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Jean Ferrat, ressuscité, marche sur les eaux.

Même Sarkozy y va de son éloge, alors que Jean Ferrat a mille fois étrillé les types de son acabit, de ses idées, de son arrivisme, de son milieu.

« Â Qu’il chante, mais qu’il ne parle pas  », disaient aux animateurs d’émissions de variété ceux qui tenaient les ficelles de l’ORTF.

Qu’il chante ? Oui, mais s’il-vous plaît, Jean, pas « Â Potemkine », chanson interdite sur les ondes, pas « Â Ma France », qui fait polémique.

L’engagement sans faille de cet homme aux côtés des travailleurs fit que l’intelligentsia le déclassa comme un sous-Brassens, sous-Brel, sous-Férré. Un sous-intellectuel, lui qui mit en musique tant de poèmes d’Aragon dont il était l’ami.

Aujourd’hui, aujourd’hui qu’il est mort, aujourd’hui qu’il ne peut plus ni chanter ni parler, ceux qui voulurent le museler, le cacher au fond de la classe, le priver de laurier, nous jurent qu’il fut un grand parmi les grands.

Pour un peu, ils rétrograderaient Brassens, autre censuré, mais pour des délits mineurs (gros mots, moquerie des pandores). Ferrat a chanté Cuba, il se mouillait contre la guerre d’Indochine et contre l’extermination des juifs. Brassens a chanté « Â Mourir pour des idées » et hélas ! « Â Les deux oncles », sorte de « Â match nul, la balle au centre » entre « Â l’ami des Tommies et l’ami des Teutons ».

Ces différences qu’il eut été malséant de noter du vivant de l’artiste, voyez comme elles vont être portées à son crédit aujourd’hui, avec un demi-siècle de retard sur le jugement du peuple qui lui rendit justice par ses acclamations quand les mous du bide tordaient le nez : « Â Populiste, démago, compagnon de route du PCF… ».

Les hypocrites qui pleurent sur son cercueil, les décerveleurs, sont prêts à ressusciter le Ferrat des années 60 pour que se taise le Ferrat des années 2000. Ce sage-là disait que, les médias étant ce qu’ils sont, il ne pourrait plus aujourd’hui, lui, Ferrat, ce géant que la mafia médiatico-politique pleure, enregistrer de disque.

Mais ils pleurent, ils pleurent ce dur à cuire qui a survécu au cyanure de leurs flèches pour mourir à l’heure de ses cheveux blancs. Ils inondent les alentours en se demandant in petto ou en comité de rédaction s’ils peuvent pousser le bouchon de leur obscène bassesse jusqu’à annoncer que la « Â perte irréparable » ne fut que provisoire. Car, Jean vient de ressusciter. « Â Edition spéciale, le grand chanteur, l’immense poète Jean Ferrat aurait été aperçu, marchant sur les eaux de l’Ardèche… »

Bon pour l’audimat, ça, coco. J’exagère ? Oui, mais à peine, diront (avec une mauvaise foi dictée par la tristesse) ceux qui fréquentent les salles d’attente de coiffeurs ou de médecins.

Ciao, Jean (et embrasse Georges, qui le mérite, malgré tout).

Théophraste.

URL de cette brève 907
https://www.legrandsoir.info/jean-ferrat-ressuscite-marche-sur-les-eaux.html
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Commentaires
14/03/2010 à 16:06 par Jean Gau

Désormais, il vit dans le coeur des citoyens(ennes) de gauche et ses oeuvres sont là pour nous aider, ne le décevons pas !

Merci Jean,

#60593 
14/03/2010 à 18:48 par eric faget

Jean Ferrat
MON CHANT EST UN RUISSEAU
Paroles : Henri Gougaud d’après un poème de Vitezslav Nezval

Quand le monde sera une étable comblée
Quand les guerres seront finies
Alors buvez mon chant comme du thé au lait
Dans des tasses myosotis

Vous affamés d’hier ombres maigres et dures
Mon chant est un ruisseau mon chant est une mûre

Quand le choeur des humains fera sonner le monde
Comme un atelier de potier
Alors mangez mon chant dans une assiette ronde
Ornée d’un motif d’oignon bleu

Vous affamés d’hier ombres maigres et dures
Mon chant est un ruisseau mon chant est une mûre

Dans ce monde incertain comme barque qui penche
Mordez dans mon chant travailleurs
Comme dans le pain blanc du matin à dents franches
Le pain blanc à la fraîche odeur

Vous affamés d’hier ombres maigres et dures
Mon chant est un ruisseau mon chant est une mûre

O ma patrie de monts et de rivières vertes
Moi qui t’invoque à chaque instant
Je suis comme le coq dressant au ciel sa crête
Je chante et chante tout le temps

Vous affamés d’hier ombres maigres et dures
Mon chant est un ruisseau mon chant est une mûre
Mon chant est un ruisseau mon chant est une mûre

Pour moi, l’adolescent boutonneux fragile et frustre, je ne sais pas comment le nommer, MR Ferrat, jean, mon oncle, a fait plus que tout les livres que l’école s’est échiné à me faire lire, il m’a donné le gout amer mais fort de la vérité. A plus oncle jean.

eric faget clown toujours, poète un jour

#60596 
14/03/2010 à 22:00 par Joannès

Joannès
14 mars 2010 à 9:31
Que d’émotions, les larmes viennent aux yeux ! Un grand HUMANISTE s’en va, je dirai comme il en est du « CHE » : Il est encore plus grand, mort que vivant ! Pendant de longues années résonneront encore ses chansons pleines d’espérance qui nous aidé et nous aideront encore longtemps à vivre. D’autres générations sans doute l’écouteront avec aussi beaucoup d’émotion. Les GRANDS HUMANISTES ne meurent jamais !

#60598 
15/03/2010 à 03:11 par Surmely Alain

Sans le connaître personnellement,comme on dit,j’aimais beaucoup l’homme et l’artiste Jean Ferrat ainsi que ce qu’il représentait d’admirable à mes yeux.Depuis mon adolescence j’écoute,sans jamais me lasser,ses chansons,les multiples poèmes qu’il avait fait siens et mis en musique avec un incomparable talent.Son oeuvre a eu un écho immense en France et cet écho n’est pas près de disparaître.Il y a trois semaines tout au plus,après avoir fait l’acquisition d’un CD de Ferrat,j’ai découvert avec jubilation une chanson que je ne connaissais pas :"Robert le Diable".Une pépite en quelque sorte,une ode à la liberté,à la création,à l’intelligence poétique,à la valeur humaine.Quant à la récupération que vous mentionnez avec pertinence elle ne m’étonne même plus tant la pratique est devenue rituelle.C’est très français cela.En France on compte de nombreux intellectuels,artistes,hommes politiques de valeur...etc.Mais c’est dur pour eux de vivre en France,avant leur éloge funèbre.Jean Ferrat avait chanté un très beau texte à ce sujet et dont la figure emblématique était Vincent Van Gogh.Au demeurant je crois que Ferrat a été heureux en Ardèche...et c’est très bien ainsi.Quant au riche répertoire qu’il nous a "légué" à nous de le découvrir,redécouvrir et faire partager.Il est et restera pour longtemps une source d’inspiration créatrice.

#60601 
15/03/2010 à 08:06 par JACQUES DEBEIRE

camarade JEAN tes chansons ; cris de lutes , lueurs d espoirs , combien de fois ont elles fait vibrer nos coeurs , un sang bouillonnant parcourant nos veines ; cela nous prenait aux tripes , et nous paraissait proche L AVENIR DE L HOMME . Merci JEAN , la FRANCE des opprimés te garde éternellement dans son immense coeur .Dans nos lutes tu seras toujours avec nous . Tu as bien mérité le repos avec tous nos camarades disparus .

#60602 
15/03/2010 à 17:56 par marguerie

sincérité,c’est le mot qui caractérise jean Ferrat et c’est je crois ce qui le rend si populaire au dela de son talent .Il a su rester humble ,discret,c’est ce qui l’a rendu si attachant.
Depuis samedi ,"j’ ai le coeur qui me fend "pour reprendre une expression que Ferrat avait employée lors des obsèques de son ami jean saussac.

#60607 
15/03/2010 à 19:01 par LeMarmot

Au dela de toutes hypocrisies entendues ou écrites,nul ne peut contester ses valeurs humaines,sa modestie et son talent. Décripter tous les messages délivrés dans ses chansons et oeuvrer dans ce sens serait me semble-t-il lui rendre un bel hommage.Quoi qu’il en soit ces chansons perdureront pour le plus grand bonheur de ceux qui l’ont sincérement aimé et respecté.

#60608 
16/03/2010 à 07:58 par alfare

Heureusement qu’il reste FERRAT, ils rament quand meme beaucoup pour récupérer, dénaturer, tronquer, escamoter (ex : l’hommage France3 lundi soir, des chansons qu’on entend 3 ou 4 fois dans la meme émission, d’autres qu’on cite mais qu’on n’entendra pas, beaucoup qui passent à la trappe).

bon dans tout ca ya quand meme
http://www.la-bas.org/article.php3?id_article=1873
à déguster sans modération
merci Jean.

#60613 
16/03/2010 à 12:17 par Fethi GHARBI

Ferrat a porté l’Afrique dans son coeur. Appréciez l’originalité du rythme dans :

.......A moi l’Afrique
.......

...Voilà les fruits et les fleurs

Les sources bleues, les couleurs

Les pagnes et les colliers

Au pas lent des chameliers

A moi, à moi, à moi

A moi l’Afrique

Serpent de lune et parfum

L’odeur du thé au jasmin

Monte à portée de la main

A moi, à moi, à moi l’Afrique

Et face aux tentes rayées

En plein désert appuyées

J’ai le coeur débarbouillé

A moi, à moi, à moi l’Afrique

Tout redevient neuf et beau

Mon âme marche en sabots

Mes bras s’ouvriront demain

L’avenir n’est pas si loin

A moi, à moi, à moi

A moi l’Afrique

#60619 
16/03/2010 à 18:20 par Anonyme

Bonjour,

Je pense à tous les proches de Jean Ferrat et leur adresse toutes mes condoléances. Avec la disparition de Jean, c’est une part magique de mon enfance qui disparait, bien que certaines de ses mélodies resteront gravées à jamais dans ma mémoire, en particulier celles accompagnant les textes de Louis Aragon, mais pas seulement. Simplicité de l’homme que je ne connaissais pourtant pas personnellement mais qui transparait à travers les témoignages de ceux qui le cotoyaient, ténacité du progressiste qu’il était et talent de l’artiste... cela donne envie d’avoir une existence qui ressemble à la sienne, surtout en sachant à quel point il croquait dans la vie à pleines dents. Je suis né en 1968 et je n’oublierai jamais ses chansons que ma mère, très marquée également par sa disparition, et mon père, instituteurs de l’école publique d’un petit village, passaient souvent sur le tourne-disque ou le magnétophone. Elles ajoutaient un surcroît de beauté à nos instants de vie et donnaient un supplément de courage pour affronter les difficultés. Jean Ferrat était l’un de ces très rares artistes qui, sans être présent parmi nous, faisait pour ainsi dire partie de la famille, et en demeura membre toujours. Il y a quelques années, j’ai traversé en un après-midi et un soir cette belle région des monts d’Ardèche. Ce faisant, j’ai pensé aussitôt à lui, acquiescant en mon for intérieur au choix de son cadre de vie. Probablement un jour viendrai-je à Antraigues pour un moment de recueillement et un hommage personnel silencieux. Jean Ferrat n’est plus, cependant son oeuvre lui survit à jamais. Pour moi, à jamais elle me ramènera à l’univers merveilleux des premiers âges et restera, je l’espère, source de motivation. pour avancer dans la vie, seul ou avec d’autres, en espérant contribuer à bâtir une société meilleure et plus juste.

#60629 
   
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