En médecine libérale comme à l’hôpital, la vogue managériale est à la mise
en place de primes à la performance : plus on satisfait à des critères
standards dits de « qualité », plus on est financièrement récompensé. Ce
nouveau mode de gouvernance par le mérite et la politique du chiffre a
d’ailleurs gagné tous les domaines de la société : la compétition remplace la
coopération, au prix d’une souffrance au travail croissante.
Pour les médecins libéraux, cette prime à la performance variable (jusqu’à
9000 € par an) instaurée par la dernière convention médicale, par ses
effets pervers, risque d’exclure les « mauvais malades » trop indociles et trop
coûteux. Basée sur des indicateurs contestables, inefficace en termes de
qualité réelle, consommant un temps précieux, elle déplace en effet par
conflit d’intérêt l’activité médicale du soin vers la gestion financière. La
course à la performance c’est toujours plus de technologie et d’informatique,
et toujours moins de disponibilité pour les patients !
Pour les praticiens hospitaliers, la loi HPST de juillet 2009 a inscrit
dans le marbre une politique d’intéressement définie par le directeur, tandis
que les nouveaux cliniciens hospitaliers voient leur salaire contractuel
supérieur varier en fonction d’objectifs quantitatifs et non thérapeutiques.
L’accord cadre relatif à l’exercice médical à l’hôpital étend ce
dispositif d’intéressement par la performance individuelle et collective à toutes
les équipes soignantes, pour les « valoriser » à coups d’objectifs et de
résultats. Et hormis la grève et l’action syndicale, plus rien n’empêche
désormais un directeur zélé d’accorder une prime au mérite à des agents triés sur
le volet. Voici le règne sans partage de l’arbitraire bureaucratique...
L’intéressement par le profit et la concurrence est un mode de gestion
faussement rationnel, inégalitaire et dangereux. Il asservit et sélectionne
les usagers et les professionnels par l’appât du gain pour leur faire oublier
toute réflexion sur le sens des soins et les vrais enjeux de santé
publique, et les dresser les uns contre les autres... L’indépendance et l’éthique
de la médecine sont au coeur des pratiques de soins, au service de la
population. Au nom de quoi la médecine favoriserait-elle désormais l’égoïsme sur
la solidarité, la cupidité sur le désintéressement, le productivisme sur le
bien commun ? La prime à la performance est clairement contraire à la
déontologie : « Un médecin salarié ne peut, en aucun cas, accepter une
rémunération fondée sur des normes de productivité » (article 97). Va-t-elle
conduire à une contractualisation individuelle qui signerait la fin du système
solidaire d’assurance maladie : « Le médecin ne peut aliéner son indépendance
sous quelque forme que ce soit » (article 5) ?
Non, le médecin du 21ème siècle ne sera pas un chasseur de primes !
Les organisations syndicales demandent l’abandon de toutes les primes à la performance :
Association des médecins urgentistes de France
Sud santé sociaux
Syndicat des médecins anésthésistes réanimateurs non universitaires
Syndicat de la médecine générale
Syndicat national des psychiatres privés
Syndicat des praticiens des hôpitaux publics
Syndicat des psychiatres d’exercice public
Syndicat des psychiatres des hôpitaux
Union syndicale de la psychiatrie
Vous trouverez le communiqué complet avec tous les logos ci-joint et
téléchargeable à l’adresse :
http://www.uspsy.fr/Communique-intersyndical-Prime-a.html