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La nausée

Brest, 19 mars 1950. Les ouvriers du bâtiment, qui reconstruisent la ville détruite à la fin de la guerre, se mettent en grève. Grève qui devient générale en quelques jours. Les ouvriers demandent une augmentation des salaires parce que les salaires sont insuffisants pour manger. L’alimentation est chère en cette époque de pénurie. Le 14 avril une manifestation de femmes " des salopes venues demander à la mairie du pain et du lait pour les enfants ! " est refoulée sans ménagement par la police. La députée Marie Lambert, qui conduisait la manifestation, est arrêtée bien que jouissant en théorie de l’immunité parlementaire.

Le 17 avril la manifestation des ouvriers est réprimée dans le sang. Le député Alain Signor, qui est aussi un grand invalide de la Résistance, est arrêté. « Monsieur Signor était à terre, six CRS le frappaient sauvagement à coups de crosse » écrira Ouest-Matin. Les policiers tirent. Ils feront quarante neuf blessés " dont un en perdra une jambe " et un mort d’une balle dans la tête. La stupeur est grande. Même la gendarmerie se sent fort gênée et toute la ville de Brest ne verra pas le moindre uniforme le lendemain ! Quatre-vingts mille personnes assistent aux obsèques d’Édouard Mazé le surlendemain 19 avril. Enfin, après trente-six jours de grève, le patronat cède et augmente les salaires.

Le MRP, parti démocrate-chrétien, condamne la violence... des ouvriers ! Ce qui met le député MRP Henri Grouès, connu sous le nom de Résistance d’abbé Pierre, dans une colère noire. Il écrit sa démission du MRP dans une lettre rendue officielle le 28 avril que je vais citer à plusieurs reprises.

Le 30 juillet 2010 Sarkozy annonce, dans son discours à Grenoble, la « fin des implantations sauvages de campements de Roms » qui inaugure une vague d’expulsions. Elles vont soulever l’indignation en Europe. Et c’est le 30 juillet 2012 " jour anniversaire ! " que choisit Manuel Valls pour relancer la même politique de destruction des camps et d’expulsion des Roms ! Encore une fois on s’attaque aux plus faibles et aux plus pauvres. Bien sûr le gouvernement Ayrault-Valls chante l’increvable rengaine de la sécurité, de l’ordre public et de la tranquillité des riverains. L’abbé Pierre tonne : « Condamner les plus faibles et rester sans actes devant les forts, [...] tout cela est iniquité. » Si quelques abris de fortune offusquent le sens esthétique d’un voisin grincheux, on pourrait reloger plus dignement de pauvres gens et, au passage, tancer l’intolérant qui ne songe qu’à son petit confort personnel quand il est témoin de la détresse d’autrui. En redonnant sa juste mesure au supposé vol de trois poules. Qui, même s’il était avéré, ne saurait entraîner la punition collective de toute une ethnie. Ah mais il n’en est pas ainsi ! et ça agace au plus haut point notre abbé : « Consentir à voter le blâme pour les violences des uns sans oser voter le blâme pour les duretés des autres. »

Le gouvernement commet cette ignominie, contraire aux engagements de campagne de François Hollande, contraire aux idées fondamentales même des plus modérés des socio-démocrates. Et pas un membre du Parti socialiste, qui tient congrès à Toulouse cette fin de semaine, n’y trouve à redire. Le gouvernement et le Parti socialiste se couvrent de honte. C’est leur affaire. Mais ils salissent aussi l’idée même du socialisme et tous ceux, dont je suis, qui se réclament d’un idéal socialiste dans toute sa diversité de Louise Michel à Louis Lecoin, de Jean Jaurès à Léon Blum, de René Dumont à André Gorz en passant par Karl Marx et Léon Trotsky. L’abbé Pierre s’en retourne encore dans sa tombe : « Ce n’est pas à l’un des nôtres d’offrir un déguisement, et le déguisement de notre idéal, à une politique qui est à ce point contraire. Les habiletés ont des limites au-delà desquelles, à moins d’inconscience, il n’y a plus de probité. Laissez cette politique à ceux qui la veulent. Ne donnez pas à croire qu’elle est devenue la nôtre. »

Comme on ne peut plus se défouler sur le youpin et la juiverie apatride depuis la Shoah, on a trouvé un autre bouc-émissaire avec le romanichel qui n’a pas assez dit, écrit, répété, hurlé samudaripen après guerre. Négros et bougnoules, mes frères en humanité, votre tour reviendra bientôt puisque le gouvernement utilise ouvertement des critères raciaux. J’ai voté au deuxième tour contre Sarkozy et sa politique, toute sa politique, est restée inchangée ! Pas seulement la politique économique et son exaspérant TINA " il n’y a pas d’alternative " cher à Margaret Thatcher et à nos socialistes de marché. Même les idées humanistes les plus simples, qui ne coûtent pas un centime aux caisses publiques, sont foulées au pied. J’ai la nausée quand je pense que j’ai voté pour un gouvernement qui remet les critères raciaux en vigueur. J’ai la nausée quand je pense que j’ai voté pour la déportation de gens misérables.

L’abbé Pierre claque la porte de son parti. Je claque la porte de l’isoloir. On ne m’y reprendra pas à voter pour le Parti socialiste. Même au deuxième tour. Même si la droite menace. Où reste-t-il une différence entre droite et PS ?

"""
Samudaripen. De sa- (tout), mudare (tuer) et -ipen (suffixe créant le substantif). Le « Tuez-les tous ! » En romani, néologisme désignant le génocide des Rroms de 1936 à 1945. Synonyme : Porrajmos, littéralement « dévorer ».

Partageux rencontre la France d’en bas et de tout en bas.

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