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Auteur : Georges DARIEN

Socialisme et anarchie (II)

Georges DARIEN

Le voleur poursuit sa quête : donner un sens à son existence. Sa galerie de portraits et de doctrines s'enrichit ici de ceux des anarchistes de son époque. Elle montre qu'il est difficile de dire que les précédents portraits, ceux des socialistes, sont sortis de la plume d'un anarchiste... au sens des programmes et des partis du moins. Où l'on verra aussi que le copier-coller d'aujourd'hui se pratiquait alors de façon plus matérielle. Enfin que le droit à la caricature ne doit pas être réservé à celle d'un seul prophète. Mauris Dwaabala

L'IDÉE MARCHE Une lettre de Roger-la-Honte m'a appelé à Rouen ; il s'agissait d'une taxe extraordinaire à prélever sur un capital déterminé. Nous avons opéré la saisie pendant la nuit, afin de ne déranger personne, et nous sommes partis ensemble pour l'Angleterre. Je suis très content d'être revenu à Londres. L'Anarchie est un peu persécutée en ce moment et ses grands hommes se sont réfugiés sur le sol britannique. Ces théoriciens, ces faiseurs de systèmes qui ont si souvent déjà, dans leurs diverses publications, tracé la voie de l'humanité, ont sûrement une vision nette des choses, la prescience de l'avenir ; ils connaissent le secret du futur, et peut-être... Mais pourquoi pas ? Pourquoi me refuseraient-ils le secours de leur expérience ? Pourquoi ne voudraient-ils pas m'indiquer la route qu'il faut suivre ? Car ils ne doivent pas se payer de mots, ceux-là ; et s'ils parlent, ce doit être pour dire quelque chose. Si j'allais les voir ?... Oui, mais ils sont tant... Ils sont (…) Lire la suite »

Socialisme et anarchie (I)

Georges DARIEN

Le Voleur de Georges Darien, réédité par Jean-Jacques Pauvert, est paru en 1898. Soixante ans passèrent. J'étais en classe de première. Pascal Lainé, un camarade dévoré par l'écriture – dans laquelle il se fit plus tard un grand nom, Médicis puis Goncourt, mais j'ignorais alors ce destin, me donna titre et auteur de ce qu'il lisait et vanta leurs mérites. Une vingtaine d'années plus tard, l'ouvrage vendu d'occasion dans une librairie de Tunis accrocha mon regard, je l'acquis pour lui laisser prendre la poussière. Une vingtaine d'années plus tard encore, ou davantage, ces jours-ci, je le redécouvris sur mes rayons et me mis enfin à le lire. Comme l'indique le titre, son narrateur a délibérément choisi de vivre en marge de la société. Il s'interroge pourtant, à peu près au milieu du roman, sur la voie à suivre, ce qui l'amène d'abord à fréquenter les cercles socialistes. C'est l'objet de ce premier volet. Dans le suivant, il rencontrera quelques sommités de l'anarchisme. Ici, il vient d'assister à une exécution sur la place publique, telle qu'elle se pratiquait encore à l'époque. Place, donc, au texte.
Mauris Dwaabala

... Et je raconte à l'abbé mon voyage avec le bourreau, l'exécution à laquelle j'ai assisté, et je lui fais part des réflexions que m'ont suggérées ces événements. — Oui, dis-je en terminant, je souhaite le renversement d'un état social qui permet de pareilles horreurs, qui ne s'appuie que sur la prison et l'échafaud, et dans lequel sont possibles le vol et l'assassinat. Je sais qu'il y a des gens qui pensent comme moi, des révolutionnaires qui rêvent de balayer cet univers putréfié et de faire luire à l'horizon l'aube d'une ère nouvelle. Je veux me joindre à eux. Peut-être pourrai-je... L'abbé m'interrompt. — Écoutez-moi, dit-il. Autrefois, quand on était las et dégoûté du monde, on entrait au couvent ; et, lorsqu'on avait du bon sens, on y restait. Aujourd'hui, quand on est las et dégoûté du monde, on entre dans la révolution ; et, lorsqu'on est intelligent, on en sort. Faites ce que vous voudrez. Je n'empêcherai jamais personne d'agir à sa guise. Mais vous vous souviendrez (…) Lire la suite »