Certains commentateurs, formatés au libéralisme ambiant, ont immédiatement qualifié la signature de l’accord du 11 Janvier 2013 d’historique.
Du point de vue du MEDEF, des grands groupes et de l’ensemble du patronat Français, il revêt en effet un caractère historique puisqu’il donne satisfaction à des décennies de combats patronaux pour faire diminuer le prix du paiement des forces de travail et pour pouvoir exploiter le salariat comme bon lui semble.
Cet accord, ratifié par trois organisations syndicales minoritaires (CFDT, CFTC, CGC) avec le MEDEF et la CGPME, peut conduire, si le gouvernement et ses majorités à l’Assemblée Nationale et au Sénat suivent la philosophie et axes qu’ils engagent, à la déstabilisation généralisée du salariat et à une véritable régression sociale dans le pays.
Notons au passage que l’Union Européenne, le FMI et la BCE, tout comme le Patronat structuré au plan européen, applaudissent cette fin des discussions sur la sécurisation de l’emploi voulue par le Chef de l’Etat Hollande et le Gouvernement Ayrault.
Ils s’en émerveillent d’autant plus que cet accord répond aux exigences du " marché libre et non faussé " qu’avec leur outil, l’Union européenne, ils organisent et structurent sans relâche depuis plusieurs décennies, sur la zone géographique de l’Europe. Partout, ils poussent à la régression généralisée en s’attaquant aux salaires, au droit du travail, à la durée de celui-ci, à la protection sociale et aux services publics.
Après l’offensive conduite notamment en Grèce, au Portugal, en Espagne et en Italie -et sur laquelle nous aurions sans doute pu plus nous interroger- c’est aujourd’hui au tour de la France d’être dans l’oeil du cyclone.
A partir de cette situation, de la réalité de cet accord et du comportement des forces syndicales et politiques qui ont permis sa signature, il est indispensable, si nous voulons avoir la possibilité que le salariat puisse s’y opposer efficacement, de nous interroger sur les raisons qui ont fait que nous en sommes arrivés là .
Et de le faire sans complaisance et avec lucidité à partir de l’expérience : en prenant en compte la réalité de la situation (sociale, économique et idéologique) du salariat ; en examinant le potentiel de conviction de nos revendications essentielles ont eues et en mesurant l’efficacité de notre démarche de rassemblement (qu’il s’agisse du " syndicalisme rassemblé " ou de notre intégration dans la CES).
En fait, le chantier devant lequel nous sommes, peut se résumer à apporter les réponses à deux questions simples.
Une : dans la décennie écoulée -et notamment depuis l’éclatement de la crise- pourquoi et comment le salariat, malgré des luttes d’une dimension inédite depuis des décennies, n’a-t-il pas cessé de reculer sous les coups du capital ?
Deux : quel rôle, du fait de nos revendications, de nos prises de positions et de nos stratégies de rassemblement, avons-nous joué dans cet affrontement et au cours de ces luttes ?
C’est en assumant cette double interrogation et en débattant démocratiquement pour en construire les réponses que le 50ème congrès de la CGT peut affirmer toute son utilité pour le salariat.
La fin du contrat à durée indéterminée des salariés vient de sonner avec ce texte que promotionnent main dans la main le MEDEF et la CFDT.
Cette disparition forcée des contrats de travail à durée indéterminée entraînera, de fait, la généralisation de l’abaissement des salaires et des qualifications et demain la mise en cause des congés payés que les salariés devront se payer pour en bénéficier (et pour combien de temps ?)
Il pourra, si les salariés ne le combattent pas, accélérer la mobilité géographique des salariés en les contraignant à accepter d’être mutés à des centaines voire des milliers de kilomètres de leur domiciles, de leurs familles et racines en fonction des choix que feront les grand donneurs d’ordre qui orchestrent la vie économique dans le pays sans que les politiques ne s’y opposent.
En réduisant les moyens d’expertises pour les salariés et leurs représentants, il mettra fin aux possibilités -déjà été amputées- de recours des salariés en justice pour contester les licenciements face à leurs employeurs et obtenir réparation des préjudices subis
Avec cet accord le patronat pourra demain multiplier les restructurations et jeter des entreprises toutes celles et ceux dont il veut se débarrasser (travailleurs handicapés, malades, âgés, rebelles, femmes, syndicalistes,…)
Cet accord prolonge celui sur la compétitivité, réduit la période des recours pour les salariés à trois ans mais, avec la remise en cause du CDI qui amplifiera la précarité du travail et de la vie des salariés, il ne sera plus possible d’obtenir réparation donc, de fait, l’institution prud’homale pourra sournoisement être éteinte.
La portée de cet accord, en terme de déstabilisation du salariat, conduira très rapidement à la remise en cause de la présence des institutions représentatives des salariés (DP, CE, CHSCT) et des syndicats dans les entreprises puisque il ouvre la voie pour accentuer la mobilité professionnelle et géographique et le renforcement du lien de subordination du patron sur le salarié.
Avec ces dispositions imposées aux salariés du secteur privé et à tous les salariés hors statut de la fonction publique, comment pourrons nous prétendre demain maintenir et consolider l’existant pour celles et ceux qui disposent encore d’un statut et que deviendra l’Inspection du travail ?
La preuve est faite, depuis plus de trente ans, que lorsque les salariés sont plongés dans la précarité, la peur l’emporte sur la solidarité, l’individualisme et le repli sur soi prennent le dessus sur l’engagement collectif.
L’objectif du patronat de voir disparaître la présence des Syndicats sur les lieux du travail, issue de la Loi du 5 Décembre 1968, sera ainsi atteint avec l’aval des signataires de l’Accord sur la Compétitivité !
Le patronat ne s’en cache plus, son objectif est de faire baisser par tous les moyens la masse salariale et donc, là où il en existe encore, de réduire aussi le financement des activités sociales (CE, CAS), de remettre en cause le financement socialisé de la Protection Sociale et de la Formation Professionnelle.
La fin des négociations par branche (des conventions collectives) est annoncée puisque cet accord renvoie aux accords d’entreprises qui s’effectueront dans le cadre contraint fixé par le patronat avec des représentants des salariés qui pourront demain, ne nous faisons pas d’illusion, être extérieurs à l’entreprise et qui discuteront avec le révolver des patrons sur la tempe !
Rappelons-nous qu’en 1989 la mise en place des conseillers assistants des salariés n’avait donné lieu à aucune opposition du patronat, elle était déjà applaudit par les organisations syndicales réformistes et cet engrenage s’était de nouveau enclenché sous l’impulsion de la Ministre du travail Aubry dans le cadre du dispositif 35H !
Cet accord précipite le salariat plus d’un siècle en arrière avec le retour du règne du gré à gré dans un environnement social et économique sans garantie collective, sans possibilité pour les salariés de se retourner contre ce patronat de droit divin !
Le dispositif annoncé comme une avancée par les signataires pour étendre les couvertures prévoyance participera à la liquidation des mutuelles, au profit des banques et des assurances en accentuant la casse de la Sécu et comme pour les actuels contrats groupes imposés aux salariés les patrons seront exonérés fiscalement !
Décidément les signataires ont pensé à tout et surtout comment ils allaient pouvoir en finir avec notre protection sociale demain.
La pérennité des contrats de travail sera liée aux objectifs fixés par les dirigeants et actionnaires des entreprises donc des exigences des groupes, de leurs objectifs, de leurs performances financières dans le cadre de l’externalisation de tous ce qu’ils considèrent comme ne faisant pas partie du coeur de métier.
Voilà la réalité de cet accord de la honte présenté comme révolutionnaire par la CFDT.
Malheureusement, trois organisations syndicales de salariés minoritaires dans la représentation ont pris la responsabilité de répondre aux appétits financiers du patronat comme elles l’avaient fait en 1995 contre les régimes particuliers, contre les retraites en 2003 et contre les intérêts des chômeurs dans les discussions sur le régime d’indemnisation du chômage et dans le cadre du plan compétitivité du MEDEF et de la CGPME.
Trois organisations syndicales, qui depuis des années, ont accepté la soumission face aux exigences patronales et ont pris la responsabilité de l’exclusion de toute discussion des organisations syndicales qui refusent d’apporter leur caution aux régressions. Cette logique imposée à conduit les organisations en désaccord à ratifier des textes contraires aux intérêts des salariés pour ne pas être exclues des discussions et à céder à la culture Européiste du diagnostic partagé avec ceux qui combattent les intérêts du salariat !
Grâce à la CFDT, à la CFTC et à la CGC et souvent aussi à FO l’ensemble des organisations syndicales ont été jetées en pâture à la vindicte populaire.
Ceux qui ont fait le choix d’abandonner le terrain de la défense des intérêts matériels et moraux des salariés et des combats progressistes ont été présentés par les médias et la plupart des politiques comme des modernes et ceux qui luttent contre la régression sociale pour de nouvelles conquêtes sociales comme des passéistes, des archaïques dépassés !
Les militants de la CGT, faisant partie de la seconde colonne ont été décriés par les médias et l’objet d’un déchaînement de la part du patronat et de la plupart des forces politiques au pouvoir.
Les dirigeants de ces organisations syndicales signataires, qui pour certains se revendiquent du courant réformiste du syndicalisme, ont en fait pris la responsabilité d’une collaboration avec la classe capitaliste qui risque de coûter très cher à l’ensemble des salariés en France et qui sera montrée demain en exemple pour dépecer les droits des salariés des autres pays occidentaux
Au plan du contenu régressif pour les salariés, des conditions dans lesquelles il a pu être obtenu, cet accord est historique puisqu’il détruit des décennies de luttes des salariés, de batailles syndicales et politiques pour faire évoluer le droit du travail sur la durée, l’organisation du travail, les conditions d’exécution du contrat de travail et du statut du travail salarié.
Il devrait dans la CGT nous amener à réfléchir à notre stratégie et aux conditions que nous n’avons pas forcément créer de meilleure façon pour construire un rapport de force permettant de placer le patronat et le gouvernement sous pression.
Pendant que des écuries s’activaient dans la CGT pour la succession du secrétaire général, le camp opposé aux intérêts du salariat lui s’organisait pour défendre les intérêts de sa classe.
L’histoire du Syndicalisme nous révèle des différences d’approches et de conception entre les (trop) nombreuses organisations syndicales françaises qui toutes ont une histoire avec des particularités et des choix de conceptions syndicales différentes. Mais elle nous enseigne aussi que notre CGT a toujours été tiraillée (pour faire court) entre ceux qui privilégient le dialogue social et ceux qui considèrent que seul le rapport de force permet le progrès social.
La signature par trois organisations syndicales de salariés avec le MEDEF et la CGPME qui ouvre la voie au déclenchement de la destruction du social dans les entreprises et les professions nous contraint dans la CGT à analyser comment ils ont pu y parvenir et quel doit être a présent notre stratégie de rassemblement du salariat et le contenu de nos propositions et revendications.
Ce nouveau virage des trois signataires porte atteinte à ce que représente le Syndicalisme dans l’opinion publique et la conscience collective du salariat puisque ces mêmes organisations ont décidé de sortir de la mission de défense des intérêts matériels et moraux du salariat au profit des intérêts capitalistes. Le gouvernement, après avoir promotionné dans les sphères ministérielles des représentants du patronat, ce qui devrait déjà interroger dans la CGT (pour des gens qui se revendiquent de gauche), vient de remercier les dirigeants de la CFDT pour bons et loyaux services au camp d’en face en les nommant dans de hautes fonctions avec des salaires en conséquence. Ce fait n’est pas nouveau puisque déjà le gouvernement durant le premier mandat de F Mitterrand avait inauguré la méthode au début des années 80 après la casse de la sidérurgie ; mais aujourd’hui, il se confirme au plan National avec toutes les promotions que l’on a pu observer au plan local dans les entreprises publiques et privées et dans les collectivités.
La CGT, à ce stade, ne peut pas faire comme s’il ne s’était rien passé dans le Syndicalisme et ne pas analyser toutes ces évolutions ; comme elle ne peut pas faire l’impasse sur le pourquoi en 2009 et 2010 avec des manifestations massives qui ont rassemblé successivement près de huit millions de manifestants dans le pays, nous nous sommes arrêtés au milieu du gué avec encore un rôle catastrophique de la CFDT.
A l’issue de cette période la direction de la CGT considérait comme positif ce qui s’était passé alors que le sentiment dominant dans la CGT sur cette période était inverse dans l’organisation…ce qui a conduit ensuite à une modulation du discours confédéral. S’engager dans des discussions avec le patronat et le gouvernement, affaiblis et divisés après le CCN de juin sans donner durant quatre mois toute l’impulsion Nationale à la hauteur des enjeux et de nos ambitions de conquêtes, ne nous place pas aujourd’hui dans la meilleure posture. Pourtant là encore l’expérience des promesses non tenues dans les discussions dans les Ministères que ce soit dans la décennie 80 ou l’épisode de 97 à 2002 devraient nous conduire à privilégier nos efforts pour mobiliser les salariés pour discuter et négocier à l’appui des luttes.
Puisque nous nous battons dans les entreprises pour que tous les accords soient l’objet de la consultation des salariés, nous devons maintenant contester la validité de ce texte sur lequel le gouvernement s’appuiera pour nettoyer la législation du travail de demain et ouvrir le débat à l’occasion de la préparation du 50ème congrès de la CGT sur notre stratégie. Contester cet accord en proposant à FO ( (non signataire…..) soit de le faire avec nous soit parallèlement, cela nous permettrait de revenir à l’offensive dans le débat et de gagner du temps pour construire un nouveau processus de luttes et réviser notre approche du rassemblement des salariés à partir des revendications.
Nous sommes unitaire pourquoi et pourquoi faire ?
Nous avons toujours recherché l’unité d’action à la CGT pour gagner sur les revendications, pour faire progresser le social mais nous avons toujours expliqué que cela supposait de n’être ni aveugles, ni sourds et que cela nécessitait de livrer en toutes circonstances notre opinion, nos propositions et de faire la clarté sur les positions des uns et des autres acteurs.
L’expérience dans la CGT et le salariat des luttes depuis 2003, des pratiques particulièrement de la CFDT, devrait depuis longtemps nous éclairer sur l’efficacité des affichages d’addition de sigles sur des contenus nébuleux et très en retrait des besoins exprimés ! Depuis des décennies nous traînons le syndicalisme réformiste dans les mobilisations interprofessionnelles sur des motivations revendicatives foncièrement différentes aux nôtres. Les militants de la CGT se battent pour mobiliser les salariés en tirant les autres OS poussées par la base mais demeurant opposées à l’action collective.
Faute de mener le travail de clarification nécessaire sur ce que chacun revendique, nous contribuons à créer des illusions vis-à -vis de ceux qui au moindre fléchissement de la combativité se précipitent pour ratifier le cahier des charges du patronat.
Les discussions au plan National qui viennent de se solder par des avancées sans précédent pour le patronat, n’auraient-elles pas justifiées de les placer sous le contrôle des salariés ?
Nous passons, de fait, dans une ère nouvelle du combat de classe et du rassemblement des salariés, qui cette fois, la réalité des faits nous y contraint, met en question la stratégie du " Syndicalisme rassemblé " auxquels certains dans la CGT restent accrochés en refusant de prendre en compte l’expérience et d’apprécier ce qui se passe concrètement dans les entreprises, les départements.
La question, que cela nous satisfasse ou pas, à ce stade de notre action syndicale, nous est posée, de fait, par la réalité des actes des uns et des autres acteurs sociaux et non partenaires comme là encore certains se complaisent à nous en faire la caricature
Face à une telle offensive contre les intérêts du salariat qui va se poursuivre, la CFDT, le MEDEF et la CGPME dans notre Région ne s’en sont pas cachés sur FR3 Centre, samedi 19 janvier, au cours de l’émission « La Voix est Libre », demain ce sera la remise à plat du régime d’indemnisation du chômage, de l’édifice et du financement de la Formation Professionnelle des salariés et de la Sécu.
Puisqu’il restera possible, si nous ne contestons pas cet accord, de ratifier demain un texte présenté par le Patronat, avec la bénédiction, il faut être franc et lucide, du Gouvernement, sans consultation des salariés (accord ou pas sur la Représentativité), nous pouvons nous attendre au pire. La démocratie en prend un sacré coup. Cet accord ne grandit pas l’image du Syndicalisme, il contribue à l’éloigner davantage du Salariat.
Si nous ne dénonçons pas à la fois, le rôle du Patronat et des " Lucky Luke " du stylo à bille de la CFDT, de la CFTC et de la CGC, si nous n’éclairons pas la réflexion des salariés sur le double langage du Gouvernement, être syndiqué(e) demain relèvera dans ce pays d’un acte héroïque.
La situation nouvelle, dans laquelle nous sommes, nous contraint à être plus clairs dans nos explications sur la politique gouvernementale qui s’oppose à l’augmentation des salaires et des cotisations sociales, qui ne cesse de répondre aux exigences du MEDEF et des groupes par le déversement des fonds publics aux pôles de compétitivité, par exemple, qui poursuit la politique d’exonérations de cotisations sociales et de la casse de la Fonction Publique.
Comment interprétons-nous le fait que, dès la rentrée et en nombre très important, les ministres de ce gouvernement, qui se revendiquent de gauche, accourent à l’université d’été du MEDEF à Villepinte ?
Expliquer qu’elles peuvent être les conséquences dans la vie quotidienne des salariés d’un tel accord est une nécessité qui ne peut être dissociée de l’urgence d’une clarification sur le rôle occupé par la CFDT et la CFTC qui, au fond, portent ensemble la même logique d’alliance entre le capital et le travail pour substituer l’assistance publique et la charité à la solidarité salariale. C’est particulièrement sur ce terrain que nous sommes confrontés aux offensives menées contre le salaire socialisé et le financement des retraites et de la Sécurité Sociale et que nous perdons les batailles faute d’explications sur le fond depuis les premiers coups portés par Rocard avec la création de la CSG. Mener de manière offensive la bataille d’idées en proposant d’agir aux salariés et en ouvrant des perspectives revendicatives qui donnent envie de lutter, qui réamorcent l’espoir dans la CGT comme dans le salariat, est maintenant une obligation pour toute la CGT avec la préparation du 50ème congrès confédéral.
Une obligation qui implique une réécriture totale du document d’orientation totalement en décalage avec la réalité. Ce travail ne pourra pas faire l’impasse sur l’appréciation des rapports de forces en Europe au plan syndical et politique sur le bilan de notre adhésion à la CES sur la base d’une expérience de près de quinze ans et sur la nature de l’UE qui n’a jamais eu vocation à être ou devenir sociale.
Quand le patronat, les tenants du libéralisme qu’ils soient de droite comme de gauche nous assènent à longueur de journée qu’il faudrait encore et toujours plus d’Europe et d’intégration pour que la vie soit plus belle, la CGT ne peut pas se couler dans ce moule de l’idéologie capitaliste. D’abord parce que ce serait renier et renoncer à toute notre histoire et, surtout, parce que l’expérience nous montre que l’UE enferme les peuples en confisquant leur souveraineté pour leur imposer dans tous les domaines de leurs vies les exigences des grandes multinationales.
Transformer le social par le rapport de force suppose aussi de poser la perspective du changement de société et d’attaquer par le revendicatif le coeur du système économique qui étouffe la société et s’oppose à l’émancipation du salariat.
Transformer le social et la société implique en même temps d’agir pour la paix, le désarmement, la coopération entre les peuples dont la condition première réside dans la souveraineté de chacun d’entre eux.
Partant du fait que nous disposons déjà d’un début d’expériences réussies, d’un début de sortie de la domination du capital en France avec les Nationalisations, le Statut des fonctionnaires, la Sécurité Sociale, les retraites…, n’avons-nous pas avec le congrès qui arrive, l’opportunité liée à la situation et aux enjeux pour donner un contenu plus clair et offensif à la revendication qui porte sur la Sécurité sociale professionnelle et le nouveau statut du travail salarié avancés par la CGT qui pourrait libérer le salariat du lien de subordination au patronat et en finir avec la mise en concurrence des salariés, le chantage à l’emploi, le travail précaire et le chômage ?
Cela supposerait de dire clairement que nous proposons de financer le salaire à partir de la qualification dès 18 ans en activité professionnelle ou en formation par la cotisation sociale gérée par les salariés dans une nouvelle caisse de sécurité sociale professionnelle. Une caisse pour payer les salaires pour sortir les salariés du lien de subordination aux patrons, renverser cet ordre établit qui contraint les salariés à des démarches et procédures invraisemblables pour défendre ses droits et son statut de salarié.
A s’interdire dans le contenu des revendications sur la Sécurité sociale professionnelle par exemple de contester la domination du capital nous laissons le champ libre aux réformateurs pour imposer dans toutes les discussions leur cadre déterminé par la compétitivité, l’employabilité, les compétences, les rémunérations ! Porter d’autres ambitions pour les salariés exige de revenir sur nos fondamentaux dans la CGT et de montrer ouvertement que nous faisons le choix du progrès social, du changement de société pour et avec celles et ceux qui créent les richesses en contestant la propriété privée à but lucratif au nom de laquelle le capital nous impose toutes les régressions et en nous battant pour le respect de la souveraineté du peuple.
La faiblesse du document d’orientation sur l’analyse des luttes des dernières années, sur la situation du salariat, sur la nécessaire centralité de la bataille pour l’augmentation des salaires tout comme celle pour l’annulation de la dette, sur une véritable consolidation du financement salarial de la protection sociale, sur la conquête de nouveaux droits et moyens pour les salariés et le syndicalisme, sur l’examen de la validité de notre stratégie de rassemblement (prôner aujourd’hui " toujours le syndicalisme rassemblé " et " plus d’Europe " constitue un déni d’expérience invraisemblable)… tout cela, et nombre d’autres questions, nous créent obligation à revoir complètement l’édifice de ce document et surtout à faire effort pour écouter et entendre tout ce qui s’exprime dans la CGT.
Blois, le 28 janvier 2013
Contribution au débat du 50èmeCongrès de la CGT de Philippe CORDAT
Secrétaire du Comité Régional de la CGT Centre