Le syndrome de la peau de chagrin
L’homo bidochon, fils naturel de l’homo faber et d’une sorcière capitaliste, déguisée en fée désirante, est habitué depuis longtemps au syndrome de la peau de chagrin…
On dit qu’un jeune employé de l’industrie du dentifrice, a gagné l’estime de son patron, et sans doute une prime modeste, en proposant d’élargir, juste un peu… le diamètre du trou du tube… Ainsi la pâte étendue sur la longueur de la brosse avait la même longueur, mais environ trente pour cent de plus de l’inutile matière… Réduisant d’autant la longévité du tube et augmentant du même taux la consommation des addicts à l’haleine fraîche, c’était au temps ou l’incisive éclatante était un argument électoral d’un célèbre candidat centriste aux inépuisables sourires niais…
On lit, chaque jour, des quotidiens, et aussi des magazines, dont le nombre de pages est inchangé, mais envahi de surfaces publicitaires dévorantes de notre esprit… On peut faire le pari que, si un jour la part éditoriale disparaissait complètement, certains ne s’en apercevraient même pas, qui depuis longtemps ne regardaient que les images…
On sait l’obsolescence programmée de nos objets usuels, le bas nylon éternel est aussi subversif que la bande à Bonnot et Bakounine réunis. Ce qui se prépare c’est l’obsolescence de l’humain lui-même, sa date de péremption correspondra au déclin de sa "˜productivité’…
L’homo bidochon est un être désirant et stupide à la fois, facile à berner, capable de s’esclaffer devant plus bête que lui, lorsqu’il en trouve encore…
L’homo bidochon regarde son nombril, sa meuf ou sa bagnole, autant de tamagotchis d’importance existentielle, qui lui font oublier sa servitude…
Les "˜soirées pizza’ ont encore de l’avenir… C’est lorsque le diamètre de la galette sera égal à celui d’un petit pois, que l’envie de grogner se réveillera ; entre temps il aura pris l’habitude de manger deux, puis trois, puis quatre ou douze "˜pizza chagrin’… On les nommera "˜La Balzac’, mais il ne comprendra même pas de quoi on parle …
Et c’est difficile de réfléchir la bouche pleine. On a déjà inventé la "˜Big Mac’ à quatre étages pour étouffer les grandes gueules et boucher précocement leurs coronaires pour économiser sur les retraites ; avec la "˜Balzac’ on mettra bientôt ses lunettes pour voir dans l’assiette… Avant, c’est la crampe de la faim, à l’estomac, qui suffisait pour qu’on se penche vers la rondelle trois fromages mini ou Margarita Lolita…On trouvera bien l’appellation sexy pour aiguiser les appétits insatiables des bidochons…
Bon appétit !