« Il faut que tout change pour que rien ne change ! »
Giuseppe Tomasi de Lampedusa ;
Récemment, la presse internationale s’est faite largement l’écho de l’élection présidentielle au Sri Lanka. De manière assez stupéfiante et presque unanimement on a dans les médias mainstream, sur les réseaux sociaux ou à travers les déclarations péremptoires de politiciens de droite comme de gauche, signalé ou salué l’arrivée au pouvoir d’un président « marxiste », voir « marxiste-léniniste », mieux encore « communiste ». De tels commentaires ont suscité à Colombo une hilarité générale ! On en plaisante encore.
Pour avoir vécu une quinzaine d'années au Sri Lanka, je pense connaître un peu ce pays dont Octave Mirbeau disait "qu'il était le paradis sur terre". Une chose est certaine, la violence à Colombo est loin de correspondre à la philosophie du Bouddha, même si l’ile aux épices et aux saphirs demeure belle, riche de par ses nombreux atouts, ses ressources naturelles et son peuple dépositaire d’une culture millénaire.
Crise économique, manifestations, remaniements ministériels… Ça chauffe au Sri Lanka et, fait plutôt étonnant, les soubresauts de l’île asiatique défraient la chronique de nos médias occidentaux. Tous les pays du Sud ne sont pas logés à la même enseigne. Mais il faut souligner que dans la région de l’Océan indien, le Sri Lanka occupe une position stratégique. Un élément qui manque souvent dans les analyses et que la Dr Darini Rajasingham-Senanayake a le mérite de mettre en lumière .
Les évènements tragiques intervenus ces derniers jours à Ampara dans le sud-est du pays et surtout à Kandy, l’ancienne capitale historique de Ceylan, devenu en 1972 une République, puis la république Socialiste et Démocratique du Sri Lanka, sont alarmants à plus d’un titre.
Ils ont été marqués par des manifestations violentes anti musulmanes. Des magasins et des habitations ont été incendiés, on compte plusieurs morts, des blessés, des centaines d’arrestations, le pays est de nouveau sous tension.
La barbarie subie par le peuple Tamoul reste à ce jour tragiquement méconnue. Depuis 1948 le nombre de morts s’élève au moins à 400.000 et les événements de 2009, plus particulièrement intenses en avril et mai, ont fait 80 000 morts, 146 000 disparus, 30 000 handicapés, selon l’ONU. Nous sommes en présence d’un phénomène où les mots de massacre, de meurtre de masse, de génocide culturel restent en deçà des vécus affectifs et émotionnels des populations.