajat, Wadi Al-Nar et la nouvelle rocade d’Anata-Ezariye, qui ont toutes été construites pour empêcher les Palestiniens d’emprunter les routes israéliennes qui traversent la Cisjordanie, comme la route 1 et la route 60.

Ignorés à Jérusalem

A Jérusalem, la négligence des autorités israéliennes à l’égard de la population palestinienne de la ville est stupéfiante. Dans la ville, 72,9 % de la population palestinienne vit sous le seuil de pauvreté, et moins de 10 % des fonds municipaux lui sont consacrés, malgré ses contributions fiscales municipales élevées. Des zones telles que Kufr Aqab et le camp de réfugiés de Shufat, qui se trouvent à l’intérieur des limites municipales de Jérusalem, sont littéralement emmurées et abandonnées à elles-mêmes, sans aucun service municipal.

Plus de 320 000 Palestiniens qui vivent à Jérusalem-Est ne sont pas considérés comme des citoyens par Israël. Ils ne peuvent aller nulle part, car s’ils partent, ils risquent de perdre définitivement leur droit légal de résider à Jérusalem. Ils sont confrontés à un manque criant de logements, à un système scolaire inadéquat, à des taxes municipales élevées (dont ils ne voient pas le retour sur investissement) et à des conditions de vie très difficiles.

Les Palestiniens de la ville craignent de voir leur sort encore s’aggraver dans les jours à venir du fait des nouvelles politiques israéliennes sur les frontières municipales de Jérusalem. Ils craignent également que l’imminent ’accord du siècle’ du président Trump ne les force à renoncer à leur résidence dans la ville et à solliciter la pleine citoyenneté jordanienne ou palestinienne. Ils craignent que personne n’essaie d’empêcher Israël de nettoyer Jérusalem des Palestiniens.

Des citoyens de deuxième classe

De plus, les citoyens palestiniens et d’autres citoyens non juifs d’Israël sont confrontés à une discrimination accrue, du fait de la loi controversée sur l’État-nation juif. La loi a transformé leur marginalisation en une situation légale (de jure), alors qu’auparavant ce n’était qu’une situation de fait (de facto). Avec cette loi qui légalise une citoyenneté de seconde zone pour les non-juifs et ôte à l’Arabique le statut de langue officielle, qui peut encore prétendre qu’Israël est une ’démocratie’ qui traite tous ses citoyens de manière égale ?

La réponse officielle des dirigeants palestiniens à cette loi a été molle, c’est le moins qu’on puisse dire. En Cisjordanie, l’Autorité palestinienne n’a pas trouvé de réponse adéquate. Comme à chaque fois que sa légitimité est remise en question, elle s’est lancée dans une campagne de ’loyauté’. Récemment, dans la perspective de la73ièmesession de l’Assemblée générale des Nations Unies, elle a diffusé à plusieurs reprises des slogans soulignant le devoir national des Palestiniens de soutenir leurs dirigeants dans cette ’période historique’.

La situation à Gaza est encore pire. L’économie de la bande assiégée est en ’chute libre’, selon un rapport récent de la Banque mondiale, pour qui le blocus israélien de 11 ans est responsable de cette situation, en même temps que les rivalités politiques internes qui affligent la bande de Gaza.

Nous devons agir avant de nous écraser au fond de l’abîme

La situation, brièvement décrite ici, devrait alarmer tous les Palestiniens concernés par l’avenir de leur peuple. Le désespoir ressenti dans toute la Palestine est alarmant, d’autant plus que la plupart des Palestiniens ont maintenant le sentiment de ne pas avoir de véritables amis au sein de la communauté internationale.

Depuis la création de l’Autorité palestinienne, Israël exerce un contrôle illimité sur le peuple et les territoires palestiniens, sans avoir besoin de faire la moindre concession. Et depuis trop longtemps les dirigeants palestiniens se battent de toutes leurs forces pour maintenir le statu quo, sans se soucier de notre désespoir.

En Cisjordanie, la lutte palestinienne pour la liberté a été bel et bien criminalisée par l’appareil de sécurité de l’Autorité palestinienne elle-même. L’ordre instauré par les dirigeants en Cisjordanie ne profite qu’à l’élite politique, économique et sécuritaire. Des années de négociations et de diplomatie internationale n’ont porté que peu de fruits pour ne pas dire aucun. Le gouvernement israélien agit comme si les Palestiniens n’existaient pas, tout en votant des lois et en menant des politiques inqualifiables qui rendent les Palestiniens totalement impuissants.

Les Palestiniens ne voient pas comment en sortir. Si on est réaliste, tout ce que les Palestiniens peuvent espérer, c’est la poursuite de l’ignoble statu quo qui leur est imposé et une aggravation continuelle de leur situation.

La vie dans les territoires palestiniens occupés est insupportable et sans espoir. Nous avons désespérément besoin de passer à l’action sinon, nous sombrerons dans l’abîme.

Jalalal Abukhater

Traduction Dominique Muselet de l’article de Al Jazeera

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D. Vanhove de formation en psycho-pédagogie, a été bénévole à l’ABP (Association Belgo-Palestinienne) de Bruxelles, où il a participé à la formation et à la coordination des candidats aux Missions Civiles d’Observation en Palestine. Il a encadré une soixantaine de Missions et en a accompagné huit sur le terrain, entre Novembre 2001 et Avril 2004. Auteur de plusieurs livres : co-auteur de « Retour de Palestine », 2002 – Ed. Vista ; « Si vous détruisez nos maisons, vous ne détruirez pas nos (…)
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