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Intervention au Sénat sur l’accord du 13 juillet avec la Grèce

Pierre Laurent

Nous abordons le vote crucial d’aujourd’hui, toujours sous le choc, et certains que le coup porté ce week-end à la démocratie marquera durablement les esprits et les relations entre pays européens.

Trois sentiments animent le groupe CRC :

La volonté de défendre l’intérêt du peuple grec qui a eu le courage de se lever - le 25 janvier et lors du référendum - pour crier à la face de l’Europe sa souffrance et son exigence de voir lever le pilon qui l’écrase !
Vive le peuple grec digne et libre.
Et vive Alexis Tsipras dont le courage et la responsabilité politique sont exemplaires.

Le second sentiment, c’est la colère contre la violence de dirigeants de l’UE - au premier rang desquels Angela Merkel et Wolfgang Schauble.
Ils viennent de montrer quels intérêts ils défendent.
Qu’un peuple se lève contre l’ordre libéral et l’oligarchie financière, et ils s’affairent à le soumettre et le punir.
Depuis le premier jour, ils n’ont jamais recherché un accord viable avec la Grèce et ont organisé son asphyxie financière.
Ils voulaient la tête d’Alexis Tsipras.
Le référendum a douché leur tentative de coup de force.
Ils se sont alors acharné jusqu’à la dernière minute à provoquer un « grexit » de fait.
Alexis Tsipras, porteur du mandat de son peuple de rester dans la zone euro et de faire respecter la souveraineté de la Grèce, dans l’UE, s’y est refusé avec juste raison.
Dès lors, leur choix a été l’humiliation et le chantage pour imposer le couteau sous la gorge, un nouveau plan drastique à la Grèce.
Ces dirigeants et leur méthode sont la honte de l’Europe ! Ils ne servent que les pouvoirs financiers, quitte à s’appuyer sur l’extrême droite.
Des millions d’Européens ne l’oublieront pas.

Le troisième sentiment est alors celui d’une très grande inquiétude pour l’avenir de l’Europe.
Elle meurt dans les coeurs et dans les têtes si elle continue ainsi.
Tous ceux qui persistent à soutenir de telles méthodes prennent une très grave responsabilité devant l’histoire !
Des frustrations et des humiliations générées par une telle arrogance et la seule loi du plus fort naîtront des monstres politiques ! Ils grandissent déjà au coeur de l’Europe !

La leçon première à tirer, est l’impérieuse nécessité de la refondation sociale et démocratique de l’UE, et son émancipation urgente des logiques financières qui l’étouffent.
L’accord qui nous est soumis écarte à première vue le « grexit » qui était et qui reste l’objectif des dirigeants allemands.
Alexis Tsipras a dit hier, avec une grande loyauté à l’égard de son peuple, dans quelles conditions il a assumé un accord contraint et forcé, pour éviter ce cauchemar à la Grèce.
Je sais, que devant la brutalité de cet accord, certains en viennent à penser que le grexit ne serait plus qu’un moindre mal.
Je ne le crois pas.
Les Grecs non plus.
Parce qu’une sortie de la zone euro ferait passer la Grèce de la crise humanitaire à l’hécatombe.
Parce que toutes nos économies seraient déstabilisées.
Parce que c’est aussi une affaire politique et géopolitique qui peut ouvrir le chemin à un nouveau choc des nations.
Regardez comment dans le dos des irresponsables comme monsieur Schauble, Marine le Pen et les siens attendent le « grexit » comme la victoire enfin remportée, qui sonnerait le glas de la solidarité européenne !

Mais l’accord n’a pas réellement levé ce risque en choisissant d’imposer à la Grèce une mise sous tutelle insupportable et de nouvelles mesures d’austérité draconiennes.

Joseph Stiglitz, prix Nobel, a déclaré : « les efforts demandés à Athènes dépassent la sévérité, ils recèlent un esprit de vengeance ! », comme si le peuple grec devait payer le prix de son insoumission.
Si les exigences des créanciers sont toutes respectées, elles s’avéreront une nouvelle fois injustes socialement et empêcheront les objectifs de redressement productif du pays.

Alexis Tsipras a redit sa volonté de protéger les plus faibles et d’aller chercher de nouvelles recettes fiscales auprès de ceux qui s’enrichissent. Il a redit la nécessité absolue d’investissements productifs pour relancer l’économie et d’allègement du fardeau de la dette.
Mais tout est fait pour l’en empêcher.

Ainsi en va-t-il du programme démentiel de privatisations. Les rapaces sont déjà à pied d’oeuvre.
Vinci est paraît-il déjà sur place pour racheter les aéroports !

Plusieurs engagements financiers sont envisagés par l’accord à la demande de la Grèce :
- un programme de refinancement de 82 à 85 milliards d’euros,
- un rééchelonnement partiel de la dette,
- un plan d’investissement pouvant aller jusqu’à 35 milliards d’euros.
Sans ces engagements, tout le monde le sait, aucune relance ne sera possible !

Or, sous la pression de l’Allemagne, tous ces engagements sont rendus hypothétiques et seront soumis au chantage permanent des créanciers !
Quant à la France, si le Président de la République a joué tardivement un rôle pour éviter le « grexit », elle a accepté que le prix exorbitant à payer soit fixé par Angela Merkel, qui a dicté, une fois de plus ses conditions.

Je le dis solennellement, pour la Grèce mais aussi pour la France, nous ne sommes pas quittes.
Et ne nous pouvons encore moins après ça, nous remettre à célébrer, comme si de rien n’était, le couple « indestructible » franco-allemand.

La bataille ne fait que commencer.
Tsipras est en première ligne.
Certains voudraient refermer la parenthèse grecque.

Notre intérêt commun, grecs, français, espagnols, européens de toute nationalité est au contraire de pousser au changement dans toute l’Europe, de la libérer des forces libérales et des marchés financiers .

La France doit agir immédiatement pour :
- obtenir le déblocage immédiat des liquidités de la BCE sans les soumettre à de nouvelles conditions
- mobiliser le plus vite possible les 35 milliards d’investissements prévus en engageant sans tarder la contribution de la France et en proposant à d’autres pays de se joindre à la création d’un fonds de développement pour la Grèce qui pourrait préfigurer un fonds de développement pour l’Europe toute entière
- Travailler à concrétiser le rééchelonnement de la dette.

Notre vote est aujourd’hui un acte de lutte et de solidarité aux côtés du peuple grec, d’Alexis Tsipras et de nos camarades de Syriza.
Nous sommes solidaires de leurs choix et assumons leur difficile et courageux combat.
Nous sommes à leurs côtés pour dire non à l’expulsion de la Grèce.
Mais nous disons d’un même mouvement, au nom de la France, que l’accord scandaleux imposé à Bruxelles n’est pas digne de l’Europe et qu’aucun maintien dans l’euro ne le peut légitimer.

Le Groupe CRC votera majoritairement contre.

15 juillet 2015.

COMMENTAIRES  

15/07/2015 20:38 par AUBERT

Pourquoi n’as tu pas dit et écrit ca précédemment ??? On ne suit plus une directive de Parti... Ne le sais tu pas ? Je préfère et soutiens cette intervention comme je dénonce ta précédente intervention. Vu le niveau de zig-zag que tu entreprends es tu encore le vrai Responsable du P.C.F ???

15/07/2015 21:06 par sergio

Tout et le contraire de tout, ce n’est pas tenable pour un esprit honnête (comme l’entendait Georges Orwell...) Décevant et pitoyable... c’est vraiment moche, passons vite à autre chose ! sergio

15/07/2015 22:27 par Dwaabala

Le privilège des communistes est de donner des boutons aux lecteurs rien qu’avec leur signature.

16/07/2015 03:21 par Totor

Ce type là n’en est pas à une contradiction près.Il fait maintenant parti des rapaces qu’il désigne lui même. comme la droite(j’inclus le ps là dedans et lui aussi) il veut nous faire encore rêver de l’Europe. le vote à 65% contre l’UE devrait lui faire comprendre que les français n’en veulent pas, mais visiblement il est dans le camp des profiteurs.

16/07/2015 05:31 par Beyer Michel

Comment se suicider quand on est déjà mort ?

16/07/2015 05:40 par depassage

Un véritable cri est cet article, mais peu d’oreilles sont prêtes à l’entendre. Le couple France Allemagne a le dos échiné et ses marionnettes dont le rôle est plutôt clownesque, s’affairent à répéter un scénario auquel elles ne comprennent absolument rien. Peut-être qu’elles comprendront quelques choses après le montage du film. Peut-être ? On sait que les marionnettes sont des marionnettes parce qu’elles ne comprennent rien et bougent les lèvres selon les voix des ventriloques qui les manipules ou seules des marionnettistes bien cachés ou autres. Il est dit que la Grèce ne servira pas d’exemple positif et ce, en aucun cas. Alors, elle ne doit pas servir en aucun d’exemple répètent les marionnettes. La fin du film est son début. Le début : pas de concession et la fin, c’est aussi : pas de concession. Sinon, mettre au rebut et veiller à en faire exemple négatif.

16/07/2015 07:56 par gregory pillon

je ne suis pas d’accord avec le commentaire qui dit que le signe PCF donne des boutons, c’est là du sectarisme, même si je ne suis pas voire jamais d’accord avec le PCF, du moins sa direction, et son rôle au sein du PGE. Je vous demande de lire cette analyse qui m’explique mieux vers où on nous dirige :

http://joukov.eklablog.com/cahiers-n-224-a118175026

16/07/2015 08:57 par lecrabe

"La leçon première à tirer, est l’impérieuse nécessité de la refondation sociale et démocratique de l’UE, et son émancipation urgente des logiques financières qui l’étouffent."
Une urgence depuis, au bas mot, 1992. Me voilà à nouveau plein d’espoir pour les prochaines décennies, à nous l’"Europe sociale" !

"La France doit agir immédiatement pour : - Travailler à concrétiser le rééchelonnement de la dette."
Une immédiateté qui se concrétisera dès l’accession de monsieur Laurent à la présidence de la république française. Me voilà plein d’espoir pour 2017.

Dans nos pays vieillissants, la révolution aussi avance en déambulateur.

16/07/2015 10:47 par AF30

Comme d’habitude le discours de P Laurent est insipide, des généralités mais aucune offensive sérieuse contre l’attitude et le choix de Hollande. Bien qu’ayant lu très vite cet article parce qu’il en est insupportable on peut constater qu’il ménage le gouvernement et particulièrement Hollande alors que ce dernier est le second couteau de cette ignominie. Si on veut être crédible dans sa critique comme dans son approbation il faut être exhaustif et rentrer dans le dur. D’ailleurs en voyant cette photo beaucoup vue et dont certains ont parlée, cette table autour de laquelle on voit quelques personnages ( http://s2.lemde.fr/image/2015/07/15/534x0/4683770_6_a9e9_merkel-hollande-et-tsipras-reunis-pour_cca3a6daa6d84050ec5a75b5639857da.jpg) peut-on l’imaginer avec De Gaule, Mitterrand ou même Chirac assis à la place de Hollande à l’extrémité, en situation subalterne. C’est une honte. P. Laurent est un poids mort.

16/07/2015 11:33 par Dwaabala

Quelles autres voix que celle de P. Laurent au Sénat et de A. Chassaigne à l’Assemblée ont-elles dénoncé cet accord inique ? Eût-il mieux valu qu’elles n’existassent point ?
Le commentaire qui confond ironie et sectarisme est un joli petit bouton au bout du nez.

16/07/2015 11:45 par CN46400

Tant qu’un dirigeant du PCF déclenche de l’hostilité, y a de l’espoir.....

16/07/2015 12:37 par totor

Lecrabe, j’espère que vous plaisantez...L’epoir c’est la litanie de tous les fachos qui ont fait l’Europe. Il faut détruire l’UE, ça oui !Quant à Dwaabala je ne savais pas qu’il était anticommuniste à ce point. Peut-être encore un trotskiste...Pour ma part je respecte les communistes(la résistance, la guerre d’Espagne, le Viet-nam et son héroïsme, Cuba Ortega, etc...), en particulier les anciens, même si je critique Mr Laurent parce qu’il le mérite et qu’à mon avis il n’est pas ou il n’est plus communiste.

16/07/2015 14:33 par sergio

Le problème c’est pas le PCF mais Laurent…

Le plan concocté par l’eurogroupe, et imposé au premier ministre Tsipras et à l’ex-ministre de l’économie Varoufakis, de la manière ignoble que l’on sait, est un Grecexit en bonne et due forme !

Tsipras se bat comme un beau diable pour éviter l’implosion de son parti, Syriza, et au choix :
1) une guerre civile (si les choses venait à s’envenimer sérieusement !, car n’en doutons pas, il s’agit bien de terrorisme financier, concocté par les oligarques l’UE, via la BCE et le FMI, sur fond de coup d’état financier),

2) ou, le terrain politique laissé à l’extrême droite grecque (Aube dorée), postée en embuscade et qui n’attend que ça ! (des militaires en retraites ont même menacé ouvertement le gouvernement du premier ministre grec, Tsipras, d’un coup d’état si celui-ci décidait de quitter le giron de la zone euro (sous-entendu les forces de l’OTAN) ).

Car contrairement à ce n’écrit pas Laurent, ce plan est non seulement une bombe à retardement politique, mais aussi, et surtout économique !…

Ce qu’il ne dit pas, c’est qu’il faut en finir avec l’euro ! (même si Tsipras, se veut le représentant de toutes les tendances politiques en Grèce (sauf bien entendu les fachos d’Aube dorée), et ce qu’il ne dit pas, c’est que ce piège mortel pour la Grèce et le peuple grec, est une arme diabolique, qui rend impossible le redressement économique de ce pays ! D’ailleurs, comment peut-on imaginer concilier des économies aussi disparates que celles (des pays) de la zone euro ?

La Grèce est exsangue, ruinée par le poids exorbitant de la dette, et l’eurogroupe, l’UE, la BCE et le FMI, le savent que trop bien ! C’est pour cette raison qu’ils se sont permis de faire le forcing (car il n’y avait aucun risque pour eux…), tout en sachant que Tsipras n’avait pas d’autre solution que de "négocier"… le flingue sur la tempe !, et ils savaient parfaitement, qu’en proposant ce plan abject à Tsipras, celui-ci aboutirait inéluctablement à son élimination politique, pour la bonne et simple raison qu’avec ce plan, la Grèce ne pourra pas se relevé économiquement !

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