Souvent convoquée pour énoncer des vérités indiscutables, la science n’est pas neutre. Depuis 50 ans, elle participe même activement au développement incontrôlé des risques industriels : amiante, nucléaire, pesticides ou perturbateurs endocriniens. C’est ce que révèle le livre La science asservie. Santé publique : les collusions mortifères entre industriels et chercheurs, écrit par Annie Thébaud-Mony, directrice de recherche à l’Inserm et spécialiste des questions de santé au travail. Elle y défend aussi une autre conception du travail scientifique, ancré dans la réalité des ouvriers, premières victimes des risques industriels. « En 1984, un ouvrier avait quatre fois plus de risques de mourir d’un cancer qu’un cadre supérieur. En 2008, ce risque est dix fois plus élevé », explique-t-elle. Entretien.
Chaque année, 500 enfants et adolescents décèdent d’un cancer en France. C’est leur première cause de décès par maladie. Les « progrès » régulièrement évoqués (le taux de guérison sur 10 ans – qui signifie qu’un enfant atteint d’un cancer est encore vivant 10 ans après son diagnostic – est passé de 30% en 1970 à plus de 70%) cachent une réalité peu connue : seuls les enfants pouvant être soignés avec des traitements initialement destinés aux adultes sont mieux guéris.