Première Partie
La Syrie peut-elle être correctement considérée comme un exemple d’une révolution populaire arabe « pure », un soulèvement non violent, une manifestation pour la liberté contre une tyrannie et qui n’a rencontré que répression ? Je crois que cette narration est une lecture totalement fausse servant délibérément certaines ambitions différentes. Les conséquences de fermer les yeux sur ce qui se passe en Syrie fait courir d’énormes risques : un conflit sectaire potentiel qui ne serait pas confiné à la Syrie.
L’un des problèmes pour dévoiler le paradoxe syrien c’est qu’il y a effectivement une demande interne réelle de changement. Une vaste majorité de Syriens veulent des réformes. Ils ressentent la claustrophobie de l’autoritarisme inerte de l’état et de l’indifférence arrogante de la bureaucratie à l’égard de leurs difficultés quotidiennes. Les Syriens sont indignés par la corruption envahissante et les tentacules des autorités sécuritaires dans pratiquement tout le quotidien. Mais la demande largement répandue de réformes est-elle comme beaucoup l’affirme à l’origine des violences en Syrie ?
Il y a cette demande massive de réformes. Mais paradoxalement - et contrairement à la narration du « réveil » - la plupart des Syriens croient aussi que le Président Bashar Al Assad partage leurs convictions sur les réformes. Les populations de Damas, d’Alep, la classe moyenne, la classe des commerçants et les minorités non sunnites (qui correspondent à ¼ de la population) entre autres, dont la direction des Frères Musulmans sunnites, rentrent dans cette catégorie. Ils pensent également qu’il n’y a « personne d’autre » de crédible capable de mener ces réformes.
Qu’est ce qui se passe donc alors ? Pourquoi le conflit se polarise- t-il ainsi et devient si amer s’il y a effectivement un tel consensus large ?
Je pense que les racines de l’amertume se trouvent plutôt en Irak qu’en Syrie de deux manières distinctes.
Premièrement elles remontent au courant de pensée jihadiste sunnite tel qu’exprimée par Abi Musab al-Zarqawi qui s’est développé en Irak a fait violemment surface au Liban et a été transposé en Syrie avec le retour de nombreux vétérans syriens salafistes à la « fin » du conflit en Irak.
Deuxièmement, et séparément, l’amertume en Syrie est également liée à un sens profond de grief ressenti par certains états arabes à cause de la perte de pouvoir politique sunnite suite à l’ascension au pouvoir en Irak du premier ministre Nuri al-Malaki dont ils rendent Assad responsable.
Précurseur des évènements actuels en Syrie l’armée libanaise a du également en 2007 se battre contre un groupe de militants sunnites de diverses nationalités qui avaient combattu en Irak. Le groupe, Fatah al-Islam, avait infiltré venant de Syrie le camp de réfugiés Naher al-Bared au Nord du Liban et ses membres s’étaient intégrés aux familles palestiniennes du camp par mariages.
Bien que le nombre de combattants étrangers était relativement bas, ils étaient bien armés et expérimentés en combats urbains. Ils ont aussi bénéficié de soutien libanais local. Ce conflit sanglant avec l’armée libanaise a duré plus de trois mois. A la fin Naher al-Bared était en ruines et 168 soldats de l’armée libanaise avaient été tués.
Cet évènement était le point culminant de toute une série de mouvements d’Afghanistan et à travers la région d’allées et venues en Irak. La plupart de ces Sunnites radicalisés venus combattre l’occupation des US gravitaient autour de groupes liés de loin à Zarqawi. L’affiliation de Zarqawi avec Al Qaeda n’a pas de signification particulière pour la Syrie actuellement mais la doctrine « Syrie » de Zarqawi qui s’est développé en Irak est cruciale.
Zarqawi comme les autres Salafistes ont rejeté les frontières artificielles et les divisions nationales héritées du colonialisme. A la place il a insisté pour appeler l’ensemble du Liban la Syrie la Palestine et la Jordanie et une partie de la Turquie et de l’Irak par son ancien nom « Bilad a-Sham ». Zarqawi et ses supporters étaient férocement anti Shi’ite - bien plus que ne l’était au début al Qaeda - et affirmaient qu’ a-Sham était un patrimoine entièrement sunnite qui avait été conquis par les Shi’ites.
Selon sa narration, le coeur sunnite, la Syrie, a été usurpé ces 40 dernières années par les Shi’ites d’Al Assad ( les Alawites sont une branche du mouvement Shi’ite). L’ascension du Hezbollah pour partie grâce à Assad a aussi sapé encore plus le caractère sunnite du Liban. De même ils pointent du doigt le soi disant affaiblissement par Assad de l’ancien premier ministre d’Irak, Ayad-Allawi, comme un acte livrant l’Irak aux Shi’ites, nommément à Malaki.
A partir de ce profond grief l’écartement du pouvoir des Sunnites les alliés de Zarqawi ont développé une doctrine dans laquelle le Liban et la Syrie n’étaient plus des plateformes d’où lancer le jihad mais des endroits pour le jihad (contre les Shi’ites de même que contre les autres). Les Salafistes syriens sont retournés chez eux en entretenant ce grief. Un grand nombre d’entre eux - Syriens et non Syriens - se sont installés dans les villages à la campagne à la frontière du Liban et de la Turquie et comme leurs confrères de Nahar al- Bared, ils se sont mariés localement.
Ce sont ces éléments - comme au Liban en 2007 - qui ont donné naissance à une violence armée en Syrie contre les services de sécurité syriens. A la différence de la Tunisie et de l’Egypte, la Syrie a fait l’expérience de centaines de morts et de centaines et centaines de blessés parmi les forces de sécurité et la police. (A Dara c’est différent les éléments armés sont des Bédouins qui migrent entre l’Arabie Saoudite, la Jordanie et la Syrie).
Difficile de fixer un nombre mais peut être 40 000 à 50 000 Syriens ont combattu en Irak. Avec leurs mariages au sein de communautés locales leur base de soutien est plus importante que les chiffres réels de ceux qui sont allés en Irak. Leur objectif en Syrie est identique à ce qu’il était en Irak : établir les conditions pour le jihad en Syrie en exacerbant l’animosité sectaire - comme l’a fait Zarqawi en Irak via ses attaques contre les Shi’ites et leurs mosquées. De même, ils cherchent à s’implanter dans le Nord Est de la Syrie pour créer un émirat islamique salafiste qui agirait de façon autonome sans obéir à l’autorité de l’état.
Cette fraction d e l’opposition n’est pas intéressée par des « réformes » ou la démocratie : ils déclarent clairement et publiquement que si cela coûte 2 millions de vies pour renverser les Alawites « Shi’ites » le sacrifice en vaut la peine. Mettre en place une législation autorisant de nouveaux partis politiques ou étendre la liberté de la presse sont des exigences auxquelles ils sont complètement indifférents. Le mouvement de Zarqawi rejette d’emblée la politique occidentale.
Ces groupes Salafistes sont le premier tiroir de la « boîte » syrienne : ils ne se réduisent pas à une seule organisation mais sont généralement dirigés localement et autonomes. Liés entre eux sans contrainte via un système de communications ils sont bien financés et ont des liens avec l’extérieur.
L e deuxième tiroir de la boîte syrienne ce sont certains groupes en exil : eux aussi sont bien financés par le gouvernement US et d’autres sources étrangères et ont des liens externes à la fois dans la région et en Occident. Certaines dépêches de 2009 de l’ambassade US à Damas révèlent comment un certain nombre de ces groupes et stations TV liés avec eux avaient reçu des dizaines de millions de dollars pour leurs actions de la part du département d’état et de fondations basées aux US, de même qu’une formation et une assistance technique. Ces mouvements d’exilés croient qu’il s peuvent réussir à utiliser les rebelles salafistes pour leurs propres intérêts.
Les exilés espèrent que l’insurrection salafiste contre l’état - bien que confinée au début à la périphérie de la Syrie - provoquerait un tel contrecoup de la part du gouvernement syrien qu’une masse de gens concentreraient leur hostilité contre l’état et que finalement une intervention étrangère deviendrait inévitable - suivant idéalement le modèle libyen de Benghazi.
Ce n’est pas ce qui s’est passé bien que les dirigeants occidentaux tel le ministre des affaires étrangères français Alain Juppé a fait beaucoup pour maintenir en vie cette perspective. Ce sont les exilés souvent séculiers et de gauche qui essaient « d’arranger » les histoires des médias sur la Syrie. Ces expatriés ont encadré les Salafistes en utilisant des techniques des révolutions « colorées » pour décrire une pure histoire de répression massive et sans provocation par un régime qui refuse les réformes tandis que l’armée se désintègre sous la pression parce que forcée de tuer ses compatriotes.
Al-Jazeera et Al Arabia ont coopéré en mettant en avant cette histoire en diffusant des comptes rendus de témoins anonymes et des vidéos sans poser de questions - voir par exemple Ibrahim al-Amine
Mais les Salafistes ont compris que les exilés les utilisent pour provoquer des incidents et prouver la narration médiatique de répression faite par l’opposition à l’extérieur ; cela peut éventuellement servir les intérêts des Salafistes aussi.
Ces deux composantes peuvent être relativement petites en nombres mais l’attrait émotionnel de la voix amplifiée du grief sunnite - et son besoin de réparation à une base plus large et plus significative. Il est facilement transformable en action à la fois en Syrie et dans la région dans son ensemble.
L’Arabie Saoudite et les Pays du Golfe s’appuient explicitement sur les craintes d’un « expansionnisme » shi’ite pour justifier la répression du Conseil de Coopération du Golfe au Bahreïn et l’intervention au Yémen et la « voix » péremptoire du sectarisme est amplifiée en Syrie aussi.
Des voix sunnites cléricales vantent le « réveil » arabe comme étant la « révolution sunnite » en riposte à la révolution shi’ite d’Iran. En Mars Al Jazeera a diffusé un sermon du Sheikh Youssef al-Qaradawi qui levait l’étendard de la restauration de l’ascendance sunnite en Syrie. Qaradawi qui est basé au Qatar, a été rejoint par le dirigeant religieux saoudien Saleh Al-Luhaidan qui a exhorté à « tuer 1/3 des Syriens pour que les 2/3 restants puissent vivre ».
A l’évidence beaucoup de manifestants dans des centres traditionnels d’irrédentisme sunnite tels Homs et Hama en Syrie sont des Sunnites affligés qui cherchent à chasser les Alawites et un retour à l’ascendant sunnite. Ce ne sont pas des Salafistes mais des Syriens ordinaires pour qui l’ascendance sunnite l’irrédentisme et le réformisme se sont cristallisés en une seule demande. C’est une perspective très effrayante pour le quart des Syriens qui forment des minorités non sunnites.
La marginalisation des Sunnites en Irak en Syrie et plus récemment au Liban a touché l’Arabie Saoudite et certains pays du Golfe tout autant que les Salafistes. La perception qu’Assad a trahi les intérêts sunnites en Irak - bien que ce soit inexact - aide effectivement à expliquer l’agressivité de la campagne d’information préméditée contre Assad d’Al Jazeera une TV financée par l’émir du Qatar.
Le magazine français Le Nouvel Observateur a publié un article sur un activiste des médias à Stockholm qui a fait une visite clandestine à Doha où les directeurs d’Al Jazeera lui ont donné accès à la TV pan arabe et l’ont encadré pour faire en sorte que ses vidéos frappent encore plus durement :
» filmes des femmes et des enfants. Insistes sur le fait qu’ils utilisent des slogans pacifiques. »
A l’opposé la presse arabe s’est faite directement l’écho des demandes insistantes faites à Assad par les états du Golfe ( les « Arabes d’Amérique ») et des envoyés européens en échange de leur soutien. Ibrahim al -Amine, éditeur en chef du journal indépendant al-Akhbar, a fait la liste des réformes à entreprendre consistant à démanteler le parti au pouvoir, créer une nouvelle législation sur les partis politiques et la liberté de la presse, le limogeage de certains officiers, retirer l’armée des rues et commencer des négociations directes et intensives avec Israël.
Les envoyés ont également suggéré que de telles réformes pourraient fournir à Assad un prétexte pour rompre son alliance avec le Hezbollah et le Hamas en plus de rompre l’aspect résistance de la relation de Damas avec Téhéran…
Deuxième Partie
Les diplomates ont suggéré qu’en prenant de telles mesures cela faciliterait l’amélioration des relations avec des états arabes et des capitales internationales et offrirait la perspective que des états arabes pétroliers riches puissent offrir à Assad une aide de 20 milliards pour détourner Assad de toute dépendance économique de l’Iran.
Tout ceci reflète l’autre dimension des évènements en Syrie : sa position stratégique comme pierre d’angle d’un arc allant du Sud Liban à l’Iran. C’est ce rôle que ceux aux US et en Europe qui se préoccupent d’abord de la sécurité d’Israël ont cherché à changer. Ce n’est pas sûr cependant qu’Israël soit aussi inquiet que les responsables occidentaux de voir Assad renversé. Les dirigeants israéliens manifestent du respect pour Assad. Et si Assad devait partir personne ne sait ce qui suivra en Syrie.
Entre 1947 et 1949 les responsables gouvernementaux US sont intervenus en Syrie. Leur but c’était de libérer le peuple syrien d’une élite d’autocrates corrompus. Le résultat a été désastreux et a finalement abouti à l’arrivée au pouvoir de la famille Assad. Possible que les puissances occidentales ne se rappellent plus cette histoire comme l’a fait remarqué récemment un commentateur de la BBC mais les Syriens s’en souviennent surement.
Depuis l’invasion en 2003 de l’Irak les US ont en fait continuellement menacé le président syrien d’ultimatums pour qu’il fasse la paix avec Israël- travaillant de concert avec Paris. Le rejet d’Assad de la menace de 2003 a donné lieu à des séquences incessantes de pressions et menaces à l’encontre du président syrien dont une action auprès du CSONU, le Tribunal Spécial pour le Liban concernant le meurtre de l’ex premier ministre libanais Rafic al- Hariri et l’action militaire israélienne pour affaiblir le Hezbollah et changer la balance du pouvoir au désavantage d’Assad.
Les US ont également commencé à financer librement des groupes d’opposition syriens au moins depuis 2005 ; et plus récemment de former des activistes dont des activistes syriens sur les moyens d’éviter les arrestations et sur des systèmes de communications sécurisés utilisant des réseaux de téléphone sans licence et des logiciels internet.
Ce sont ces techniques plus l’entraînement des activistes par des organisations non gouvernementales et d’autres réseaux médiatiques qui ont aussi été utilisés par l’insurrection armée militarisée - de même que les mouvements de protestation pro démocratie.
Les US ont également été actifs dans le financement direct ou indirect de centres des droits de l’homme qui ont été très actifs en fournissant les chiffres non vérifiés des victimes et des comptes rendus de témoins aux activistes des médias. Certains tels le Centre des Droits de l’Homme de Damas déclare ouvertement son partenariat avec Le US Endowment for Democracy et d’autre sont financés par exemple par le Democracy Council et l’ International Republican Institute.
La décision du gouvernement syrien d’interdire les journalistes étrangers a bien sûr contribué à donner libre cour aux sources externes des activistes leur permettant ainsi de dominer la narration médiatique sur la Syrie.
Le côté manquant de la boîte de Pandore syrien qui a été omis jusqu’à maintenant c’est celui de l’armée syrienne et sa réponse aux manifestations. L’armée principalement entraînée aux méthodes russes n’a pas d’expérience de combat dans des zones urbaines compliquées où il y a à la fois de vrais manifestants et un petit nombre d’insurgés armés qui eux maîtrisent les techniques de guérilla urbaine et l’expérience des embuscades acquises en Irak et qui cherchent à provoquer des confrontations avec les forces de sécurité.
L’armée syrienne manque d’expérience en contre insurrection. Bien que les histoires de défections massives de l’armée constituent de la désinformation il y a eu une érosion de confiance en soi militaire aux échelons les plus bas du commandement. Et la confiance du public dans l’armée a également été ébranlée alors que le nombre des victimes augmentait. Mais cet « ébranlement » s’est terminé avec le conflit dramatique autour de Jisr - al-Shagour mi Juin.
Tout comme la nation libanaise s’est ralliée derrière son armée lors du conflit de Naher -al-Bared, de même les Syriens se sont ralliés derrière leur armée face aux attaques salafistes contre la police puis par la suite contre l’armée et les institutions publiques à Jisr. Et comme les détails du conflit de Jisr -al-Shagour se déroulaient sous les yeux du public l’amertume a cru vis-à -vis des insurgés probablement de façon décisive.
Les images de Jisr de même que d’autres vidéos circulant sur des lynchages et des attaques contre les forces de sécurité ont choqué un grand nombre de Syriens qui ont vu en elles le même « goût du sang » que dans celles accompagnant les images de la pendaison de Saddam Hussein en 2006.
Les évènements de Jisr pourraient bien avoir été un tournant décisif. La confiance de l’armée en elle-même et son honneur se sont accrus et la majorité du public voit d’une façon qui n’était pas évidente auparavant que la Syrie affronte une menace sérieuse n’ayant aucun lien avec un agenda de réformes. Le sentiment s’est éloigné de toute pensée en termes de réformes immédiates.
L’opinion publique est concentrée et en veut aux Salafistes et leurs alliés. La gauche et les milieux d’opposition séculiers prennent leurs distances avec la violence salafiste - l’inhérente contradiction entre les aspirations divergentes des « exilés » et les Salafistes avec le consensus majoritaire syrien éclate maintenant au grand jour. Ceci est essentiellement le dernier volet de la « boîte » du paradoxe syrien.
Dans cette ambiance des réformes dramatiques pourraient être perçues par les supporters du président comme un signe de faiblesse, même la clémence vis-à -vis de ceux qui sont responsables des tueries d’officiers de police et de l’armée à Jisr. Ce n’est pas surprenant qu’Assad ait utilisé son discours de la semaine dernière pour parler à ceux qui le soutiennent : pour parler des difficultés et menaces auxquelles est confrontée la Syrie mais aussi pour présenter le processus vers une s ortie du danger et vers des réformes substantielles.
Les commentaires occidentaux ont largement qualifié le discours de « décevant » ou de « peu détaillé » mais ils n’ont rien compris. Alors que plus tôt une réforme choc dramatique telle que l’avait conseillé le ministre des affaires étrangères turc ,Ahmet Davutoglu, aurait pu à un certain moment avoir un effet transformateur choc, il est peut probable qu’on puisse y parvenir actuellement.
Au contraire, des concessions obtenues en tordant le bras du gouvernement avec le type de violence vues à Jisr mettraient probablement en colère les supporters d’Assad et serait rejetée catégoriquement par l’opposition qui cherche à exacerber les tensions pour que l’Occident se décide à intervenir.
En sélectionnant prudemment certains actes volontaires et en procédant de l’avant, Assad a correctement interprété l’humeur de l a majorité en Syrie. Le temps jugera mais il semble qu’Assad sortira vainqueur de toute une série de défis compliqués dirigés contre lui venant de mouvements et d’états reflétant toute un éventail d’intérêts spéciaux et de motivations de même que de griefs. La racine de tout ceci est bien éloignée de problèmes législatifs et de réformes politiques en Syrie.
Ce ne serait pas surprenant qu’Assad voit dans toutes ces mesures contre lui une tentative de coup « en douceur ». Il peut s’interroger sur l’étendue de la connaissance du président US Obama sur ce qui s’est passé en Syrie. Il semble peu probable que les responsables US aient été totalement ignorants ou n’aient pas eu connaissance de la matrice de menaces convergeant pour déstabiliser Assad.
Et si c’est le cas ce n’est pas la première fois que les responsables syriens ont constaté un style de politique étrangère d’Obama avec un disfonctionnement entre la « main gauche et la main droite » des politiques contradictoires étant menées simultanément par des responsables US.
Si comme il semble Assad émerge effectivement de tous ces défis la teneur de sa réponse récente aux envoyés européens et arabes suggére que des réformes seront entreprises d’une part pour protéger le caractère de la résistance syrienne de futur défis de ce type.
En 2007 Assad a fait remarquer avec une ironie désabusée dans une note ajoutée à son discours qu’il n’avait pas eu le temps de poursuivre des réformes efficaces : « nous n’avons même pas eu le temps de discuter de l’idée concernant la loi sur les partis entre autres. A un moment donné l’économie était une priorité mais nous n’avons pas eu le temps d’aborder la situation économique. Nous étions engagés dans une bataille décisive (sur le front extérieur) et nous devions gagner. Il n’y avait pas d’autre option… »
Actuellement la« réforme » est le front extérieur existentiel. Mais si le but de tout ceci c’était de modifier la balance stratégique au Moyen Orient cela n’a pas fonctionné. Il est peu probable qu’Assad émergera plus souple face aux défis occidentaux - pas plus qu’il ne l’a été par le passé.
Alastair Crooke - 15/07/2011- Copyright A. Crooke
Alastair Crooke est fondateur et directeur de Conflicts Forum et ancien conseiller de Javier Solana ex-chef de la politique étrangère de l’UE 1997-2003.
source originale Asia Times : http://www.atimes.com/atimes/Middle_East/MG15Ak02.html
(posté par internaute - origine de la traduction non précisée - LGS)