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Oppenheimer ou La bombe ?

Vous avez sans doute vu passer la question suivante « Barbie ou Oppenheimer ? » Je n’avais pas très envie d’aller voir une pub version longue mais pas plus le dernier Christopher Nolan, bien que très intéressé par l’histoire du créateur de la bombe nucléaire, étant habitué à la déception avec le cinéma étasunien et le cinéma de Nolan en particulier.

Je l’ai finalement vu avec des amis et sans surprise la qualité n’était pas au rendez-vous. Au moins le film est assez rythmé pour pouvoir faire passer sans problème les 3h de durée. Le premier problème vient de la révolution cinématographique tant attendue si l’on devait en croire son réalisateur n’est qu’un condensé de tous les clichés du biopic, y compris les scènes de sexes qui n’ont aucune utilité dans l’intrigue. Pour rendre le personnage plus trouble on lui invente des méfaits (ici empoisonner la pomme de son professeur) afin de laisser douter de sa mégalomanie dans la création d’une arme pouvant détruire l’humanité (plus pratique que de dire qu’il n’a été qu’un instrument certes génial d’une situation plus complexe, lié au développement du capitalisme et aux affrontements géopolitiques). Lorsqu’on voit le personnage en mauvaise posture, on voit le sol trembler comme sous une explosion nucléaire pour montrer le trouble du personnage. Même le découpage avec des flash-back et de retour au présent du film est d’un déjà vu.

Cependant, le plus décevant c’est qu’Oppenheimer n’est pas un film sur la peur de la bombe nucléaire. On ne voit jamais ses effets, on se contente de les décrire. Histoire que le spectateur ait quand même peur, le réalisateur est obligé de montrer une scène où le savant imagine les conséquences de l’explosion, mais les conséquences dans la réalité on ne les voit pas. Qui a vu les images d’archives ou tout simplement la fameuse scène du film d’animation Gen d’Hiroshima sait à quel point la réalité est effroyable. Mais on n’en saura rien avec Nolan. Scène caractéristique, on voit Oppenheimer à une vidéo projection montrant les victimes d’Hiroshima et de Nagasaki. Ce que l’on voit, nous spectateurs, ce n’est pas les images du drame. Non, ce que l’on voit, c’est Oppenheimer regardant les images. Cela n’a pas le même impact. Ici c’est pour nous identifier à un personnage qui commence à regretter sa création. Ironiquement, l’identification est rendue plus difficile car on discerne mal la raison de ses doutes.

Et c’est pour comprendre les remords bien réel du scientifique que je vous conseille de voir La bombe de Peter Watkins (1966), un moyen métrage montrant l’effet de l’explosion d’une bombe atomique en pleine Angleterre dans un style quasi-documentaire. Au menu, on y voit les cris, les tremblements et le bruit assourdissant de la bombe, la lumière de l’explosion qui brûle la peau et rend aveugle, la tempête de feu qui emmène les maisons sur son passage, la distance de touche de la bombe et les gens qui s’étouffent. Une scène qui dure environ 10 minutes et qui est effroyable à regarder.

Cela ne s’arrête pas là car Watkins nous montre l’après, en se basant sur différents bombardements ayant eu lieu. Le territoire du pays étant en partie inhabitable à cause de la radioactivité, les ressources utilisables s’affaiblissent. Afin de conserver un semblant d’Etat les autorités sont obligées de favoriser dans l’accès aux premières nécessités ceux qui maintiennent leur pouvoir : la police et l’armée. C’est comme cela qu’un pays autoritaire, où toutes révoltes de la faim est terminée par des exécution sommaires, vient au monde. Séquence qui a beaucoup déplu à la BBC, le financeur du film.

Sortez d’Oppenheimer et vous vous direz que c’est une triste histoire, sortez de La bombe et vous vous direz que le monde ne mérite pas de connaître cette horreur.

»» https://lecuirassedoctobre.fr/2023/08/16/oppenheimer-ou-la-bombe/
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Jean Ortiz a publié 90 articles sur le site Le Grand Soir. Son style impeccable, son cœur à fleur de clavier, son intelligence servant sa remarquable connaissance des dossiers qu’il traite, son humour, sa fougue, sa fidélité aux siens, c’est-à-dire aux guérilleros espagnols que le monde a laissé se faire écraser par un dictateur fasciste, le font apprécier par nos lecteurs (nos compteurs de lecture le disent). Il a en poche une carte du PCF qui rend imparfaitement compte de ce qu’est pour (…)
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