Billet du 30 août 2012, Front de Lutte des Syndicalistes.
Contre la paupérisation de masse !
Il s’avère qu’en mettant en lumière la réalité de l’ampleur de la paupérisation des travailleurs et notamment de la Classe ouvrière, nous remplissons notre tâche d’analyses et d’informations concrètes sur une situation concrète.
Depuis des années, on entend les railleries des exploiteurs, les récriminations des politiciens de la réaction, mais aujourd’hui on entend les magiciens qui tentent de répandre de nouvelles illusions en constatant l’ampleur réelle des dégâts en matière économique et sociale. Aujourd’hui, le gouvernement ne peut pas contester ce que furent les lois de paupérisation de la société et des travailleurs, votées par l’assemblée nationale entre 2007 et 2012, jugée comme la plus réactionnaire depuis 1940.
Mais nous pensons aussi aux dernières propositions gouvernementales, sur l’emploi des jeunes mises en avant par le ministre du travail, sur la faiblesse de l’augmentation du smic décidée par le 1er ministre, sur le plus que timoré retour sur la loi sur les retraites, ou sur la ratification du traité européen de stabilité resté en l’état, et qui sur insistance du Président, sera proposé aux votes des assemblées en octobre prochain…
Mais il est impossible, de nous empêcher de penser, étant dans ce bain de la paupérisation de masse, qu’en fait, depuis ce mois de mai 2012, ce n’est plus l’alternance que nous avions connue depuis 30 ans avec ses périodes de progrès social, mais la continuité des 10 années de disette sociale et économique que nous venons de subir après le passage à la monnaie unique européenne et à l’ultralibéralisme incarné par l’ancien gouvernement et sa majorité…
Il est certain, qu’en cette période critique et instable, tout est mis en action pour freiner la lutte des classes qui se met en place dans un Front unique qui rassemble les énergies démocratiques qui entendent combattre cette paupérisation de masse. Aussi aujourd’hui, certains voudraient nous faire croire que les travailleurs croient plus au vertu du capitalisme qu’au socialisme réel, en mettant sur le devant de la scène les exemples suédois ou allemands… comme si la Suède et l’Allemagne étaient un paradis pour les ouvriers et autres travailleurs, alors que même dans les paradis « fiscaux », les travailleurs sont exploités et paupérisés.
La paupérisation frappe durement de larges masses, le niveau de vie déjà précaire baisse d’année en année, et la consommation moyenne par habitant est en chute, une moyenne qui prend en compte la consommation des classes les plus aisées qui est en augmentation exponentielle et bien supérieure aux classes laborieuses.
Aujourd’hui, des média bourgeois, les libéraux adeptes de l’économie de marché, et les experts en tout genre inféodés au système, en sont à accuser les travailleurs d’être les responsables de la montée de la paupérisation et de la misère. Ils mettent en avant que les travailleurs ne dépenseraient pas assez d’argent pour contribuer à une relance économique mais que par contre, ils dépenseraient, donc couteraient trop socialement avec tout ce qui est pris en charge par les services publics gérés par les administrations de l’Etat.
D’une part, ils oublient le résultat néfaste du blocage des salaires opérés depuis des années par les ultralibéraux pour obéir aux lois du marché capitaliste, et de l’autre la mise en place de la flexibilité et l’intensité au travail qui ont été multipliées pour répondre à l’appétit des actionnaires et autres investisseurs financiers.
Les plans de licenciements de masse et individuel se multiplient, sous couvert de restructuration, de réduction des coûts et des frais généraux, ou sous le prétexte de baisse des ventes, on constate une créant une flambée du taux de travailleurs mis au chômage, l’Etat et son gouvernement semblent ignorer qu’ils auraient la possibilité souveraine de procéder à des nationalisations sans indemnisation des patrons1 pour éviter une paupérisation encore plus importante.
1- [Nous disons sans indemnisation, car les nationalisations opérées en 1981 par le 1er gouvernement de gauche socialiste de la 5ème République ont joué le rôle d’assainissement des secteurs de productions jugés non rentables par les capitalistes mais qui leur ont rapportés des milliards en indemnisations.]
Prenons un exemple simple mais transversal à toute la population, celui du transport.
Niant, les effets pervers du manque de pouvoir d’achat, le lobby des constructeurs a réussi à faire imposer une loi qui oblige le propriétaire à un « contrôle technique » des véhicules automobiles et commerciaux. Cette loi a été mise en place au nom de la sécurité des personnes, ce qui peut paraître de bon sens.
En fait, il s’agissait pour les constructeurs, d’imposer aux travailleurs l’achat de véhicules. Le capital ayant bien compris qu’une automobile est indispensable en France car, outre les grandes agglomérations, le réseau public de transport urbain ou régional n’a plus cette capacité de transporter des travailleurs sur des lieux de travail de plus en plus décentralisés des lieux d’habitation. De plus avec les nouvelles flexibilités du travail qui imposent des heures décalées, la situation s’empire.
Ainsi, nous connaissons des zones industrielles où aucun transport public n’est présent, et encore moins quand il s’agit des campagnes. Aujourd’hui, ne pas avoir un véhicule est un handicap pour trouver un travail, ce qui nuit donc aux conditions d’existence des classes sociales les plus défavorisées qui ont à choisir entre le toit et la nourriture, et l’acquisition d’un moyen de transport autonome pour se rendre au travail.
La paupérisation de masse et le chômage de masse va donc avoir un impact concret sur les ventes d’automobiles.
Les lois de régression sociale
Les lois demandées par le capital au nom de la compétitivité liée à la libre concurrence et à la mondialisation des marchés et des échanges : c’est-à -dire la baisse des salaires, la suppression du contrat à durée indéterminée, la flexibilité et l’employabilité des travailleurs en rapport avec le niveau des commandes… vont créer un véritable problème de fond.
En effet, une précarité accrue n’engendrera pas une montée de la consommation mais elle va favoriser le travail informel et le système D, mais aussi de nouvelles formes de délinquance et de violence.
La paupérisation modifie aussi les habitudes alimentaires, comme ce fût toujours le cas en période de crise (la margarine à la place du beurre, le lait devenant trop cher, donc moins de production laitière, d’où moins d’éleveurs et en conséquence, moins d’usines de transformation…).
Mais qui dit modifications alimentaires, dit des travailleurs avec moins de force, donc moins de rendement à la tâche et plus d’accidents du travail, donc un cycle de vie qui s’amenuise et qui aboutit à termes à vivre moins longtemps… d’où une période de retraite plus courte donc moins couteuse aux caisses… la boucle de la paupérisation se met en place et ceinture tous les secteurs.
Aussi, mais c’est une pure spéculation, le service militaire permettait de mesurer l’état de santé d’une population de travailleurs pour les 40 années qui suivaient. Aujourd’hui, quelle est la base de mesure, aucune… !
Or, à entendre nos hommes politiques adeptes de la politique politicienne qui favorise le clientélisme et les privilèges, l’économie de marché capitaliste est la seule solution.
En réalité, l’économie capitaliste conduit à la paupérisation de masse, c’est-à -dire qu’elle contribue à son propre déclin, qui ne peut se résoudre que par la destruction, c’est-à -dire par la guerre avec des armées composées de militaires professionnels, le reste étant de la chair à canons sans formation.
La misère ordinaire
La paupérisation des travailleurs est un fait, il faut travailler plus longtemps aujourd’hui pour pouvoir s’acheter un bien de consommation ordinaire, car les prix ont augmenté plus que les salaires.
Si cela était faux, le gouvernement n’augmenterait pas la prime de rentrée scolaire de 25%. Il est clair que le gouvernement a voulu cacher la véritable situation des familles paupérisées pour diminuer la visibilité d’une misère ordinaire qui s’installe et qui touche en priorité les jeunes dont l’avenir est déjà fortement compromis.
D’autre part, il a été constaté qu’à partir du 18 ou 20 du mois, la consommation diminue, le caddy moyen baisse de 20 à 30 % pendant les dix derniers jours pour revenir à la normale en début de mois, et le temps de cycle diminue d’année en année puisqu’aujourd’hui nous arrivons à une baisse du caddy moyen le 15 du mois. Le capital a compris qu’il y avait un marché de la précarité à prendre, en ouvrant une multitude de commerces discount et en proposant des cartes de paiements différés des achats (avec un taux d’usure souvent à 2 chiffres)… en utilisant des associations de recyclage.
Mais, une fois de plus, quand on lit ou écoute nos hommes politiques adeptes de la politique politicienne ou autres experts au service de l’économie de marché capitaliste, « les travailleurs les plus paupérisés seraient en fait incapables de gérer leur budget : ils s’habillent en marque de luxe, dépensent en alcool ou/et en tabac, s’achètent des écrans plats et des téléphones portables… bref ils jouent aux riches »
Il faudrait donc éduquer les travailleurs à une meilleure hygiène de vie et à gérer au mieux leur porte-monnaie… c’est donc peut-être une affaire de psychologie et de pédagogie ! Mais est-ce que les millions de familles, privées de ressources du travail, vivant des minima sociaux et des aides alimentaires, qui se soignent avec la CMU, installées dans des logements précaires, et obligées d’abriter ses enfants jeunes adultes… peuvent-elles trouver une explication rationnelle à leur paupérisation et à leur misère, dans la psychologie et le manque d’une pratique de gestion du néant ?
Aussi, rappelons cette phrase d’Engels il y a 150 ans, dans son livre « la critique du programme de Gotha et d’Erfurt » qui disait « le dépérissement physique d’une population est compris dans la misère sociale », c’est-à -dire une incertitude d’une existence normale qui serait pour le capitalisme, le fait, non pas d’un système, mais d’une fatalité liée à une condition de travailleurs à laquelle il faut s’habituer car attachée à la condition même des êtres humains…
Or, ceci est une nouvelle négation des réalités de la lutte des classes, car la paupérisation de masse est intimement liée à la capacité qu’ont les travailleurs pour s’organiser par la résistance collective de classe, et en créant leur propre système basé sur l’intérêt collectif qui dépasse l’individualisme fomenté par le capitalisme.
Mais outre les travailleurs de la classe ouvrière et les employés, une paupérisation des classes moyennes est en marche. Ces classes, placées entre les ouvriers et les capitalistes, pourtant vouées au culte de l’argent et de la soumission par le travail, subissent de plein fouet les effets de la crise. Les commerçants et les détaillants, subissent la désertification des centres villes avec la concentration des enseignes multinationales dans des zones à vocation commerciale qui leurs sont réservées. Quant aux agriculteurs, la concentration dans de grandes propriétés à caractère semi-industriel, fait que chaque année des milliers d’entre eux font faillite.
Le capitalisme n’ayant aucune pitié ni aucun sens de la morale, ceux qui pensaient être des « compagnons de classe » de la bourgeoisie, supportent mal ce déclassement et beaucoup deviennent la base politique de l’extrême-droite. Il en est de même pour toute une partie d’éléments sociaux parasitaires composants les effectifs militaires, la bureaucratie technocratique, les cadres de l’industrie, du négoce divers et des banques…
En fait, si la classe ouvrière et les travailleurs connaissent de telles difficultés grandissantes, c’est aussi parce qu’ils supportent tout ce monde parasitaire sur leurs dos, la pyramide à l’envers des improductifs étant de plus en plus lourde.
Mais la classe capitaliste sait utiliser pour renforcer son pouvoir et sa sécurité, et ces classes moyennes parasites sont liées au mode d’existence de la grande bourgeoisie. C’est-à -dire que sans bourgeoisie elles n’auraient pas le même train de vie, ainsi elles ont donc tout intérêt à véhiculer les idées réactionnaires et opportunistes pour défendre leur existence sociale, en allant encore plus loin pour influencer dans la classe ouvrière et ses organisations.
Aussi, on peut comprendre leur crainte et leur opposition farouche quand il s’agit de défendre le bilan de la dictature du prolétariat qui est la preuve la plus brillante d’essor économique pour faire face aux réalités concrètes subies par la crise du capitalisme. Le problème est qu’en étant touché par le capitalisme, ces classes moyennes liées à la bourgeoisie, tentent de se réfugier dans ce qu’elles croient être une troisième voie possible, mais qui en fait mène au fascisme.
C’est tout le travail d’explications à mettre en place pour rallier une partie de ces classes moyennes au combat des travailleurs, ce qui n’est pas facile vue la révision de l’histoire par les politologues experts ralliés à la bourgeoisie… pourtant le capitalisme les condamne et les exclue après en avoir abusé !
La paupérisation ne sera éliminée qu’en éliminant l’exploitation capitaliste.
Il est certain que pour la classe ouvrière et les travailleurs exploités, la voie de la lutte de classe est celle de l’espérance de voir les conditions s’améliorer. La bourgeoisie quant à elle, redoutant les effets de la luttes des classes a tout intérêt à distiller le sentiment d’impuissance et à calomnier les expériences du socialisme réel qui ont contribués à changer le monde en moins de 50 ans.
Toutefois, pour obtenir des salaires qui correspondent à la valeur de leur force de travail, pour réduire la journée de temps de travail, pour améliorer les conditions de travail, les travailleurs ont toujours livré un combat acharné en créant des organisations en capacité de porter leurs revendications économiques. Tout ceci, même s’il existe des organisations qui démoralisent plutôt que lutter ou qui ne mènent pas le combat en se fourvoyant dans la collaboration de classes et le réformisme qui nuit au progrès social.
Mais aujourd’hui, il est quand même force de constater que le syndicalisme tel qu’il est devenu préfère « l’action efficace », que le nouveau gouvernement entend mettre en place pour lutter contre la paupérisation, jugeant certaines méthodes de luttes dépassées et la lutte des classes obsolètes… on en est presque à l’Union Sacrée ! Mais, l’« action efficace » sera-t-elle celle employée pendant des années, ce qui n’a pas empêchée l’aggravation de la dégradation des conditions de vies des travailleurs malgré des promesses pour réduire la paupérisation liée au système capitaliste ?
Ainsi, il n’existe pas de pire illusion que ce faux réalisme réformiste. Mais s’il est certain que les combats en faveur des intérêts économiques des travailleurs sont indispensables dans un système capitaliste, il est tout autant certain que l’on ne peut éliminer l’exploitation et la paupérisation de masse qu’en éliminant le capitalisme. On ne peut donner cette illusion que le dé-paupérisation se construit petit à petit avec des recettes indolores à l’intérieur même du capitalisme, car historiquement, la tâche des travailleurs et de leur avant-garde issue de la Classe ouvrière est d’être le fossoyeur de ce régime bourgeois qui est prêt au pire pour défendre ses propres intérêts de classe.
En effet, rappelons cette phrase de la préface de « la situation de la Classe Ouvrière en Angleterre » : « la situation de la classe ouvrière est le fond et le point de départ réel de tous les mouvements sociaux ».
La situation de la Classe ouvrière et des travailleurs dans la société capitaliste l’oblige à toujours lutter pied à pied contre l’aggravation de sa condition due à l’exploitation capitaliste. Ainsi notre classe sociale doit oeuvrer à l’unité dans ses propres rangs, ainsi qu’à l’unité avec une partie des classes moyennes et de la paysannerie appauvries, afin de réaliser un changement politique du pays et un progrès démocratique pour améliorer les conditions d’existence d’une grande majorité du peuple. C’est pourquoi, dès maintenant nous devons repousser et dénoncer toutes les théories et les actes destinés à paralyser le déploiement des forces et à voiler la réalité de l’exploitation capitaliste de l’homme par l’homme, en sachant toujours qu’une barricade n’a que deux côtés et jamais trois.