"Luk VERVAET travaillait comme professeur de néerlandais dans différents établissements pénitentiaires belges, depuis 2004, lorsque, soudainement, en août 2009, la Direction générale des établissements pénitentiaires a décidé de lui retirer son autorisation d’entrer dans les prisons belges pour des « raisons de sécurité ».
Un courrier émanant de la Sureté de l’Etat
Ces raisons sont contenues dans un courrier émanant de la Sureté de l’Etat, auquel Luk VERVAET n’a eu accès qu’après avoir perdu son emploi. Cet organe stigmatise les activités militantes de Luk VERVAET :
– Il fait partie du CLEA, Comité pour la liberté d’expression et d’association ;
– Il a participé à des manifestations, dont celle visant à soutenir les personnes prévenues – et aujourd’hui acquittées – dans le procès DHKPC et celle organisée contre l’extradition de Monsieur TRABELSI aux Etats-Unis – la Belgique ayant été condamnée depuis par la Cour européenne des droits de l’homme pour traitements inhumains et dégradants ;
– Il a été fondateur d’un parti politique, ESG (Egalité sans guillemets) – dont il n’est plus membre actuellement ;
– Ce parti comptait dans ses rangs des proches du Parti du travail de Belgique ;
– Il connait Monsieur SAIDI ;
– Il fait partie d’une association, l’Union Internationale des Parlementaire pour la Palestine, comme Monsieur JAHJAH – aujourd’hui collaborateur habituel du journal De Standaard ;
– Il a été membre d’une association ayant pour objet de défendre les droits des Palestiniens et ayant lancé une pétition pour que le Hamas soit rayé de la liste européenne des organisations terroristes.
A l’évidence, ces éléments relèvent tous de la liberté de pensée et de la liberté d’expression de Luk VERVAET. Il n’est connu d’aucune manière par le Parquet, n’a pas de casier judiciaire et personne n’a prétendu qu’il s’agirait d’un homme violent ou prônant de tels comportements.
Qu’à cela ne tienne !
" ..Pour des raisons de sécurité évidentes dans le régime pénitentiaire, l’administration ne pouvait pas prendre de risque.."
Pour le Tribunal de première instance de Bruxelles, « même si [la note de la Sureté de l’Etat] ne se conclut que par un vague soupçon (« la défense des supposées victimes de ces lois [antiterroristes] a pu le conduire à franchir la frontière entre la défense légitime d’une justice équitable et le soutien à des idéologies justifiant de manière indirecte le terroriste »), l’on peut comprendre dans ce contexte, que, pour des raisons de sécurité évidentes dans le régime pénitentiaire, l’administration ne pouvait pas prendre de risque ».
Qu’importe que rien ne permette de penser qu’une frontière aurait été franchie (laquelle ?), qu’importe que Luk VERVAET ait toujours travaillé à la pleine satisfaction de tous, qu’importe qu’aucun Directeur de prison ne se soit jamais plaint d’aucun « comportement suspect », qu’importe qu’aucun risque un tant soit peu concret ou circonstancié ne soit mis en avant par la Sureté de l’Etat, qu’importe que l’administration pénitentiaire n’explique nullement quel risque elle craignait.
Pour le Tribunal de première instance, il existe un « vague soupçon » (de quoi exactement ?) et, en conséquence, il était légitime pour l’administration pénitentiaire de faire perdre son emploi à un enseignant de néerlandais.
Triste jour pour notre pays !
Triste Etat de droit dans lequel le « soupçon » d’un « risque » suffit pour sanctionner les citoyens qui ont oser manifesté une opinion minoritaire, bien que nullement violente.
Hier, d’innombrables citoyens ont manifesté pour la liberté d’expression.
Luk VERVAET est un professeur qui a choisi d’enseigner en prison. Il considère que la répression n’est pas la seule réponse pour lutter contre le terrorisme. Comme ses avocats, il a la conviction que l’éducation, l’émancipation, l’égalité et le respect des droits de l’homme sont essentiels dans cette lutte contre l’extrémisme islamique. Il a été sanctionné pour la mise en œuvre de cet idéal.
Cet exemple doit nous interpeller sur la portée de la liberté d’expression. Luk VERVAET a décidé d’interjeter appel du jugement rendu par la 4ème chambre du Tribunal de première instance de Bruxelles le 17 décembre 2014."