Après la tournée de Guaidó à Washington, l’Administration Trump alloue plus d’argent au "changement de régime" au Venezuela

L’auteur : Cavan Kharrazian , chercheur au Center for Economic and Policy Research (Washington DC), est titulaire d’une Maîtrise en études du développement de l’Institut international d’études sociales de La Haye, où il a exploré les modèles de développement alternatifs et les questions agraires, alimentaires et environnementales. Il a participé à des recherches avec des mouvements sociaux au Mexique qui luttent contre l’accaparement de l’eau, et poursuit son activisme universitaire en solidarité avec les mouvements des Amériques.

Le voyage de haut niveau de Juan Guaidó à Washington au début du mois semble porter ses fruits. Alors qu’il a reçu une ovation bipartisane lors du discours sur l’état de l’Union de M. Trump, assisté à une conférence de presse conjointe avec la démocrate Nancy Pelosi et rencontré en privé le vice-président Pence dans le bureau ovale, l’administration de M. Trump vient pour sa part d’allouer des millions de dollars supplémentaires pour soutenir les efforts de changement de régime au Venezuela.

Selon la justification du budget du Congrès pour l’année fiscale 2021, récemment publiée par le Département d’État, les dépenses consacrées au changement de régime au Venezuela ont reçu une impulsion significative.

L’administration Trump a demandé 200 millions de dollars du Fonds de Soutien et de Développement économique (ESDF, sigles en anglais) pour l’exercice 2021, « pour faire face à la crise au Venezuela« , qui comprend une programmation modulable « pour soutenir une transition démocratique et les besoins connexes au Venezuela ». Ce qui représente 22 fois plus que la demande de l’administration pour l’exercice 2020, et environ 26 % de la demande de financement total du ESDF pour l’ensemble de l’hémisphère occidental.

Souvent, la destination finale de ces fonds peut changer et, compte tenu de la situation politique, ils finissent par être dépensés en dehors du territoire vénézuélien. L’année dernière, Trump a détourné plus de 40 millions de dollars de l’ »aide » centraméricaine au profit direct de l’opposition vénézuélienne dirigée par Juan Guaidó, pour financer, entre autres, les salaires, les billets d’avion et la formation technique du personnel de Guaidó – dont la majorité réside à Washington, DC.

Parmi les autres postes budgétaires, on peut citer l’Agence Américaine pour les Médias Mondiaux (USAGM), qui a demandé un budget de 637 millions de dollars pour « informer, engager et connecter les gens du monde entier en faveur de la liberté et de la démocratie » tout en donnant la priorité aux « régions d’importance stratégique pour la sécurité nationale des États-Unis » et en « assurant une couverture complète du conflit actuel de gouvernance au Venezuela« . Ce chiffre est une estimation prudente, car les deux budgets précédents ont largement dépassé des demandes similaires, avec des dépenses de plus de 810 millions de dollars rien que pour l’année dernière. On ne sait toutefois pas exactement quelle part de ce budget financera les différentes campagnes médiatiques de l’USAGM au Venezuela.

Un autre nouveau développement dans le budget de cette année est le transfert de 25 millions de dollars du Fonds pour le Progrès Diplomatique vers le « Contrôle international des stupéfiants et l’application de la loi », citant la « transition politique au Venezuela » comme l’une des priorités politiques de ce financement. Bien que restant vague sur la façon dont l’argent sera utilisé, il semble en phase avec la rhétorique politique du « narcoterrorisme« , que l’administration Trump et ses alliés dans la région ont imposé à certains des gouvernements qu’ils ont cherché à renverser.

Bien qu’une partie des fonds du budget de cette année soit destinée à l’aide humanitaire au Venezuela, dont 5 millions de dollars pour le programme vénézuélien de santé mondiale de l’USAID, ce n’est qu’une goutte dans l’océan par rapport à l’impact dévastateur que les sanctions étasuniennes ont eu sur le pays depuis qu’elles ont été fortement accrues en 2017.

Les sanctions sur les transactions financières avec les entreprises vénézuéliennes et les sanctions économiques contre la compagnie pétrolière nationale du Venezuela ont coûté au pays les milliards de dollars dont il a besoin pour maintenir les infrastructures vitales en matière de santé, d’eau et de sécurité alimentaire, tout en empêchant les transactions bancaires, les paiements et donc l’importation de médicaments et de nourriture qui pourraient sauver des vies. Le résultat a été la mort de dizaines de milliers de Vénézuéliens et de millions de réfugiés pour des raisons économiques. Ces sanctions sont illégales tant en vertu des traités que les États-Unis ont signés, qu’en vertu du droit international.

Avec la tournée internationale de Juan Guaidó et les promesses vides de soutien de Trump au « peuple vénézuélien« , la résolution pacifique et diplomatique de la crise politique semble rester lointaine. Le nouveau budget de Trump, au lieu de se concentrer sur les solutions diplomatiques, qui serait de faciliter une aide humanitaire dépolitisée et d’aider à la reprise de l’économie vénézuélienne, ne fait que miser de plus belle sur une stratégie de changement de régime qui a échoué et qui n’a fait que nuire à des millions de Vénézuéliens, tout en coûtant aux contribuables états-uniens des centaines de millions de dollars en impôts.

Cavan Kharrazian

Source de l’article : Center for Economic and Policy Research, Washington DC, https://cepr.net/after-guaidos-dc-circuit-trump-admin-earmarks-more-money-for-regime-change-in-venezuela/

Traduit de l’anglais par Thierry Deronne

 https://venezuelainfos.wordpress.com/2020/02/25/apres-la-tournee-de-guaido-a-washington-ladministration-trump-alloue-plus-dargent-au-changement-de-regime-au-venezuela-cavan-kharrazian-cepr/
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COMMENTAIRES  

02/03/2020 12:01 par Assimbonanga

Hé oui... Voilà le rôle pacifiste de Trump ! J’espère que c’est clair ? Les USA restent les fouteurs de merde planétaires. Partout, il faut qu’ils fourrent leur interventionnisme et cassent toute dynamique nationale.
France, juin 2019 :

Depuis trente-huit ans, ce programme de la French-American Foundation, présidée depuis janvier, en France, par Alain Papiasse, président de la Banque de financement et d’investissement (CIB) du groupe BNP Paribas, et de BNP Paribas USA , a désigné des centaines de têtes bien faites, âgées de moins de 40 ans et déjà sur les rails du pouvoir. Et peut-être de la renommée. Emmanuel Macron et Cédric Villani s’y sont rencontrés en 2012. D’Alain Juppé, en 1981, à Victor Lugger, le créateur du groupe de restauration Big Mamma, en 2018, la liste est longue. De part et d’autre de l’Atlantique, des dirigeants issus du monde de l’entreprise, de la haute fonction publique, de l’armée, des médias ou encore de la recherche font tous partie du même réseau : celui des Young Leaders.
L’opération, sponsorisée par le Boston Consulting Group (BCG), le chasseur de têtes Egon Zehnder , la banque d’affaires J.P. Morgan et le groupe de restauration collective et de services aux entreprises Sodexo, a officiellement pour objectif d’accroître la coopération entre la France et les Etats-Unis. Chaque année, la vingtaine d’« élus » français et américains suit ainsi deux séminaires de cinq jours, sur deux ans. De quoi resserrer les liens et les réseaux transatlantiques, et pas seulement.
Le jury présidé par Agnès Touraine (YL 1996) a sélectionné dix profils, cinq femmes et cinq hommes, qui composent la partie française de la promotion 2019. S’y mêlent trois start-uppers, un super consultant, quelques institutionnels dont une ex-députée LREM , une scientifique, une personnalité de la culture et une cadre dirigeante de grand groupe. Tous se retrouveront en séminaire à Chicago en octobre prochain ; ils y rencontreront leurs homologues américains. Source : Les Echos

Sodexo ? Ah oui ! Ce groupe est bien sûr intervenu à la Convention Citoyenne pour le Climat : intervenants de la session 5
Comment peut-on croire un seul instant que les 150 citoyens lambda tirés par le sort vont se comporter en hommes libres de toute pression ? Cela n’a rien à voir avec la démocratie participative ou le communalisme ! C’est le fait du prince, Macron et rien d’autre, une astuce, machiavélique. Notre Young Leader passe par-dessus bord la représentation parlementaire et les syndicats mais il mettra en avant sa convention pseudo citoyenne. Nous allons boire le calice jusqu’à la lie.

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