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Côte d’Ivoire : Pluies rares, productions en baisse et famine en vue, par Fulgence Zamblé.








IPS, Ferke, nord de la Côte d’Ivoire, 29 janvier 2007.


Chaque matin, quand Ousmane Soro quitte sa maison pour son champ, de nombreuses interrogations lui passent par la tête. « Qu’en sera-t-il de mes récoltes de patate douce, de canne à sucre et de mangue cette année ? Aurai-je de quoi subvenir aux besoins de ma famille ? » se demande-t-il.


Ce cultivateur du village d’Ouaraga, dans le département de Ferké nourrit son quotidien d’inquiétudes, comme la majorité de ses pairs. « Depuis quelques années, nous sommes confrontés à une baisse de nos productions agricoles. La dégradation des sols s’accentue et la pluviométrie est en constante diminution », explique-t-il.

En 2001, le département de Ferké avait enregistré 1.000 mm de pluie. En 2005, la hauteur de pluie recueillie est tombée à 800 mm. En 2006, elle n’était que de 700 mm. « C’est très faible pour espérer faire de bonnes récoltes car les sols manquent d’eau et ne donnent plus autant qu’avant », déclare à IPS Hermann Kassi, conseiller agricole à la Compagnie cotonnière de Côte d’Ivoire, dans le nord du pays.

Il a cinq ans, ajoute-t-il, le département de Ferké avait réalisé les meilleures productions de la région nord. « Nous avions récolté 180.000 tonnes de mangues, presque autant d’anacarde, 150.000 tonnes de canne à sucre, 90.000 tonnes de coton. Nous disposions également de plusieurs milliers de têtes de bovins et de volaille ».

D’année en année, la production a chuté pour se retrouver aujourd’hui à 80.000 tonnes de mangue, 100.000 tonnes d’anacarde et 115.000 tonnes de canne à sucre, selon la Coopérative des producteurs agricoles de Ferké.

En 2003, le Fonds des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) tirait déjà la sonnette d’alarme en révélant que la production de céréales en Côte d’Ivoire chutait pour la deuxième année consécutive passant de 1.785.000 tonnes en 2001 à 1.378.000 tonnes en 2002, puis à 1.280.000 tonnes en 2003.

Le bureau de coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (OCHA), s’est également préoccupé de la situation alimentaire dans le pays qu’il a qualifié de critique, surtout dans l’ouest et le nord, contrôlés par les rebelles.

«  Depuis mai 2003, les précipitations ont été inférieures à la moyenne dans l’ensemble de la Côte d’Ivoire. Cela a des conséquences sur la culture du maïs dans le sud, le mil et le sorgho dans le nord », a annoncé l’organisation dans l’une de ses publications.

Kassi confie à IPS que compte tenu du fait que la situation s’aggravait d’année en année, les cultivateurs ont progressivement commencé à abandonner les cultures de rente pour se consacrer aux cultures vivrières avec lesquels ils estiment pouvoir gagner de l’argent tout en se nourrissant.

Mais, de l’avis de Maxime Kablan, de l’Agence nationale de développement rural (ANADER), il n’est pas évident que la production de vivriers suffise à nourrir les populations. « Les prévisions de production de riz, de maïs et de mil risquent de ne pas être atteintes à cause du retard des pluies et de leur faible quantité », indique-t-il.

Maxime Kablan estime que l’état actuel des choses dans la partie nord du pays n’a d’explication que dans les comportements antérieurs et actuels des populations rurales des savanes du nord. « Les feux de brousse incontrôlés sont nombreux ici. Et les jachères naturelles sont parcourues chaque année par ces feux », affirme-t-il. En conséquence, les jeunes plants qui émergent au cours de la saison pluvieuse sont réduits en cendre à la saison sèche. « Cela rend quasiment impossible la régénération des ligneux forestiers », conclu-t-il.

L’agroéconomiste, Véronique Brou, relève que environ 90 pour cent de la population urbaine des zones de savanes utilisent le bois de feu ou le charbon de bois, et cent pour cent des ménages ruraux utilisent le bois de chauffe. « Nous avons atteint une étape critique. Il ne reste qu’à encourager et soutenir les femmes qui pratiquent la riziculture dans le nord du pays », propose cette spécialiste.

Cette idée est également appuyée par l’ONG Actions, genre, développement économique et social (AGEDES), basée à Abidjan, pour lutter contre la pénurie de riz que pourrait connaître le nord de la Côte d’Ivoire si la situation actuelle perdure. « Nous sommes dans une situation délicate qui peut nous amener vers la famine si rien n’est fait », avertit le président de l’ONG, le Dr Brou Kouamé. (FIN/2007)

Fulgence Zamblé


 Source : IPS www.ipsinternational.org



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