Y faut pas s’appeler Einstein pour comprendre que la dégoulinance de moraline écœurée suinte aussi bien du côté de l’exercice du pouvoir (commanditaires compris) que du côté de la critique dite « anti-système ». Élite suprémaciste aux divines épaules recouvertes de soie synthétique ou roture édentée en chemise de crin.
La différence transparaît une fois qu’on a compris que les seconds prennent la moraline très au sérieux, tandis que les premiers ne croient pas un seul instant aux leçons dogmatiques qu’ils se permettent de dispenser « au nom de la démocrature et des droits des petits chiens-chiens » en façade et à ce lui de leur portefeuille, par-dessous les tables. ― Ce qui, pour l’anecdote, permet aux premiers d’utiliser les seconds en guise d’idiots utiles à l’insu de leur plein gré et à ceux-ci, d’entretenir l’illusion qu’ils lézardent le système, alors qu’ils augmentent sa perniciosité.
Il y a donc un effet de renforcement réciproque, de telle sorte qu’à chaque fois qu’un excès de moraline suit une débauche d’indignation, l’étouffement croît de façon quasi exponentielle. Résultat des courses : la vie de tous les jours devient de plus en plus impossible, et même insupportable, tant elle se voit dépréciée et condamnée d’office dans les possibilités de développement qu’elle offre.
Déjà que, depuis le virage néo-libéral des forces pseudo-progressistes, l’opposition gauche-droite en a pris un sacré coup au point de n’être plus qu’un stérile miroir aux alouettes, voici que la possibilité critique en elle-même devient une sorte de tourne-en-rond où la nécessité se résume à un jeu de dupe entre nigauds hystériques et ordures psychopathes.
La belle affaire !
Inutile d’un rajouter une couche : c’est bel et bien à un effondrement irrévocable de civilisation que l’on assiste. Non pas à cause du pic de ceci ou de la pénurie de cela, mais bien parce que la bête humaine n’a plus ni le courage ni la force nécessaires afin de s’extraire aux forceps de la chape de plomb qu’elle a construit et dans laquelle elle se sera laissé glisser au fil du temps aussi bien par soucis de confort ou par négligence que par cupidité ou férocité crasse.
Je me demande cependant si, une fois réellement au fond du trou, il en restera des durs qui s’élèveront contre ces pauvres loques vaguement humaines qui dévoreront tel rat étourdi ou telle grosse mouche verte et dodue qui passait par là, simplement parce que, entre désespoir, désastre et désolation, il n’y aura plus rien à se mettre sous la gencive. À défaut de quenottes déjà perdues.
Bien de la joie...