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Syrie : nouvelles des chrétiens du diocèse de Homs et de Hama

Le faire-part du décès du Père Basilios avec le tropaire byzantin en l’honneur des martyrs

Chers amis, en ce jour où nous célébrons la fête majeure de notre communauté, celle de l’Unité, notre coeur est dans l’amertume mais non sans lever les yeux au ciel d’où vient tout secours.
Notre vision s’éclaircit petit à petit : elle perce le mur inexpugnable de la désinformation. La réalité n’est pas binaire comme on nous l’assène. Elle est complexe. Les chrétiens de Syrie ont-ils encore une place au sein de la destabilisation entamée d’une société composite ? Le sort de la Syrie sera-t-il calqué sur celui de l’Iraq ? Nous ne savons pas. Nous prions...
Ne nous oubliez pas !

Pour mémoire et pour l’histoire :

Les chrétiens du diocèse de Homs, Hama et Yabroud sont intégrés au tissu social comme des citoyens à part entière. Avant les évènements qui ensanglantent la Syrie il était inconvenant de décliner sa confession religieuse. Aujourd’hui il n’en est plus ainsi. Le conflit qui s’instaure est passé d’une réclamation populaire de liberté et démocratie à une révolution islamiste. Le vendredi 20 janvier le slogan fatidique a été brandi par les comités de coordination de la révolution : «  le peuple veut déclarer le Jihad ! ». Jusqu’à présent nous n’avons pas fait état d’une «  persécution » directe qui frapperait les chrétiens. Ils étaient englobés dans les sévices ciblant la population participant à la vie civile. Mais il semble que la donne commence à changer. Comme si la tendance qui couvait devenait dorénavant une consigne. Le futur le dira. Toujours est-il que nous portons à votre connaissance diverses agressions désormais franchement antichrétiennes :

1- Aujourd’hui 25 janvier le Père Basilios Nassar, curé grec orthodoxe du village de Kafarbohom, province de Hama, a été abattu par des insurgés alors qu’il venait en aide à un homme agressé par les insurgés dans la rue Jarajima de Hama. C’est la première fois, depuis l’insurrection, qu’un prêtre est la cible de la violence aveugle qui est devenue l’arme redoutable d’une insurrection de plus en plus manipulée.

Nous avons reçu plusieurs coups de fil de la part de prêtres amis qui devenaient inquiets.

Ce meurtre est alarmant. Il conforte les craintes de voir la révolution syrienne tourner au conflit confessionnel. Sous couvert d’une quête de liberté et de démocratie les insurgés se révèlent comme des islamistes qui s’en prennent à des civils innocents dans une démarche de discrimination religieuse.

2- Hier matin le fils de l’Emir islamiste de Yabroud, M.Khadra, attendait avec trois autres hommes en armes le major chrétien Zafer Karam Issa, âgé de 30 ans, marié depuis un an, à la sortie de sa maison. Ils le tuent en tirant sur lui une centaine de balles qui criblent tout son corps et s’enfuient.

Les funérailles ont eu lieu aujourd’hui à une heure, avec la participation du village en émoi. Le curé de Yabroud R.P. Georges Haddad a eu des paroles inspirées : «  Dieu est amour et miséricorde. Il incite l’homme à aimer son prochain et à ne pas se détourner de lui. Nous nous adressons à ceux qui se sont érigés comme juges suprêmes de leurs frères qui s’octroient le droit de condamner à mort un être humain. Ils brandissent de faux slogans et mettent le pays à feu et à sang. Zafer, en bon soldat fidèle à sa patrie, voulait mourir dans un affrontement avec l’ennemi pour libérer le Golan. Il a été tué par qui ? et pourquoi ? Par un frère, dans son village, devant sa maison. Revenons à nous-mêmes et réfléchissons sur la voie que nous empruntons. Notre existence est basée sur l’amour et l’acceptation de l’autre. Ne laissons pas des étrangers nous dicter une conduite qui instille la méfiance, la haine et la division. Nous tendons nos mains en signe de réconciliation avec tous : ceux qui sont proches et ceux qui sont loin. Que le sang de nos martyrs donnent à notre cher pays la paix et des lendemains meilleurs ».

3- Dans la semaine, le jeune chrétien Khairo Kassouha, âgé de 24 ans, a été lui aussi abattu en sortant de chez lui à Kusayr.

4- Le Père Mayas Abboud, recteur du petit séminaire des grecs catholiques à Damas nous rapporte qu’il a été contacté hier par la veuve du martyr Nidal Arbache, un chauffeur de taxi abattu dernièrement par les insurgés. Dalal Louis Arbache lui dit au téléphone : «  cher Père, ici à Kusayr nous sommes livrés au bon plaisir des insurgés qui font la loi chez nous. Nous nous attendons à toutes sortes de sévices. Nous n’avons rien ni personne pour nous protéger. Je vous en supplie Père, prenez cela comme un testament. S’il m’arrive quelque chose de fâcheux je vous confie mon fils, prenez soin de lui. Toute notre famille est menacée par les bandes armées ».

5- On nous rapporte aussi qu’André Arbache, mari de Virginie Louis Arbache a été kidnappé la semaine passée. On ne sait rien de lui. Sa famille craint pour lui le pire.

6- Toujours à Kusayr un cousin de Père Louka, curé de Nebek raconte ce qui suit : «  je rentrai à Kusayr lorsqu’à un rond-point de la ville j’ai été arrêté par les insurgés. Ils m’ont réclamé mes papiers et m’ont fait attendre deux heures pour vérifier si mon nom est cité dans les listes issues par les comités de coordination de la révolution qui sont désormais des organes de référence judiciaire. Si mon nom avait été mentionné j’aurai été exécuté sur place comme ils le font avec d’autres.

7- A Homs la liste du Gouverneur s’allonge : il y a plus de 230 chrétiens qui ont été abattus. Plusieurs sont kidnappés. Souvent les insurgés réclament une rançon qui varie entre 20000$ et 40000$ par personne.

8- Certains quartiers mixtes comme Bab Sbah ou Hamidiyeh à Homs voient 80% de leurs habitants chrétiens les déserter pour s’établir chez des amis ou des parents dans les régions de la Vallée des chrétiens. Les chrétiens de Hama et de sa province font de même. Le mouvement est progressif mais implacable.


POSITION DU MONASTERE SAINT JACQUES L’INTERCIS PAR RAPPORT AUX EVENEMENTS EN SYRIE

Depuis le début de la crise la position de notre monastère et de son higoumène s’est tracée la ligne suivante en conformité avec ses convictions et les exigences de la conscience chrétienne et monastique.

1- Avoir une idée claire des enjeux géopolitiques à travers une étude approfondie et documentée.

2- Ne prendre aucune position politique non par peur des uns ou des autres mais parce que nous ne nous sentons pas interpellés politiquement. Notre témoignage se trouve ailleurs, dans le domaine de l’Avènement en nous et autour de nous du Royaume de Dieu dont les moyens ne sont pas ceux du monde. Nous ne sommes ni pour ni contre aucune des parties au conflit. Nous nous positionnons contre tout ce qui est contraire à la loi de Dieu et aux droits de l’homme.

3- Venir en aide à toute personne humaine dans la détresse quelle que soit son appartenance.

4- Si personne ne le fait : avoir le courage de stigmatiser à haute voix la désinformation parce qu’elle est une atteinte à la vérité et une manière d’encourager l’impunité des malfaiteurs, quels qu’ils soient.

5- Prendre position pour les pauvres et les maltraités. Particulièrement les civils innocents qu’ils soient ciblés par le régime ou par les bandes armées de l’insurrection.

6- Faire attention à l’identité des malfaiteurs ainsi qu’à celle des victimes afin de pouvoir discerner et de porter l’aide convenable à ceux qui sont dans le besoin.

A cet égard Mère Agnès-Mariam de la Croix a, en plein consensus avec sa communauté :

- aidé l’opposition du village harcelée par l’armée. A la demande des insurgés Mère Agnès-Mariam a fait des pourparlers avec les militaires pour adoucir leur poigne et
respecter la liberté de mouvement de la population.

- lancé une opération pour la libération des prisonniers de droit commun retenus sans jugement.

- accepté que des membres de l’opposition se réfugient au monastère pour une réunion secrète. De là a été lancé un manifeste en vue d’un dialogue national qui a été repris par le Président de la République.

- accédé à la demande de l’UCIP-Liban pour inviter des journalistes catholiques. Ce groupe est le premier au monde à avoir noté que la population civile était la cible d’une violence qui ne provenait pas du régime. Le fait de le dire a déchaîné de graves accusations contre Mère Agnès-Mariam qui ne se sont pas tues à ce jour. La communauté est fière d’être persécutée parce qu’elle a contribué à faire la lumière sur ce volet ténébreux des guerres de l’ombre.

- écrit, le 5 novembre 2011 dans l’Orient-le Jour, quotidien pro-opposition libanais, une lettre au Président Bachar El Assad pour réclamer des observateurs de la Croix Rouge qui vérifient que les blessés sont convenablement pris en charge dans les hôpitaux, abstraction faite de leur appartenance politique ainsi que pour solliciter la création d’un comité ad hoc qui s’occupe des prisonniers retenus indéfiniment en prison sans jugement.

- continué à établir les vraies listes des vrais morts en contraste avec les fausses listes des faux morts produites honteusement par le frauduleux Observatoire syrien des droits de l’homme.

- visité, au péril de sa vie, les quartiers de l’opposition dans la ville de Homs et dans le village de Kusayr. Durant cette visite Mère Agnès-Mariam cachée par une burqa a vu de ses yeux les bandes armées évoluer et, prise pour une musulmane, a recueilli les confidences des sunnites insurgés. Elle a été attristée de constater que l’esprit de ces populations minoritaires est gagné à l’islamisme militant. Elles forment un environnement porteur propice aux bandes armées qui sévissent cruellement contre la population civile toutes confessions confondues tant que celle-ci cherche à maintenir la normalité de la vie citoyenne à l’ombre des institutions en vigueur.

- lancé une campagne d’aide aux familles sinistrées de Homs et de Kusayr.

- hébergé des personnes et des familles sans abris et recueilli des enfants abandonnés.

- obtenu des visas à la demande de la presse mainstream. Ce volet sera traité ultérieurement.

Dans un temps marqué par de graves manipulations et des conflits où les innocents payent le prix du sang notre communauté n’a pas peur, malgré les rumeurs et les quand dira-t-on, de s’avancer sur une voie qui est celle du Christ qui enseigne la véracité et prône l’amour du prochain ainsi que la protection des plus faibles et de toute personne humaine en danger.

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« A toute époque, les idées de la classe dominante sont les idées dominantes : autrement dit, la classe qui est la puissance matérielle dominante de la société est en même temps la puissance spirituelle dominante. La classe qui dispose des moyens de la production matérielle dispose en même temps, de ce fait, des moyens de la production intellectuelle, si bien qu’en général, elle exerce son pouvoir sur les idées de ceux à qui ces moyens font défaut. Les pensées dominantes ne sont rien d’autre que l’expression en idées des conditions matérielles dominantes, ce sont ces conditions conçues comme idées, donc l’expression des rapports sociaux qui font justement d’une seule classe la classe dominante, donc les idées de sa suprématie. »

Karl Marx

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