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Le combat d’un Homme de paix

Kaid Ahmed recevant une délégation de révolutionnaires africains. On reconnaît Nelson Mandela, l’icône de la lutte anti-apartheid en Afrique du Sud, Robert Reisha et d’autres combattants africains accompagnés de Me Vergès

Un chapitre de la vie de Mandela très peu cité par les médias.

« Le pardon libère l’âme, il fait disparaître la peur. C’est pourquoi le pardon est une arme si puissante » Nelson Mandela.

Johnny Makatini, Sindelo Thamy, deux noms, plutôt deux frères qui nous venaient de cette lointaine Afrique du Sud qui vivait de plein fouet les affres d’un régime inqualifiable où l’apartheid, « rehaussé » d’oppression et d’avilissement, faisait des ravages.
Représentant l’ANC en notre pays qui les a fraternellement accueillis et, ne désemparant sur aucune action favorable à leur juste cause, ils nous ont largement sensibilisés sur les problèmes vécus chez eux, par leur peuple. Ils étaient nos frères de combat, et c’est en les accompagnant, dans leurs missions de tous les jours, que nous avons connu cet illustre personnage Nelson Mandela ; qui était pour les impérialistes, ce « bagnard » de Robben Island et de la prison de Pollsmoore, mais qui, pour nous, était ce frère « moudjahid » à la gloire de son pays et de sa résistance contre l’apartheid.
En effet, nous avons appris à le connaître, à travers Makatini et Thamy, comme si nous l’accompagnions dans son valeureux combat contre les forces du mal.

C’était du temps où notre pays et, plus précisément sa capitale, représentait alors, en tant qu’escale incontournable en Afrique, la « Mecque des révolutionnaires », selon le regretté Amilcar Cabral, père de l’indépendance de la Guinée-, ou la chanteuse sud-africaine Myriam Makéba, à la voix ensorceleuse, qui interprétait, à Alger en 1972, dans la ferveur faite de militantisme, de soutien, de solidarité et de lutte commune : « Ana Hurra fi el Djazair » (je suis libre en Algérie).

En effet, c’est cette ambiance militante, que nous avons connue et dans laquelle nous avons grandi et évolué. C’était du temps de la glorieuse Jfln, lorsque nous menions, tambour battant, des actions concrètes au profit des peuples et des jeunesses en lutte contre les manifestations sordides de l’impérialisme. Nous étions d’autant plus poussés à le faire, car dans les rangs de l’ANC, du Mpla, du Paigc, du Frelimo, du Swapo ou du Zapu, les jeunes combattants constituaient le noyau dynamique des mouvements de libération nationale. C’était aussi, dans ce climat de résolution et de volonté que nous nous sommes familiarisés avec des noms de leaders africains et d’ailleurs, ces noms que nous répétions en toute circonstance, dans nos écrits, dans nos interventions, dans nos relations avec d’autres organisations à travers le monde.

« Madiba » n’est plus..., un hommage unanime lui est rendu

Ainsi, Nelson Mandela ou « Madiba », ce nom que nous conjuguions au rythme de nos rencontres avec les représentants de l’ANC, n’est plus. Notre affection, doublée d’une profonde douleur, nous donne en cet instant la liberté d’exprimer dans l’émotion, quelques impressions pour célébrer, à notre manière, cet imperturbable combattant qui aura marqué son époque. Alors, une page d’Histoire disparait avec Madiba, cet Homme hors du commun, ce personnage incontournable du continent africain, ce dirigeant clairvoyant et perspicace qui a su imprimer à la lutte du tiers-monde la volonté d’aller jusqu’au bout, à travers un combat authentiquement historique. C’est dire que le père de « la Nation arc-en-ciel », cet exemple de dignité face à l’humiliation, de liberté face à l’injustice, de courage face à l’oppression, nous ouvre, par son départ chez notre Seigneur, une page glorieuse de mémorables hauts faits qui vont gagner en valeur, à partir de ce triste jour du jeudi 5 décembre 2013, pour rentrer, par la grande porte, dans l’Histoire universelle.
Mais aujourd’hui, dans la précipitation de ce triste événement, qu’allons-nous transmettre aux jeunes, en nous inspirant de ces pages illustres que nous laisse cet Homme de paix ?

Franchement, c’est tellement complexe et passionnant à la fois qu’on ne peut tout dire dans un hommage comme celui-ci et on ne peut cerner l’exaltante mission qui fut celle d’un Homme qui portait en lui tant d’espérances.
S’exprimer sur « Madiba » c’est revenir à la réalité d’un peuple, une réalité qui nous interpelle avec force pour connaître toutes sortes de raisons profondes et multiples qui ont été le ferment de cette lutte légitime de l’Afrique du Sud, tout au long de l’histoire de l’apartheid.
Aussi, il serait prétentieux de notre part de vouloir énoncer de grandes choses sur cette icône de la lutte contre l’injustice qui, aujourd’hui, en ces moments de deuil, suscite beaucoup d’émotion et de grande compassion à la hauteur de sa personnalité, hors du commun. C’est dire que l’instant est pathétique, d’où la reconnaissance de ce lourd patrimoine que vient de léguer « Madiba » à l’Humanité, toute entière, un précieux héritage fait de sacrifices et de dévouement pendant de longues années, faisant de lui « un symbole de la libération du colonialisme et de l’occupation pour tous les peuples aspirant à la liberté », selon la déclaration du président palestinien, Mahmoud Abbas.

Pour cela, il est évident que nous ne pouvons qu’affirmer modestement, en joignant nos sentiments à ceux des autres peuples de par le monde, dans un message d’affliction, qui sort du plus profond de nous-mêmes, notre détermination de faire connaître à notre jeunesse les valeurs de celui qui n’a vécu que pour la paix et le progrès de son pays.
Nous leur dirons que cette halte, nourrie d’une conscience claire du chemin parcouru par cet Homme exceptionnel, symbole de la lutte contre le racisme, nous montre combien était pénible sa mission pendant une longue période de l’Histoire, que ce soit dans le port de son identité nationale, sous des formes originales, voire radicales, ou dans son combat pour la souveraineté et l’indépendance nationales de son pays, avec des objectifs précis et une volonté inébranlable.

Mandela, Homme sage, Homme de paix et de pardon

Nous leur dirons aussi que Nelson Mandela a passé vingt-sept années difficiles dans un régime carcéral inhumain.... Nous nous poserons également des questions avec eux, pour y répondre aussitôt. Ce personnage illustre, qui a vécu longtemps, dans des geôles étroites, humides, rébarbatives, a-t-il un jour manigancé quelques plans pour se venger de ses tortionnaires et ceux du peuple sud-africain ?
A-t-il, pendant cette longue et pénible réclusion où les brimades, la faim, la soif, les travaux forcés, la maladie, la fatigue, le sommeil et un cortège de pénibilité, médité pour prendre un jour sa revanche et le pouvoir, en Afrique du Sud pour s’asseoir sur le trône de la République ?
A-t-il entrepris toute cette lutte opiniâtre pour, enfin, assouvir des sentiments d’une personne velléitaire qui souffre d’un certain égocentrisme, sentiments somme toute naturels chez certains chefs du continent ?

Non ! Pas du tout ! L’éducation, la culture, l’altruisme, la bonté et le nationalisme de Mandela, ne lui permettaient pas d’agir autrement que selon ce que lui commandaient ces valeurs intrinsèques qu’il véhiculait depuis sa prime jeunesse. Et puis, encore, dans son esprit que dominaient la dignité et l’humilité, n’avait-il pas quelque chose, peut-être beaucoup de choses, du Mahatma Gandhi ?
En effet, il possédait plusieurs de ses qualités car, en entamant des études en droit, en découvrant le nationalisme afrikaner, il a adhéré, en même temps, à la doctrine de non-violence prônée par ce maître de sagesse.
Ainsi, toutes ces valeurs de cet Homme exceptionnel lui ont servi à agir avec puissance. Oui, avec puissance, car même avec les travaux forcés auxquels il était soumis, il trouvait ces quelques moments pour s’occuper des prisonniers, ses amis de bagne, en les formant par l’échange de connaissances dans ce qui devenait « l’université Mandela ».
Il parlait avec eux aussi bien de politique que de littérature, en récitant et en enseignant le poème Invictus (Invaincu) de William Ernest Henley, afin de les encourager à tenir le coup.
Oui, avec tout ce qu’a enduré Mandela, et quand on connait ses sentiments vis-à-vis d’autrui, et même de ses ennemis, il n’est pas étonnant qu’il soit récipiendaire de ce « prix Nobel de la paix » en tant qu’Homme de sagesse et de pardon !
D’ailleurs, en sortant de prison, n’a-t-il pas mis fin pacifiquement, par la réconciliation et la négociation avec le du président Frederik de Klerk, au régime d’apartheid, et jeté les bases d’une nouvelle Afrique du Sud démocratique ?

C’est ainsi qu’à l’annonce de son décès, deux de ses compatriotes qui, grandement émus, ont ouvert leurs cœurs en des hommages émouvants.
« Madiba nous a appris comment vivre ensemble et croire en nous-mêmes et en chacun », a dit l’archevêque anglican sud-africain Desmond Tutu, « prix Nobel de la paix », pour saluer, à l’annonce du décès de Mandela, ce héros de la lutte anti-apartheid.

« Loin d’assumer un rôle divin, Mandela est au contraire pleinement et absolument humain... Il a souffert et végété en prison pendant plus d’un tiers de sa vie, pour en sortir sans un mot de vengeance. Il a supporté tout cela, c’est évident, non seulement parce que la liberté de son peuple est son souffle vital, mais parce qu’il est l’un de ces rares êtres pour qui la famille humaine est sa propre famille », écrivait Nadine Gordimer, écrivaine sud-africaine, proche de l’ANC et de Madiba, également « prix Nobel de littérature » en 1991.

Ils avaient raison de s’exprimer ainsi quand Mandela, lui-même, s’adressait sereinement et sincèrement à ceux qui voulaient l’entendre : « Le pardon libère l’âme, il fait disparaître la peur. C’est pourquoi le pardon est une arme si puissante. »

L’Algérie qui pleure aujourd’hui Mandela..., le soutenait depuis longtemps

Assurément, le peuple algérien vient de perdre un des siens, un valeureux « moudjahid » qui, pendant toute sa vie a lutté pour la liberté et la dignité en Afrique. Mandela, ou Madiba, n’était pas un Homme quelconque.
Il s’intéressait à toutes les causes justes de par le monde et l’Algérie se trouvait être, malgré la grande distance qui la sépare de l’Afrique du Sud, la destination qu’il devait atteindre pour parfaire son itinéraire combattant avec nos « djounoud » de l’ALN. En 1960, Mandela était chez nous, aux frontières algéro-marocaines dans le cadre d’une formation militaire et du renforcement des liens entre l’ANC et l’ALN-FLN.
Le commandant Si Slimane, Kaïd Ahmed, l’avait reçu et, mutuellement, les deux hommes, avaient vu se renforcer leur sympathie réciproque et l’identité de vues sur les nombreuses questions qu’ils développaient sur la libération du continent dans son ensemble.
Il faut préciser cet aspect pour mettre en exergue également que la Révolution algérienne, en pleine lutte pour le recouvrement de l’indépendance du pays, était à l’écoute des causes justes qui se manifestaient sur le continent et les assistait dans leur lutte contre les différentes formes de domination.

C’est dans ce cadre que Nelson Mandela, accompagné de Robert Reisha - qui sera après notre indépendance, le représentant permanent de l’ANC en Algérie -, s’était rapproché du Gpra et de l’ALN, dans le but de lancer la lutte armée dans son pays sur des bases solides, afin de s’affranchir du joug de l’apartheid. Vigilant et soucieux de la réussite de cette importante mission que menaient ses hôtes auprès des combattants algériens, Kaïd Ahmed, en étroite relation avec Boumediene, le chef de l’état-major, voulait que les contacts de ces derniers soient entourés du plus grand secret, pour des raisons de sécurité.
Cet impératif avait été dicté par le fait que le Boss (Bureau of State Security, des redoutables services de renseignement du temps du régime de l’apartheid en Afrique du Sud) suivait de près les déplacements de Mandela et de ses compagnons et que leurs contacts constituaient déjà pour le régime de Pretoria une activité criminelle. Alors, un scénario a donc été élaboré pour protéger l’anonymat de Mandela. Il s’agissait de l’intégrer, avec son compagnon Reisha, dans la délégation de la Conférence des organisations nationales des colonies portugaises qui se trouvait chez l’ALN.

Kaïd Ahmed devait confier Mandela et Reisha à Chérif Belkacem pour les accompagner. Il lui avait recommandé de bien les encadrer, au cours de leur mission, par des spécialistes politiques et militaires, dans l’objectif de la préparation des conditions nécessaires au déclenchement de la lutte armée en Afrique du Sud. Ainsi, « à l’issue de ces longues séances de travail qui, aux yeux de l’Histoire, constituent le premier acte de coopération étroite entre les deux peuples, algérien et sud-africain, j’ai eu pour mission d’emmener Mandela et Reisha en zone opérationnelle nord, où ils ont vu la réalité des tirs d’artillerie des Français sur nos combattants, puis au camp d’instruction de Zghenghen dans le Rif », raconte Nourredine Djoudi qui sera un éminent ambassadeur après l’indépendance.

Cette mission de première importance de Mandela auprès de l’ALN n’a jamais été dévoilée. Elle sera portée à la connaissance du monde, bien après l’indépendance de notre pays, par le responsable des relations extérieures de l’ANC, Johnny Makatini, pendant que Mandela était incarcéré au bagne, tristement célèbre, de Robben Island.

Ainsi, durant sa visite en notre pays, deux mois après sa libération de prison en 1990, Nelson Mandela a fait remarquer que « l’Algérie est sa maison, et qu’elle a fait de lui un homme », se référant clairement aux relations plus que chaleureuses qu’ont toujours entretenues l’Afrique du Sud et l’Algérie. Enfin, l’actuel président de l’Afrique du Sud, Jacob Zuma, a-t-il jamais oublié qu’il voyageait avec un passeport algérien ? « C’était courageux de la part de l’Algérie de donner un passeport d’un pays souverain à des militants étrangers qui étaient qualifiés par leurs ennemis de hors-la-loi’’ ! D’ailleurs, c’est l’Algérie qui a remporté une magnifique victoire contre le régime de l’apartheid lorsque, présidant l’Assemblée générale de l’ONU, en 1974, elle a réussi à exclure l’Afrique du Sud des travaux de l’Assemblée générale de l’ONU !, disait-il à l’occasion de l’ouverture de la Coupe du Monde en Afrique du Sud.

Dors en paix, frère Mandela, nous essayerons, nous qui t’avons bien aimé, d’être solidaires, de travailler la main dans la main, dans un esprit de dévouement, car nos pays d’Afrique ont bien besoin de cette unité, comme tu nous l’as toujours affirmé :

« Aucun de nous, en agissant seul, ne peut atteindre le succès. »

Kamel Bouchama

»» L’Expression - Algérie
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Depuis 1974 en France, à l’époque du serpent monétaire européen, l’État - et c’est pareil dans les autres pays européens - s’est interdit à lui-même d’emprunter auprès de sa banque centrale et il s’est donc lui-même privé de la création monétaire. Donc, l’État (c’est-à -dire nous tous !) s’oblige à emprunter auprès d’acteurs privés, à qui il doit donc payer des intérêts, et cela rend évidemment tout beaucoup plus cher.

On ne l’a dit pas clairement : on a dit qu’il y avait désormais interdiction d’emprunter à la Banque centrale, ce qui n’est pas honnête, pas clair, et ne permet pas aux gens de comprendre. Si l’article 104, disait « Les États ne peuvent plus créer la monnaie, maintenant ils doivent l’emprunter auprès des acteurs privés en leur payant un intérêt ruineux qui rend tous les investissements publics hors de prix mais qui fait aussi le grand bonheur des riches rentiers », il y aurait eu une révolution.

Ce hold-up scandaleux coûte à la France environ 80 milliards par an et nous ruine année après année. Ce sujet devrait être au coeur de tout. Au lieu de cela, personne n’en parle.

Etienne Chouard

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