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L’île reste une terre de solidarité et de compréhension

Le discours anti-immigré ne prend pas chez les habitants de l’île italienne, désormais habitués aux drames quotidiens.

Envoyé spécial . Un Syrien entre chez le coiffeur. La tondeuse ne marche plus. Le coiffeur l’envoie chez un confrère. On se parle avec les mains, l’un en arabe, l’autre en italien. À Lampedusa, on ne peut pas toujours se comprendre, mais on regarde au quotidien les migrants « en face », selon l’expression de la maire (voir ci-contre). Le discours anti-immigré ne prend pas.

Les migrants sont omniprésents dans les rues. Ils sont pourtant censés rester dans un «  centre ouvert  » dont ils ne peuvent sortir par la porte principale. Ils sortent par les grillages latéraux, troués. Les militants jouent leur rôle. Ainsi, l’association Askavusa travaille à un musée de l’immigration. «  Nous avons collecté huit cents objets, trouvés sur les bateaux  », raconte Giacomo Sferlazzo. Des lettres et photos sont en train d’être restaurées par la Bibliothèque de Sicile. Ces derniers jours, l’association organise l’accueil des familles de victimes chez l’habitant. L’association est aussi très politique, dénonce les lois de l’Europe forteresse. Pour Sferlazzo, «  Lampedusa sert de justification à une militarisation de l’espace méditerranéen  ».

Une habitante raconte certains épisodes de solidarité. Il y a deux ans, «  on était plusieurs à aller chercher l’argent envoyé par leurs familles aux migrants par mandat, plusieurs fois par jour. Les migrants recevaient leurs appels sur nos téléphones, se souvient-elle. Nous pourrions être inquiétés pour favoriser l’immigration illégale. Les lois répressives servent à éviter cette solidarité  ».

En fait, explique-t-elle, «  à Lampedusa, la question des migrants évite qu’on parle des vrais problèmes de l’île  ». La santé tout d’abord. Dans cette île de 6 000 habitants, «  pour les maladies graves, tels les cancers, il faut se rendre en Sicile pour les chimiothérapies. Cela signifie prendre l’avion, payer l’hôtel, souvent à ses propres frais  », regrette Franca Parrizi, adjointe municipale à la santé. Il en est de même pour accoucher. Seuls les enfants de migrantes naissent sur l’île, les enfants d’Italiennes naissent ailleurs en Italie. Deuxième problème : le transport. «  Ce matin, le bateau qui fait la liaison entre la Sicile et Lampedusa n’est pas arrivé, nous expliquait mercredi Ezio Billeci, adjoint à la pêche. On a deux jours de poisson dans notre bateau. Il ne peut pas partir.  » En sus de transporter les passagers, le ferry obsolète quotidien transporte l’essence, le poisson, les poubelles, et les odeurs qui les accompagnent.

Lundi soir, sur le port, outre les migrants, une soixantaine d’habitants étaient venus saluer les dépouilles une dernière fois, quand elles étaient chargées sur le navire devant les transporter en Sicile. Natalia, une Roumaine au service d’une personne âgée, fait partie des quelques étrangers de l’île. Les clandestins ne restent pas. «  C’est terrible : regardez cet enfant. En Roumanie, mon fils gagne 150 euros. C’est pour ça que, nous, les Roumains nous partons. Eux, c’est pareil. Ils fuient. Ils croient se trouver en Europe, ils sont à Lampedusa.  » Sur son scooter, Mimmo, 
vingt-quatre ans, est venu avec sa fiancée. Son père, pêcheur, fait partie de ceux qui ont sauvé les immigrés, le 3 octobre. «  Ce qu’on voit ce soir : c’est les hommes politiques dans leur splendeur. La loi Bossi-Fini, qui fait de la clandestinité un délit, n’est pas une loi. C’est un homicide.  » Les deux tourtereaux repartent, affectés.

G. D. S. le 18 Octobre 2013.

»» L’Humanite.fr
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