RSS SyndicationTwitterFacebookFeedBurnerNetVibes
Rechercher

CELAC : Rendez-vous à La Havane

Ce n’est pas un miracle, mais presque. Contre toute attente, la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC) se consolide comme institution de "Notre Amérique" et tient son deuxième Sommet des Présidents à La Havane.

Nous parlons de « miracle » car qui aurait pu imaginer, il y a seulement cinq ans, que le rêve bolivarien d’Hugo Chavez, rêve fondé sur un diagnostic impeccable de la situation géopolitique mondiale et qui cherchait à construire un organisme régional sans la présence des USA et du Canada, pourrait donner des fruits ? Pour ce faire, Chavez et ceux qui l’accompagnaient dans cette entreprise patriotique, ont dû surmonter toutes sortes d’obstacles : la résignation de certains gouvernements, la faiblesse des uns, le scepticisme des autres et l’opposition systématique de Washington, fait tout sauf mineur dans la politique de nos pays. Eppur si muove, dirait Galilée en contemplant la réalisation du projet bolivarien qui rassemble, pour la première fois dans l’histoire, toutes les nations d’Amérique latine et des Caraïbes à la seule exception de Porto Rico, pour le moment. Sans aucun doute, le renforcement de la CELAC et de l’UNASUR (au niveau de l’Amérique du Sud) sont de très bonnes nouvelles pour l’émancipation de la Patria Grande.

La Maison Blanche avait d’abord tenté d’empêcher le lancement de la CELAC qui eut lieu à Caracas en décembre 2011, en présence de son infatigable promoteur et mentor déjà attaqué par le cancer qui devait l’emporter. Ayant échoué, l’empire a mobilisé ses alliés régionaux pour faire avorter ou du moins reporter l’initiative dans un futur indéfini. Sans résultat non plus. La stratégie suivante a été d’utiliser certains de ses pions dans la région comme chevaux de Troie pour miner le projet de l’intérieur. Sans grandes avancées mais en arrivant malgré tout à ce que le premier gouvernement qui ait obtenu la présidence tournante de la CELAC en 2012, le Chili de Sebastián Piñera, déclare par la bouche d’ Alfredo Moreno, son ministre des Affaires étrangères : "la CELAC sera un forum et pas une organisation, elle n’aura pas de siège, ni de secrétariat, ni de bureaucratie ou autre". Un forum ! C’est à dire un espace pour d’aimables et insignifiantes conversations entre gouvernants, diplomates et experts sans le moindre questionnement sur la domination impérialiste en Amérique latine et dans les Caraïbes. Et la Maison Blanche a également réussi, grâce à l’activisme militant de ses principaux amis de l’Alliance du Pacifique (le Mexique, la Colombie et le Chili), à faire en sorte que toutes les décisions de la CELAC soient prises à l’unanimité. Il semblerait bien que la "règle de la majorité", si chère à la tradition politique US, ne fonctionne que quand ça l’intéresse. Et quand ce n’est pas le cas, cela confère de fait un droit de veto à chacun des trente-trois membres de l’organisation. Mais c’est une arme à double tranchant : Le Panama ou le Honduras pourront s’opposer à une résolution appelant à mettre fin au statut colonial de Porto-Rico ; mais la Bolivie, l’Equateur et le Venezuela pourront faire la même chose s’il est proposé d’en appeler à la collaboration du Commandement Sud (de l’armée US) pour lutter contre le trafic de drogue.

La seconde présidence de la CELAC, en 2013, est allée à Cuba et le président Raúl Castro Ruz a pris d’importantes mesures pour contrecarrer les machinations de la ministre des Affaires étrangères du Chili : on a avancé dans l’institutionnalisation de la CELAC et l’embryon d’une organisation a été créé pour ce sommet, ce qui a permis de produire 26 documents, chose qu’aucun forum ne fait. Certaines propositions, comme celle de déclarer « Zone de paix » l’Amérique latine et les Caraïbes, feront l’objet d’un dialogue de sourds. Car il ne s’agit pas seulement d’éviter la présence d’armes nucléaires dans la région - comment savoir s’il n’y en a pas déjà dans la base de Mount Pleasant, dans nos îles Malouines ? - mais aussi d’utiliser la force pour résoudre les conflits internes. Cela fait subrepticement allusion à la tradition interventionniste de Washington en Amérique latine et à la présence de ses 77 bases militaires dans la région, dont le but est exactement cela : intervenir avec sa force militaire dans la politique intérieure des pays de la région, lorsque les conditions l’y invitent, pour compléter l’intervention ouverte que Washington réalise dans chacun d’eux. Il suffit de se souvenir, comme bon exemple didactique, du rôle crucial de « l’ambassade » pour déterminer le vainqueur de la récente élection présidentielle au Honduras. Ce problème, comme nous le voyons, sera l’un des points d’achoppement et de discorde car il y a des gouvernements, et ils ne sont pas rares, qui ne se contentent pas de tolérer la présence de ces bases militaires US-américaines mais qui comme la Colombie, le Pérou et le Panama, les réclament.

Un autre problème potentiellement perturbateur est l’approbation de la proposition du Venezuela d’intégrer Porto Rico à la CELAC - proposition tout à fait logique compte tenu de l’histoire et du vécu de ce pays, de sa culture, sa langue et ses traditions - mais susceptible de susciter des réserves parmi les gouvernements les plus proches de Washington pour qui Porto Rico est un butin de guerre non négociable. Avec cette guerre dont la victoire a été arrachée aux patriotes cubains et au cours de laquelle, elle s’est approprié Cuba, Porto Rico et les Philippines, la Rome des Amériques a commencé sa sinistre transition de la République à l’Empire. On remarque par contre un soutien unanime à la demande de l’Argentine en ce qui concerne les îles Malouines, la levée du blocus de Cuba et d’autres propositions visant à renforcer les liens commerciaux, politiques et culturels. On sait que l’Équateur va présenter une proposition de rejet de l’espionnage réalisé par les USA et de développement d’un nouveau réseau de communication sur Internet en dépit de l’interdiction de Washington, et il est probable que des propositions concrètes soient adoptées pour combattre la pauvreté et que soient étudiées des alternatives pour renforcer la Banque du Sud et, éventuellement, créer une compagnie pétrolière d’Amérique latine, sujet sur lequel le président Chavez avait insisté encore et encore.

La transition géopolitique internationale actuelle, qui se manifeste par le déplacement du centre de gravité de l’économie mondiale vers l’Asie-Pacifique, le déclin de la puissance mondiale des USA, l’effondrement irrémédiable du projet européen, la persistance de la crise économique qui a explosé à la fin 2007 et qui ne semble que s’accentuer avec le passage du temps et la permanence d’un « ordre » économique mondial qui concentre la richesse, marginalise les nations et approfondit la destruction de l’environnement, ont agi comme une incitation puissante pour éliminer la méfiance initiale que de nombreux gouvernements montraient vis-à-vis de la CELAC. L’accord conclu à Caracas en 2011 a établi qu’une troïka assumerait successivement la présidence pendant les trois premières années : Le Chili a commencé, Cuba a continué (confirmant la condamnation continentale du blocus US et de son but d’isoler la Révolution cubaine) et à la fin du sommet des présidents, la présidence sera dévolue au Costa Rica. Ce pays, allié fidèle de Washington, devra faire face à une élection cruciale le 2 février prochain, lorsque pour la première fois depuis des décennies, l’hégémonie politique de la droite néocoloniale du Costa Rica sera menacée par la montée d’un nouvel acteur politique surprenant : Le Front Elargi. L’actuelle présidente, Laura Chinchilla, qui avait été fonctionnaire de l’USAID pendant de nombreuses années, garantissait avec la victoire du parti au pouvoir la « domestication » de la CELAC et le retour au projet conçu par Sebastián Piñera et impudemment promu par son ministre des Affaires étrangères. Mais tous les sondages donnent pour acquis qu’il y aura un deuxième tour, et le discours et les propositions bolivariennes du candidat du Front élargi, M. José Villata, pourraient le catapulter à la présidence du Costa Rica. Bien sûr, comme cela a été le cas récemment durant l’élection présidentielle au Honduras voisin, tout l’appareil de renseignement, de manipulation médiatique et de financement des partis amis a été lancé par Washington pour qui la défaite de la droite néocoloniale du Costa Rica serait un revers avec des implications régionales plus larges. Si une telle chose se produisait, la CELAC pourrait traverser une autre étape vers son institutionnalisation définitive, ce dont l’Amérique latine et les Caraïbes ont impérativement besoin.

Atilio A. Boron

Source : http://www.atilioboron.com.ar/2014/01/celac-cita-en-la-habana.html

Traduit par CM pour le Front de Gauche Latino

Merci à Tlaxcala http://www.tlaxcala-int.org/article.asp?reference=11238

EN COMPLEMENT

CELAC : proclamation de l’Amérique Latine et des Caraïbes zone de paix,

(Original signé par les Chefs d’Etat et de Gouvernement de la Communauté des Etats Latino-Américains et Caribéens)

Nous, les Chefs d’Etat et de Gouvernement de la Communauté des Etats Latino-Américains et Caribéens (CELAC) réunis à La Havane, Cuba, les 28 et 29 janvier 2014, au II° Sommet, au nom de leurs peuples et interprétant fidèlement leurs soifs et leurs aspirations,

Ratifiant l’engagement de leurs pays dans les Propositions et les Principes consacrés dans la Charte des Nations Unies et le Droit International, et conscients que la prospérité et la stabilité de la région contribuent à la paix et à la sécurité internationales,

Conscients que la paix est un bien suprême et une soif légitime de tous les peuples et que sa préservation est un élément fondamental de l’intégration de l’Amérique Latine et des Caraïbes et un principe et une valeur commune de la Communauté des Etats Latino-Américains et Caribéens (CELAC),

En réaffirmant que l’intégration renforce la vision d’un ordre international juste confirmé par le droit et par une culture de paix qui exclue l’usage de la force et les moyens non-légitimes de défense parmi lesquels les armes de destruction massive et, en particulier, les armes nucléaires,

Soulignant l’importance du Traité de Tlatelolco pour la Proscription des Armes Nucléaires en Amérique Latine et dans les Caraïbes qui établit la première zone libre d’armes nucléaires dans une zone avec une forte densité de population, ceci étant une contribution à la paix et à la sécurité régionale et internationale,

Réitérant la nécessité urgente du Désarmement Nucléaire Général et Complet, ainsi que d’un engagement avec l’Agenda Stratégique de l’Organisme pour la Proscription des Armes Nucléaires en Amérique Latine et dans les Caraïbes (OPANAL) adopté par les 33 Etats membres de l’Organisme à la conférence Générale de Buenos Aires en août 2013,

Rappelant les principes de paix, de démocratie, de développement et de liberté qui inspirent les actions des pays membres du SICA,

Rappelant la décision des Chefs d’Etat de l’UNASUR de renforcer l’Amérique du Sud comme Zone de Paix et de Coopération,

Rappelant l’établissement, en 1986, de la zone de Paix et de Coopération de l’Atlantique Sud,

Rappelant aussi notre engagement, ratifié dans la Déclaration au Sommet de l’Unité de l’Amérique Latine et des Caraïbes, le 23 février 2010, de promouvoir la mise en œuvre de mécanismes propres de résolution pacifique des conflits,

Renouvelant notre engagement pour qu’en l’Amérique Latine et dans les Caraïbes, se consolide une Zone de Paix dans laquelle les différents entre les nations se résolvent de manière pacifique, par la voie du dialogue et de la négociation ou autre forme de résolution et en pleine harmonie avec le Droit International,

Egalement conscients de l’impact humanitaire global catastrophique et à long terme de l’usage des armes nucléaires et d’autres armes de destruction massive et des discussions en cours sur ces thèmes,

Nous déclarons :

  1. L’Amérique Latine et les Caraïbes Zone de Paix sur la base du respect des principes et des normes du Droit International, incluant les instruments internationaux dont font partie les Etats membres et les Principes et Propositions de la Charte des Nations Unies,
  2. Notre engagement permanent dans la résolution pacifique des conflits afin de supprimer pour toujours l’usage et la menace de l’usage de la force de notre région,
  3. L’engagement des Etats de la région envers l’accomplissement strict de leur obligation de ne pas intervenir, directement ou indirectement, dans les sujets internes de tout autre Etat et d’observer les principes de souveraineté nationale, l’égalité des droits et la libre détermination des peuples,
  4. L’engagement des peuples d’ Amérique Latine et des Caraïbes de susciter des relations d’amitié et de coopération entre eux et avec d’autres nations, indépendamment des différences existant entre leurs systèmes politiques , économiques et sociaux ou leurs niveaux de développement, de pratiquer la tolérance et de coexister en paix comme de bons voisins.
  5. L’engagement des Etats d’ Amérique Latine et des Caraïbes de respecter pleinement le droit inaliénable de tout Etat à choisir son système politique, économique, social et culturel, une condition essentielle pour assurer la coexistence pacifique entre les nations,
  6. La promotion dans la région d’une culture de paix basée, entre autres, sur les principes de la Déclaration sur la Culture de Paix des Nations Unies.
  7. L’engagement des Etats de la région d’avoir pour guide la présente Déclaration dans leur comportement international,
  8. L’engagement des Etats de la région de continuer à promouvoir le désarmement nucléaire comme objectif prioritaire et de contribuer à un désarmement général et complet pour favoriser le renforcement de la confiance entre les nations.

Nous demandons instamment à tous les Etats membres de la Communauté Internationale de respecter pleinement cette Déclaration dans ses relations avec les Etats membres de la CELAC.

(Granma, 30 janvier 2014)
http://www.granma.cu/espanol/cuba/29enero-proclama.html

traduction Françoise Lopez pour Cuba Si France Provence

http://cubasifranceprovence.over-blog.com/2014/01/cuba-proclamation-de...

URL de cet article 24232
  

Putain d’usine, de Jean Pierre Levaray.
« Tous les jours pareils. J’arrive au boulot et ça me tombe dessus, comme une vague de désespoir, comme un suicide, comme une petite mort, comme la brûlure de la balle sur la tempe. Un travail trop connu, une salle de contrôle écrasée sous les néons - et des collègues que, certains jours, on n’a pas envie de retrouver. On fait avec, mais on ne s’habitue pas. On en arrive même à souhaiter que la boîte ferme. Oui, qu’elle délocalise, qu’elle restructure, qu’elle augmente sa productivité, qu’elle baisse ses (...)
Agrandir | voir bibliographie

 

« A toute époque, les idées de la classe dominante sont les idées dominantes : autrement dit, la classe qui est la puissance matérielle dominante de la société est en même temps la puissance spirituelle dominante. La classe qui dispose des moyens de la production matérielle dispose en même temps, de ce fait, des moyens de la production intellectuelle, si bien qu’en général, elle exerce son pouvoir sur les idées de ceux à qui ces moyens font défaut. Les pensées dominantes ne sont rien d’autre que l’expression en idées des conditions matérielles dominantes, ce sont ces conditions conçues comme idées, donc l’expression des rapports sociaux qui font justement d’une seule classe la classe dominante, donc les idées de sa suprématie. »

Karl Marx

Le DECODEX Alternatif (méfiez-vous des imitations)
(mise à jour le 19/02/2017) Le Grand Soir, toujours à l’écoute de ses lecteurs (réguliers, occasionnels ou accidentels) vous offre le DECODEX ALTERNATIF, un vrai DECODEX rédigé par de vrais gens dotés d’une véritable expérience. Ces analyses ne sont basées ni sur une vague impression après un survol rapide, ni sur un coup de fil à « Conspiracywatch », mais sur l’expérience de militants/bénévoles chevronnés de « l’information alternative ». Contrairement à d’autres DECODEX de bas de gamme qui circulent sur le (...)
103 
Le fascisme reviendra sous couvert d’antifascisme - ou de Charlie Hebdo, ça dépend.
Le 8 août 2012, nous avons eu la surprise de découvrir dans Charlie Hebdo, sous la signature d’un de ses journalistes réguliers traitant de l’international, un article signalé en « une » sous le titre « Cette extrême droite qui soutient Damas », dans lequel (page 11) Le Grand Soir et deux de ses administrateurs sont qualifiés de « bruns » et « rouges bruns ». Pour qui connaît l’histoire des sinistres SA hitlériennes (« les chemises brunes »), c’est une accusation de nazisme et d’antisémitisme qui est ainsi (...)
124 
Hier, j’ai surpris France Télécom semant des graines de suicide.
Didier Lombard, ex-PDG de FT, a été mis en examen pour harcèlement moral dans l’enquête sur la vague de suicides dans son entreprise. C’est le moment de republier sur le sujet un article du Grand Soir datant de 2009 et toujours d’actualité. Les suicides à France Télécom ne sont pas une mode qui déferle, mais une éclosion de graines empoisonnées, semées depuis des décennies. Dans les années 80/90, j’étais ergonome dans une grande direction de France Télécom délocalisée de Paris à Blagnac, près de Toulouse. (...)
69 
Vos dons sont vitaux pour soutenir notre combat contre cette attaque ainsi que les autres formes de censures, pour les projets de Wikileaks, l'équipe, les serveurs, et les infrastructures de protection. Nous sommes entièrement soutenus par le grand public.
CLIQUEZ ICI
© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.