Monsanto pensait bien voir son projet aboutir en Argentine. Le numéro un sur le marché des semences génétiquement modifiées avait à vrai dire mis le paquet : un investissement de 160 millions de dollars et la perspective de créer quelque quatre cents emplois dans une des régions les plus pauvres du pays. L’urgence sociale, selon les dirigeants de la multinationale, aurait dû faire taire les protestations. Mais les choses ont pris une tournure pour le moins inattendue.
Les habitants de Malvinas Argentina et des groupes de protection de l’environnement ont réussi à obtenir de la justice que leurs revendications soient entendues. En effet, les travaux entrepris par Monsanto sont pour le moment arrêtés tant qu’un rapport n’aura pas prouvé la non-dangerosité de ses produits sur l’environnement. Mieux, la pression sociale commencée il y a quelques mois a conduit le gouvernement provincial à revenir sur le projet-même de l’entreprise. Federico Mavciocchi, avocat de l’association « Malvinas lucha por la vida » est très clair : « nombre d’études ont déjà été menées et toutes mettent en évidence les dangers que Monsanto représente pour l’environnement. On peut parler de contamination ».
Le mouvement contre Monsanto gagne des forces en Amérique latine ainsi que dans les Caraïbes : les mouvements et les populations locales, en Argentine mais aussi en Haïti, au Brésil et au Pérou, luttent pour l’interdiction des OGM et des pesticides et pour un contrôle local indépendant des semences et de l’agriculture. Les petits paysans se trouvent aujourd’hui aux premières lignes de la bataille contre l’augmentation des cultures transgéniques, puisque ce sont eux qui poussent vers la souveraineté alimentaire et la mettent en pratique. Le modèle agricole néo-libéral pourrait être supplanté si le modèle d’agriculture familiale, qui actuellement produit la plus grande partie de l’alimentation en Amérique latine, recevait les investissements publics destinés aux entreprises agricoles industrielles pour les cultures de canne à sucre, pour l’éthanol, pour le soja et autres monocultures agro-industrielles.
L’Argentine semble avoir pris la tête de ce mouvement de contestation. En 2011, un tribunal a confirmé une injonction interdisant l’épandage de pesticides près des habitations dans la province de Chaco. Le tribunal a réaffirmé le principe de précaution qui appelle à prendre des mesures de protection en cas de risque probable de dommages environnementaux. Il a surtout mis l’accent sur la priorité à la santé de la population qui est plus importante que la production agricole.
Ces décisions marquent une étape importante et montrent l’intensification nécessaire des luttes internationales contre la production industrielle de soja transgénique. Cette production doit être arrêtée avant que l’utilisation de pesticides toxiques, le déplacement en masse de populations locales et la commercialisation d’aliments transgéniques dangereux ne créent d’autres victimes.
Au moment où la bonne santé du groupe étasunien est saluée par la presse économique (un chiffre d’affaires de 5,83 milliards de dollars, en hausse de 6,6 %), le géant Monsanto a été contraint de battre en retraite. La globalisation a été cette fois-ci du côté des luttes et de l’espérance. David a vaincu Goliath en terre argentine.
Capitaine Martin
http://www.resistance-politique.fr/article-en-argentine-la-resistance-populaire-met-fin-aux-projets-de-monsanto-123278926.html