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Environnementalisme naïf ou Ecologie réelle ? La voie souveraine vers la durabilité

Le journal pro-MAS bolivien La Epoca publie ici un entretien qui traduit la nécessité pour les mouvements bolivariens actuels de lutter contre les partis écologistes pro-impérialistes locaux tout en s'engageant concrètement dans le sillage cubain de l'agroécologie et de la lutte difficile contre l'agrobuziness.

Par Rafaela Molina Vargas

Entretien avec Guillaume Suing, professeur français agrégé de biologie, membre du Cercle Henri Barbusse de culture ouvrière et populaire et du Rassemblement Communiste (RC). Auteur de « Evolution ; la preuve par Marx. Dépasser la légende noire de Lyssenko » (2016),« L’Écologie Réelle. Une histoire soviétique et cubaine » (2018), et « L’origine de la vie, une siècle après Oparine » (2020), éditions Delga. Il est également l’auteur de nombreux articles concernant les politiques agraires et énergétiques anti-impérialistes et les limites de « l’écologisme » occidental, sur le blog « Germinal Le Journal ».

La Epoca : Le « sens commun » actuel tend à opposer progrès et science à protection de la nature (formulation plus claire que développement / nature ?). Cependant, cette dichotomie semble masquer la véritable contradiction Capital / Nature. Comment expliquez-vous cette contradiction liée à la contradiction Capital / Travail du système-monde actuel ?

G. Suing : Il y a effectivement une contradiction entre l’histoire de l’Homme et celle de la biosphère plus globalement. D’une certaine façon, l’Homme est devenu le « jardinier » du monde, et cela rend sans doute difficile la recherche d’une harmonie relative, d’un rééquilibrage permanent entre la nécessaire satisfaction des besoins humains et l’indispensable régénération des ressources terrestres.

Cependant, puisqu’on parle de « contradictions » et de « dialectique », il faut regarder les choses de plus près et bien comprendre en quoi la fameuse contradiction nous opposant en apparence à une « nature » idéalisée et soit disant « en équilibre », cache de nombreux enjeux d’ordre idéologique. En réalité, nous sommes en face de deux contradictions bien distinctes, chacune ayant une temporalité propre.

La première est bien une contradiction profonde de l’histoire humaine, celle d’Homo sapiens qui exploite les ressources naturelles en cherchant autant que possible, non pas à « fixer » vainement la « nature », mais à permettre une reconstitution rationelle des ressources dépensées. Cette contradiction date globalement du néolithique (début des grandes domestications), et non du récent capitalisme, elle est consubstancielle à notre espèce. C’est, pour parler en termes marxistes, une contradiction de type non antagonique. C’est-à-dire une contradiction qui peut se résoudre sans la destruction de l’un des pôles. Quand certains veulent nier la nécessité de reconstituer les ressources environnementales jugées inépuisables (destruction du pôle « nature »), d’autres veulent revenir à l’âge-de-pierre et au malthusianisme pour limiter la satisfaction de nos besoins humains au nom d’une « nature » anthropomorphisée voire déïfiée (destruction du pôle « espèce humaine »). Ces deux positions sont tout aussi réactionnaires, au sens premier du mot, et comportent même, en miroir, une tendance potentiellement fasciste (fuite en avant « futuriste » et nihiliste, ou malthusianisme nostalgique d’un passé féodal idéalisé).

La deuxième est en revanche une contradiction complètement antagonique : Il est clair que la contradiction « Capital / Nature », aspect particulier d’une contradiction plus large, Capital / Travail (le travail humain incluant bien sûr le travail de gestion de l’environnement pour le long terme), ne pourra se résoudre que par la destruction de l’un des pôles. Il me paraît peu crédible que le pôle « Travail humain » se « suicide » sur le long terme. C’est la raison pour laquelle un véritable « écologisme » ne peut être qu’anticapitaliste, tout en tenant compte des dérives idéologiques possibles d’une focalisation uniquement « naturelle ».

Cette dernière, tu le rappelles, est bien un fait : L’impérialisme utilise, entre autres, l’idéologie « écolo » pour lutter contre les multiples expériences révolutionnaires et d’indépendance nationale des pays du Sud.

C’est donc bien le pôle Capital qu’il faut détruire pour dépasser cette contradiction bien comprise. Autrement dit, il ne s’agit pas de se limiter au romantisme ou au contraire à « la science pure » pour accomplir ce dépassement, mais de faire de la politique... et c’est beaucoup plus difficile !

L. E. : Dans le même ordre d’idées, de nombreux opposants écologistes à la gauche latino-américaine, comme Eduardo Gudynas, s’opposent à l’extractivisme (ou au néo-extractivisme) supposé des gouvernements d’Evo Morales, Rafael Correa, etc. Comment comprendre cette critique de l’extractivisme ? Existe-t-il une possibilité de transition automatique et directe vers un système équitable et écologiquement durable sans utiliser de ressources ?

G. S. : La plupart des peuples qui cherchent à se libérer de l’emprise impérialiste états-unienne ou européenne ont hérité d’un modèle économique colonial, centré sur la monoculture ou la spécialisation énergétique pour l’exportation. C’est ainsi. Si la gauche antilibérale cherche dans ces pays une voie permettant de se libérer du joug impérialiste tout en préservant l’environnement, il faut s’armer d’une ligne politique adaptée : A l’époque de la révolution russe, la jeune Union Soviétique avait elle-même hérité d’un modèle féodal à partir duquel une collectivisation des terres et une nationalisation immédiate des grands moyens de production étaient extrêmement complexes à réaliser. Une « Nouvelle Politique Economique » (NEP) exigée par Lénine au début des années 20, devait permettre à une forme controlée de capitalisme agraire, pour quelques années, de développer les forces productives nécessaires à un passage au socialisme réel (ce qui par contre n’était pas nécessaire pour les pays industrialisés et riches d’Occident par exemple).

Ce qu’il faut comprendre, c’est qu’une politique véritablement révolutionnaire, non en parole mais en acte, est obligatoirement sinueuse, tout en gardant clairement un cap (en URSS le passage au Socialisme a été réalisé ensuite). C’est ainsi qu’on peut comprendre, avec Lénine, la distinction profonde entre compromission avec l’ennemi (liquidation de sa politique antiimpérialiste) et compromis, un couteau sous la gorge (recul temporaire permettant la survie de l’Etat pour garder le cap sur le long terme).

Le fait pour Evo Morales par exemple d’avoir su préserver l’agroécologie des hauts plateaux, à l’abri de l’agrobuziness, tout en permettant sur le court terme son emprise dans d’autres régions périurbaines, fut une façon de tenir sur le long terme (protéger les richesses nationales en terme de biodiversité et d’agroécologie) tout en évitant une déclaration de guerre immédiate par une ennemi encore trop puissant.

C’est la même chose pour l’extraction du lithium : Pour développer une agroécologie durable, base d’une souveraineté alimentaire, et une politique énergétique indépendante également durable, il faut des moyens, souvent peu « visibles » mais bien réels. Il faut en particulier une recherche en agrobiologie de pointe (pour dépasser les impasses historiques de « l’agrochimie » et de l’agriculture intensive qui s’en inspire), donc des universités et des centres de recherche, coûteux. Il faut encore, pour l’ensemble des travailleurs de la terre, un niveau d’alphabétisation suffisant pour appliquer, en « agronome de leur propre sol », des pratiques agroécologiques plus complexes scientifiquement que celles de la monoculture intensive de la fin du 20ème siècle : Il faut donc aussi un système scolaire puissant et démocratique. Tout cela exige, comme le développement des techniques d’extraction des énergies renouvelables locales, souvent complexes, des dépenses d’état considérables, que le secteur privé n’acceptera jamais de payer, puisqu’il s’agit d’investissement de très long terme. On ne peut en arriver là du jour au lendemain et c’est évidemment l’accumulation de forces productives qui doit précéder (et accompagner) la réalisation d’une réforme agraire durable et agroécologique de long terme, et non l’inverse.

Si l’extraction du lithium profite exclusivement aux prédateurs impérialistes, c’est une politique réactionnaire à combattre, bien sûr. Mais si l’extraction du lithium permet, à terme, de financer un autre modèle énergétique et agricole pour le pays, c’est ce qu’on pourrait appeler une « NEP écologique », et il faut soutenir, même si des écologistes « naïfs » se placeront de l’autre côté de la « barricade », avec tous ceux qui refusent que le peuple ne soit durablement souverain.

Dans ce sens il est clair que la théorie écologiste malthusienne de la « décroissance » est une forme de sabotage, utile à l’impérialisme, de toute politique agroécologique souveraine dans les pays semi-colonisés du Sud.

L. E. : Dans ton livre « L’Écologie Réelle », tu affirmes que les luttes pour la conservation de la nature découlent et prolongent des luttes anticapitalistes et qu’en outre elles ne peuvent pas se produire avant ou séparément des luttes pour la souveraineté nationale et donc anti-impérialiste. Comment Cuba, et l’Union soviétique auparavant, en sont-ils des exemples historiques ?

G. S. : Nous avons aujourd’hui des faits historiques, et une propagande qui cherche à les dissimuler. Le premier de ces faits est que Cuba socialiste est désormais leader dans le développement de l’agroécologie. L’ONU a clairement indiqué qu’il est le seul pays à avoir atteint le « stade du développement durable ». Ce ne fut pas sans efforts, évidemment. Mais l’ensemble des mouvements écologistes occidentaux cherchent à le cacher, pour continuer d’incriminer les « extractivistes » de l’ALBA par exemple.

La réalité est bien sûr complexe à reconstruire, tant les mensonges, les calomnies et les confusions volontaires ont été nombreuses au sujet de Cuba. Il est clair que sa conversion à l’agroécologie date de la période spéciale dans les années 90. Sous blocus, sans possibilité technique de poursuivre une agriculture intensive effectivement appliquée depuis des décennies sur ses sols, Cuba a pourtant réussi, par une série de politiques volontaristes, à mettre en pratique un modèle qui n’était que théorique dans les autres pays. Comment ? Par les possibilités qu’offrent le système socialiste lui-même : L’Etat qui possède la terre, peut décréter, hors de toute contrainte des propriétaires fonciers vendus à l’impérialisme, la réorganisation des champs en petites unités données par usufruit gratuit (pas de loyer) à des collectifs de travail (littéralement ce qu’on appelle des kolkhozes). Il peut de plus interdire juridiquement l’usage des pesticides sur l’ensemble du territoire national (ce qui est par définition inenvisageable dans un pays capitaliste). C’est également parce que l’Etat a pu financer un système éducatif de haut niveau qu’il a pu développer une recherche en agrobiologie conséquente. C’est enfin parce que l’Etat est en lien direct avec les syndicats paysans (l’ANAP, rattaché à l’internationale paysanne Via Campesina qui irrige beaucoup de pays d’Amérique du Sud), qu’une mobilisation massive des paysans, acteurs de cette transition agricole, a été possible, par la voie d’un mouvement très efficace nommé Campesino a campesino (transmission de savoir-faire traditionnel entre les travailleurs de la Terre). C’est une véritable réussite qui a permis à Cuba de produire non pas moins, mais plus, et de façon plus diversifiée, qu’avant les années 90 pour satisfaire une grande partie des besoins alimentaires de la population sans recours aux exportations. Evidemment celles-ci subsistent, mais beaucoup moins que dans la plupart des pays latino-américains fortement dépendants des exportations US.

La coopération de Cuba avec d’autres pays de l’ALBA, la Chine, entre autres, n’a pas remis en cause ce modèle, qui n’est donc pas transitoire, comme pouvaient le penser les critiques anticastristes. Au contraire, parallèlement aux grandes missions internationales des médecins cubains, des agronomes cubains sont également envoyés en mission désormais pour aider les paysans d’autres pays soucieux du développement d’un tel modèle agroécologique.

Ajoutons, et c’est de mon point de vue très important, que le modèle agricole de type soviétique en vigueur dans l’île avant 1990 fut introduit par une URSS post-Khrouchtchevienne, dont la politique agraire avait été volontairement calquée, avec un « retard » très net, sur celui des USA et de l’Europe après la deuxième guerre mondiale. C’est effectivement pour l’URSS non par une politique consubstantielle au système socialiste, mais au contraire un fléchissement de son rapport vis-à-vis de l’encerclement capitaliste, qui de ce point de vue, a marqué le début de son affaiblissement et de sa dépendance aux exportations, paradoxalement. La révolution de 1959 à Cuba, même si elle a continué de se démarquer jusqu’à un certain point du « grand frère » soviétique en préservant les traditions agricoles locales et une certaine protection volontariste de son environnement, n’a pas échappé à l’influence d’un modèle agricole qui, en réalité, n’était pas spécifiquement socialiste.

Au contraire, l’URSS pré-Khrouchtchévienne avait développé des années 20 aux années 50 un tout autre modèle, fondé sur une science des sols radicalement différente de son homologue occidentale très réductionniste. Des pédologues russes comme Dokoutchaïev puis Williams avaient développé une théorie dynamique de la fertilité des sols, de l’acclimatation des plantes, de la polyculture à grande échelle et de l’agroforesterie, qui trouva son point d’orgue avec le « grand plan de transformation de la nature » à partir de 1948. Ce « grand plan » est sous bien des aspects, une conquête historique de l’agroécologie (on ne l’appelait pas ainsi à l’époque évidemment), au sens où il s’agissait, contre la doxa occidentale de l’agrochimie se substituant aux propriétés des sols cultivés, de développer la « vie des sols » pour que celle-ci développe la vie des plantes cultivées. D’une certaine façon, et non sans résultats sur le long terme, la résilience et la productivité d’un tel modèle, cherchant à fertiliser de nouveaux sols infertiles plutôt qu’à « doper » chimiquement des régions saturées, mettait l’URSS à l’avant-garde des réflexions sur l’agroécologie extensive.

Ce n’était pas une théorie romantique sur la beauté de la nature qui soutendait une telle politique, mais bien la conscience que l’environnement, la biodiversité locale, la qualité des sols cultivés, constituaient une partie cruciale, fondamentale, de la richesse nationale, et la condition vitale, sur le long terme, de la souveraineté et de l’autosuffisance alimentaire. La mutation khrouchtchévienne, de ce point de vue, fut une « fuite en avant » aventuriste et court-termiste, visiblement funeste.

D’une certaine façon, le fait qu’on trouve aujourd’hui à l’avant-garde des expérimentations agroécologiques des pays comme Cuba, le Kérala communiste, ou même le Vietnam (actuellement pousuivi par l’OMS à la demande des USA pour avoir interdit les produits Monsanto sur ses champs), est très significatif de cette intrication dont tu parles entre contradictions Capital / Travail et Capital / Nature.

Guillaume SUING

 https://www.la-epoca.com.bo/2021/06/14/ambientalismo-ingenuo-o-ecologia-real-el-camino-soberano-hacia-la-sustentabilidad/
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COMMENTAIRES  

22/06/2021 11:42 par Serge Sales

Bonjour à tous
Les abeilles meurent chez nous et prolifèrent à Cuba, tout est dit. Autre chose qui n’est pas en rapport avec le sujet mais en regardant les résultats des élections régionales en Rhône-Alpes-Auvergne, le PCF a fait liste commune avec Najat Vallaud-Belkacem ???. Alors, soit ils ne sont pas au courant mais Najat est une Young Leaders c’est-à-dire ATLANTISTE auquel cas, il va falloir les informer. Je ne sais pas ce que les dirigeants du PCF prennent comme drogue, mais ça a l’air fort… !!!
Faites attention à vous

22/06/2021 12:29 par Dominique

Pour moi, les deux contradictions dont parlent cet article ne sont pas antagoniques mais n’en forment en réalité qu’une seule qui a évolué avec le temps. La domination systémique de la nature par l’homme, comme nous le démontre le plus ancien mythe connu, celui de Gilgamesh, remonte aux premières villes de l’Antiquité, soit à la naissance de notre concept de civilisation. Ce mythe raconte la quête ratée de l’immortalité de Gilgamesh, un tyran sumérien qui a tué Uwawa, le gardien de la forêt, pour pouvoir raser cette dernière et construire Ur, sa ville. Il n’est pas devenu immortel mais l’Histoire a retenu son nom.

À noter qu’avec les villes et cette domination institutionnalisée de la Nature, la domination institutionnalisée de l’homme par l’homme apparaît en simultané, de même que le commerce, l’écriture pour tenir la comptabilité, la guerre organisée et le patriarcat. Depuis, toutes les civilisations qui se sont succédées ont été basées sur ce suprématisme (dominer pour pouvoir exploiter n’est rien d’autre que du suprématisme), elles se sont étendues jusqu’aux limites que leur imposaient les conditions géopolitiques de leurs époques, sont entrées en décadence et ont disparu.

Aujourd’hui, l’exemple cubain montre qu’il est possible de développer une agriculture de proximité qui soit bénéfique autant aux consommateurs (produits de première qualité et exempt de saloperies chimiques) qu’à la nature (on recrée les cycles naturels, ce qui l’enrichit au lieu de l’appauvrir) sans avoir besoin de recourir, comme cela fut fait par Correa, à l’armée pour chasser des peuples de la forêt qui n’avaient pas été consultés pour décider de transformer la forêt en mines. Ceci dans un contexte où les peuples de la forêt, depuis des millénaires, savent vivre en harmonie avec leur environnement et contribuer à la biodiversité de la forêt, par exemple en prenant avec eux les semences des plantes qu’ils cultivent quand ils déménagent.

L’Histoire montre que ces deux contradictions n’en forment qu’une, qu’elle a évolué avec le temps et qu’avec l’apparition de l’exploitation systémique de ce que nous appelons civilisation, nous sommes en face d’un véritable suprématisme, lequel n’a cessé, avec la marche historique de civilisations qui toutes ont optimisé ce suprématisme et l’exploitation qui l’accompagne à un niveau supérieur à celui des civilisations précédentes, d’étendre son emprise sur l’ensemble de la planète et sur tous les aspects de nos vies.

Aujourd’hui, nous vivons dans une société industrielle de consommation, d’exploitation et de destruction de masse. La forme de travail industriel s’accompagne d’une spécialisation poussée du travail, ce qui crée une hiérarchie du travail qui renforce les hiérarchies basées sur la richesse et le pouvoir. De plus, les données accumulées depuis le premier jour de la révolution industrielle jusqu’à aujourd’hui nous montrent de façon têtue que l’ensemble des nouvelles technologies comme l’ensemble des économies d’énergies et de matières premières n’ont jamais été utilisées que pour réaliser une seule chose : toujours plus d’industrialisation. Pour aboutir à la situation actuelle : le désastre environnemental et social causé par le mode de vie industriel globalisé continue d’accélérer.

Ceci me montre que plutôt que de continuer à opposer encore et toujours les modes de vie ancestraux avec le mode de vie civilisé, il est nécessaire de les réconcilier dans tous les domaines. Cela a commencé à être fait pour l’agriculture par certains pays comme Cuba, mais il faudrait faire de même dans tous les domaines. Et ce n’est certainement pas en continuant à détruire la forêt de force que nous y arriverons.

En pratique, le problème est de savoir comment forcer les élites à prendre ce virage à 180 degré. Je n’ai pas de recette miracle mais une chose est sure : le point fort de l’ennemi est le Capital car sans lui, le mode de vie actuel est impossible à financer et donc à mettre en oeuvre, ce qui le rend imbattable au jeu de récupérer à son profit la contestation pour la travestir.

Quelqu’un de censé n’attaque pas son ennemi sur son pont fort, sauf pour éventuellement faire diversion, il l’attaque sur son point faible. Il serait temps que les marxistes prennent conscience de cela et arrête de nous faire croire qu’en construisant la course à la croissance industrielle, il soit possible de faire mieux que, dans le meilleur des cas, être l’aile gauche du Capital qu’ils combattent an vain. La révolte des luddistes, cette révolte du peuple anglais au tout début de la révolution industrielle, nous montre la voie à suivre : le point faible de la société techno-capitaliste est son outil de travail, lequel aujourd’hui repose sur un petit nombre de réseaux globalisés de distribution et d’approvisionnement de matières premières, de marchandises, de personnes et d’informations.

En pratique nous sommes très, très loin du rapport de force nécessaire. Un mouvement de résistance capable d’arrêter la machine industrielle globalisée et d’aider les gens à s’organiser pour faire autre chose est irréaliste, ceci principalement parce que la majorité des gens n’ont simplement pas conscience du problème de fond. Pour la même raison, il est irréaliste de croire que demain, le monde entier pourrait se lever et descendre pacifiquement dans les rues du monde entier pour dire :

Stop, nous ne voulons plus de ces conneries suprématistes, de ces dominations écrasantes, de ces destructions sans fin. Aujourd’hui nous disons stop et nous commençons à nous retrouver pour, tous ensemble, développer ici et maintenant un nouveau monde, un monde où il fasse bon vivre en harmonie avec ses voisins et avec la nature.

C’est pourtant bien une de ces deux choses qu’il faudrait faire, ceci car, à l’image de son moteur économique, la société techno-industrielle est non réformable. En pratique, il faudrait faire les deux en simultané.

22/06/2021 14:28 par jo nice

Lisez "l’écologie réel "de G Suing pour avoir l’équivalent d’un T34 argumentatif contre les éco-capitaliste style EELV qui déblatèrent des conneries sur le "productivisme" soviétique, la décroissance et autre "small is beautiful".

22/06/2021 14:44 par CN46400

"Une « Nouvelle Politique Economique » (NEP) exigée par Lénine au début des années 20, devait permettre à une forme controlée de capitalisme agraire, pour quelques années, de développer les forces productives"
,Exact, sauf que c’est pour "plusieurs générations" que Lénine envisageait la NEP, et pas pour "quelques années" (voir les tomes 27,32,33,36,45,42 des OCs). Il propose même de louer pour 60 ans le Kamchatka à un consortium de capitalistes US pour 5% sur les bénéfices de royalties pour l’URSS, faisant ressortir que des millier de prolos soviétiques pourraient s’y frotter aux techniques les plus modernes.
Ceci dit, Suing omet de noter qu’en Chine depuis Deng, et à Cuba depuis le recul décidé par Fidel Castro sur la canne à sucre, la terre, tout en restant propriété de l’état, peut être exploitée, sous contrôle de l’état, gratuitement par des entreprises privées (75ha max à Cuba).

22/06/2021 14:52 par Yannis

Très intéressant, toujours pertinents G. Suing.

En France, on a Cyril Dyon et Pablo Servigné qui montrent leur visage de parfaits beau-fistons à la TV et nous parlent de Collapsologie avec un grand Q ou de développement durable avec des scientifiques des campus étasuniens. Mais ne connaissent ríen de Cuba, ou n’en parlent pas sur les plateaux TV.

Heureusement, on a encore des concaincus sur le terrain, les mains dans la terre, la pensée rationnelle, imaginative, constructive, pas seulement des blablateurs en auto-promo.

Malheureusement ceux-là et la plupart des vendus de EELV ont instrumentalisé l’écologie (comme d’autres le peuple) à des fins toutes personnelles.

Et sinon, que dit la Politique Agricole Commune ou PACA en Euroland concernant l’agro-écologie ???

23/06/2021 17:35 par Autrement

Comme suite aux réflexions sur les conditions de possibilité d’une vraie agroécologie, le Rassemblement communiste (RC), dont G. Suing est membre, me paraît donner la bonne position concernant les élections régionales, sous le titre "La double raclée du tandem Macron Le Pen"

24/06/2021 11:21 par Assimbonanga

C’est un agriculteur qui vous le dit : "En bio, ça paie bien". Vous trouverez cette sentence à 0:55 de cette vidéo. On sent vraiment la conviction militante de cette conversion au BIO.
Aussi, lorsque je consommerai du bourgeon de cassis en infusion, je me souviendrai de la puissante motivation de ce plouc sur sa parcelle...
L’union européenne n’étant composée que de nations libérales, à caractère capitaliste et fondées sur le seul dogme de la croissance, comment pourrait-elle encourager l’agro-écologie ? La PAC est le reflet de cette idéologie dominante, incapable de penser autrement. Les distributions de subventions se font selon l’ordre établi et selon les hommes qui chuchotent à l’oreille des Présidents. Non ?
Et les médias sont là pour animer, présenter, rendre vivants, les communiqués des syndicats agricoles ? Non ?

29/06/2021 18:18 par RV

Il me semble avoir lu quelque part que la politique agricole cubaine a été aussi et surtout le résultat des restrictions dues à l’embargo états-uniens.

30/06/2021 00:59 par Danael

Ce n’est pas seulement le blocus qui a introduit des changements dans l’agriculture cubaine mais aussi les échecs , les défaillances internes et la grande capacité des Cubains à se remettre en question. Par ailleurs un État socialiste au service de son peuple à des capacités supérieures pour saisir les enjeux mondiaux et locaux, planifier avec efficacité son économie et introduire les changements importants et nécessaires à chaque grande étape. D’autant plus que la révolution cubaine a investi dès le départ sur la matière grise et les valeurs humanistes de son peuple. Et elle n’a pas fini de nous surprendre dans ce sens.

30/06/2021 08:49 par Assimbonanga

@RV, c’est ça qui est remarquable ! Les sanctions finissent au bout du compte par renforcer les défenses immunitaires des pays qui en sont victimes !
Hier soir, un super documentaire sur la Corée : Corée du nord. Les hommes du dictateur. Je vous le recommande.
Le débat ensuite était également très instructif. Seul le présentateur ramait pour asséner la propagande habituelle. Les invités étaient beaucoup plus subtils, ainsi que Marjolaine Grappe, la réalisatrice du film.

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