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Il n’existe pas de "Licenciement boursier" !

Préambule :

Le langage libéral, cette "novlangue’ au service du capitalisme et de la neutralisation de la langue des travailleurs et du socialisme , est parvenu a glisser dans le mental et dans les propos de nombreux commentateurs ou acteurs de la vie économique et politique , ce concept dépourvu de sens :’licenciement boursier’.

Il convient de "déconstruire’ cette expression, comme doivent l’être aussi d’autres impostures sémantiques qui visent à désarmer le monde du travail de sa capacité à comprendre les processus qui participent à son aliénation et son exploitation.

Ces impostures ont déjà transformé le "travailleur’, (seul producteur de richesses), en "salarié’, (dont l’appellation même occulte sa fonction et le résume à son "coût’ pour l’employeur) ! A aussi été "adopté’ le concept "d’état providence’ qui a transformé une conquête sociale exemplaire, (celle de la création de la Sécurité Sociale), en une prérogative étatique qui en outre serait placée sous le signe d’une bienveillante providence… (1) Le langage de la lutte des classes est remisé dans les grimoires accessibles aux historiens mais il est oublié des travailleurs eux-mêmes, aussi souvent de leurs représentants syndicaux , qui usent du langage de leurs adversaires. Ils sont parfois fiers de l’appellation "partenaires sociaux’ qui leur a été concédée, mais englobe un présupposé de connivence plus que de confrontation…

Le licenciement est la situation faite aux "perdants’ de ce "partenariat social’ , lorsque la "providence’ de l’état s’interdit d’intervenir dans les conflits, et lorsqu’il est demandé à chaque "salarié’ de comprendre que le coût de son travail est le premier obstacle à la productivité… Le "choc de compétitivité’ est l’objectif nouveau qui exige des sacrifices dont la répartition est bien asymétrique… La faute à qui ? A la bourse ! Vraiment ?

La bourse licencie ? Vraiment ? Depuis quand ? C’est quoi la bourse ?

Nous ne parlons pas de cette particularité anatomique réservée au "genre’ dominant qui y dissimule ses gonades. Nous parlons de cet objet ancien et de son évolution. Dans le passé la bouse était "un petit sac destiné à contenir de l’argent, de la monnaie…’. Un sac dont chacun pouvait "tenir le cordon’… Plus tard le mot désigna le lieu matériel, l’édifice construit dans ce but, où se rencontrent les négociants, agents de change et courtiers, pour traiter "d’affaires’. La bourse est donc liée avec la possession et les échanges, elle en est le temple, celui où les possédants tentent de faire fructifier leur propriété privée, y compris celle des moyens de production. Le capitalisme mondialisé a fondé les "bourses de valeurs’ (New York ; Londres, Tokyo, Paris…etc.) ou se négocient les "titres’ des sociétés les plus importantes ; celles qui sont "cotées en bourse’

Ceux qui y réalisent des transactions le font parce qu’ils reçoivent de la part des "possédants’ des instructions, des "ordres de bourse’, déterminés par les sociétés qui veulent y protéger et faire prospérer leurs intérêts . La bourse n’est que cela !
Elle est une structure du capitalisme mondialisé. Ses acteurs en sont les serviteurs.
Il existe depuis 1967 des "Commissions des opérations de bourse’ qui veillent au bon fonctionnement des opérations et à la régularité des informations diffusées. Mais la bourse est au service exclusif du capitalisme.

Elle ne possède aucun règlement, aucune charte, aucune morale, aucune éthique, qui l’obligerait à considérer les conséquences sociales et humaines des opérations réalisées. La bourse est aveugle sourde et muette, inductrice de fortune ou de faillite, de richesse ou de misère, selon la seule volonté des donneurs d’ordres. Les acteurs boursiers ne sont pas des représentants du monde du travail mais des commis de ceux qui l’exploitent ! Rien n’oblige "la bourse’ à prendre en compte le facteur humain ou la sauvegarde de la planète ; seul l’argent circule, seul "signifiant’ de ceux qui ordonnent les opérations. L’argent roi ici est bien loin des réalités sociales…

Qui licencie ?

Alors ne nous trompons pas. Il n’y a pas de "licenciement boursier’. La bourse, cette entité presque abstraite pour chaque citoyen n’a ni ce rôle ni ce pouvoir.
Pourtant ce qui se joue en bourse a des effets sociaux indiscutables.

Mais ces effets ne résultent pas de la bourse elle-même, ils résultent de stratégies et décisions prises par ceux qui donnent les "consignes’ aux opérateurs boursiers, ceux qui donnent les "ordres en bourse’ !

Ceux là sont ailleurs. Ils ont chacun une identité, ce sont des personnes physiques en charge d’intérêts capitalistes. Leurs décisions "d’ordre en bourse’ sont prises sous la double contrainte de l’accumulation espérée du capital et de la fidélisation souhaitable des actionnaires qui ne connaissent que leur rémunération par dividendes. Le Capital comme les dividendes ne sont qu’un détournement d’une partie, (de plus en plus importante) des fruits du travail humain. Les travailleurs ne voient pas ici défendus leurs intérêts. Même à l’origine des richesses produites, ils restent la "variable d’ajustement’ qui permet, à leur dépens, de majorer les profits ou les dividendes ! Cela se fait par la pression salariale, la flexibilité et précarité de l’emploi, un "management’ de plus en plus inhumain s’accommodant de pousser jusqu’au suicide parfois des exploités ; a l’extrême les licenciements sont le moyen ultime de réduction de ce que les employeurs nomment "la charge’ salariale…

Un licenciement est "toujours’ décidé par un employeur ! Il n’existe pas de licenciement boursier. La décision est humaine, elle est patronale même si elle est prise parfois sous pression actionnariale.

Alors pourquoi parler de licenciement "boursier’ ?

Cette formule sémantique est scandaleuse et mystificatrice :

- Scandaleuse car mensongère et exonérant de leurs responsabilités les seuls décideurs de chaque licenciement. La formule utilisée a pour effet de reporter la responsabilité de la décision prise sur une entité abstraite, lointaine, désincarnée, sans visage, inaccessible … La bourse !

- Mystificatrice car transposant sur un "outil’ du capitalisme la responsabilité de ses méfaits, résultant pourtant toujours de décisions humaines. Il s’agit ici de dissimuler le caractère prédateur et antisocial par essence du processus d’accumulation privée des richesses. Il s’agit d’évoquer ici comme l’existence d’un "grand tout’ au dessus des hommes et du patronat lui-même, l’existence d’une "bourse’ qui aurait quelques pouvoirs maléfiques, qui serait a elle seule responsable des méfaits du capitalisme. Il s’agit d’inventer comme une sorte de "fatalité’ à l’origine de ces effets indésirables ; alors que ces effets résultent de stratégies et décisions parfaitement élaborées, avec des acteurs clairement identifiables !

Que nous enseignent ces réflexions ?

- Elles nous permettent d’observer en premier que le capitalisme n’est pas la seule invention humaine à se doter d’une sorte de "transcendance’ qui mériterait à la fois respect et soumission. Toutes les croyances, religieuses ou profanes, sont des modes d’entrée dans les formes diverses de la servitude et de l’aliénation. Le dieu "TINA’ (There is no alternative) est adoré chaque jour dans les temples de la Bourse.

- Elles nous disent ensuite que dans tous les cas, les mots sont choisis, pour induire le sentiment d’une autorité, d’une fatalité, d’une nécessité, d’une évidence, dont résultera le sentiment d’impuissance le plus répandu, même chez ceux que la soumission indispose. Qui pourrait s’opposer à un "licenciement boursier’ ? C’est qui la bourse ? Où est le bureau des réclamations ? Les locaux de la Bourse sont vides et seulement protégés par quelques vigiles entre les séances ; ces locaux n’abritent aucun chef, aucun maître, aucun imperator dominant qui distribuerait l’or ou la misère…

- Elles nous disent enfin qu’il ne se produit en ces lieux que des actes commis par les valets et mercenaires du capitalisme. Pas plus qu’une cathédrale n’est responsables des crimes des croisades ou de l’inquisition prêchées sur son autel par des évêques, la bourse n’est responsable des conséquences des actes commis par les "bolcheviques du marché’ comme les nommait le prix Nobel d’économie Joseph Stiglitz stigmatisant le comportement des capitalistes, même s’il ne franchit pas le pas de préconiser la sortie du "système’. (2)

En quoi cela nous est il utile de démasquer l’imposture sémantique des "licenciements boursiers’ ?

- Cela nous permet de comprendre que cette expression appartient au langage de l’oppression, de la fatalité et du renoncement.

- Cela nous permet de faire tomber les masques des donneurs d’ordres qui prennent les décisions responsables de la dégradation des conditions de vie des travailleurs et parfois de leur licenciement. (3-4)

- Cela nous indique que cette expression "licenciement boursier’, comme d’autres expressions dictées par nos adversaires (1), doit être exclue du langage de la gauche, politique ou syndicale, car elle induit un sentiment d’impuissance en même temps qu’elle dissimule la responsabilité patronale.

- Cela nous permet de démasquer qui sont les donneurs d’ordres et ceux qui les influencent par la pression actionnariale, comme seuls responsables des conséquences de leurs actes.

- Cela nous permet en dernière analyse d’identifier la responsabilité du capitalisme lui-même et donc d’écarter toute option "réformiste’ qui en conserverait l’hégémonie des acteurs et la propriété privée des moyens de production.

- Cela ne nous dit pas ce que seraient ces lieux consacrés aux échanges dans un socialisme du XXI me siècle. Mais dans le changement espéré, sans aucun doute et après expropriation des prédateurs des fruits du travail, ce serait les travailleurs eux-mêmes qui devront s’approprier la gestion des moyens de production et la répartition des richesses.

Jacques Richaud

21 novembre 2012

(1) 24 février 2009 Note sur quelques dépossessions sémantiques -Social - Santé : les mots sont importants. Jacques Richaud http://www.legrandsoir.info/Social-Sante-les-mots-sont-importants.html

(2) 30 décembre 2010, par Frédéric Joignot « LE TRIOMPHE DE LA CUPIDITE » DE JOSEPH. E. STIGLITZ, PRIX NOBEL D’ECONOMIE PUBLIÉ EN FRANCE EN POCHE. UNE LECON DE CHOSES http://fredericjoignot.blog.lemonde.fr/2010/12/30/le-triomphe-de-la-cupidite-de-joseph-e-stiglitz-prix-nobel-deconomie-publie-en-france-en-poche-une-lecon-de-choses/

(3) 8 avril 2012 Salaire minimum ou esclavage. Jacques Richaud
http://www.legrandsoir.info/salaire-minimum-ou-esclavage.html

(4) 6 juillet 2010 « FIN DE DROIT ! »……L’ULTIME DEPOSSESSION Jacques Richaud http://www.npa31.org/tribune/fin-de-droit-%E2%80%A6%E2%80%A6lultime-depossession.html

COMMENTAIRES  

27/11/2012 07:54 par tchoo

Tout au contraire l’expression "licenciement boursiers" permet de mettre à jour le processus mis en place pour en arriver là .
et soumet à interrogation du pourquoi des licenciements dans une entreprise bénéficiaire.
Les gens du peuple ne sont pas idiots et capable de réflexion, l’image de licenciement boursiers est très parlante et suffisament scandaleuse par le dénoncé qu’elle implique.
Evidemment qu’il y a un responsable humain derrière tout cela, qui décide de se soumettre à la pression des actionnaires.
Il me semble autrement plus néfaste d’asséner à longueur de bulletin d’information, le fait que le prix d’une action d’un quelconque entreprise monte ou descend et d’assimiler cela à une catastrophe (la baisse) comme si l’entreprise trouvait un gain ou une perte quelconque à cette variation de valeur d’un bout de papier qui lui a échappé depuis longtemps.
Les variations de valeur d’une action n’ont aucune influence sur la rentabilité industrielle d’une entreprise, ni sur la valeur ajoutée qu’elle produit. Et pourtant on nous assène ces variations comme étant le reflet de la santé économique de l’entreprise. Là , il ya une véritable imposture produit par le capitalisme

27/11/2012 09:30 par comité de base: cellule ouvrière du bassin minier ouest du pas de calais

Il est tout à fait possible que des licenciements soient prononcés hors des licenciements boursiers, c’est à dire qu’une entreprise licencie en cas de perte de marchés ou d’augmentation trop importante de sa matière première. Même Cuba a licencié des milliers de travailleurs du sucre, la différence c’est le reclassement qui passe par une nouvelle orientation liée aux besoins. On ne peut pas dire qu’il n’y a pas de licenciements boursiers, car la bourse sait réagir à un plan de licenciements qui améliore les performances financières oui qui supprime un concurrent. Comme le dit le commentaire, les travailleurs savent quand se passent des licenciements boursiers et quand il y a un problème de production. Aussi peut-être qu’après boursier il faut ajouter "et pour raison de restructuration". Toutefois, il ne faut pas une fois de plus, distiller le sentiment d’impuissance quand on est à deux doigts qu’une loi soit votée sur ce sujet des licenciements boursiers, il ne s’agit pas de sémantique mais de bons sens, d’une étape, d’une contradiction entre capital et travail.

27/11/2012 15:14 par gloupitch

Je ne rejoins pas du tout l’analyse de Jacques RICHAUD qui de mon point de vue est un contresens total.
Dommage car en matière de sémantique et de nov’langue il y aurait eu beaucoup à dire : "Plan de Sauvegarde de l’Emploi" pour "licenciements massifs", "demandeur d’emploi" pour "chômeur", "charges sociales" pour "cotisations", "coût du travail" pour "prix du travail", "ressources humaines" pour "services du personnel", "ajustement structurel" pour le cassage en règle de tous les acquis sociaux...etc.

Au lieu de quoi l’auteur ergote sur une expression qui, loin d’être utilisée et dévoyée par les libéraux de tous bords, appartient plutôt au registre de la gauche avec un grand "G", voire de l’extrême gauche.

Lorsque l’on entend l’expression "licenciement boursier", m’est avis que tout le monde comprend bien qu’il s’agit de licenciements dont l’origine n’est pas à prendre dans une logique économique dégradée mais dans la recherche effrénée de profits sans cesse plus élevés : Ex. : SANOFI fait des profits énormes et le lendemain de l’annonce du licenciement, son action en bourse monte car il y aura encore plus de profit à attendre suite à la délocalisation de la production et de la recherche = licenciement boursier.
Ainsi une loi (indispensable à mon avis) interdisant les licenciements boursiers aurait vocation à interdire à une entreprise qui fait des bénéfices de licencier.

Il ne faut pas prendre les gens pour ce qu’il ne sont pas.

28/11/2012 06:55 par babelouest

Jacques Richaud nous dit ce que n’est pas le licenciement boursier, il ne nous dit pas vraiment ce qu’il est : utiliser la "variable d’ajustement" des créateurs de richesses, les travailleurs, pour gagner encore plus provisoirement, avant de refiler le bébé en l’état à quelqu’un d’autre (vente "en bourse" d’un outil devenu "pas cher", mais affaibli par les licenciements précisément). C’est pourquoi il faut faire vite, pour se débarrasser de ce paquet fragilisé avant que cela ne se voie. Les actionnaires sont de grands cyniques. Seul compte leur profit. Comme il est probable que l’acheteur de ces actions imposera des mesures drastiques du même tonneau, des entreprises autrefois florissantes s’écroulent, sucées jusqu’au sang, jusqu’à la moelle, par des propriétaires successifs.

Le licenciement boursier, c’est l’art d’utiliser la bourse pour gagner sur le dos d’une maison que l’on fait s’écrouler par des mesures en ressources humaines parfaitement inhumaines. C’est en ce sens-là que le terme licenciement boursier n’est pas inadéquat. La Bourse n’est pas l’ogre, c’est le moyen pour les ogres de se goinfrer. Analogie : au marché des esclaves, le maître vend un homme encore robuste, mais qui n’a pas mangé depuis deux jours. Cela ne se voit pas encore. Si l’acheteur fait de même... et le suivant... un jour l’esclave meurt.

29/11/2012 01:23 par Jacques Richaud (L'auteur)

LICENCIEMENT BOURSIER CONTROVERSE

- A tchoo, qui écrit :
« Tout au contraire l’expression "licenciement boursier" permet de mettre à jour le processus mis en place pour en arriver là . et soumet à interrogation du pourquoi des licenciements dans une entreprise bénéficiaire.  » Nous sommes d’accord, mais alors pourquoi ce détour de langage ? Pourquoi ne pas désigner le donneur d’ordre en place de l’outil utilisé ?

Mais il corrige et agrée : « Evidemment qu’il y a un responsable humain derrière tout cela, qui décide de se soumettre à la pression des actionnaires. » Et je partage la conclusion : « Là , il y a une véritable imposture produit par le capitalisme  »

- Au comité de base : cellule ouvrière du bassin minier ouest du pas de calais
Qui écrit : «  Il est tout à fait possible que des licenciements soient prononcés hors des licenciements boursiers,  » Bien évidemment, mais ce n’était pas le sujet de ma réflexion.
Rajoute : « On ne peut pas dire qu’il n’y a pas de licenciements boursiers, car la bourse sait réagir à un plan de licenciements qui améliore les performances financières oui qui supprime un concurrent. » Exact, mais la bourse ne se donne pas d’ordres à elle-même et ce sont bien les "˜réactions de la bourse’ qui sont attendues par les donneurs d’ordre, pour les effets attendus par ceux-ci ! Pas de désaccord encore ici, mais une inversion de logique qui a pour effet d’inverser la causalité ; comme si le "˜licencieur’ était "˜victime’ malgré lui de la bourse, avec pour seule solution le licenciement ! Ce qui est évidemment faux, et que j’ai tenté d’expliciter.
Mais une approche un peu "˜non conventionnelle’ de ce couple donneur d’ordre membre du patronat et institution boursière, peut dérouter certains, j’en conviens. Ne pas décrypter cela, c’est se condamner en effet à l’acceptation d’une sorte de fatalité. Et j’approuve le propos qui renforce le miens : « Toutefois, il ne faut pas une fois de plus, distiller le sentiment d’impuissance… » C’est bien un des objectifs de mon article de montrer comment se construit ce "˜sentiment d’impuissance’, à l’ombre de cette "˜bourse’ divinisée par le capitalisme comme si chaque "˜patron’ d’entreprise cotée en bourse devait à la fois craindre son influence et se soumettre a ses diktats ! Là c’est l’irresponsabilité patronale qui se construit une armure protectrice, à laquelle la sémantique contribue activement…

Mais dire « quand on est à deux doigts qu’une loi soit votée sur ce sujet des licenciements boursiers » ( ?) … Cela exprime selon moi un voeu dont je n’observe pas les indices sérieux. Il fut un temps ou des "˜lois sur l’autorisation administrative de licenciement’ tentaient d’atténuer ce phénomène. Démantelées par un gouvernement antérieur, je n’ai pas entendu dire qu’elles devraient être rétablies prochainement ou améliorées dans leur formule première déjà insuffisante… Gardons l’optimisme de la volonté, mais aussi le pessimisme de la lucidité…
« il ne s’agit pas de sémantique mais de bons sens » écrivez vous ; je crois moi que la sémantique est une arme pour perturber le bon sens ou neutraliser la pensée réflexive. La première de mes références (1) traitait déjà de cela dans le vocabulaire de la santé et du social. Ce que nous observons s’inscrit en effet comme « une étape, d’une contradiction entre capital et travail.  » Mais parvenu à cette étape, les mots sont destinés à brouiller les termes réels de cette contradiction en élevant "˜la bourse’ au dessus de la raison et des actions humaines, c’était aussi le sens de mon propos. Je ne pense pas avoir de désaccord sur ce point, avec le commentaire.

- A gloupitch
« contresens total. Dommage car en matière de sémantique et de nov’langue il y aurait eu beaucoup à dire  » Je pense avoir été mal lu, pour la novlangue, je n’en suis pas à mon premier "˜exercice’ de décryptage, (voir plus haut), et les exemples donnés ici sont de la même nature que ceux que j’avais moi-même cités… J’en ai d’autres "˜en réserve’ qui nous font utiliser dans presque tous les domaines la langue de nos adversaires, réduisant nos argumentaires à des balbutiements incompréhensibles car nous ne sortons pas assez de la logique des mots , à la foi porteurs de sens et créateurs de sens …
C’est de ne pas avoir compris cela qui permet d’écrire : « Au lieu de quoi l’auteur ergote sur une expression qui, loin d’être utilisée et dévoyée par les libéraux de tous bords, appartient plutôt au registre de la gauche avec un grand "G", voire de l’extrême gauche.  ». Erreur ici, la pression de la bourse est une rengaine patronale ancienne, déjà mise "˜sur le marché’ de la novlangue libérale du temps du CNPF, avant même le MEDEF actuel, visant à déresponsabiliser le monde patronal, et renforcer la servitude du monde du travail à une logique financière qui a tout intérêt à rester abstraite, sans visages, ses conséquences débouchant sur l’impunité de ses acteurs… Et que la "˜gauche’ ait repris cette expression comme une évidence n’est pas un progrès de son discernement mais une chute dans un piège sémantique fournisseur de sentiment d’impuissance. C’était l’objet de mon propos que de le dénoncer. Faut il relire le "˜Capital’ pour ne pas tomber dans un piège aussi grossier ?
Dire : «  Lorsque l’on entend l’expression "licenciement boursier", m’est avis que tout le monde comprend bien qu’il s’agit de licenciements dont l’origine n’est pas à prendre dans une logique économique dégradée mais dans la recherche effrénée de profits sans cesse plus élevés  » D’accord, les gens ne sont pas stupides ; mais si tout le monde le comprend ainsi comme une recherche effrénée de profits, pourquoi ne pas dire simplement "˜licenciement par cupidité effrénée des employeurs ’ ? Ou "˜licenciement abusif sans nécessité réelle’ ? Pourquoi utiliser une formule détournée ? Pourquoi faire le "˜cadeau’ de cet euphémisme à ceux qui l’ont construit pour masquer leur responsabilité aux conséquences sociales souvent criminelles ? C’était l’objet de mon propos.

- A babelouest
« Jacques Richaud nous dit ce que n’est pas le licenciement boursier, il ne nous dit pas vraiment ce qu’il est : utiliser la "variable d’ajustement" des créateurs de richesses, les travailleurs, » Et « Seul compte leur profit.  » Mais si ! J’ai dis cela et les conséquences sur le "˜facteur humain’ ; et le seul but d’enrichissement des donneurs d’ordre… Il faut lire…
Puis « C’est en ce sens-là que le terme licenciement boursier n’est pas inadéquat. La Bourse n’est pas l’ogre, c’est le moyen pour les ogres de se goinfrer. » La juste conclusion est exactement une autre reformulation de mon propos, mais c’est alors une contradiction incompréhensible de soutenir encore que le terme de licenciement boursier n’est pas inadéquat !

Pour répondre de façon plus globale, je pense qu’il serait temps que la gauche s’émancipe du langage imposé par ses adversaires et se réapproprie la langue des luttes sociales :
+ Cela suppose de s’interdire les euphémismes qui masquent des réalités sinistres.
+ Cela suppose aussi de mettre de la précision et de la justesse dans toutes les expressions utilisées.
+ Il est des mots qui sont en eux même des mensonges et des propos de propagande.

Que chacun dans son milieu y songe, les exemples sont nombreux.
Jacques Richaud 29 novembre 2012

29/11/2012 11:06 par résistant

"Il s’agit d’inventer comme une sorte de "˜fatalité’ à l’origine de ces effets indésirables"

C’est exactement celà . Merci de penser plus loin que le bout de votre nez :)
C’est ainsi que l’on veut nous faire percevoir "la crise" comme une fatalité extérieure, alors que les banquiers créent les crises économiques, politiques ou militaires de toutes pièces à la seule fin d’augmenter leur domination sur le monde.

Ou bien notre fameuse "dépression nerveuse", comme s’il s’agissait d’une maladie tombée du ciel sur un être jusque là parfaitement heureux. Car personne n’est triste, personne n’a de raison de ne pas être heureux, donc si vous êtes malheureux, c’est que vous êtes malade. Pas de chance, vous avez attrapé une fatalité extérieure, une dépression ! Il n’y certainement pas de cause sociale à celà , ou alors peut-être un vague traumatisme lié à votre mère ou votre père lorsque vous étiez trop petits pour vous en souvenir. Mais des causes réelles, concrètes et actuelles à votre tristesse ? Dans notre monde parfait ? Allons donc ! Prenez plutot cette pillule et arrêtez de penser de telles inepties !
On pourrait multiplier les exemples, mais dans le fond, le procédé est simple : il s’agit de nous empêcher de penser aux causes de ce qui nous arrive.

La solution est en nous : pensez quand-même ! Doutez ! Remettez en cause les évidences qui vous sont servies ! demandez-vous toujours d’où vient ce que l’on vous répette constament et à qui ça profite !
Après celà on vous dira bien sûr que vous avez attrapé, pas de chance, une autre fatalité, une autre maladie : la paranoia ! la complotite ! Prenez donc cette pillule, ça va passer, faites-nous confiance !
Aies confiansssssssssssssssssss......

ps : question au Grand Soir : si je remplis le champs "Votre adresse email", mon adresse sera-t-elle publiée avec mon commentaire, où bien est-ce suelement pour que vous puissez éventuellement me contacter ? Merci

29/11/2012 11:28 par E.W.

Il semble surtout que ce soit un abus de langage fourre-tout, il ne s’applique littéralement que dans quelques cas de licenciements collectifs lors du décrochage du cours d’une action sur le marché et encore un économiste capitaliste expliquera de lui même que l’efficacité de la manoeuvre est vraiment toute relative.

Nous utilisons souvent le terme pour qualifier des licenciements produits par des entreprises saines (comprendre : qui n’ont aucun besoin structurel de capitaux immédiats) -voire même nettement bénéficiaires- au moment des licenciements ; ce type de licenciements est mené précisément à ces moments là dans le seul but de faire baisser le prix de la masse salariale afin d’afficher un bilan comptable encore plus sympa soit -dans le cas des PME/PMI non cotées- pour dégager un bénéfice plus important, soit pour reverser un dividende plus important aux actionnaires, soit en vue de faire monter artificiellement la valeur de l’action sur les marchés dans la perspective de la revente d’actions.

C’est donc un abus de langage relativement fondé.

Si on veut poursuivre un peu sur notre lancée, le capitaliste arguera alors qu’il faut penser aux restructurations quand tout va bien, que c’est précisément le moment d’y penser, soit, concédons le lui mais le cas de la capitalisation pure est particulier puisque nous ne parlons pas des intérêts de l’entreprise mais des intérêts particuliers du patron et/ou des actionnaires, ce moment est également le plus propices aux manoeuvres de capitalisation vue ci-dessus, dans ce cas de figure nous devrions exiger que les travailleurs soient récompensés de leurs efforts car c’est avant tout grâce à eux, par la richesse produite, que le capitaliste peu à présent penser à éventuellement capitaliser encore davantage.

Je voudrai m’étendre là dessus. Ca ne me choque pas, dans la mesure où le capitalisme est considéré en tant que tel et justifié pour la situation donnée, qu’un capitaliste dise ouvertement : "je veux capitaliser". Même s’il ne l’avait pas dit, on avait peu de doute sur la question. Le fond du problème reste que le capitalisme n’est pas adapté à tous les aspects du réel et que même si tel était le cas il ne constitue pas forcément un idéal sociétal pour tout le monde, il faut tout de même avoir envie de se retrouver exposé aux risques systémiques capitalistes pour faire un bon capitaliste, moi je n’ai pas envie. Bref, vouloir capitaliser n’exclue pas de disposer de deux sous de valeurs morales et à partir du moment où la volonté est posée ainsi le travailleur devrait pouvoir capter la plus grande partie du capital qu’il a lui même contribué à créer. Et si le motif affiché est une conjoncture à venir difficile qui impose de licencier alors il est aberrant que face à cette même conjoncture les dividendes des actionnaires augmentent ou que le patron se verse un meilleur salaire, ce serait du vol, c’est un crime punit par la loi n’est-ce pas ?

D’une part cela serait justice rendue aux travailleurs et d’autres part cela enlèverait au capitaliste la tentation malsaine de sacrifier son entreprise par pure cupidité. Nous pouvons dans cette même veine songer à plafonner les dividendes et exiger une plus juste répartition des richesses générées par l’entreprise.

Quoi qu’il en soit il reste illusoire de vouloir dompter le tigre capitaliste, c’est de la taille de sa cage dont il nous faut parler, pas de la tonalité de ses grognements.

30/11/2012 10:55 par Maxime Vivas

De Jacques Richaud (via MV à cause d’un pb de connexion).

La taille de la cage…

Merci à ceux qui enrichissent le débat, même de façon critique, cela ne me dérange pas car cela montre aussi combien les chaînes sémantiques qui entravent notre esprit sont solides. Indolores mais solides au point de nous empêcher de penser "˜autrement’, ou de penser "˜à côté’ du cadre conceptuel imposé. Ce cadre est celui du capitalisme mondialisé. Il possède ses structures, ses superstructures, ses pédagogues, ses prophètes, ses armées au besoin mobilisées, et …son langage.

Oui les mots sont importants, Maïakovski le disait déjà  : « Les mots sont des balles »… Par eux passent les idées et sont passées toutes les révoltes et toutes les révolutions, par eux se légitiment toute les violences faites aux peuples. Lorsque le langage de la classe prolétarienne est devenu, au travers du socialisme, trop structuré et menaçant, son adversaire a compris qu’il faudrait neutraliser la langue de la lutte des classes par un verbiage aux vertus d’enfumage ou de dépréciation. C’est de cela que nous parlons ici.

Nos mots pourraient être des balles, si nous forgions avec eux nos propres munitions. Eu lieu de cela nous recevons les balles anesthésiantes de l’adversaire… ’Même pas mal, c’est sympa la novlangue’… Personne n’est dupe disent certains ; pas si sur ! La preuve en est que ces mots dévoyés sont repris dans nos tribunes politiques et nos "˜feuilles’ syndicales, rarement assortis de remarques critiques !

Ce langage accepté vise à enfumer le mental de tous ceux qui sont broyés par le système… :"˜There is no alternative’, TINA, n’est ce pas ? Il faut bien répondre au "˜choc des compétitivités’ n’est ce pas ? Vous, piétaille salariée ne pouvez comprendre cette logique… Vous vous pensiez "˜travailleur’ ? La "˜refondation sociale’, celle du MEDEF ne vous a-t-elle pas convaincus, derrière la CFDT collaborationniste de cette révolution antisociale, que vous n’étiez plus rien ? Que des "˜salariés’ des assistés, corvéables, flexibles, éjectables, négligeables… N’avez-vous pas compris que cela était aussi nécessaire qu’irréversible ? Travailler plus pour gagner plus… Fallait il préciser que le "˜gagner plus’ concernait les actionnaires et les patrons, pas vous ? Allons donc, chers "˜partenaires sociaux’, buvons ensemble à la prospérité de notre entreprise commune… Le parler suave des sociaux démocrates ne se distingue en rien de celui des plus radicaux des capitalistes … N’a-t-on pas vu un socialiste à la tête du FMI ? … Pascal Lamy, il y est encore ; et un autre à la tête de l’OMC ? Une éjaculation incontrôlée du priapique sur la face et le col d’une prolétaire nous a évité de le voir dressé en icône présidentielle…

Au coeur du temple capitaliste à Wall Street, certains commencent à comprendre ; « Nous sommes 99% ! » disent ils ; ils ont raison. Cette vérité là méritait d’être posée, poursuivons en nous réappropriant toute la langue du social, de l’économique et du politique !

- résistant l’a compris, « penser plus loin que le bout de votre nez » dit il, et « l’on veut nous faire percevoir "la crise" comme une fatalité extérieure », oui exactement.
Ecoutons le aussi : « La solution est en nous : pensez quand-même ! Doutez ! Remettez en cause les évidences qui vous sont servies ! demandez-vous toujours d’où vient ce que l’on vous répète constamment et à qui ça profite ! ». Et attendons nous, en nous y préparant aussi, aux accusations évoquées… Merci a lui. Mettons de l’intelligence dans nos indignations et allons plus loin encore...

- Pour EW, qui perçoit un "˜fourre tout’, c’est justement cette confusion qui entrave le discernement nécessaire. Mais la défense qui suit de la "˜logique capitaliste’ ne me convainc pas. Ce doit être cela que veut dire l’expression "˜se faire l’avocat du diable’, car le propos est celui du découragement … En effet semble t il penser, le rapport de force est tellement défavorable que Margaret Thatcher et son TINA a eu sur nous tous un impact presque mortel… Alors "˜Que faire ?’ Comme disait l’autre…
C’est sa conclusion qui m’inspire la réponse : « Quoi qu’il en soit il reste illusoire de vouloir dompter le tigre capitaliste, c’est de la taille de sa cage dont il nous faut parler, pas de la tonalité de ses grognements. »
+ C’est vrai, le grognement de la bête peut faire illusion, c’est Mao qui parlait du "˜tigre de papier’. Les crises du capitalisme illustrent cette fragilité masquée et sa perception incomplète. Au coeur même du système, à Wall Street certains l’ont compris qui, entourés aussi de certains intellectuels et même de prix Nobel d’économie disent « Nous sommes 99%’ ! »
Il ne dépend que de nous que les 1% soient contraints de renoncer à leurs privilèges.
+ C’est vrai aussi, la "˜taille de la cage’ est de nature à nous rendre impuissants à la parcourir toute entière, mais ce sont les idées qui se déplacent ! Ils devraient trembler, pourtant, les 1% dans cette cage de sept milliards d’hommes et de femmes, lorsque ceux-ci prendront la décision, vraiment, de s’approprier leur destin ! La cage était déjà grande, souvenons nous en, au temps des féodalités et du servage, au temps des royautés et du tiers état, au temps des empires coloniaux et de l’esclavage, au temps des totalitarismes et des massacres de masse… Et pourtant… Ni le grognement de la bête ni la taille de la cage ne doivent nous effrayer !

Le capitalisme n’est pas la "˜fin de l’histoire’, ce n’est qu’un soubresaut adaptatif dans la suite de la civilisation technique, qui a aussi permis d’authentiques progrès sociaux. Ce n’est pas une raison pour laisser le tigre rugir et bouffer les travailleurs ! La chute du mur de Berlin a donné au tigre l’illusion de sa toute puissance et de son droit à toutes les outrances… Mais c’est nous et nous seuls qui lui concédons "˜ce droit’ !

Ce n’est pas seulement le langage que nous devons nous réapproprier, mais l’orientation de notre destin. Il doit bien exister des mots, d’autres mots, pour le dire… D’autres mots que ceux du bréviaire des banquiers, spéculateurs et prédateurs de tout poil… Non ?

Jacques Richaud 30 novembre 2012
NB ; tiens nous étions plus de deux mille le 29 novembre au meeting de Toulouse ce soir, du CAC, collectif pour l’audit citoyen sur la dette, Mélenchon, Poutou et même Onesta ne disaient pas autre chose … A nous de transformer les discours bien intentionnés en convergence des luttes et concrétisation d’une autre société, non ?

30/11/2012 23:52 par E.W.

@ Jacques Richaud

Les abus de langages n’empêchent pas le discernement (peut-être pas pour tout le monde, ok) et l’observation (même imparfaite) des mécanismes d’un système ne rend pas l’observateur partie prenante. Ceci dit, j’ai pas spécialement envie de me défendre sur un procès d’intentions camarade.

Merci à toi de nous donner l’occasion de forger nos munitions.

01/12/2012 00:47 par redrock

Je pense que M. Richaud n’a pas bien saisi que l’activité principale des "investisseurs" en bourse est surtout la recherche de plus values, de coups basés sur des manipulations de cours ou des effets d’annonce comme celle d’un licenciement ou d’une restructuration qui vont faire monter les cours de plusieurs points, opération juteuse pour ceux qui auront anticipé le coup avec de forts effets de levier.

La durée moyenne de possession d’une action est actuellement de 22 secondes sur le marché (a cause du trading haute fréquence), le paiement des dividendes n’est donc pas le moteur premier de la bourse.

Il est vrai cependant que pour certains gros actionnaires influents, propriétaires fondateurs ou investisseurs institutionnels (assurances, banques, fonds de pension ), la recherche de forts dividendes est un souci de base mais cela ne les empêche surtout pas de jouer aussi le jeu des spéculateurs avec de plus de gros conflits d’intérêt.

01/12/2012 15:25 par Jacques Richaud (L'auteur)

LICENCIEMENT BOURSIER, SUITE…. SANOFI… MITTAL… Licenciements "˜boursiers’ ?

Je vois que la situation s’éclaircit, un peu…Et merci aux contributeurs.

- EW a raison, forger nos munitions (en terme de langage clair) est une priorité pour la gauche dont une large partie de la pensée commune (voir au PS ! Mais pas seulement au PS) est contaminée ou embrumée par la langue de nos adversaires… C’est l’objet de mon propos.
Et si « Les abus de langages n’empêchent pas le discernement (peut-être pas pour tout le monde, ok)  », tentons de les débusquer tous, un par un, mensonge après mensonge, car c’est le cumul de tout ces abus qui constitue la "˜novlangue’ créée pour contrer le vocabulaire de la lutte des classes ou des simples revendications, même celles mises en avant par les réformistes. Un simple retour sur la "˜refondation sociale du MEDEF’ et le tournant de compromission et d’adhésion, pris à cette période par la CFDT, suffirait à nous en montrer les ravages.

- Redrock nous rappelle, et il a raison, une part du fonctionnement et des effets attendus de l’instrumentalisation de la bourse par les "˜donneurs d’ordre’ dont j’évoquais l’existence et au service de qui ils s’activent. Cette précision n’enlève rien à mon argumentaire qui est au contraire renforcé par la précision : « …effets d’annonce comme celle d’un licenciement ou d’une restructuration qui vont faire monter les cours de plusieurs points, opération juteuse pour ceux qui auront anticipé le coup… » . En effet ce n"˜est pas "˜la bourse’ qui est à l’origine de cet effet d’annonce, mais bien les représentants du capital que l’on espère faire fructifier au mépris des conséquences humaines de la manipulation. C’était aussi la précision apportée par mon propos.

Une illustration récente est apportée par l’annonce par Sanofi de réduction d’effectifs sévères de chercheurs, avec majoration immédiate de la valeur boursière qui ne s’est jamais aussi bien portée ! …. Il se trouve que sur Toulouse "˜les Sanofi’ ne se laissent pas faire et que se poursuivent les "˜jeudi de la colère’ avec une mobilisation grandissante depuis de longues semaines… Ils savent, eux, qui a "˜donné les ordres’ et que la logique du bénéfice boursier attendu ne doit pas être confondue avec la véritable origine des décisions prises.

J’espère avoir été clair, pour que ce "˜distinguo’ (Il n’existe pas de licenciement boursier !) ne soit pas considéré comme un "˜ergotage’ comme disait un intervenant précédent, mais comme un recadrage de ce qui nous permet de penser la riposte aux évènements…
Demandez aux sidérurgistes de Mittal, s’ils se font une illusion sur l’origine de la restructuration qui les menace ? Non bien sur. Le responsable a un nom et un visage et une fortune …
Au passage, est ce parce qu’il est "˜étranger’, Indien, que ce visage est connu de tous ? Qui connaît "˜la gueule’ des prédateurs de nos entreprises qui ont commis tant d’autres licenciements qu’il disaient "˜ boursiers’ ? Poser la question, c’est comprendre la motivation de mon article qui dénonce une expression commune servant d’enfumage pour masquer les responsabilités patronales, tout simplement...

Jacques Richaud 1 décembre 2012

01/12/2012 19:17 par Générale et désirs

Je pense que M. Jacques Richaud essaye sciemment de brouiller les pistes. Le titre de cet article est déjà une désinformation, car donnant l’impression d’éxonérer les places spéculatives. De plus, ses réponses sont très ennuyeuses et alambiquées. Enfin, il semble qu’il ignore le mot cac 40, la city, wall street et nikéi... Il est évident que la totalité des licenciements massifs de ces temps-ci n’a qu’un seul objectif : faire monter le cours des actions en place de spéculation, par l’augmentation du résultat de l’entreprise. On peut appeler cela licenciements spéculatifs, boursiers ou dumping social, c’est la base même du pillage actuel des économies. Le pillage est aussi écologique. Les deux formes de pillage bénéficient de la complicité de médias qui sont du côté du mensonge et de l’illusion de masse. Il me semble très coupable d’essayer de brouiller les pistes sur ces points.

02/12/2012 00:57 par Jacques Richaud (L'auteur)

LICENCIEMENT BOURSIER, SUITE…. SANOFI… MITTAL… Licenciements "˜boursiers’ ?

Je vois que la situation s’éclaircit, un peu…Et merci aux contributeurs.

- EW a raison, forger nos munitions (en terme de langage clair) est une priorité pour la gauche dont une large partie de la pensée commune (voir au PS ! Mais pas seulement au PS) est contaminée ou embrumée par la langue de nos adversaires… C’est l’objet de mon propos.
Et si «  Les abus de langages n’empêchent pas le discernement (peut-être pas pour tout le monde, ok) », tentons de les débusquer tous, un par un, mensonge après mensonge, car c’est le cumul de tout ces abus qui constitue la "˜novlangue’ créée pour contrer le vocabulaire de la lutte des classes ou des simples revendications, même celles mises en avant par les réformistes. Un simple retour suer la "˜refondation sociale du MEDEF’ et le tournant de compromission et d’adhésion, pris à cette période par la CFDT, suffirait à nous en montrer les ravages.

- Redrock nous rappelle, et il a raison, une part du fonctionnement et des effets attendus de l’instrumentalisation de la bourse par les "˜donneurs d’ordre’ dont j’évoquais l’existence et au service de qui ils s’activent. Cette précision n’enlève rien à mon argumentaire qui est au contraire renforcé par la précision : « …effets d’annonce comme celle d’un licenciement ou d’une restructuration qui vont faire monter les cours de plusieurs points, opération juteuse pour ceux qui auront anticipé le coup… » . En effet ce n"˜est pas "˜la bourse’ qui est à l’origine de cet effet d’annonce, mais bien les représentants du capital que l’on espère faire fructifier au mépris des conséquences humaines de la manipulation. C’était aussi la précision apportée par mon propos.

Une illustration récente est apportée par l’annonce par Sanofi de réduction d’effectifs sévères de chercheurs, avec majoration immédiate de la valeur boursière qui ne s’est jamais aussi bien portée ! …. Il se trouve que sur Toulouse "˜les Sanofi’ ne se laissent pas faire et que se poursuivent les "˜jeudi de la colère’ avec une mobilisation grandissante depuis de longues semaines… Ils savent, eux, qui a "˜donné les ordres’ et que la logique du bénéfice boursier attendu ne doit pas être confondue avec la véritable origine des décisions prises.

J’espère avoir été clair, pour que ce "˜distinguo’ (Il n’existe pas de licenciement boursier !) ne soit pas considéré comme un "˜ergotage’ comme disait un intervenant précédent, mais comme un recadrage de ce qui nous permet de penser la riposte aux évènements…
Demandez aux sidérurgistes de Mittal, s’ils se font une illusion sur l’origine de la restructuration qui les menace ? Non bien sur. Le responsable a un nom et un visage et une fortune …
Au passage, est ce parce qu’il est "˜étranger’, Indien’, que ce visage est connu de tous ? Qui connaît "˜la gueule’ des prédateurs de nos entreprises qui ont commis tant d’autres licenciements qu’il disaient "˜ boursiers’ ? Poser la question, c’est comprendre la motivation de mon article qui dénonce une expression commune servant d’enfumage pour masquer les responsabilités patronales, tout simplement...

Jacques Richaud 1 décembre 2012

02/12/2012 11:19 par babelouest

En 1983-84, je n’ai plus la date exacte, j’ai eu l’occasion de faire une visite qui n’était normalement pas du tout autorisée : celle des locaux de la Bourse quelques minutes avant la séance. A l’époque je travaillais au service Bourse d’une banque justement. Et bien sûr je connaissais les mécanismes (ils se sont accélérés beaucoup depuis) qui présidaient aux cotations à une époque où faute d’ordinateurs personnels chez tout le monde, tout se faisait par téléphone ou par télex. A part à la corbeille (là où officiaient les agents de change, qui traitaient ce qu’on appelait alors le Terme, pour les grosses valeurs avant la création du CAC40), le coteur de chaque groupe de cotation au Comptant en était encore réduit à afficher les cours successifs avec des craies sur un tableau noir pendant que devant lui les commis braillaient "J’ai" "Je prends". Spectaculaire, mais demandant une tête solide.

Il n’y a plus d’agents de change, plus de commis, plus de coteurs, et la fameuse "corbeille" avec son cône de sable est au musée de la bourse, elle ne sert plus de cendrier géant pour les cigares des agents de change. Tout se passe sur écrans désormais, mais en fait bien entendu tout se passe chez les clients qui donnent les ordres. Je ne parle même pas là des ordres automatiques ultra-nombreux, initiés par les programmes automatiques des banques, qui jouent sur des différences de cours infimes la plupart du temps, mais qui faussent par la masse qu’ils représentent les cours réels. C’est d’ailleurs là où la bourse a perdu toute signification liée au réel.

02/12/2012 18:54 par Jacques Richaud (L'auteur)

ET BIEN NON !

Ne pas comprendre un propos peut avoir plusieurs origines :
- Un exposé pas assez clair, mea culpa si c’est le cas, mais je ne pense pas être pourtant "˜alambiqué’ comme le perçoit celui qui sans doute n’a que survolé l’article en ayant conservé l’impression que j’avais "˜exonéré les places spéculatives’ !
- Ou une posture de rejet par "˜a priori’, pouvant résulter justement de l’effet que je dénonce, l’enfumage par le vocabulaire…
+ Tant pis si certains "˜salariés’ ont déjà oublié qu’ils sont d’abord des travailleurs, et que le salaire qu’on leur consent n’est que la contrepartie de leur production, qu’elle soit matérielle ou intellectuelle, sans discrimination. Si être réduits à leur "˜coût’ en lieu d’être respecté dans leur dignité et pour le fait qu’ils sont les seuls à produire des richesses leur convient, c’est que le capitalisme a gagné totalement la bataille idéologique qui lui permet de disposer à sa guise des fruits du travail et ordonner la répartition des richesses entre pactole pour les prédateurs et miettes pour le "˜salariat’… Prolétaires de tous les Pays, vous êtes les 99% !
+ Tant pis si certains croient à la "˜transcendance’ sans alternative de Margaret Thatcher, comme d’autres croient au ciel et à l’enfer. Ils respecteront les temples et les prêtres de la bourse et du CAC 40 comme d’autres tremblaient devant la menace de damnation… Ni dieu ni maître, lorsque notre destin est en jeu !

Mon propos n’est évidemment pas de nier l’usage fait de ces outils structurels du capitalisme ; il était de rappeler qu’il est toujours une main qui tient l’outil ou qui en l’occurrence lui donne des ordres… Aucune arme n’est "˜dangereuse’ en soi, c’est son utilisateur qui peut devenir criminel ! On ne condamne pas le bâton mais celui qui s’en sert pour assommer son voisin ! On ne désigne pas le crime par l’arme utilisée mais par celui qui vise et tire : Touché ! Licencié !

Il est enfin un peu facile, sinon désobligeant, d’écrire « Enfin, il semble qu’il ignore le mot cac 40, la city, wall street et nikéi... » … J’ai fait allusion à Wall Street comme lieu symbolique de la contestation récente des "˜indignés’ US . Ceux là savent qu’ils s’attaquent à un symbole du système, non pas en tant que "˜lieu’, mais comme place ou les "˜1%’ par leurs mandataires ,viennent exercer leurs effets prédateurs aux conséquences sociales pouvant aboutir aux ….licenciements !

Peut être mon contradicteur connaît il, lui, un seul travailleur qui aurait reçu sa feuille de licenciement dans une enveloppe à en tête du CAC 40 ? De la city ? De Wall Street et Nikkéi... ? Ou de La Bourse ???? Si le document existe je suis certain que Le Grand Soir se fera un plaisir de le publier !

Licenciements qui sont, dois je le rappeler, l’objet de mon propos qui vise à replacer chaque acteur dans sa responsabilité.

Pour conclure. Si tout lecteur peut comprendre qu’il n’y a pas :
- De "˜licenciement’ sans licencieur…
- De "˜pillage’ sans pilleur…
- De "˜complicité’ sans complice…
- De "˜média’ sans journaliste …Pour reprendre la litanie du commentaire précédent ....
Alors il aura compris qu’un certain vocabulaire participe à nos aliénations. Il s’agit du vocabulaire qui élude l’action des hommes pour ne désigner qu’un processus abstrait, ou une structure, désigné en transfert symbolique des actions humaines.
Ce vocabulaire qui nous aveugle (les échanges sur ce forum en témoignent), nous pousse aussi vers l’impuissance. Oui "˜les mots sont importants’ !
C’est une outrance d’écrire « Il me semble très coupable d’essayer de brouiller les pistes sur ces points ». Alors que le brouillage des pistes résulte justement de ce que je dénonce !
Nier cela, le dénoncer comme "˜coupable’ , c’est une excellente défense du "˜système’ , une manière de tenter de neutraliser un propos qu’un porte parole du MEDEF n’aurait pas désavoué… : « Eh oui, mon bon Monsieur, ma bonne Dame, il y a la bourse ! Il y a le CAC 40 ! Il y a l’indice Nikkei... ! Je suis comme vous mes pauvres amis, si, si… Je dois plier devant la conjoncture, m’adapter au choc des compétitivités… Et parfois, avec un grand déchirement, je vous assure… observer les effets imprévus du meilleur système du monde… Car c’est le meilleur système n’est ce pas ? Vous êtes d’accord avec moi ? Vous ne voudriez tout de même pas revenir au Socialisme ? On y peut rien croyez moi ! Vous n’étiez pas assez flexible sans doute…Ou pas assez productif peut être… Et oui je sais, la bourse vous a licencié…Ah mon pauvre ami, les temps sont difficiles vous savez…La Bourse, la Bourse, la Bourse …  » Et bien NON !

Non, il n’y a pas de licenciement "˜boursier’ !

Jacques Richaud 2 décembre 2012

03/12/2012 12:06 par E.W.

Licenciement boursier

Sens strict : Appellation désignant des licenciements collectifs réalisés dans le but de compenser une baisse du cours de l’action d’une entreprise sur les marchés boursiers.

Sens large : Licenciements réalisés par l’entreprise dans le but de faire augmenter momentanément la valeur de son action ou sa marge bénéficiaire.

03/12/2012 16:10 par Jacques Richaud (L'auteur)

SENS STRICT OU SENS LARGE, OUI !

Nous sommes bien d’accord EW !

Et dans les deux cas, (sens strict ou sens large) ce n’est pas la Bourse qui licencie, mais les ordonnateurs du licenciement. Qu’il s’agisse de compenser une baisse de l’action ou de la faire augmenter, en jouant sur la seule variable d’ajustement qu’est alors le facteur humain : L’emploi. Car il est bien connu que c’est "˜le poids des salaires’, le poids "˜des charges’ qui est le "˜principal obstacle à la productivité’
Le licenciement intervient alors :
- Soit comme ultime recours après pression salariale antérieure et pression managériale sur la productivité attendue de chaque travailleur,
- Soit comme élément d’intimidation pour anticiper un mouvement social et faire accepter par "˜ceux qui restent’ les conditions les plus dures, les mesures d’adaptation a ce qui est nommé "˜choc de compétitivité’. Mais cette adaptation vise d’abord à préserver le pactole patronal et celui des actionnaires ; dans tous les cas de figure l’avenir des travailleurs n’est pas la question centrale !

La distinction entre les deux (sens strict ou sens large) était en effet utile, qui rappelle aussi que dans tous les cas la décision est "˜humaine’ et patronale (managériale pour euphémiser et faire plus "˜moderne’ et anglophile…).

Les leçons d’un Forum : Mais pourquoi faut il passer par tant d’échanges pour en convenir et revenir à l’affirmation première ?

Je crois que nous avons , les uns ou les autres, du mal à convenir parfois que nous sommes, nous nous sommes, laissés piéger par un langage dont l’imprécision ne résulte pas du hasard mais d’une volonté d’énonciation moins précise ou clairement mensongère, de ce dont on parle… Une langue faite pour brouiller l’entendement et éviter les vérités qui choquent.
Avoir antérieurement professé lors d’une réunion syndicale ou d’un meeting, ou imprimé sur un tract "˜Non au licenciement boursier !’, fait recevoir ce texte comme une "˜provocation’, le forum en témoigne…
Pourtant non, rien de provoquant, seulement une invitation à donner à nos combats des armes sémantiques adaptées aux enjeux. C’est à nous de démasquer la perfidie de la langue de nos adversaires, personne d’autre ne le fera à notre place ! Cette langue est aussi celle de nos faux amis prétendument socialistes …
- Une vérité qui choque est une vérité qui nous fait ressentir notre faiblesse, notre impuissance ou notre lâcheté… Elle peut aussi être le moteur de la révolte, lorsque l’évidence de l’injustice éclate…

Une actualité éclairante :

Pour citer l’actualité, à Mittal, personne, absolument personne désormais, n’ose parler de licenciement boursier qui se serait "˜imposé’ à l’entreprise ! Chacun sait la logique décisionnelle venue du responsable du groupe et de lui seul.
Que le gouvernement soit venu à son secours pour sauver sa respectabilité et son poste de manager, en place d’une nationalisation annoncée, ne fait que révéler ce qu’un intervenant précédent nommait "˜complicité’ ! Lorsqu’il s’agit de sauver "˜le système’ (capitaliste), tous les mensonges sont permis, venus du patronat ou des sociaux libéraux qui nous gouvernent. A nous de déconstruire un par un les abus de langage, jamais innocents.

Prochaine étape :

Nous disons « Nos vies valent mieux que leurs profits ! ». C’est pour que ce slogan ait un sens immédiatement compréhensible et crédible, qu’il est indispensable que le vocabulaire descriptif de "˜la crise’ et de ses conséquences, ne soit pas un vocabulaire mensonger ou ambigu.

La Bible du MEDEF inspire chacun de ses sermons sur la montagne ; la Bourse joue parfois le rôle de la montagne, lorsque Mme Parisot, présidente du MEDEF, se prend pour Moïse en édictant les Tables de la Loi du Capitalisme du XXI me Siècle… D’autres nouveaux "˜Commandements’ sont en préparation, dont un qui voudrait "˜refondre’ c’est-à -dire démembrer ou abroger quasiment le Code du Travail… Il nous faudra là aussi être attentifs au langage explicatif de la réforme et ne rien "˜laisser passer’ qui brouillerait la perception et la gravité des enjeux ! Soyons attentifs au vocabulaire employé, à chaque mot et à chaque argument, pour le contrer "˜coup contre coup’. Ne nous laissons pas enfermer dans la langue de nos adversaires.

Il est de nécessité vitale que le monde des Travailleurs conserve la mémoire de ses luttes, de ses conquêtes et que la défense de ses acquis s’appuie sur la langue des travailleurs eux-mêmes, pas sur celle des spécialistes de la compromission ou de l’exploitation qui ne songent qu’a neutraliser les résistances qui naissent de partout.
Un jour de véritable "˜alternative’ nous aurons aussi besoin d’un langage de vérité, pour que le soutien espéré populaire soit celui qui résulte non pas d’une manipulation mais d’une adhésion.

Jacques Richaud 3 décembre 2012

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