IRAN : PAS D INGERENCE IMPERIALISTE !
Pour les raisons bien évoquées par l’auteur la victoire réelle du président sortant ne semble pas faire de doute. L’hypothèse d’un score cependant majoré par une fraude reste crédible, mais n’autorise pas le reste du monde à donner des leçons au peuple Iranien, seul en charge de son destin.
L’idée même d’une contestation extérieure s’inscrit dans la logique impérialiste qui rend pensable l’ingérence, bien sur ’humanitaire’ pour sauver le peuple contre lui-même, comme on le fit en renversant Sadam Hussein et plongeant le pays entier dans l’effroi, la mort et la destruction de son tissu social de façon hélas durable...
Devant cette situation il était prévisible que les partisans et le leader de l’opposition s’insurgent, par colère autant que par déception d’une défaite que beaucoup doivent connaître, au fond, comme réelle, démontrant que le peuple pourtant opprimé par un régime théocratique n’est pas encore prêt à briser toutes ses chaînes.
Une posture internationaliste ne peut qu’associer deux réponses :
– Dénoncer une répression violente qui prépare sans doute une période obscurantiste rendant l’opposition politique plus difficile encore. Dénoncer l’illusion des libertés démocratiques, l’oppression de certaines minorités, celle des femmes, celle du peuple privé des plus élémentaires droits sociaux. Le faire n’est pas cautionner par avance le leader battu ; le faire serait "˜ juste’ dans tous les cas de figure lorsque le pouvoir réprime son propre peuple.
– L’autre réponse est de ne pas tomber dans le piège du refus de solidarité avec le peuple au prétexte que ce mouvement d’opposition aurait la sympathie d’une partie de l’occident et particulièrement des pires ennemis de Mahmoud Ahmadinejad, qu’ils soient à Tel Aviv ou ailleurs en Occident. Ce n’est pas soutenir l’impérialisme que de réaffirmer le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et se choisir leurs dirigeants, en même temps que de confirmer le droit à la critique de ceux-ci et la défense des opposants, surtout lorsque ceux-ci se présentent sinon comme révolutionnaires au moins désireux de ne pas enflammer "˜le choc des civilisations’ qui possède ses prédicateurs à Téhéran autant qu’a Tel Aviv ou Washington…
Les événements actuels dont nous observerons le débouché montrent la fragilité réelle de la caste politico-religieuse au pouvoir et cela est de nature à conforter la possibilité de l’émergence d’un authentique courant progressiste. Nous souhaiterons qu’il ne soit pas inféodé aux forces de l’Empire et soutiendrons ceux qui pensent d’abord au peuple avant que de penser à leur respectabilité internationale qui signerait sans doute leur allégeance au camp le plus inquiétant pour ce qui est de son projet de refonte du Moyen Orient tout entier.
Cette bataille là s’étend des rives de la Méditerranée aux confins du continent Indien et aux limites du Caucase. Des dizaines de peuples sont pris en otages pour des enjeux géostratégiques sans relation aucune avec le bien être de chacun et les chances d’émancipation véritable des femmes et des hommes qui les composent.
Nous serons toujours si nous sommes lucides et cohérents au côté de ceux-là ; jamais au côté de ceux qui ont déjà organisé les manoeuvres pour bombarder la Perse qui, comme la Mésopotamie, représente un haut lieu de nos civilisations partagées et menacées par des barbares qui ne connaissent rien de ce qui peut animer l’esprit de ceux-là et ne peut se résumer à la caricature trop facile des excès de certains.
Une révolte en Iran avait été réprimée déjà en 1999 ; gardons nous de cautionner les faux amis du peuple Iranien qui voudraient l’aider à se débarrasser de leur président comme d’autres ont fait croire au peuple Irakien qu’ils allaient leur apporter la "˜démocratie’... La solidarité est nécessaire à l’égard de toux ceux qui manifestent au risque le plus grand leur opposition au régime théocratique en place ; mais nous devrons refuser cautionner les barbares prêts à bombarder demain l’Iran qui se réjouissent déjà de ce prétexte survenu dans les urnes, peut-être au fond sans même une fraude massive, qui n’aurait pas suffit non plus à justifier le pire.
Jacques Richaud 16 juin 2009