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Pesticides : l’Agriculteur qui cache la forêt.

Parce qu’il m’est devenu de plus en plus difficilement supportable d’entendre ou lire des réquisitions à charge de l’Agriculteur, et parce que tout accusé a le droit de se défendre, permettez-moi en qualité de fille, petite-fille et sœur de viticulteurs, et en tant que collatérale d’une victime des pesticides de présenter à mon tour ces réquisitions à la faveur de nos Agriculteurs.

Ainsi tirez-vous à vue sur le paysan, selon vous responsable de toutes les misères environnementales sinon de la terre du moins de l’hexagone. Aussi présentez-vous une vision fort réductrice du problème , en effet si l’on s’en tient à vos seuls arguments on pourrait croire que le paysan dans son étable, dans son chai ou dans sa serre fabrique lui-même les produits phytosanitaires ou antibiotiques , se procurant par on ne sait quel procédé miracle les différents composants chimiques pour élaborer ses mixtures , une fois tout cela savamment orchestré , il administrerait les médicaments à son bétail et pulvériserait ses végétaux sans qu’aucun autre maillon de la chaîne n’intervienne.

Vous semblez mépriser totalement le paysan , acteur de cette catastrophe sanitaire certes , mais que faîtes-vous de l’INRA , qui brilla par sa perspicacité dans l’affaire du gaucho ; que faîtes-vous du ministère de l’agriculture et de sa Direction Générale de l’alimentation chargée entre autres de la surveillance de la mise sur le marché ; que faîtes-vous de la Commission d’études de la toxicité qui composée de scientifiques soi-disant indépendants doit évaluer les risques des pesticides avant leur mise sur le marché ;que faîtes-vous des autorisations de mise sur le marché de complaisance délivrées en l’absence de la connaissance exacte de la composition du produit au nom du respect du secret professionnel mais au mépris de toute considération de sécurité sanitaire ; que faîtes-vous des laboratoires phytopharmaceutiques qui paient très cher les campagnes de désinformation et la corruption à tous les niveaux du pouvoir ?

Depuis 1962, le cri d’alarme de madame Rachel Carson dans son best-seller « printemps silencieux », aucun gouvernement de tout parti politique, aucun organisme national ou européen ni même mondial, aucun expert, n’a réussi à s’opposer, à faire reculer l’industrie agrochimique. Au contraire, les gouvernements ont autorisé l’écoulement de stocks de pesticides suite à leur interdiction, parce qu’il coûterait moins cher aux firmes d’indemniser d’éventuelles victimes que de perdre des milliers de litres de produits ! Tout cela au nom des millions de dollars que pèsent ces multinationales.

Et vous osez reprocher au paysan d’employer les pesticides qu’on lui vend, sous prétexte qu’il doit subvenir aux besoins de ses enfants ? Oubliez-vous qu’au lendemain de la seconde guerre mondiale, on a présenté à l’Agriculteur français, les pesticides comme le remède à tous les maux ? Avec ça, il allait pouvoir nourrir la terre entière, plus jamais de famine ! Ah, oui, mais pour produire plus, il fallait produire plus vite et donc s’équiper en matériel agricole performant et très coûteux, le paysan mit le pied dans l’endettement, et se trouva ainsi pieds et poings liés à l’industrie agrochimique. Il l’est toujours aujourd’hui.

Ne croyez pas que j’encense le paysan tant que vous le méprisez. Pour moi aussi le qualificatif de paysan, d’Agriculteur se mérite. Les individus torturant leurs bêtes, méprisant la nature, trahissant la terre qui les accueille et leur fournit leur pain, ne sont pas des Agriculteurs mais des capitalistes !

Malheureusement, ce ne sont pas ces gens-là qui fréquentent des années plus tard les services d’oncologie.

Enfin, il manque à votre réquisitoire un acteur principal : le consommateur. Vous savez celui au nom duquel la France a modifié le visage de son Agriculture, celui qui veut toujours consommer plus et moins cher , celui qui veut des fraises en hiver et des oranges en été , celui qui veut des fruits et légumes plus beaux que sains .

Parce que la satisfaction de ces besoins toujours plus ahurissants fut le point de départ de la débâcle de notre Agriculture, je reste persuadée que ce n’est que par un changement de comportement du consommateur que l’on rétablira l’équilibre entre l’Homme et la Terre.

C’est pourquoi, je vous demande de faire preuve d’indulgence à l’égard de notre cher paysan.

Marie-Lys Bibeyran

COMMENTAIRES  

29/06/2013 17:48 par bibeyran marie-lys

Plus d’info sur le sujet sur le site suivant : http://web.paysan.free.fr/pesticides/

29/06/2013 20:48 par Lionel

Une donne qui change les points de vue :
Les agriculteurs ont du mal à s’inscrire dans une démarche de reconversion vers une pratique d’agro-écologie et les raisons que l’on invoque sont toujours une question de revenus et d’investissements mais il ressort d’une étude de l’INRA de 2009 "Agriculture et biodiversité" que les raisons en sont surtout l’image qu’ils donnent à leurs pairs.
Dans un village, si un agriculteur s’y met, d’autres suivront à plus ou moins long terme.
Ils ne veulent à aucun prix être mis au ban.
Quels sont donc les facteurs influençant leur décision ?
Les épouses et compagnes !!!
Si vous avez le désir de voir vos agriculteurs (re)devenir des paysans, alors parlez à leurs femmes !

29/06/2013 21:24 par rouge de honte

Il ne faut pas non plus se voiler la face, c’est toujours par appât du gain que les paysans on fait des âneries. Les produits chimiques n’ont jamais été utilisés dans le but de nourrir le monde, ils ont simplement porter l’espoir de voir grossir les comptes en banque des chimistes et des épandeurs..
Les dettes c’est pareil, nous les faisons dans le but de devenir plus riche.
Sur les produits il y a des têtes de morts...il faut être stupide pour arroser les cultures avec.
Et le drame c’est que les âneries ont été faite avec tant de zèle que le point de non retour est probablement atteint.

29/06/2013 22:58 par Lionel

@Rouge de honte, c’est la conjonction de multiples facteurs qui donne l’aspect d’une quasi religion de certains agriculteurs pour les techniques dites modernes. Leurs propres pères leur ont expliqué de quelle manière ils étaient "primitifs" dans leurs pratiques culturales et combien l’avenir du monde dépendait de leur volonté à pratiquer le plus vite possible une agriculture industrialisée.
Il est faux de dire qu’ils ont opté pour plus d’argent, les paysans n’ont pas tous pratiqué le marché noir, il y en a eu aussi pour nourrir la Résistance sans aucun argent en retour, pour héberger au risque de leurs vies juifs ou communistes.
L’idéologie dominante les a mis dans une impasse, ils ne sont plus du tout convaincus que les pesticides sont nécessaires et ne demandent qu’à revenir à plus propre mais leurs terres sont pourries par des décennies de contamination, ils n’ont donc pas d’agrément et doivent vendre les produits quasi à perte pendant une période de conversion ( 3 à 5 ans ).
Les aides au "Bio" sont inexistantes ou presque, ils sont déjà la corde au cou avec les banques et on leur propose de s’endetter encore plus ???
Les gens auxquels vous pensez ne sont qu’une minorité, les autres, les plus nombreux se battent pour gagner au moins le SMIC et aimeraient revivre ce que vivaient leurs grands-parents.
N’oubliez pas que nombreux ont été les paysans bretons et d’ailleurs qui ont été emprisonnés par l’État afin que l’on rase leurs haies au bulldozer au nom du remembrement, alors soyons justes et équitables, la version stal des paysans est vraiment idéologique et pas du tout une quelconque réalité !

30/06/2013 08:55 par rouge de honte

Les paysans n’ont jamais acceptés d’avoir le niveau de vie d’un ouvrier, ils veulent le niveau de vie d’un patron. Est-ce légitime ?
Au fur et à mesure que le niveau de vie augmente, les paysans jettent l’éponge en trouvant des emplois mieux payés. Il en reste de moins en moins et l’économie les encourage à grossir ; ce qu’ils font volontiers par appât du gain...
La sélection est ainsi faite. Subventionnés, presque fonctionnaire, sous d’autres régimes nous les aurions critiqués.
Devons-nous les blâmer ? Devons-nous blâmer un militaire ou un policier ?

Le problème est ailleurs :
Nous sommes tous coupable d’avoir abandonné l’agriculture vivrière, celle qui faisait vivre nos grands-parents.

Nous avons laissé notre souveraineté alimentaire à une poignée d’individus qui n’en sont pas dignes et à quelques industriels qui eux sont des criminels.

Vous avez quelques économies ? Vous avez un peu de temps pour des loisirs ? Et bien achetez un lopin de terre. Trois légumes vous rapporterons plus d’intérêt que ce que vous donnerai une banque...la santé en plus !

30/06/2013 11:27 par El Hierro

Tant que leur syndicat majoritaire (je vous laisse chercher lequel) aura autant de partisans, je ne pourrai pas excuser les paysans.
Ce syndicat a lutté contre l’inscription au tableau des maladies professionnelles , des maladies liées aux pesticides .
Ce syndicat est de toutes les compromissions.
Comme nous, citoyens, qui continuons de voter pour nos bourreaux : c’est de la paresse intellectuelle, le refus d’admettre que la bonne parole des dominants doit être mise en doute.

30/06/2013 11:30 par anonyme

Il ne faut pas oublier le rôle de la propagande.

Nombre de paysans (à force d’être méprisés ?) sont persuadés par les officines de vente, dont les représentants ont le look des dominants, parlent un français sans accent du terroir, voire l’anglais, que les semences ne les nourriraient pas si elles n’étaient pas "arrosées" de... divers produits qui n’existaient pas du temps de nos grands-pères... Hypnotisés, ils ne se demandent pas comment il se fait que ceux-ci (parfois) survivent.

Les paysans, par ailleurs, aimaient leur travail pour ce qu’il fait sortir à l’air pur... Ils croient toujours que l’air est pur, et la rosée matinale faite d’une d’eau également la plus pure. Et ils ne suivent pas les recommandations des officines qui leur prescrivent de sortir aux champs casqués, masqués, avec une combinaison, etc... C’est pourquoi il tombent malades beaucoup plus tôt (encore) que les habitants des villes.

La gauche en France sait les accuser de tous les maux dont elle souffre, en ce qui concerne la nourriture absorbée par les gens des villes, mais pas seulement. Car une grande partie se tournera vers le FN.et la gauche de la gauche méprisera encore plus les paysans, mettant son fort pourcentage sur leur dos.

Qui que c’est qui aura gagné ?.

Il y a effectivement de tout parmi "les paysans" : de ceux qui, par appât d’un gain facile, achètent des terres dans un pays où.la main d’œuvre est censée être moins chère, à condition de pouvoir la cravacher, à ceux qui n’ont pas Internet pour s’informer, en passant par ceux qui ne savent à quel saint dit "de gauche" se vouer. Et pourtant, ils voudraient bien.

30/06/2013 15:49 par anonyme

Vidéo : Malade, un agriculteur traîne Monsanto devant la justice

Documentaire diffusé par France 2 en Avril 2012. Sur Youtube, l’interview des réalisateurs de
La mort est dans le pré
et un extrait

Youtube déclare ici : "Le compte YouTube associé à cette vidéo a été clôturé, car nous avons reçu, à plusieurs reprises, des notifications de tiers pour atteinte aux droits d’auteur"

C’est bête pour les citoyens qui veulent être informés...

Peut-être une version complète sur Dailymotion : http://www.dailymotion.com/video/xq8fg9_la-mort-est-dans-le-pre_webcam

30/06/2013 16:23 par Feufollet

Oui, bien sûr je ne tire pas à vue
Sur tous paysans qui passent avec leurs épandeuses à poisons
Je ne peux pas tirer non plus sur les ouvriers de chez Dassault
Ni sur les employés des centrales nucléaires
L’inconscience, l’ignorance et les contingences matérielles
Nous ont rendus otages d’un système productiviste
Qu’il soie capitaliste ou serait-il même socialiste
Mais je n’arriverai jamais à nous pardonner
L’indifférence et l’incohérence qui nous retient dans le silence
Tout en s’exhaltant sur le tour de France

01/07/2013 09:09 par gérard

Ah non !
Il faut arrêter ce discours :

au lendemain de la seconde guerre mondiale, on a présenté à l’Agriculteur français, les pesticides comme le remède à tous les maux ? Avec ça, il allait pouvoir nourrir la terre entière, plus jamais de famine !

Mais c’est un discours archi-réchauffé ! Il était peut-être vrai dans les années 1960 !
Comme si ce n’était qu’en 2013 qu’on ne faisait que découvrir le problème des pesticides,des nitrates et de l’agrochimie en général !
Coucou j’arrive !
Et par exemple de la vigne, parlons en : les traitements avec un dérivé d’arsenic qui ont eu beaucoup de mal à être interdits, la FNSEA freinant des quatre fers, et je t’analyse et re-analyse avec la MSA (mutualité sociale agricole) pour savoir si c’est dangereux ou pas !
Mais ça fait au strict minimum 40 ans que le signal d’alarme avait été tiré sur les dangers de l’agro-chimie, et qu’ont-ils fait les agriculteurs...reconduit les sempiternels pontes de la FNSEA !
Milieu des années 80, ayant des aspirations de reconversion en maraîchage (en bio) j’ai donc suivi des cours pour obtenir un diplôme afin de m’installer en agriculture, deux constatations :
- cours essentiellement basés sur la chimie (on utilise bien en agronomie pour le travail de la terre le Soltner, ouvrage de référence, mais on se garde bien (on "oublie" !) tous ses aspect écologiques...
- Examens HONTEUSEMENT faciles de manière à ce que les "Fils de, ou Fille de" ( Agriculteurs ou très gros propriétaires terriens) aient AUTOMATIQUEMENT ce diplôme, pour bénéficier des subventions agricoles...Et les connaissances dans tout ça, les quoi ?...
Il arrive un moment où il faut arrêter de dire "c’est la faute aux autres",même si je suis d’accord avec une bonne partie de l’article sur la responsabilité disons du Système en général...
Par contre il faudrait dénoncer le peu de moyens (surtout en ce qui concerne la formation) qui sont donnés à l’agriculture biologique, mais il faudrait que ce soit les agriculteurs qui le fassent, ils en sont très loin !

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