RSS SyndicationTwitterFacebookFeedBurnerNetVibes
Rechercher
42 

Les « collabos de Poutine » selon Laurent Joffrin

La "Libre-Débats" du week-end des 15-16/04/2023 a publié un article de Laurent Joffrin qui s’efforce de décrédibiliser tous ceux qui se refusent de diaboliser Poutine (1). Rien que le titre « Les collabos de Poutine » en dit long sur les intentions de l’auteur. "Collabo" est un terme injurieux désignant communément tous ceux qui, à des titres divers, ont collaboré avec l’occupant nazi.

Comme au bon vieux temps de l’épuration et des femmes tondues, Laurent Joffrin se croit autorisé à livrer à la vindicte populaire quelques noms au hasard, avec des accusations qu’il imagine gravissimes :

- Michel Onfray : « devenu, à force de zigzags idéologiques, le polygraphe officiel du nationalisme le plus obtus »,

- Régis Le Sommier : « ancien de Paris-Match, animateur de la revue qui signe des reportages édifiants sur le courage des soldats russes »,

- Maurice Gourdault-Montagne : « diplomate plutôt nuancé soudain enrôlé dans cette opération de désinformation »,

- Arno Klarsfeld : « mirobolant polémiste surtout connu pour ses rollers »,

- Jacques Sapir : « économiste venu de l’ancien Front de Gauche passé à la droite souverainiste la plus rigide »,

- Henri Guaino : « ex-gaulliste et néo-sarkozyste, devenu prêcheur du relativisme poutinoïde ».

Amusant de voir Laurent Joffrin accuser Michel Onfray de « zigzags idéologiques ». Joffrin n’est-il pas lui-même le champion toutes catégories de cette spécialité ? Ancien familier de Jean-Marie Le Pen (2), il est passé plusieurs fois de L’Obs à Libé et vice-versa avant de s’aventurer dans un nouveau média, Le Journal. Un parcours sinueux qui laisse rêveur.

Libre à Joffrin de ne pas aimer l’idéologie de Régis Le Sommier. Mais il y a bien d’autres journalistes de terrain qui ne partagent pas la doxa occidentale du méchant Poutine contre le gentil Zelensky, comme Christelle Néant ou Anne-Laure Bonnel – dont sans doute Joffrin n’a jamais entendu parler, pas plus qu’il n’a sans doute entendu parler de témoins privilégiés, comme l’assistant humanitaire Adrien Bocquet ou l’observateur international Jean Neige.

Pourquoi s’en prend-il particulièrement à Maurice Gourdault-Montagne ? Cet ancien ambassadeur de France, à la carrière prestigieuse, n’est pourtant pas le seul diplomate à critiquer vivement les agissements de l’OTAN en Ukraine, comme, par exemple, le Britannique Alastair Crooke, le Suisse Jean-Pierre Vettovoglia ou l’Indien M.K. Bhadrakumar, lesquels sont, bien entendu, snobés par le nombrilisme parisien de Laurent Joffrin.

Il n’est pas question ici de juger le parcours politique d’Arno Klarsfeld dont on peut penser ce qu’on veut. Mais sa dénonciation argumentée de la présence bien réelle du nazisme en Ukraine mérite assurément le respect. En tout cas, réduire cette évidence (3) à « des bribes de vérité » en traitant l’activiste juif Klarsfeld de « mirobolant » et en ironisant sur « ses rollers », c’est, de la part de Joffrin, minable, sinon pathétique, voire odieux.

Que les analyses de Jacques Sapir dérangent les certitudes de Joffrin, ça ne change rien au fait que le conflit ukrainien a accéléré l’émergence d’une nouvelle architecture géopolitique multipolaire dans laquelle l’Europe a déjà commencé à payer très cher sa vassalisation vis-à-vis l’Oncle Sam. C’est aussi l’avis d’un nombre croissant d’observateurs non alignés : Caroline Galactéros, Jacques Baud, Sylvain Ferreira, Éric Denécé, Emmanuel Todd, etc.

Et Henri Guaino, ancienne plume de Sarkozy, aurait-il tort de renouer avec la vision de Charles De Gaulle pour qui l’Europe s’étend de l’Atlantique à l’Oural ? Joffrin oserait-il s’en prendre à Pierre De Gaulle, le petit-fils du Général, qui ne cesse de dénoncer le rôle funeste de l’OTAN ? Ira-t-il jusqu’à l’accuser de « relativisme poutinoïde » ?

C’est probable, car pour Joffrin il suffit de faire remarquer que la guerre n’a pas commencé le 24 février 2022 pour se voir accusé « d’épauler la propagande du Kremlin ».

Avec de telles prémisses, on ne s’étonnera pas de le voir assener de grossières contre-vérités. Deux exemples :

D’après Joffrin, « (...) des solutions diplomatiques (...) ont été rejetées avec force par Vladimir Poutine ». C’est exactement le contraire de la vérité, comme l’a révélé l’ex-Premier ministre d’Israël Naftali Bennett (4).

Autre déclaration de Joffrin : « (...) « les libertés publiques ont toujours été respectées dans la nouvelle Ukraine ». C’est complètement faux : fermeture des télévisions d’opposition, arrestation de journalistes indépendants et accroissement des mesures contre la culture russe (5).

Comment peut-on publier impunément de telles contre-vérités ? Comment qualifier une telle impudence ? Qu’est-ce qui autorise Joffrin à traiter de « collabos » ceux qui ne pensent pas comme lui ? Espère-t-il ainsi gagner des lecteurs ?

Le mercredi 12 avril, à Paris, Laurent Joffrin lançait officiellement « Le Journal », un nouveau média en ligne avec pour ambition d’affirmer la voix d’une gauche réformiste face à « l’extrême droite nationaliste, la technocratie verticale macroniste et le populisme de gauche » : excusez du peu. Son slogan : « On peut être de gauche et avoir une bonne droite ». Encore faut-il ne pas décocher ses coups dans le vide comme un boxeur dans le cirage.

André LACROIX

(1) https://www.lalibre.be/debats/2023/04/15/les-collabos-de-poutine-H43FW....
(2) Photo à l’appui. Voir, entre autres,
https://www.legrandsoir.info/laurent-joffrin-ou-le-mepris-de-ses-lecteurs.html).
(3) Lire, par exemple : https://forward.com/news/462916/nazi-collaborator-monuments-in-ukraine/.
(4) Voir https://cf2r.org/editorial/quand-le-brouillard-de-la-guerre-commence-a... ou https://www.investigaction.net/fr/loccident-a-sabote-la-paix-en-ukrain....
(5) Voir notamment http://www.defenddemocracy.press/zelensky-bans-political-opposition-na... et http://www.defenddemocracy.press/ukraine-parliament-passes-new-laws-se... de même que : https://lafauteadiderot.net/Repression-censure-neoliberalisme-a-la-Pin....

URL de cet article 38627
  
AGENDA

RIEN A SIGNALER

Le calme règne en ce moment
sur le front du Grand Soir.

Pour créer une agitation
CLIQUEZ-ICI

Ainsi parle Chávez
Hugo Chávez, figure du Venezuela et de l’Amérique latine contemporaine, si critiqué et diffamé dans la plupart des médias, était indéniablement le président métisse, issu d’une famille pauvre, avec lequel les classes populaires pouvaient s’identifier. Pendant 13 ans, chaque dimanche, il s’est adressé à son peuple dans une émission appelée « Allô président », fréquemment enregistrée sur le terrain et en public. Ce livre recueille certaines de ses allocutions. Tour à tour professeur, historien, blagueur, (...)
Agrandir | voir bibliographie

 

Ceux qui qualifient les chômeurs et les handicapés de parasites ne comprennent rien à l’économie et au capitalisme. Un parasite passe inaperçu et exploite son hôte à son insu. Ce qui est la définition de la classe dirigeante dans une société capitaliste.

Jason Read

Lorsque les psychopathes prennent le contrôle de la société
NdT - Quelques extraits (en vrac) traitant des psychopathes et de leur emprise sur les sociétés modernes où ils s’épanouissent à merveille jusqu’au point de devenir une minorité dirigeante. Des passages paraîtront étrangement familiers et feront probablement penser à des situations et/ou des personnages existants ou ayant existé. Tu me dis "psychopathe" et soudain je pense à pas mal d’hommes et de femmes politiques. (attention : ce texte comporte une traduction non professionnelle d’un jargon (...)
46 
Médias et Information : il est temps de tourner la page.
« La réalité est ce que nous prenons pour être vrai. Ce que nous prenons pour être vrai est ce que nous croyons. Ce que nous croyons est fondé sur nos perceptions. Ce que nous percevons dépend de ce que nous recherchons. Ce que nous recherchons dépend de ce que nous pensons. Ce que nous pensons dépend de ce que nous percevons. Ce que nous percevons détermine ce que nous croyons. Ce que nous croyons détermine ce que nous prenons pour être vrai. Ce que nous prenons pour être vrai est notre réalité. » (...)
55 
Hier, j’ai surpris France Télécom semant des graines de suicide.
Didier Lombard, ex-PDG de FT, a été mis en examen pour harcèlement moral dans l’enquête sur la vague de suicides dans son entreprise. C’est le moment de republier sur le sujet un article du Grand Soir datant de 2009 et toujours d’actualité. Les suicides à France Télécom ne sont pas une mode qui déferle, mais une éclosion de graines empoisonnées, semées depuis des décennies. Dans les années 80/90, j’étais ergonome dans une grande direction de France Télécom délocalisée de Paris à Blagnac, près de Toulouse. (...)
69 
Vos dons sont vitaux pour soutenir notre combat contre cette attaque ainsi que les autres formes de censures, pour les projets de Wikileaks, l'équipe, les serveurs, et les infrastructures de protection. Nous sommes entièrement soutenus par le grand public.
CLIQUEZ ICI
© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.