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Auteur : Domenico LOSURDO

Industrie du mensonge et guerre impérialiste

Domenico LOSURDO
Dans l’histoire de l’industrie du mensonge comme partie intégrante de l’appareil militaro-industriel de l’impérialisme l’année 1989 est un tournant. Nicolae Ceaucescu est encore au pouvoir en Roumanie. Comment le renverser ? Les médias occidentaux diffusent massivement dans la population roumaine les informations et les images du « génocide » opéré à Timisoara par la police précisément de Ceaucescu. 1. Les cadavres mutilés Qu’était-il arrivé en réalité ? Se prévalant de l’analyse de Debord sur la « société du spectacle », un illustre philosophe italien (Giorgio Agamben) a magistralement synthétisé l’affaire dont il s’agit : « Pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, des ca­davres enterrés depuis peu ou alignés sur les tables des morgues ont été déterrés à la hâte et torturés pour simuler devant les caméras de télévision le génocide qui devait légitimer le nouveau régime. Ce que le monde entier avait sous les yeux en direct comme la vérité vraie sur les écrans de (…) Lire la suite »

La démocratie ? Uniquement pour « le peuple des seigneurs »

Domenico LOSURDO

Domenico Losurdo est un philosophe communiste italien. Solidaire l’a rencontré juste avant une conférence sur le sujet de son dernier livre, Contre-histoire du libéralisme. Interview en rouge vif.

Avez-vous voulu faire un « Livre noir du libéralisme » ? Domenico Losurdo. Non. Des gens font la comparaison avec Le Livre noir du communisme (livre de propagande anti-communiste écrit en 1997 qui a reçu un écho retentissant avant d’être discrédité par les historiens et la moitié de ses contributeurs, NdlR). Mais cette Contre-histoire du libéralisme, à la fin, contient un paragraphe final qui parle d’héritage permanent du libéralisme. Si le Livre noir publiait une nouvelle édition avec un paragraphe final sur l’héritage permanent du communisme, là, la comparaison tiendrait. Pourquoi avoir écrit ce livre ? Domenico Losurdo. L’idéologie dominante a plusieurs aspects. D’un côté, elle décrit une hagiographie de la tradition libérale. Et, de l’autre, toute la tradition révolutionnaire, pas seulement le communisme mais même les courants les plus radicaux de la Révolution française, même la grande révolution des esclaves noirs à Saint-Domingue (aujourd’hui Haïti), est soit ignorée, (…) Lire la suite »

Gramsci, la Russie soviétique et la critique du populisme

Domenico LOSURDO
Gramsci, la Russie soviétique et la critique du populisme Domenico Losurdo 1. « Collectivisme de la misère, de la souffrance » Comme on le sait, la révolution qui fonde la Russie soviétique et qui, contre toute attente, a lieu dans un pays non compris dans les pays capitalistes les plus avancés, est saluée par Gramsci comme la « révolution contre Le capital ». Se gaussant du mécanicisme évolutionniste de la Deuxième Internationale, le texte publié sur Avanti ! le 24 décembre 1917 n’hésite pas à prendre ses distances avec les « scories positivistes et naturalistes » présentes même « chez Marx ». Oui, « les faits ont débordé les idéologies », et donc ce n’est pas la révolution d’octobre qui doit se présenter devant les gardiens du « marxisme » pour obtenir sa légitimation ; c’est la théorie de Marx qui doit être repensée et approfondie à la lumière du tournant historique qui a eu lieu en Russie [1]. Le début de cet article est sans nul doute mémorable, mais ce n’est pas une (…) Lire la suite »

De l’oubli de la Seconde période des désordres en Russie à l’oubli du Siècle des humiliations en Chine

Domenico LOSURDO
[…] Avec une longue histoire derrière elle, qui l'avait vue pendant des siècles ou des millénaires en position éminente dans le développement de la civilisation humaine, la Chine, en 1820 encore, s'honorait d'un PIB qui constituait 32,4% du produit intérieur brut mondial ; en 1949, au moment de sa fondation, la République populaire chinoise est le pays le plus pauvre, ou parmi les plus pauvres, du monde [60]. Ce qui a déterminé cet effondrement est l'agression colonialiste et impérialiste qui commence avec la Guerre de l'opium. Célébrées en termes même emphatiques par les plus illustres représentants de l'Occident libéral (qu'on pense à Tocqueville et à John Stuart Mill), ces guerres infâmes ouvrent un chapitre extrêmement tragique pour le grand pays asiatique. Le déficit dans la balance commerciale chinoise provoqué par la victoire des « narcotraficantes britanniques », la terrible humiliation subie (« Des femmes chinoises sont approchées et violées » par les envahisseurs. « Les (…) Lire la suite »

Les disciples de Goebbels à l’oeuvre contre la Syrie

Domenico LOSURDO
Quelle est la nature du conflit qui investit la Syrie depuis quelques mois ? Je voudrais avec cet article inviter tous ceux qui ont à coeur la cause de la paix et de la démocratie dans les rapports internationaux à se poser quelques questions élémentaires, auxquelles, de mon côté, j'essaierai de répondre en laissant la parole à des organes de presse et journalistes qu'on ne peut suspecter de complicité avec les dirigeants de Damas. 1. Il convient en premier lieu de se demander quelle était la condition du pays moyen-oriental avant l'arrivée au pouvoir, en 1970, des Assad (père puis fils) et du régime actuel. Eh bien avant cette date, « la république syrienne était un Etat faible et instable, une arène pour les rivalités régionales et internationales » ; les événements des derniers mois signifient le retour à la « situation précédant 1970 ». En ces termes s'exprime Itamar Rabinovitch, ancien ambassadeur d'Israël à Washington, dans The International Herald Tribune du 19-20 novembre (…) Lire la suite »
Intervention au 6° congrès National du PdCI (Partito dei Comunisti Italiani)

Reconstruire le parti communiste. Unir la gauche. Battre les droites.

Domenico LOSURDO
Je suis heureux de participer à ce qui pourrait être une relance voire un nouveau début de la présence communiste dans notre pays. Quand, il y a vingt ans fut créé Rifondazione Comunista, le climat idéologique était bien différent de celui d'aujourd'hui. Il y a vingt ans à Washington les idéologues les plus emphatiques proclamaient que l'histoire était finie : en tous cas le capitalisme avait triomphé et les communistes avaient eu le tort de se tenir du mauvais côté, et même du côté criminel de l'histoire. Nous savons aujourd'hui que ces certitudes et ses mythologies avaient fait brèche même dans le groupe dirigeant de Rifondazione Comunista. On a ainsi assisté au spectacle grotesque dans lequel un leader de tout premier plan (1) a déployé tout son talent oratoire pour démontrer que les communistes avaient toujours eu tort et avaient toujours provoqué des catastrophes en Russie comme en Italie ; et continuaient à avoir tort en Chine comme au Vietnam et, en dernière analyse même à (…) Lire la suite »

Sept points sur la Libye

Domenico LOSURDO
Désormais même les aveugles peuvent être en mesure de voir et de comprendre ce qui est en train d'arriver en Libye : 1. C'est une guerre promue et déclanchée par l'OTAN qui est en cours. Cette vérité finit par filtrer sur les organes mêmes d' « information » bourgeoise. Sur La Stampa du 25 août, Lucia Annunziata écrit : c'est une guerre « entièrement "extérieure", c'est-à -dire faite par les forces de l'OTAN » ; c'est « le système occidental, qui a promu la guerre contre Kadhafi ». Une vignette de l'International Herald Tribune du 24 août nous montre des « rebelles » qui exultent, mais ils sont commodément installés sur un avion qui porte l'écusson de l'OTAN. 2. Il s'agit d'une guerre préparée depuis longtemps. Le Sunday Mirror du 20 mars a révélé que déjà « trois semaines » avant la résolution de l'ONU étaient à l'oeuvre en Libye des « centaines » de soldats britanniques, encadrés dans un des corps militaires les plus sophistiqués et les plus redoutés du monde (SAS). Des (…) Lire la suite »
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La Syrie vue depuis l’Irak

Domenico LOSURDO
Informations tragiques et détails effarants arrivent de ce pays, mais il est difficile de distinguer entre la vérité et la manipulation, entre les protestations légitimes et les tentatives infâmes de déstabilisation. Il peut cependant s'avérer utile de regarder vers la Syrie à partir non pas de l'Occident mais, par exemple, de l'Irak. L'occasion nous en est fournie par un article de Tim Arango sur l'International Herald Tribune du 30-31 juillet. Lisons : « En Irak, la Syrie représente encore quelque chose de semblable à un oasis. Les Irakiens commencent à se réfugier là -bas pour fuir la guerre dirigée par les Usa et le bain de sang de la violence sectaire qui s'en suit. Au cours de la guerre, la Syrie a accueilli environ 300 mille réfugiés irakiens, plus que n'importe quel autre pays de la région (d'après le Haut Commissariat Onu pour les réfugiés). Ces jours-ci (1er août 2011), même si la Syrie doit faire face à ses désordres, rares sont les Irakiens qui rentrent chez eux. En (…) Lire la suite »
un pilote aux commandes d’un avion militaire est un « civil », mais un enfant qui lance des pierres est un « terroriste »

Orwell, l’OTAN et la guerre contre la Libye

Domenico LOSURDO

Les mots ont-ils encore un sens ? En lisant des articles sur la guerre de Libye dans la presse anglo-saxonne et italienne, Domenico Losurdo a été frappé par l’inversion des signifiés. La propagande de l’OTAN, comme celle imaginée par George Orwell dans son célèbre roman d’anticipation, passe d’abord par un grossier trucage sémantique.

En 1949, tandis que fait rage une guerre froide qui risque de se transformer d'un moment à l'autre en holocauste nucléaire, George Orwell publie son dernier livre et plus célèbre roman : 1984. Si le titre donne dans l'anticipation, la cible est clairement constituée par l'Union Soviétique, représentée comme le « Grand frère » totalitaire, qui rend vaine toute possibilité de communication, en subvertissant le langage et en créant une « novlangue » (newspeak), dans le cadre de laquelle tout concept se renverse en son contraire. En publiant son roman l'année même de la fondation de l'OTAN (l'organisation militaire qui prétendait défendre même la cause de la morale et de la vérité), Orwell apportait ainsi sa brave contribution à la campagne de l'Occident. Il ne pouvait certes pas imaginer que sa dénonciation allait se révéler beaucoup plus pertinente pour décrire la situation advenue, quelques années seulement après 1984, avec la fin de la Guerre froide et le triomphe des USA. De même (…) Lire la suite »
"Aube de l’odyssée" ?

Une nouvelle opération coloniale contre la Libye

Domenico LOSURDO

Après avoir bloqué par un veto solitaire une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU qui condamnait l’expansionnisme colonial d’Israël dans la Palestine occupée, à présent les USA se posent à nouveau en interprètes et champions de la « communauté internationale ». Ils ont convoqué le Conseil de sécurité, non pas pour condamner l’intervention des troupes saoudiennes au Bahrein mais pour exiger et finalement imposer le lancement de la « no-fly zone » et d’autres mesures de guerre contre la Libye.

D'ailleurs, quelques mesures de guerre avaient déjà été entreprises unilatéralement par Washington et par certains de ses alliés : comme le démontrent l'approche de la flotte militaire étasunienne au large des côtes libyennes et le recours à l'instrument colonialiste classique de la politique de la canonnière. Mais Obama ne s'est pas arrêté là : ces jours derniers il avait plusieurs fois intimé à Kadhafi de façon menaçante d'abandonner le pouvoir ; il avait appelé l'armée libyenne à opérer un coup d'Etat. L'aspect le plus grave est encore ailleurs. Avec la Grande Bretagne et la France, les USA ont depuis quelques temps lâché leurs agents pour mettre les fonctionnaires libyens face à un dilemme : ou passer du côté des rebelles ou bien être déférés à la Cour pénale internationale et passer le reste de leur vie en prison, en tant que responsables de « crimes contre l'humanité ». Pour couvrir la reprise des plus infâmes pratiques colonialistes, l'habituel, gigantesque appareil (…) Lire la suite »