Amnesty International Belgique, 23 septembre 2005.
Plusieurs détenus observant actuellement une grève de la faim à Guantánamo Bay sont dans un état critique, selon des avocats qui se sont récemment rendus dans le camp de détention. Amnesty International est préoccupée par les informations selon lesquelles le camp de Guantánamo ne dispose pas des équipements requis pour faire face à cette crise médicale.
« Les militaires américains semblent minimiser de manière systématique la grève de la faim, afin d’obvier à la critique internationale, a déclaré Susan Lee, directrice du Programme régional Amériques à Amnesty International. En juillet, ils ont nié qu’une grève de la faim avait lieu, alors qu’elle avait démarré depuis deux semaines. Désormais, ils semblent sous-estimer le nombre de prisonniers concernés et la gravité de l’état de santé de plusieurs d’entre eux. Cette manière d’agir démontre une nouvelle fois le manque de transparence qui caractérise les politiques et les pratiques de détention mises en oeuvre par les Américains dans le cadre de la " guerre contre le terrorisme ". »
Pas moins de 210 personnes observeraient actuellement cette grève de la faim à Guantánamo Bay, alors que le ministère de la Défense américain n’a parlé que de 36 prisonniers. Les avocats des détenus attribuent ce chiffre peu élevé aux critères permettant de définir techniquement qui fait une grève de la faim. Selon l’armée américaine, une grève de la faim correspond au refus de neuf repas consécutifs sur une période de 72 heures. Les avocats affirment que les détenus acceptent l’un de ces repas avant de le jeter dans les toilettes, afin de ne pas être nourris de force par des sondes nasales.
« Nous sommes particulièrement inquiets pour la santé des détenus qui sont peut-être passés à travers les mailles de cette définition restrictive d’un gréviste de la faim. Il se peut qu’ils ne reçoivent pas de soins médicaux, a expliqué Susan Lee. Nous demandons instamment que des experts médicaux indépendants soient autorisés à examiner les prisonniers. »
De nouvelles informations sont apparues concernant la précédente grève de la faim observée au cours de l’été à Guantánamo. Les avocats ont relaté que plusieurs détenus se sont évanouis dans leur cellule et ont vomi du sang.
« Confronté à une situation qui se dégrade et dont il est responsable, le gouvernement américain doit fermer Guantánamo Bay et inculper puis juger les détenus dans le respect du droit international, ou les libérer », a ajouté Susan Lee.
D’après les prisonniers, ils ont notamment entamé une grève de la faim parce qu’il ne leur est pas permis de contester la légalité de leur détention devant une cour de justice. Ils ont ajouté que les coups et les mauvais traitements les y avaient également incités. Depuis longtemps, Amnesty International fait campagne en faveur de la comparution des détenus de Guantánamo Bay devant les tribunaux. Elle demande aussi que soit mis un terme aux actes de torture et autres mauvais traitements.
Fait nouveau et inquiétant, les avocats du Center for Constitutional Rights (Centre de défense des droits constitutionnels), qui représentent un certain nombre de grévistes de la faim, affirment qu’on leur interdit de se rendre à l’hôpital du camp de détention. Leurs clients sont transférés depuis leurs lits, certains trop faibles pour s’asseoir, jusqu’à des cellules afin de s’entretenir avec leurs avocats.
« Le gouvernement des États-Unis doit rendre publiques toutes les informations dont il dispose sur cette grève de la faim et tenir les familles des détenus informées de leur état de santé. Il doit aussi autoriser une inspection indépendante à Guantánamo et dans tous les centres de détention liés à la " guerre contre le terrorisme " », a conclu Susan Lee.
Complément d’information
Un nombre indéterminé de prisonniers a repris vers le 12 août une grève de la faim entamée précédemment, les autorités du camp n’ayant pas tenu leurs promesses d’améliorer les conditions de détention, selon certaines sources.
Au cours de la première grève de la faim observée durant l’été, le capitaine de corvette Flex Plexico a nié en avoir eu connaissance, en dépit des informations persistantes livrées par les avocats.
Amnesty International estime que les conditions de détention à Guantánamo Bay s’apparentent à un traitement cruel, inhumain et dégradant. L’organisation fait campagne pour que cessent les actes de torture et les mauvais traitements perpétrés dans le cadre de la « guerre contre le terrorisme ». Pour en savoir plus, veuillez consulter la page d’accueil de cette campagne : http://web.amnesty.org/pages/stoptorture-index-fra
– Source : www.amnestyinternational.be