Le 28 février, j’avais publié un billet montrant l’étrange similitude entre une image emblématique des « émeutes » de 2005, une image des affrontements à Villers-le-Bel en 2007 et une image de la révolution tunisienne. On y voyait chaque fois, dans une lumière nocturne orangée, un jeune défier l’autorité en levant les bras.
Dans les deux premiers cas, il s’agissait d’émeutiers, de « jeunes voyous ». Dans le second cas, du symbole d’un peuple qui se soulevait, qui se révoltait pour conquérir sa liberté.
L’image emblématique de 2005 a refait surface le 9 novembre dernier, lorsque l’affiche des jeunes du FN a été dévoilée.
Cette image d’une France coupée en deux, avec à gauche la misère et la violence, et à droite la tranquillité et la convivialité d’un village a suscité beaucoup de réactions sur le net et dans les journaux, et des parodies sont apparues.
Il est intéressant de noter que l’affiche qui apparait actuellement sur le site des jeunes du Front National a été modifiée.
L’image des « émeutes » de 2005 de la BBC a été remplacée, retouchée comme la précédente, et assombrie.
Regardons dans le détail. Elle se compose de différents éléments qui ont été assemblés et superposés.
La voiture qui brûle à gauche a été reprise sur le site d’une agence photo, Anakaopress. Il s’agit en fait d’images d’émeutes à St Denis de la Réunion, mis en ligne en novembre 2010, mais prises en 2009 ou début 2010.
Plus intéressant, la voiture noire en flammes ressemble très fortement à celle photographiée début août 2011 par Toby Melville à Ealing, dans les faubourgs de Londres.
Quant à l’immeuble en fond, il s’agit d’une des barres de la cité des 4000 à la Courneuve, dont je suppose que la photographie originale devait se rapprocher de celle-ci :
Sous le prétexte de montrer une opposition extrême de situations, entre le chaos et l’ordre, l’affiche ne cherche pas à être vraie ni même vraisemblable. Forçant le trait, faisant des raccourcis idéologiques, superposant des ingrédients, ce sont les perspectives des images elles-mêmes qui s’en trouvent faussées.
C’est visible par les différences d’éclairage du sans-abri incrusté sur fond d’images de voitures qui brûlent, mais plus encore sur la photo du village qui nous fait apercevoir en arrière plan, et de manière plutôt irréelle un autre village avec un clocher, incrusté sur une image de la campagne.
Je résume :
– une réalité noircie
– une obsession du recadrage
– des perspectives faussées
– une campagne truquée
C’est parti pour la campagne des présidentielles 2012 avec les jeunes du FN.
deldebbio.net