« Être Français, c’est être Européen, blanc et catholique », assène Monsieur Robert Ménard... Je lui adresse mes remerciements, lui expose mon angoisse et lui exprime ma très grande gratitude. Si être Français c’est être « Européen, blanc et catholique », il s’ensuit que ni Alain Mimoun, ni Zinédine Zidane, ni Jo Wilfrid Tsonga, ni Gaël Monfils, ni, bien sûr, Alexandre Dumas qui, tous, ne remplissent que deux des trois critères retenus au maximum, ne sont Français. C’est un scoop ! Reste à savoir ce qu’ils sont... problème insignifiant... Voici l’angoisse qui me turlupine : je suis né en mars 1938, à Madrid et, en février 1939, le général Franco et les fascistes espagnols chassèrent mes parents d’Espagne qui passèrent la frontière à pied, dans la neige, avec leur enfant dans une valise... Je fus immergé dès ma seconde année d’existence dans la vie d’un village français, instruit dans une École Publique de la République Française, puis au Lycée, puis à l’Université Française ; j’acquis ce qui me tient lieu de culture dans l’exercice de mon métier d’enseignant à des générations de jeunes Français, dans mes activités militantes, syndicales et politiques, dans la fréquentation de mes concitoyens Français, mais je ne devins administrativement et totalement Français qu’à l’âge de 18 ans par naturalisation. De plus, je ne peux pas jurer ne pas avoir, parmi mes ancêtres restés sur le sol espagnol, quelque aïeul Arabe, Maure ou Juif... En outre, je suis et serai absolument athée. Alors, je suis perdu et tourmenté : quelle est ma nationalité, Monsieur Ménard ??? Mais, au final, je vous remercie, Monsieur Ménard, de me révéler que ni les Martiniquais, ni les Réunionnais, ni les Guadeloupéens ou Tahitiens, etc. ne sont Français et qu’ils ont donc bien raison d’aspirer à leur indépendance. Et je vous remercie aussi de me rassurer et de raffermir mon égoïste tranquillité en me prouvant que ni le grotesque, ni le ridicule, ni la bêtise ne tuent pas ou plus chez nous. Avec mes civilités.