Parmi les centaines de journalistes assassinés à travers le monde depuis dix ans (plusieurs dizaines en Irak), personne parmi ceux qui lisent ce billet ne connaît un autre nom que celui d’Anna Politkovskaïa (pas facile à retenir, pourtant).
Pis, un certain nombre d’auteurs de ces crimes ont été identifiées. Ils sont libres, impunis.
Journaliste, mon frère, il serait temps de ne plus regarder le doigt de Reporters sans frontières, mais d’ouvrir les yeux vers le ciel d’où nous tombe le feu et l’acier, de dénoncer tous les crimes sans tri idéologique, de ne plus céder aux dégoulinant compassionnel à sens unique.
Posons que l’assassinat de tout journaliste est un crime contre l’esprit en tous lieux. Se limiter à pleurer sur le sort de la plus photogénique, de la plus politiquement utile est une vilénie à l’égard de tous les autres, de ceux qui ont été abattus, de ceux qui le seront encore. C’est un non-lieu accordé à leurs tueurs se sachant protégés par les entreprises de diversion.
Attendons, après avoir osé ces propos incongrus, que nos contradicteurs, parmi lesquels peut-être des journalistes journalisticides, dissertent sur le symbolisme de certains crimes (ce qui explique qu’il faille les surmédiatiser) ou qu’ils nous taclent, faute de nous contredire.
Et réjouissons-nous de ce mince espace de liberté offert par Internet où peut s’exprimer un amour vrai pour le métier et pour ceux qui le font avec courage.
Théophraste.