Quelques précisions...
Plusieurs personnes nous posent la question : y a-t-il une scission au sein des indigènes ? Quelle différence entre le « mouvement des indigènes de la République » et les « indigènes de la République » tout court ? Ceux, qui avaient lu un communiqué (signé par 19 personnes) envoyé début janvier sur la liste des signataires de l’Appel : « Nous sommes les indigènes de la République !... » ont déjà une petite idée. Ce communiqué avait mis en exergue le « sectarisme » de l’Equipe d’Animation qui s ?est emparée du « mouvement » des indigènes de la République depuis septembre 2005 (*). Elle est composée actuellement de 8 personnes dont un militant du PS et 7 autres membres appartenant à des associations, organisations ou mouvements : CEDETIM « Centre d’études et d’initiatives de solidarité internationale », MAI « Mouvement Autonome de l’Immigration du Nord », DiverCité, CCIPPP « Campagne Civile Internationale pour la Protection du Peuple Palestinien », CCP « Coordination des Comités Palestine », Les Motivé-e-s, et autres collectifs.
En effet, depuis plusieurs mois, nous étions nombreux à alerter contre le « sectarisme » et la main mise de certains sur la direction du « mouvement » et à refuser la tournure que prenait l’orientation générale de celui-ci. La participation des associations, organisations ou mouvements dans le combat des « indigènes » est bien évidement la bienvenue. Mais participation ou soutien ne doivent pas signifier : diriger le « mouvement ». Car, ce faisant, le « mouvement » ne pourra plus se prévaloir d ?une quelconque autonomie et encore moins prétendre donner la parole, prioritairement, aux premiers concernés qui sont les descendants d ?indigènes. C’est une dérive par rapport au sens même de l’Appel : « Nous sommes les indigènes de la République !... » et l’orientation politique attendue par la plupart des signataires de cet Appel. Et ce n ?est pas tout ?
Nous étions nombreux à avoir signé l’Appel sans être entièrement d’accord avec certaines approximations ou amalgames qu’il contient, ni avec le ton passionnel qui est le sien. Nous pensions rectifier le tir par la suite, notamment par rapport aux points suivants qui constituent pour nous le vrai combat politique qu’il fallait mener :
1. Fixer comme objectif politique principal : la lutte pour l’égalité.
2. Dire clairement que le passé colonial ou le post-colonialisme n’expliquent pas, à eux seuls, toutes les formes d’inégalité en France : discriminations, islamophobie, marginalisations, humiliations, etc., que vivent les personnes issues des ex-colonies. Les portugais, les italiens, polonais, avaient, eux aussi, subi en France les discriminations et la xénophobie bien que « blancs », de culture « judéo-chrétienne », et surtout non descendants d’anciens colonisés ou esclaves (les clichés xénophobes à l ?encontre des ROMS, des Tziganes, perdurent encore à nos jours). En revanche, des représentations et des pratiques de l’époque coloniale perdurent dans un contexte nouveau qui est celui de la mondialisation. C’est que l’inégalité qui caractérise l ?Etat de droit n ?est pas un phénomène périphérique, secondaire, pour l’essentiel elle est structurelle. C’est pourquoi l ?action à mener ne peut être de nature morale, juridique ou sociale, elle doit être politique.
3. Affirmer que notre démarche ne saurait être une cristallisation des haines contre la société dans laquelle nous vivons, ou plus précisément contre ceux que certains appellent « blancs » ou « petits blancs ». Oui à la mémoire, oui pour tirer tous les enseignements utiles du passé colonial, oui pour la reconnaissance des crimes coloniaux ; mais ce devoir de mémoire et cette reconnaissance des crimes, ne sauraient être un règlement de comptes ou une vengeance à travers lesquels on attise les haines et on éveille à outrance les souffrances enfouies.
4. Dire que les personnes issues de l’immigration ou de l’esclavage ne peuvent construire, toutes seules, une vraie dynamique politique sans l’aide de toutes celles et tous ceux qui luttent en commun pour l’égalité de tous. Le combat que nous voulons mener n’est pas celui des seuls « basanés » ou « noirs » (bien qu’ils soient les premiers concernés, les premiers touchés), c’est le combat dans lequel toute personne sensible à la question politique est appelée à adhérer.
5. Dire que notre cause ne doit pas être opposition et confrontation systématiques avec les forces politiques de ce pays. Ce qui ne veut pas dire que nous devons être indifférents aux erreurs passées, présentes ou à venir des uns et des autres.
Nous avons pensé que les choses allaient changer avec le temps. Que ce n’étaient que de simples erreurs de jeunesse qui finiraient par se dissiper à travers l ?action. Que l’Appel n’allait pas être vidé de sens pour se résumer à son titre : « Nous sommes les indigènes de la République ».
Il n’en était rien ? Depuis plusieurs mois, rien n’a changé ! Bien au contraire, ceux qui se sont accaparés de la direction du « mouvement » continuaient à présenter aux médias une image conforme à leur attente : choquer, heurter, faire de l’audimat (il suffit par exemple de lire les nombreuses erreurs que comportaient les communiqués ; ainsi pouvait-on lire dans celui du 14/12/05 : « Et ce n ?est qu’un début. Le plan B de la décolonisation ne fait que commencer. Il se poursuivra jusqu’à la libération complète du territoire ». Dans celui du 8 février, la France est comparée au régime de l’Apartheid, etc.). Nous pouvions dès lors être présentés par certains médias comme un groupuscule « radical », « extrémiste », rongé par la haine, voulant faire croire que le legs colonial expliquerait l’ensemble des problèmes dans les banlieues.
Plus encore, au lieu d’enraciner le mouvement dans les quartiers populaires autour des vrais problèmes (nous étions complètement absents lors des événements de Clichy-sous-Bois !), ils ont plutôt continué à rechercher tout ce qui participe au bruit médiatique. Or, comme chacun le sait, le bruit médiatique, aussi fréquent soit-il, ne saurait construire un mouvement capable de peser sur le champ politique ou pouvant réellement changer, en mieux, la situation de tous ceux et celles qui souffrent au quotidien.
Nous n’étions résolument pas d’accord avec ces méthodes. Nous avons donc exprimé notre opposition dans plusieurs messages sur les listes de discussion et dans le communiqué de janvier 2006. C’est à la suite de cela, que ceux qui se sont saisis de la direction du « mouvement » ont décidé de s’organiser entre eux tout en excluant tous ceux et celles qui ne partagent pas leur vision des choses... Il y a donc eu une scission de fait, non déclarée publiquement !
Le forum www.indigenes.org/forum et le site www.indigenes.org n’ont, désormais, aucun rapport avec le « mouvement » des indigènes de la république.
Nous tenons à clairement le préciser, nous étions, sommes et le resterons plus que jamais fermement attaché à la thèse de l’Appel : les représentations et les pratiques du passé colonial continuent à agir sur le présent ?
Le combat continue avec tous ceux et celles qui le souhaitent. Nous appellerons très prochainement à des réunions autour de nos objectifs en tant que citoyens militants pour l’égalité de tous. Toute personne concernée par ce combat politique est cordialement invitée.
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(*) Ce sectarisme est illustré par la décision prise le 04/02/06 par la Coordination Nationale (composée lors de cette réunion de 13 personnes dont les 8 membres de l’Equipe d’Animation) concernant l’AG du 18-19 février 2006, puisque, les signataires initialement conviés à contribuer à l’organisation et la structuration du « mouvement » ainsi qu’à l ?élection du bureau et du CA de l’association « les indigènes de la République » ne sont plus sollicités. Les signataires sont invités uniquement à la seule « table ronde » à partir de 14h ! (voir ci-dessous les échanges postés sur la liste de discussion de la Coordination Nationale auxquels les signataires n ?ont pas eu droit). D’ailleurs, l’élection démocratique des membres de l’association « les indigènes de la République », tant promise lors de la réunion de la Coordination Nationale du 07/01/06 et sur les listes de discussion des collectifs, ne figure pas dans le programme de l’AG du 18-19 février 2006, ce qui confirme ce que nous avons dénoncé dans notre communiqué de janvier 2006 !
Question d’un membre d’un collectif après avoir remarqué que l’AG du 18-19 février n’a pas été annoncée dans la lettre d’info N°2 envoyée le 8/02/06 sur la liste nationale des signataires de l ?Appel :
« ?Histoire d’être au clair avec les infos à diffuser dans le réseau (en m’interrogeant tout de même sur le statut de ce document).
Le 18 février l’G ne se tient plus ?
(?)
Hep ! A force de dysfonctionner on en arrive à tourner au ridicule. Hier ?j’ai "fait l’article" an l’annonçant et aujourd’hui je me retrouve "maquignon", il serait temps de diffuser l’info en temps utile.
Hep 2 ! Si cette liste doit coordonner, il faudrait qu’elle s’en donne les moyens, je n’apprécie que très modéremment d’être abreuvé d’infos et de commentaires (tous plus intéressants et utiles et nécessaires) et de ne pas disposer du minimum pour travaille.
Hep 3 ! J’extrapole peut-être sur un document, qui n’engage pas me semble-t-il le mouvement (je ne sais pas d’où il vient). Mais là je le dis poliment "ça me gonfle" »
La réponse d ?un membre de l ?équipe d ?animation :
« L’ag n’est pas publique, c’est la décision de la coordination, c’est pour ça que je n’ai pas donné l’info dans la liste d’information parce c’est une liste large ; donc tu n’est pas maquignon, et l’ag se passera sur trois moment samedi matin et après midi et dimanche matin.
Pour info, le cr le dira plus en détail, on a admis que l’ag sera décisionnel, que participeront à l’ag les membres des collectifs + assoc nationale signataires + caravane ; Et que la décision qui émanera sur la structuration sera par vote, une voix pour chaque entité ;
L’équipe d’animation se réunit aujourd’hui, fera partir un mail avec le programme et les détails relatifs à l’organisation et au déroulement de l’ag discuté et acté à la dernière coordination nationale.
(?)
La table ronde l’est »
Commentaires d ?un membre d ?un collectif après la diffusion du compte-rendu la Coordination Nationale du 04/02/06 :
« Nous ne nous attarderons donc que sur la place que vous avez souhaité donner lors de l’AG du Mouvement aux associations autres que les trois citées. La coordination du Mouvement des Indigènes de la République a décidé de réduire la voilure de ses partrenaires sans même en débattre, et de limiter ces partenariats de terrain, pourquoi pas.
Nous regrettons la méthode utilisée ici, c’est à dire découvrir dans compte-rendu adressées à touTEs notre exclusion de fait, une semaine avant un rendez-vous retenu de longue date. Nous prenons donc acte que notre présence au sein du Mouvement comme celles d ?autres associations semble moins souhaitées par la coordination nationale...
Sans nécessairement attendre une réponse différente, nous vous informons qu’il ne pourrait y avoir pour nous partcipation à un mouvement que nous soutenons sans à minima notre présence effective à son Assemblée Générale (les modalités de cette participation restant évidemment à préciser). De plus, dans le cas présent un minimum d’explication sur la nouvelle stratégie de partenariat mériterait d’être explicitée.
Nous vous remercions de bien vouloir nous informer des suites que vous donnerez à ce courrier, pour notre part nous considérons que votre décision de ne exclure de l’AG consiste à ne plus nous considérer comme partie prenante du mouvement.des Indigènes de la République.
Regrettant réellement votre décision »