El Correo, 19 mars 2006.
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J’avais 10 ans, c’était la nuit du 23 mars 1976, il était 23 heures, Maman appelle à la maison, elle avait été arrêtée à la Présidence de la Nation. Maman, Maria Raquel Ramos Mejia, faisait partie des Jeunesses Péronistes depuis son adolescence, travaillait aux Affaires Juridiques de la Présidence de la Nation Argentine, avec l’échelon 23 (Ministre). Elle nous avait dit : Je vais rentrer tard, ne vous inquiétez pas...
Les militaires étaient entrés à la Présidence de la Nation et avaient retenus tous les civiles qui travaillaient à l’intérieur avec des mitraillettes contre les murs pendant qu’ils détruisaient des documents et tout sur leur passage.
Mon grand-père, Jorge Prudencio Ramos Mejia, avocat international, qui figurait dans le « who is who » du monde des lois, passe alors quelques coups de fil et ils ont relâché Maman.
Maman quand elle nous avait appelés, avait dit que probablement ils l’amèneraient sur un bateau... Bateau sur lequel ont disparu beaucoup de personnes, d’autres sont restées détenues durant des années, bateau sur lequel ont été détenus les fonctionnaires de Gouvernement les plus importants où ils ont subi un terrible lavage de cerveau.
Mon grand-père, à la demande de différents secteurs, négociait entre les militaires et la Présidente Isabel Perón, à cette époque, pour qu’elle démissionne et appelle à des élections, puisqu’elle n’avait été réellement choisie par personne. Elle a simplement assumé sa charge parce que Juan Domingo Perón venait de mourir et c’était une catastrophe comme Président. Ses ministres ne duraient pas. A mon grand-père, ils ont offert onze ministères qu’il a tous refusés pour ne pas salir son honneur. Maman a été sauvée, parce que mon grand-père était connu dans le monde entier et avait des contacts très importants.
Quand elle est arrivée à la maison à 3 heures du matin, elle était étourdie et pleine de peur. Elle a continué à travailler à la Présidence de la Nation pendant des mois jusqu’à ce qu’elle démissionne, parce que chaque jour ils la menaçaient de la faire disparaître, elle était sur une liste à la disposition du Pouvoir Exécutif (Jorge Rafael Videla), elle pouvait disparaitre à tout moment. Elle a décidé alors de quitter la Présidence de la Nation. Jusqu’à l’année 1980 elle fut sur une liste pour de gens à faire disparaître.
Nous avons subi 16 perquisitions militaires dans notre maison. Ils nous mettaient tous contre un mur avec leurs mitraillettes dans nos estomacs. J’avais seulement 10 ans. Je ne vais pas oublier les cris des militaires. Je ne vais pas oublier l’horreur.
Ce 24 mars 1976, au matin nous avons allumé la télé noir et blanc, comme il avait à cette époque à Buenos Aires, et on entendait seulement les communiqués militaires. Et je pleurais, je sentais que nous avions perdu beaucoup. On m’avait élevée parmi les avocats, en croyant dans le système démocratique, dans un système de Justice. J’avais 10 ans et je pleurais pour la démocratie perdue.
En 1983, la démocratie est revenue en Argentine. Ma mère est morte une année plus tôt. Je suis allée à tous les manifestations de tous les partis politiques. Je sentais une joie immense d’avoir récupéré la démocratie.
Maman avait rêvé d’une Argentine meilleure. Mon grand-père l’avait toujours dit, tu es ma fille, rien ne va t’arriver. Mon grand-père est mort de vieillesse le 5 mai 1983. Une année plus tard maman est morte d’un cancer viral... Mon grand-père l’a toujours protégée pendant qu’il a vécu.
Maman a lutté pour ses idées tout comme son oncle, Ernesto "Che" Guevara Lynch, elle a eu faim, elle s’est cachée, elle a due ne pas se montrer durant des années, mais elle avait choisi de ne pas quitter l’Argentine. Elle ne pouvait même pas avoir beaucoup de contacts avec ses parents pendant quatre ans. Je l’accompagnée dans ces durs moments.
Je souhaite qu’il y ait des gens qui luttent de nos jours pour ses idées, qu’ils souhaitent que l’Argentine devienne un pays meilleur, parce qu’il a tout pour l’être.
A 30 années du 24 mars de 1976. Quand a commencé la pire dictature militaire qu’il y aurait jamais en Argentine, il est nécessaire de ne pas oublier ce qui s’est passé. Que les gens disparaissaient pour penser différent, pour écrire différent, purement et simplement parce qu’ils étaient l’ennemi de quelqu’un, et parfois les disparitions étaient même payées... de toute façon... un de plus...
Que les gens qui se consacraient à ceci, non seulement faisaient disparaître des personnes, mais aussi leurs propriétés, ils sont pris leurs immeubles, avec leurs meubles et jusqu’à leurs enfants. Aux gens qui tortureraient, rien ne leur importait, et il y a des rapports très dignes de confiance à Londres et en Suède en ce qui concerne ce qui s’est passé en Argentine durant ces années là .
N’oublions pas !
Que jamais cela arrive à nouveau !
Justice pour ceux qui ne sont plus !
Justice pour ceux qui sont restés !
Justice pour ceux qui marchent encore dans la rue après avoir torturé des femmes enceintes, des enfants et autant de personnes qui leur sont passées dans les mains !
Quelqu’un peut-il oublier qu’ils ont tué des enfants de treize ans ?
Quelqu’un peut-il oublier qu’ils ont- mitraillé des maisons sans savoir qui était à l’intérieur ?
Quelqu’un peut-il oublier qu’ils ont- torturé à la gégène des femmes enceintes au vagin ?
Je crois dans la démocratie, et je crois dans l’État de Justice. Luttons pour maintenir ceci toujours dans tous nos pays.
N’oublions pas. Parce que celui qui oublie, il répète leurs erreurs.
Rachel Holway
Rachel Holway
Buenos Aires - Argentina
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– Traduction de l’espagnol pour El Correo : Estelle et Carlos Debiasi.
– Source : El Correo www.elcorreo.eu.org
Argentine : Il y a trente ans, un coup d’Etat pour la liberté... des marchés, par Paolo Gilardi.
– Les autres articles d’El Correo sur la
dictature en Argentine :
www.elcorreo.eu.org/rubrique.php3 ?id_rubrique=103
– L’Argentine sur RISAL :
http://risal.collectifs.net