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Assad, ses raids au Liban, et le lent glissement de la Syrie vers la guerre civile (The Independent)

A Damas, le régime présente un portrait de manifestations de vaste soutien. Mais alors que les tensions montent aux frontières de la nation, des fissures apparaissent. A Beyrouth, Robert Fisk jette un coup d’oeil derrière la propagande.

Des incursions transfrontalière de chars ; quatre adversaires syriens du régime de Damas kidnappés au Liban, soi-disant dans un véhicule appartenant à l’ambassade syrienne à Beyrouth, un camion de munitions et de lance-roquettes destinées aux opposants au président Bachar al-Assad de l’autre côté de la frontière libanaise saisis par l’armée libanaise - pour ne pas mentionner le rassemblement de masse en faveur de Bachar à Damas la semaine dernière, dont des Syriens arrivant au Liban dirent que vraiment - vraiment - il compta un million de personnes dans les rues. Chaque tragédie possède son mystère, je suppose, mais celui-ci prend les proportions du film épique « Autant en Emporte le Vent ».

Au dessus de l’énorme masse de supporters de Bachar volaient des hélicoptères militaires syriens trainant d’immenses drapeaux nationaux de la Russie et de la Chine - les deux amis de la Syrie au Conseil de sécurité, qui ont opposé leur veto aux sanctions de l’ONU contre le gouvernement de Damas la semaine dernière. C’était l’antidote parfaite à toutes ces images sur YouTube de manifestants morts et d’enfants agonisants, pour ne pas mentionner la photo célèbre d’une jeune fille qui aurait été décapitée par la police secrète syrienne qui s’est avéré - deus ex machina à la télévision syrienne - être bien vivante et portant bien évidemment un voile pudique. Déroutant ? Au moins nous savons maintenant, de la bouche même de l’opposition à Assad, que les « bandes armées » que le régime affirmait combattre existent vraiment, bien qu’elles portent des uniformes.

Mais d’abord, les incursions. Après avoir profité des avantages de la présence militaire de la Syrie pendant 29 ans au Liban - l’armée en partit en 2005 - les Libanais sont un peu nerveux quand les gars de Bachar apparaissent près de leur frontière, apparemment à la recherche de trafiquants d’armes du genre de ceux qui conduisaient un camion d’armes à proximité de Halba la semaine dernière. Et quand un char syrien évolue quelques mètres à travers la frontière et tire un obus dans une usine de batteries abandonnée, tout cela devient un peu plus sérieux. Il y a eu au moins trois incursions syriennes enregistrées au Liban - huit autres sont suspectées - et pendant l’une d’elles, près du village de Ensal, un homme a été tué. Il s’est avéré être un résident local syrien. La frontière, inutile de le dire, est notoirement difficile à localiser. Un certain Robert Fisk l’a même traversée par accident il a quelques années, mais les adversaires du gouvernement libanais incluant le Hezbollah (et donc pro-syrien) se déchaînent contre cette incursion supposée massive dans la souveraineté libanaise.

Ils se souciaient beaucoup moins du camion chargé d’armes sur le chemin du passage de la frontière non officiel de Wadi Khalek où les « bandes armées » étaient sans doute en train de les attendre, un brin d’incursion dans la souveraineté de la Syrie, bien que les journaux d’opposition à Beyrouth - en grande partie représentant les sunnites et une partie de la communauté chrétienne - aient demandé ironiquement pourquoi les services de sécurité libanais ont été si bons pour trouver des passeurs, mais si lents à reconduire les blindés syriens au delà de la frontière.

Passons à présent à l’affaire de l’homme de 86 ans al-Chibli Aysoouni, un des fondateurs du parti Baas original qui quitta la Syrie en 1966, avant même que la famille Assad n’arrive au pouvoir. Opposé au régime, mais inactif depuis 1992 - il s’était également exilé en Égypte, en Irak et aux États-Unis - il a disparu de son domicile dans la ville de la montagne libanaise d’Aley le 24 mai et n’a jamais été revu. Puis, trois frères syriens de la famille Jassem ont été attrapés par « des hommes inconnus » à l’extérieur d’un poste de police dans l’est de Beyrouth quand ils sont venus pour recueillir leur frère, Jasem Merii Jasem, qui avait été vu distribuant des tracts appelant à « un changement démocratique » en Syrie.

A l’époque, personne n’a prêté beaucoup d’attention à ces disparitions, bien que des ambassadeurs de l’UE se fussent déjà plaints au gouvernement de Beyrouth lorsque l’armée libanaise avait renvoyé à Damas trois déserteurs de l’armée syrienne. Craignant que ces derniers ne soient pas accueillis par leurs officiers avec du thé et des gâteaux au coin du feu, les ambassadeurs ont averti que cela pourrait équivaloir à un crime contre l’humanité. Puis la semaine dernière une explosion politique est survenue.

Des députés libanais ont révélé que lors d’une réunion de commission parlementaire à huit-clos, le Général Achraf Rifi, le sympathique, responsable galonné des paramilitaires des Forces de Sécurité Intérieures du Liban, a affirmé que des véhicules de l’ambassade syrienne à Beyrouth ont été utilisés dans les enlèvements et que les documents et les caméras de sécurité des parkings de l’ambassade à Beyrouth-Ouest - ainsi que des « agents de sécurité » - ont tous confirmé ce fait. A vrai dire, il semble que certains propres membres des Forces de Sécurité Intérieure de Rifi ont conduit les voitures. L’intrigue s’est épaissie - en fait, elle s’est pratiquement transformée en glu - quand il est apparu que l’unité des gardes de l’ambassade syrienne était dirigée par le premier-Lieutenant libanais Hajj Salah, le fils du Major général Ali Hajj, un des quatre officiers libanais emprisonnés pendant quatre ans par l’ONU sur des soupçons d’implication dans l’assassinat en 2005 de l’ancien Premier ministre libanais Rafic Hariri - jusqu’à ce que l’ONU ait décidé qu’il avaient été dupés par de faux témoignages et aient libéré les quatre hommes.

Des explosions de fureur purent alors être entendues émanant du bureau de l’ambassadeur intelligent de la Syrie au Liban, Ali Abdel Karim Ali - il venait juste de finir de lire un livre sur le Liban écrit par l’auteur de cet article - qui a fait part au ministre des Affaires étrangères libanais Adnan Mansour de sa colère sur ces allégations extraordinaires portées contre lui. Il les a toutes niées, et a exigé des preuves du Général Rifi, a indiqué un policier de haut-rang indéniablement pro-opposition qui a gardé le silence depuis. La Syrie et le Liban, a annoncé M. Ali, ont été victimes d’un « complot américano-sioniste ». La Syrie deviendrait plus forte au sortir de ces ennuis qu’elle ne l’avait été auparavant.

Et pourtant il y eut l’ONU ce week-end, avertissant d’une « véritable guerre civile » en Syrie - une cousine éloignée, je suppose, de la guerre civile ordinaire à la Libyenne - alors que le nombre de morts en sept mois des protestations anti-Assad aurait augmenté, toujours selon l’ONU, passant à 3000, dont 187 seraient des enfants. Ce samedi, la presse libanaise a publié des photographies d’un jeune garçon de 14 ans, le Syrien Ibrahim al-Chaybane, dont il est dit qu’il serait décédé dans un hôpital syrien, après avoir été touché par balles à la poitrine par les forces de sécurité syriennes. Encore une fois, la photo était sur YouTube. Une unité de déserteurs de l’armée syrienne, prétendant qu’elle était forte de plusieurs milliers d’hommes - une estimation qui provient probablement du département du doigt mouillé - a maintenant émergé sur internet, avec des photos de certains des hommes en uniforme. Un acte audacieux qui prouve aussi que les adversaires d’Assad, s’ils ne sont pas des « gangs », sont très certainement armés.

Robert Fisk

Source : Assad, his raids on Lebanon, and Syria’s slow slip into civil war - Robert Fisk (The Independent)

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