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Le "complot" de Baltimore

• QUELQUES SIGNES DE MANŒUVRES-SYSTEME POLICIERES LORS DES EVENEMENTS DE BALTIMORE. • HYPOTHESE SUR UNE DYNAMIQUE DE “FEDERALISATION” D’UNE DIMENSION POLICIERE-MILITARISEE.

Il y a eu quelques événements assez incompréhensibles de la part des autorités de Baltimore, sans doute avec l’aval des autorités fédérales, lors des premiers jours des troubles dans la ville. Les interprétations qui en sont données font état d’une poussée d’exploitation de ces troubles, sinon de leur alimentation pendant une phase de la crise, pour pouvoir mieux démontrer la nécessité d’un renforcement d’une police déjà militarisée, avec comme but général la transformation en une entité “fédéralisée” de toutes les polices des États de l’Union.

Il est vrai que cela fait partie de l’exploration, au niveau fédéral, d’un projet de l’administration Obama allant dans ce sens, où la maire de Baltimore est elle-même partie prenante. On peut admettre, pour alimenter cette théorie d’un “complot” qui s’avèrerait en fait être une manœuvre de ce qu’on nommerait “politique hybride active”, qu’il y a de la logique dans cette hypothèse substantivée par quelques faits inexpliqués ; et si nous nommons cela “politique hybride active”, c’est en référence à un terme, – “hybride”, – largement employé par les analystes américanistes pour qualifier l’action supposée des Russes, conforme au récit du bloc BAO, en Ukraine. Il s’agit du mélange opérationnel de plusieurs dimensions d’une politique activiste d’État, où les dimensions militaire, ou militarisée pour le cas de Baltimore et des polices des États de l’Union, intervient à part égale avec l’interprétation d’une communication avec toutes ses manipulation, cette communication devenue un facteur essentiel de l’opérationnalisation de la politique en question.

On cite ici un extrait important d’un texte de l’analyste étasunien Jay Johnson notamment publié par Sputnik.News le 30 avril 2015 sous le titre de « Connecting the pieces », qui pourrait s’interpréter plutôt que se traduire comme “mise en place des pièces du puzzle”. L’auteur décrit ce qui semble être des actions de provocation durant les événements de Baltimore, en même temps qu’est rappelé l’extraordinaire effort de militarisation de nombre d’agences fédérales agissant à des niveaux locaux intérieurs des États-Unis ... Hypothèse du Police State, certes, comme opération menée par le “centre” pour acquérir la complète maîtrise centralisé d’un appareil policier-militarisé embrassant toutes les capacités policières des États de l’Union.

« ... Entre Freddie Brown. Le jeune homme a été emmené en garde à vue puis on l’a retrouvé mort. Résultat, la ville de Baltimore s’est enflammée depuis maintenant plusieurs jours. Et les émeutes semblent se propager à d’autres villes. Mais, encore une fois, on note des bizarreries. Selon un article de foxnews.com, "une analyse des médias sociaux a révélé des similitudes frappantes avec les manifestations de Ferguson. L’analyste a trouvé entre 20 et 50 comptes de médias sociaux à Baltimore qui étaient également liés au pic de la violence à Ferguson ... cela suggère la présence de "manifestants professionnels" ou d’anarchistes, profitant de la mort de Freddie Gray pour faire monter la violence." Comme preuve supplémentaire de ce qui vient d’être dit, l’analyste Fox et l’ancien détective de la police de New York (NYDP) Bo Dietl, ont relié l’assassinat des officiers de police du NYPD par un homme de Baltimore plus tôt dans l’année, à des "agitateurs extérieurs" qui incitent au soulèvement. Voilà exactement ce qu’il a dit : "Ce sont les suspects habituels, ceux qui viennent ici à New York. Les agitateurs étaient bien là. Et j’ai vu – c’était d’ailleurs drôle à voir – des Blancs, des Blancs d’1,80 m avec des bandanas* sur le visage. Ils essaient de cacher leurs visages, que font-ils là ? Une seule chose. Ils essaient d’inciter les jeunes à se soulever en leur donnant le sentiment que [c’est] bien." Alors, qui sont ces provocateurs professionnels ?

 »Le Baltimore Sun a rapporté un autre événement étrange : "on a commencé à voir le mot "purge" se répandre sur les médias sociaux – ce mot fait référence à un film dans lequel le crime est légalisé. La manifestation devait partir à 15 heures du Mondawmin Mall, puis descendre Pennsylvania Avenue vers le port." Cependant, selon, Motherjones.com, ". ... La police arrêtait les cars et forçait les gens, y compris de nombreux étudiants qui voulaient rentrer chez eux, à en descendre. Les flics ont fermé la station de métro du coin. Ils ont également bloqué les routes ... et parqué les jeunes dans la zone. Autrement dit, ils n’ont pas laissé les jeunes qui sortaient de l’école se disperser." Puis il a cité un témoin oculaire : "La police anti-émeute était déjà à l’arrêt de bus de l’autre côté du centre commercial et elle renvoyait les autobus qui venaient chercher les élèves pour que les jeunes ne puissent pas y monter. Les policiers attendaient ces jeunes ... c’était un traquenard, ils ont été traités comme des criminels avant que la première brique n’ait été lancée. Du fait que la police vidait les bus et que la station de métro la plus proche était fermée, les élèves ne pouvaient plus partir".

 »Zerohedge.com a publié un article dans lequel il posait la question suivante : "Pourquoi tant de véhicules de police étaient-ils commodément garés le long des rues des zones où il y a eu les plus grandes violences ? Après la destruction d’un grand nombre de véhicules de police, samedi soir, la police de Baltimore devait savoir qu’ils représentaient des cibles de choix. Alors pourquoi, lundi, y avait-il encore plus de véhicules de police là où il était presque sûr qu’ils seraient détruits par les émeutiers ? Et où étaient les flics qui auraient dû protéger ces véhicules ? La maire, Stephanie Rawlings-Blake a peut-être fourni la réponse à cette question. En effet, elle aurait dit : "... Nous avons aussi donné à ceux qui voulaient détruire, la latitude de le faire." Pourquoi un maire excuserait-il la violence et la destruction de sa ville ?

 »Pour répondre à cette question, il faut se pencher sur la maire elle-même. Selon Infowars.com, "Rawlings-Blake était l’un des trois maires qui ont largement contribué à la Force opérationnelle de la police du XXIe siècle du président Obama qui prône la fédéralisation de services de police à travers le pays." Toujours selon Infowars.com : "Cela pourrait expliquer sa passivité au début des soulèvements : laisser la situation sortir de contrôle, pourrait permettre à la maire et à ses amis du Département de la Justice d’utiliser les troubles pour justifier l’expansion du pouvoir fédéral dans la police locale, ce qui permettrait également au maire de recevoir plus de financement. "Il ne faut pas oublier que la ville de Baltimore est au bord de la faillite.

 »Et c’est peut-être bien cela la grande affaire secrète. La fédéralisation des forces de police locales, autrement dit l’avènement de l’Etat policier. Non seulement le gouvernement fédéral a distribué davantage de matériel militaire comme des mitrailleuses, des drones et même des MRAP qui sont ni plus ni moins que des chars légers, mais, au cours des dernières années, les médias ont publié de nombreux reportages sur la façon dont les diverses institutions gouvernementales ont été tout à coup militarisées. Tout le monde, depuis le ministère de l’Agriculture, le Railroad Retirement Board,** la Tennessee Valley Authority,*** l’Office of Personnel Management****, la Consumer Product Safety Commission,***** le Service poisson et vie sauvage et le Département de l’éducation a maintenant des unités d’élites SWAT. Même l’IRS, l’administration de la sécurité sociale, et la National Oceanic and Atmospheric Administration, qui supervise le Service de la météorologie nationale, font partie des organismes fédéraux qui se sont mis à acheter des armes et des munitions en grosses quantités. En fait, selon forbes.com, depuis 2008, "73 agences fédérales ... [emploient] à temps plein environ 120 000 officiers armés habilités à procéder à des arrestations." Les quatre cinquièmes de ces officiers sont sous le commandement du Département de la sécurité intérieure (DHS) ou du ministère de la Justice ... »

Jay Johnson poursuit en faisant une référence qui nous intéresse particulièrement puisqu’elle concerne un document du US War College dont nous avions justement parlé six ans auparavant ...

« Il y a sept ans, l’US Army War College a publié un rapport appelant l’armée à se préparer à réprimer, en cas de besoin, les troubles civils dans le pays. Le journaliste d’investigation, Chris Hedges, a résumé ainsi le rapport : « L’armée doit se préparer, selon le document, à une ’’ violente dislocation stratégique à l’intérieur même des États-Unis,’’ qui pourrait être provoquée par ’’un effondrement économique imprévu’’, ’’une résistance intérieure délibérée’’, ’’une catastrophe sanitaire’’ ou ’’un vide de pouvoir juridique et légal’’. La ’’violence civile généralisée," dit le document, ’’forcerait les responsables de la défense à réorienter in extremis les priorités pour défendre l’ordre intérieur et la sécurité des individus." Est-ce la raison pour laquelle l’opération Jade Helm doit commencer dans seulement quelques semaines ? »

 »Comme le Washington Post l’a récemment fait remarquer, l’économie étasunienne continue de se contracter et les gens commencent à réaliser que ceux qui tirent les ficelles dans l’ombre ne savent plus quoi faire. La désobéissance civile a dégénéré en émeutes et les appels pour que l’Etat règle la situation sont de plus en plus pressants. Bien qu’il ne semble pas y avoir de crise sanitaire, la situation pourrait évoluer rapidement. Avec d’une part l’accroissement du pouvoir des multinationales et d’autre part le rétrécissement du marché du travail, ce n’est pas un avenir radieux qui attend dans l’immédiat les Américains moyens. »

Un texte publié sur ce site le 24 décembre 2008 avait évoqué en détails ce rapport du 15 décembre 2008, du Strategic Studies Institute (SSI), un département dépendant de l’US Army War College. Il s’agit du rapport « Known Unknowns : Unconventional “Strategic Shocks” in Defense Strategy Development”, de Nathan Freier, un lieutenant-colonel qui avait récemment quitté l’armée et était alors professeur au même War College. Nous remarquions combien ce rapport s’intéressait à une évolution vers des tensions extrêmes de la situation intérieure étasunienne et une situation générale décrite comme une “dislocation stratégique”, et les mesures à éventuellement considérer du point de vue des autorités centrales pour contrôler ou empêcher cette évolution. Que Baltimore et les événements qui y conduisent et l’accompagnent représentent ou pas cette situation de “tensions extrêmes”, cela reste une question ouverte ; que les autorités du Système (la précision importe plus que jamais) considèrent les choses de cette façon, cela semble une hypothèse tout à fait acceptable ... Ci-après, des extraits de notre texte de décembre 2008.

« Ce rapport est présenté dans le contexte de l’élection du nouveau président, comme une contribution à la réflexion que doit entreprendre la nouvelle équipe de sécurité nationale qui arrive au pouvoir (selon la présentation du SSI : « The author provides the defense policy team a clear warning against excessive adherence to past defense and national security convention »). WSWS.org le commente dans le sens voulu par son analyse, qui est l’hypothèse de l’établissement d’une dictature militaire aux États-Unis. Ce qui nous apparaît important dans ce rapport est certainement l’hypothèse de “dislocation stratégique” appliquée aux EU, notamment mais d’une façon appuyée, à partir de troubles nés de la situation de crise économique (« “violent, strategic dislocation inside the United States,” which could be provoked by “unforeseen economic collapse” or “loss of functioning political and legal order” »). L’hypothèse est évidemment particulièrement éclairée, sinon étayée par la situation de crise présente, et son importance, sa mise en évidence sont évidemment suscitées par cette situation. La réaction rapide de la réflexion de l’équipe stratégique derrière le rapport à la crise financière et économique mesure la préoccupation à propos de ce sujet.

 » Il s’agit d’un exemple convaincant de l’évolution de la réflexion stratégique. La forme de la “surprise stratégique” pour la période considérée a ses racines dans l’attaque du 11 septembre 2001, mais les hypothèses concernaient essentiellement des causes d’une telle surprise qui viendraient de l’extérieur. L’ouragan Katrina et ses conséquences ont commencé à modifier cette perception. La crise actuelle achève cette modification, au point qu’on peut parler de transformation de la perception stratégique. L’hypothèse de troubles intérieurs restaient jusqu’alors, justement, du domaine de l’hypothétique liée à une pensée spéculative sinon exaltée ; désormais, elle est directement liée à des événements en cours.

 » On observera que l’hypothèse concerne des événements auxquels les pays européens sont habitués, comme, aujourd’hui, les événements en Grèce. Cette sorte d’événements est complètement inhabituel pour les EU, qui se présentent comme une société de grande cohésion civique, – en réalité un ordre maintenu autant par le conformisme des conceptions que par l’absence d’unité sociale éventuellement contestatrice et une forte présence de la loi. Ce caractère rigide de l’ordre public dans les domaines social et politique est d’autant plus important que le pays est fragile et vulnérable du point de vue de sa structure et de sa cohésion. On voit que certaines réactions à la situation économique impliquent déjà des références à la guerre de Sécession. Le document du SSI nous indique que, plus que l’idée précise d’une dictature militaire, c’est à notre sens la crainte de la vulnérabilité structurelle des EU qui s’empare des esprits des stratèges (étasuniens mais aussi occidentaux dans un sens plus large). La notion de “surprise stratégique”, qui est la marque du temps, se détache de l’agression extérieure, du mythe du terrorisme, pour parvenir au stade ultime qui est la cohésion structurelle des EU. La crise est passée par là et elle ne va plus cesser de renforcer cette hypothèse, d’entretenir cette crainte. Il s’agit sans aucun doute de la crainte ultime de la pensée stratégique occidentale depuis la Deuxième Guerre mondiale. Si la cohésion du “centre” est mise en cause, c’est l’intégrité fondamentale du système qui est mise en cause. Le cas central de la puissance de notre système se trouve concentré effectivement dans la question de la “cohésion stratégique” des EU, menacée par le risque de “dislocation stratégique”. La crise financière et économique a ouvert la boîte de Pandore. »

Philippe Grasset

Traduction des parties en anglais : Dominique Muselet

Notes :

* Un bandana est une pièce de tissu triangulaire ou quadrangulaire nouée sur la tête ou autour du cou. Le mot vient de l’hindi bandhana, qui signifie attacher, nouer (Wikipedia)

** Le Railroad Retirement Board (RRB) est un organisme fédéral indépendant qui supervise les programmes de retraite et les prestations de chômage pour les travailleurs de chemin de fer et de leurs familles.

*** La Tennessee Valley Authority (TVA) est une entreprise étasunienne chargée de la navigation, du contrôle des crues, de la production d’électricité et du développement économique de la vallée du Tennessee.

**** L’Office des États-Unis de la gestion du personnel (OPM) est un organisme indépendant du gouvernement des États-Unis qui gère la fonction publique du gouvernement fédéral.

***** Le United States Consumer Product Safety Commission (CPSC) est une agence indépendante du gouvernement des États-Unis créée en 1972 par le Consumer Product Safety Act dans le but de protéger les personnes contre les « risques déraisonnables de lésions dues à des produits de large distribution »

»» http://www.dedefensa.org/article-le_complot_de_baltimore_04_05_2015.html
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