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Le fournisseur de messagerie de Snowden se saborde pour ne pas céder aux pressions du gouvernement US. (Green Left Weekly)

Un nouveau donneur d’alerte est apparu avec une nouvelle révélation effrayante concernant la surveillance de Washington de ses citoyens. Mais il n’est pas autorisé à donner l’alerte sous peine de prison.

Tout ce que le dénonciateur pouvait faire était d’annoncer son acte de résistance et l’existence d’une menace contre lui. Il l’a fait dans l’émission de la chaîne de télévision progressiste aux Etats-Unis, Democracy Now !, le 13 Août.

Ladar Levison est le propriétaire de la société Lavabit, un fournisseur de messagerie qui offre aux utilisateurs un service sécurisé que le gouvernement ne peut pas pénétrer facilement. Il utilise un cryptage sophistiqué pour crypter les messages des utilisateurs dans un code difficile à craquer.

Il a récemment préféré fermer Lavabit plutôt que de remettre aux barbouzes du gouvernement certains des 410.000 fichiers de ses utilisateurs. En exprimant sa tristesse d’avoir à abandonner 10 ans de travail acharné dans la construction de Lavabit, il a comparé sa décision à celle « d’abréger la vie d’un animal de compagnie bien-aimé... devant le choix de le regarder souffrir ou de l’endormir tranquillement. »

« J’ai senti que je devais choisir entre le moindre mal et que la fermeture du service, si elle n’était plus sûre, était la meilleure option. »

Lavabit était le service de messageraie d’Edward Snowden. Snowden a déclaré que la décision de Levison était « une inspiration ».

Democracy Now ! a rapporté que Glenn Greenwald, le journaliste qui a été chargé de fournir à la presse les révélations de Snowden, a déclaré : « Ce qui est particulièrement effrayant à propos de l’auto-sabordage de Lavabit est que la société est bâillonnée par la loi et ne peut même pas discuter des problèmes juridiques qu’elle rencontre ni de la procédure judiciaire qu’elle a engagée. ».

« Autrement dit, le propriétaire américain de l’entreprise estime que ses droits constitutionnels et ceux de ses clients sont violés par le gouvernement américain, mais il n’est pas autorisé à en parler. »

Greenwald a ajouté : « Comme pour les personnes qui ont reçu des lettres de Sécurité Nationale en vertu du Patriot Act, Lavabit a été informée qu’elle risquait des sanctions pénales graves si elle discutait publiquement de ce qu’elle subissait. »

Levison a déclaré : « Pour simplement ajouter une chose aux commentaires de Greenwald, il y des informations que je ne peux même pas partager avec mon avocat, et encore moins avec le public américain. Donc, si nous parlons de secret, nous sommes dans un cas des plus extrêmes. »

« Et je pense vraiment qu’il est utilisé par l’administration actuelle pour couvrir des actions dont elle pourrait avoir honte. »

Présent aux côtés de Levison durant le programme se trouvait son avocat, Jesse Binnall.

L’échange suivant est instructif. Levison a déclaré : « J’ai toujours respecté la loi. C’est juste que dans ce cas, j’ai senti que le respect de la loi ... »

Binnall l’a interrompu : « Il doit faire attention à ce stade. Mais je pense qu’il peut s’exprimer sur le plan philosophique sur le... sa philosophie derrière la société Lavabit et pourquoi elle l’a amené à prendre la décision d’arrêter. »

En réponse à une question sur ce que Levison peut ou ne peut pas dire, Binnall a déclaré : « Ladar est dans une situation où il doit faire attention à chaque mot qu’il prononce devant la presse, de peur d’être emprisonné. Et nous ne pouvons même pas dire quelles sont les contraintes légales qui font en sorte qu’il est obligé de faire attention. »

« Mais le simple fait est qu’en réalité je suis ici à ses côtés parce qu’il y a des lignes très minces qu’il ne peut pas franchir, par crainte de se retrouver emmené avec des menottes. Et ce sont à peu près ces mêmes craintes qui ont conduit les pères fondateurs (des Etats-Unis – NdT) à nous donner le Premier Amendement. »

Amy Goodman de Democracy Now ! a ensuite indiqué que peu de temps après la fermeture de Lavabit, un autre fournisseur de messagerie crypté appelé Silent Circle avait lui-aussi fermé. Le fondateur et PDG Mike Janke a déclaré : « Il n’y a pas eu de préavis de 12 heures pour [mes clients]. Si nous l’avions annoncé à l’avance, cela aurait donné aux autorités le temps de déposer une lettre de Sécurité Nationale. »

« Nous avons décidé de détruire [Silent Circle] avant qu’on nous demande de remettre les données. Nous devions pratiquer la politique de la terre brûlée. »

En réponse, Levison a déclaré : « Je peux certainement comprendre sa position . Si le gouvernement avait appris que j’étais en train de fermer mon service – est-ce que je dire ça ? »

Binnall (son avocat) a répondu : « Je pense qu’il est préférable d’éviter ce sujet, malheureusement ... »

Levison a repris : « Oui, mais je vais dire que je ne crois pas avoir eu d’autre choix que de fermer sans préavis ... Je laisse à vos auditeurs le soin de comprendre pourquoi. »

Goodman a également demandé à Levison s’il pouvait dire oui ou non qu’il avait reçu une lettre de Sécurité Nationale. Levison a dit : « Non ». Binnall a ajouté : « Malheureusement, il ne peut pas. »

Democracy Now ! a ensuite diffusé un enregistrement de Barack Obama de 2005, lorsqu’il était sénateur et opposé à la loi autorisant les lettres de Sécurité Nationale.

Dans ce document, Obama déclarait : « C’est une loi qui met notre propre Ministère de la Justice au-dessus de la loi. Lorsque les lettres de sécurité nationale sont émises, elles permettent aux agents fédéraux de mener une recherche sur n’importe quel Américain, peu importe l’ampleur, peu importe l’étendue, sans jamais aller devant un juge pour prouver que la recherche est nécessaire. »

« Tout ce qui est nécessaire est la signature d’un agent du FBI local. C’est tout. Une fois qu’une entreprise ou une personne a reçu la notification qu’ils font l’objet de recherches, il leur est interdit de parler à quiconque à ce sujet .. »

« Et si quelqu’un veut savoir pourquoi leur gouvernement a décidé d’aller à la pêche aux informations dans tous les documents personnels ou privés, dans les livres de bibliothèque que vous avez lus, les coups de fil que vous avez passés, les courriers électroniques que vous avez échangés, cette loi n’accorde aucun droit de faire appel devant un tribunal. »

« Aucun juge n’examinera votre appel, aucun jury n’entendra votre cas. »

Levison a apporté une correction aux propos de M. Obama : « On peut recevoir un de ces ordres signé par un tribunal. Vous savez, nous avons le tribunal de la FISA, qui est de fait un tribunal secret, parfois appelé un tribunal fantoche parce qu’il n’y a pas d’opposition ... »

Au cours des audiences secrètes de la FISA, seul le gouvernement présente son cas. Les personnes visées ne sont même pas au courant de la procédure.

Ca, c’était Obama en 2005. A présent, nous avons Obama, président de l’Etat de Sécurité Nationale d’Amérique, qui défend le contraire.

Le fait même que Levison se soit présenté pour s’exprimer est une indication que malgré les énormes campagnes menées par le gouvernement, l’armée et les médias contre les dénonciateurs comme Bradley Manning et Edward Snowden, les qualifiant de traîtres pour avoir révélé au peuple des États-Unis les crimes de ce qui est censé être « leur » gouvernement, la vérité a commencé à percer.

Autre signe qu’un nombre croissant de simples citoyens aux États-Unis commencent à s’inquiéter suite à ces révélations a été un vote à la Chambre des Représentants qui a failli supprimer le financement de certains des pires aspects du programme criminel de la NSA.

Ce projet de loi, rejeté par sept voix seulement, aurait empêché la collecte massive de données qui ne sont pas explicitement liées à des activités d’espionnage à l’étranger, le terrorisme ou les opérations de renseignement clandestines.

Bien sûr, les exonérations étaient suffisamment larges pour laisser passer un paquebot. Mais la collecte massive de données de chaque communication - comme révélée par Snowden – n’aurait plus été financée.

Que l’amendement ait failli être adopté à la Chambre des Représentants, connu et méprisé pour sa vénalité, indique l’ampleur du malaise populaire.

Le New York Times a récemment titré : « Les fuites de la NSA rendent improbables le Plan de cyberdéfense . » L’article racontait comment la super agence d’espionnage avait l’intention de « déployer l’équivalent d’une défense ’Guerre des Etoiles’ ... conçue pour intercepter les cyberattaques avant qu’elles ne paralysent des centrales électriques, des banques ou des marchés financiers. »

« Mais les responsables de l’administration disent que le plan, défendu par le général Keith B. Alexander, le directeur de la NSA et chef de la Cyber ​​Commande du Pentagone, n’avait pratiquement aucune chance d’aller de l’avant compte tenu des réactions contre la NSA après les dernières révélations sur son programme de surveillance .... »

« Le peu de confiance qui perdurait a disparu » a ajouté un officiel [supérieur du renseignement]. « Qui croira la NSA lorsqu’elle insiste qu’elle bloque les attaques chinoises mais n’utilise pas la même technologie pour lire vos courriers électroniques ? »

Une autre indication est un discours prononcé par Obama après ce vote. Dans ce discours, il a reconnu que beaucoup d’Américains ne font pas confiance au gouvernement sur ce plan.

Obama a promis des réformes pour introduire plus de « garanties » et de « transparence ». Cette réforme du vaste appareil d’espionnage sera proposée par l’appareil lui-même, dirigé par le Général Alexander. Nous pouvons tous dormir tranquille, nous a-t-il rassurés.

Barry Sheppard

http://www.greenleft.org.au/node/54790

Barry Sheppard a longtemps été un dirigeant du Socialist Workers Party au Etats-Unis et de la Quatrième Internationale. Il raconte son expérience au SWP dans un livre en deux volumes The Party — the Socialist Workers Party 1960-1988 disponible chez Resistance Books.

Traduction « euh... je voulais dire un truc, mais non finalement » par Viktor Dedaj pour le Grand Soir avec probablement toutes les fautes et coquilles habituelles.

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