RSS SyndicationTwitterFacebookFeedBurnerNetVibes
Rechercher

Brésil : le coup d’état sans « Impeachment », mode d’emploi

La procédure de destitution (Impeachment) requiert l'approbation des 2/3 du Congrès. Mais la non-approbation des comptes de campagne empêche le vainqueur des élections d'assumer la présidence. La décision appartient au pouvoir judiciaire. C'est ce qu'on appelle le coup d'État Paraguayen. CHERS AMIS DU GRAND SOIR, VOICI UNE VARIANTE DE LA RÉVOLUTION COLORÉE. AMICALEMENT - LULU.

Le coup d’état sans « impeachment » a déjà été mis sur les rails par le ministre du STF (Supremo Tribunal Federal - Cour suprême) et président du TSE (Tribunal Superior Eleitoral - Cour Suprême Électorale) Antonio Dias Toffoli, en collusion avec son collègue Gilmar Mendes. Nous en verrons la conclusion dans quelques semaines.

Les étapes du coup d’état sont les suivantes :

1. Jeudi dernier, le 13, le mandat du ministre Henrique Neves au Tribunal Supérieur Électoral a pris fin (les juges, qui remplissent leur office aux deux Cours Suprêmes, ont statut de ministre NdT). Les ministres peuvent être reconduits une fois à leur poste. Toffoli, Président du Tribunal Supérieur Électoral, a présenté une liste de trois noms à la présidente Dilma Rousseff. Toffoli espérait que Neves (Henrique de son prénom, à ne pas confondre avec Aécio Neves, candidat battu aux élections NdT) serait reconduit dans ses fonctions.

2. Dilma était hors du pays (au G20 NdT) et le renouvellement n’a pas été automatique. Contrarié par la non-reconduction du mandat de Neves, Toffoli a redistribué les procès de celui-ci, à peine 14 heures après l’expiration de son mandat. Parmi les milliers de procès, les deux principaux – concernant les comptes de la campagne de Dilma - ont été distribués à Gilmar Mendes. Premier parfum d’escroquerie. Parmi les sept juges du TSE, la probabilité que deux procès principaux de Neves retombent sur Mendes était de 2 pour 100. Il y a tous les signes d’un arrangement monté par Toffoli (1).

3. Le Ministère Public Électoral, par son procureur Eugênio Aragão, s’est prononcé contre la redistribution. Aragão a invoqué l’article 16, paragraphe 8 du Règlement intérieur du TSE, qui prévoit qu’en cas de vacance du ministre effectif, les procès sont repris par le ministre substitut de la même classe. La date limite pour l’examen de comptes de campagne étant le 25 Novembre, il y a suffisamment de temps pour nommer le remplaçant – Neves peut d’ailleurs être reconduit. Donc, « l’urgence imposée n’a pas lieu d’être, elle est donc rejetée ».

4. Gilmar a allégué que trente jours était déjà passés depuis la fin de la durée du mandat de Neves. En réalité, Toffoli a redistribué les procès seulement 14 heures après la fin de ce mandat.

5. La réaction de Gilmar a été de déterminer que son équipe examine les comptes du TSE et prennent les mesures nécessaires à ce travail. Tout cela pour entraver la demande de redistribution faite par Aragão.

Avec le pouvoir d’enquêter sur les comptes de campagne, Gilmar pourra s’accrocher à n’importe quel détail pour les contester. Et en les contestant, Dilma ne pourra pas assumer la présidence le 18 Décembre.

Le coup final - déjà prévu - sera de travailler un curieux concept sur la caisse officielle (Caixa 1 - en opposition avec la Caixa Dois – Caisse noire NdT). Gilmar alléguera qu’une partie du financement de la campagne officielle, à savoir de la Caixa 1, a quelque rapport avec les ressources dénoncées par l’opération Lava Jato (actuel procès sur la corruption de la Petrobras. Par ses développements spectaculaires – mise en examen des dirigeants de six parmi les plus importantes entreprises brésiliennes – cette affaire, qui arrangeait l’opposition quand il s’agissait d’accuser le PT, commence désormais à donner des sueurs froides à celle-ci NdT). L’action de Gilmar profitera de l’énorme tapage autour de Lava Jato pour consommer le coup d’état.

Toffoli a été nommé à ce poste par l’ancien président Lula. Jusqu’à l’épisode actuel, il risquait de rester dans l’histoire comme l’un des juges les moins bien préparés de la Cour suprême.

Avec l’opération en cours, il risque de rester dans l’histoire d’une façon plus dépréciative encore. L’histoire le mettra dans une galerie aux côtés de ses pairs, les célèbres Cabo Anselmo (2) et Joaquim Silvério dos Reis (3).

Hier, lors d’un dîner en l’honneur du président de la Cour Suprême Ricardo Lewandowski, l’ancien gouverneur de São Paulo Claudio Lembo se disait stupéfait par un discours de Toffoli, pendant la journée, dans lequel ce dernier faisait les éloges du coup d’État de 1964.

S’il y a quelque fait illégal dans les comptes de campagne de Dilma, il faut que la justice suive son cours. Le fait est que l’opération armée par Toffoli et par Gilmar est truffée d’irrégularités ; c’est un vrai coup d’État.

S’il n’y a pas de réaction forte dans le pays de la part d’esprits légalistes, le coup sera consommé dans les prochaines semaines.

Luis Nassif

Note du traducteur : il est impossible de traduire tous les articles sur ce sujet parus dans la blogosphère brésilienne d’information alternative. Toutefois, ce scénario est considéré comme crédible. Certains disent qu’en cas d’irrégularités dans ses comptes de campagne, Dilma pourrait quand même assumer la présidence en décembre, mais que le processus d’impeachment serait mis en place. Avec une bagarre juridique dantesque et une instabilité politique qui fragiliserait sans doute l’économie du pays. Et cela pourrait durer longtemps, quand on connaît l’habileté des juristes brésiliens (on se souvient du projet de loi sur la Ficha limpa - qui empêche les politiques élus et déjà condamnés de se représenter – qui avait été bloqué pendant des mois à cause d’un subjonctif !)

PS : apprenez le portugais !

Traduit par Lulu pour Si le Brésil m’était traduit...

»» http://jornalggn.com.br/noticia/armado-por-toffoli-e-gilmar-ja-esta-em...

(1) Mendes est connu pour ses décisions systématiquement opposées au PT, quel que soit le dossier, si celui-ci implique ce parti. En outre, le ministre passe son temps à faire des déclarations publiques contenant des attaques contre le PT. Ainsi, étant donné le climat politique tendu que connaît le pays, on peut s’attendre à ce qu’il trouve le moyen de désapprouver les comptes de Dilma.

(2) José Anselmo dos Santos, dit Cabo Anselmo, agent du gouvernement militaire, infiltré au sein des mouvements d’extrême gauche pendant la dictature. Il est le responsable de la mort de plusieurs d’entre eux, ainsi que de sa femme enceinte, qu’il avait dénoncée à la police. Elle n’a pas résisté à la torture.

(3) Joaquim Silvério dos Reis, membre de la Conjuration Mineira (Inconfidência Mineira – 1789), qu’il trahit en échange de l’annulation de sa dette envers l’État.


URL de cet article 27440
  
AGENDA

RIEN A SIGNALER

Le calme règne en ce moment
sur le front du Grand Soir.

Pour créer une agitation
CLIQUEZ-ICI

Roberto Saviano. Gomorra. Dans l’empire de la camorra. Gallimard, 2007.
Bernard GENSANE
Il n’est pas inutile, dans le contexte de la crise du capitalisme qui affecte les peuples aujourd’hui, de revenir sur le livre de Roberto Saviano. Napolitain lui-même, Saviano, dont on sait qu’il fait désormais l’objet d’un contrat de mort, a trouvé dans son ouvrage la bonne distance pour parler de la mafia napolitaine. Il l’observe quasiment de l’intérieur pour décrire ses méfaits (je ne reviendrai pas ici sur la violence inouïe des moeurs mafieuses, des impensables tortures corporelles, véritable (...)
Agrandir | voir bibliographie

 

"L’un des grands arguments de la guerre israélienne de l’information consiste à demander pourquoi le monde entier s’émeut davantage du sort des Palestiniens que de celui des Tchétchènes ou des Algériens - insinuant par-là que la raison en serait un fonds incurable d’antisémitisme. Au-delà de ce qu’il y a d’odieux dans cette manière de nous ordonner de regarder ailleurs, on peut assez facilement répondre à cette question. On s’en émeut davantage (et ce n’est qu’un supplément d’indignation très relatif, d’ailleurs) parce que, avant que les Etats-Unis n’envahissent l’Irak, c’était le dernier conflit colonial de la planète - même si ce colonisateur-là a pour caractéristique particulière d’avoir sa métropole à un jet de pierre des territoires occupés -, et qu’il y a quelque chose d’insupportable dans le fait de voir des êtres humains subir encore l’arrogance coloniale. Parce que la Palestine est le front principal de cette guerre que l’Occident désoeuvré a choisi de déclarer au monde musulman pour ne pas s’ennuyer quand les Rouges n’ont plus voulu jouer. Parce que l’impunité dont jouit depuis des décennies l’occupant israélien, l’instrumentalisation du génocide pour oblitérer inexorablement les spoliations et les injustices subies par les Palestiniens, l’impression persistante qu’ils en sont victimes en tant qu’Arabes, nourrit un sentiment minant d’injustice."

Mona Chollet

Hier, j’ai surpris France Télécom semant des graines de suicide.
Didier Lombard, ex-PDG de FT, a été mis en examen pour harcèlement moral dans l’enquête sur la vague de suicides dans son entreprise. C’est le moment de republier sur le sujet un article du Grand Soir datant de 2009 et toujours d’actualité. Les suicides à France Télécom ne sont pas une mode qui déferle, mais une éclosion de graines empoisonnées, semées depuis des décennies. Dans les années 80/90, j’étais ergonome dans une grande direction de France Télécom délocalisée de Paris à Blagnac, près de Toulouse. (...)
69 
L’UNESCO et le «  symposium international sur la liberté d’expression » : entre instrumentalisation et nouvelle croisade (il fallait le voir pour le croire)
Le 26 janvier 2011, la presse Cubaine a annoncé l’homologation du premier vaccin thérapeutique au monde contre les stades avancés du cancer du poumon. Vous n’en avez pas entendu parler. Soit la presse cubaine ment, soit notre presse, jouissant de sa liberté d’expression légendaire, a décidé de ne pas vous en parler. (1) Le même jour, à l’initiative de la délégation suédoise à l’UNESCO, s’est tenu au siège de l’organisation à Paris un colloque international intitulé « Symposium international sur la liberté (...)
19 
"Un système meurtrier est en train de se créer sous nos yeux" (Republik)
Une allégation de viol inventée et des preuves fabriquées en Suède, la pression du Royaume-Uni pour ne pas abandonner l’affaire, un juge partial, la détention dans une prison de sécurité maximale, la torture psychologique - et bientôt l’extradition vers les États-Unis, où il pourrait être condamné à 175 ans de prison pour avoir dénoncé des crimes de guerre. Pour la première fois, le rapporteur spécial des Nations unies sur la torture, Nils Melzer, parle en détail des conclusions explosives de son enquête sur (...)
11 
Vos dons sont vitaux pour soutenir notre combat contre cette attaque ainsi que les autres formes de censures, pour les projets de Wikileaks, l'équipe, les serveurs, et les infrastructures de protection. Nous sommes entièrement soutenus par le grand public.
CLIQUEZ ICI
© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.