25 
La Syrie est au centre d’une alliance des forces opposées à la domination israélo-américaine dans la région

Fichez la paix à la Syrie !

Déjà dix ans de guerre en Syrie, et les souffrances du peuple syrien continuent. Dix ans de guerre, et les milliers de vies qu’elle a fauchées, les immenses dévastations qu’elles a causées, sont les stigmates du martyr infligé à un peuple qui ne demandait qu’à vivre en paix. Gigantesque tribut payé à cette folie collective orchestrée de l’étranger, qui a vu des mercenaires de 120 nationalités affluer au Pays de Cham pour y instaurer un nouvel « émirat ».

Guerre sans pitié, où l’État syrien menacé d’anéantissement s’est battu bec et ongles, défendant l’intégrité territoriale et la souveraineté de la nation. Affrontement aux multiples visages, la guerre de Syrie n’en finit pas de présenter son sinistre bilan.

Il fallait être naïf pour ne pas voir, dès le printemps 2011, la formidable duplicité des gouvernements occidentaux versant des larmes de crocodile sur les victimes de l’armée syrienne tout en absolvant les exactions de la rébellion armée. Difficile d’ignorer, non plus, que les combattants de la nébuleuse insurrectionnelle disposaient d’un soutien financier massif de la part des pétromonarchies du Golfe. Mais si les Occidentaux et leurs alliés régionaux voulaient en découdre avec Damas, ce n’était pas pour faire la promotion des droits de l’homme. C’était pour défendre des intérêts sonnants et trébuchants au cœur d’une région cruciale pour l’avenir énergétique de la planète.

C’était aussi, comme l’a écrit Hillary Clinton dans un célèbre courriel révélé par Julian Assange, pour garantir la sécurité d’Israël en neutralisant l’un des derniers bastions du nationalisme arabe. Car la Syrie est au centre d’une alliance réunissant les forces qui s’opposent à la domination israélo-américaine dans la région. Elle demeure le seul État arabe debout, refusant de plier devant la puissance occupante. Elle est le pivot d’un arc de la résistance qui va de Damas à Téhéran en passant par le Hezbollah libanais et les mouvements palestiniens. Le drame, mais aussi la fierté de la Syrie, c’est qu’elle est l’enfant terrible du nationalisme arabe, le dernier vestige d’une époque où Nasser et le parti Baath inspiraient la lutte contre l’impérialisme et le sionisme.

S’imaginant qu’ils allaient provoquer sa chute à la faveur des « printemps arabes », les dirigeants occidentaux ont ignoré la légitimité dont jouissait le gouvernement syrien. Ils pensaient que l’armée régulière se déliterait sous l’effet de désertions en masse qui n’eurent jamais lieu.

Aveuglés par leur lecture orientaliste de la société syrienne, ils la croyaient dominée par la minorité alaouite alors même que les principaux cadres de cet État laïc, le seul du monde arabe, étaient sunnites. Ils faisaient mine de croire à la légende d’un peuple héroïque dressé contre un despote aux abois, alors que la légitimité du président Assad se trouvait confortée, au contraire, par sa détermination à lutter contre les ennemis de la Syrie.

Les médias occidentaux ont braqué leurs caméras vers des attroupements de barbus en les faisant passer pour un soulèvement populaire, mais ils ont occulté les immenses rassemblements en faveur du gouvernement et des réformes, à Damas, Alep et Tartous, entre juin et novembre 2011. Il suffisait pourtant d’analyser de tels événements pour mesurer le véritable rapport de forces au sein du pays. Mais la myopie volontaire du regard occidental sur la Syrie a pulvérisé tous les records. Avide de prendre le train à grande vitesse de la propagande anti-Damas, le moindre journaliste s’est précipité tête baissée dans son dernier wagon. L’imagination propagandiste a réduit au silence le simple bon sens, et les atrocités commises par les extrémistes, dès le printemps 2011, n’ont pas passé la rampe d’une couverture médiatique faisant le tri entre les bonnes et les mauvaises victimes.

Indice infaillible de son importance stratégique pour Washington et ses séides, la guerre de Syrie aura suscité une avalanche de mensonges sans précédent. La fable grotesque des attaques chimiques attribuées à l’armée syrienne mérite une mention spéciale du jury : elle restera à jamais dans les annales de la désinformation, à côté de la fiole de Colin Powell et des couveuses de Koweit-City.

L’écran de fumée d’une « opposition syrienne démocratique » s’étant vite dissipé, il a fallu inventer un cortège d’horreurs imaginaires pour inverser la charge de la preuve. Afin de détourner l’attention de ces coupeurs de tête venus de partout et de nulle part pour exterminer les hérétiques, on s’est mis à accabler l’État syrien. On a alors monté de toutes pièces des accusations invraisemblables dont seule la crédulité d’une opinion occidentale soumise à un intense lavage de cerveau pouvait garantir l’efficacité.

Il suffisait pourtant de consulter les chiffres fournis par un organisme proche de l’opposition armée (l’OSDH) pour constater que la moitié des victimes de la guerre appartenaient aux forces de sécurité syriennes. Quel meilleur démenti infligé à la fable du massacre de populations innocentes par une armée de tortionnaires ? Mais la narration dominante n’avait cure de ces broutilles, et l’opération de « regime change » voulue par Washington s’accommodait aisément de telles distorsions avec la réalité. Elle faisait fi de ce que les observateurs de la Mission dépêchée par la Ligue arabe avaient constaté entre décembre 2011 et janvier 2012, à savoir la violence déchaînée par une opposition présentée en Occident comme pacifique et tolérante, alors qu’elle était gangrenée dès l’origine par l’idéologie takfiriste, les pratiques mafieuses et l’argent saoudien.

Voulue par Washington, Londres, Paris et Ankara, financée par les monarques du Golfe, la guerre de Syrie est une farce sanglante. Provoquée par l’appétit de domination impérialiste, elle a mobilisé une piétaille fanatisée, issue de masses manipulables, abruties au dernier degré par l’idéologie wahhabite. Véritable boîte de Pandore, ce conflit a fait jaillir un impressionnant florilège d’ignominies : des dirigeants occidentaux qui prétendent combattre les terroristes tout en leur procurant des armes au nom des droits de l’homme ; des États dits démocratiques qui infligent un embargo sur les médicaments à des populations civiles coupables de ne pas combattre leur gouvernement ; des familles royales sanguinaires et débauchées qui donnent des leçons de démocratie tout en sponsorisant la terreur ; et pour finir, des intellectuels français qui exigent comme un impératif moral le bombardement d’un pays qui ne nous a rien fait.

De ces mercenaires crétinisés venus dévaster le berceau de la civilisation pour une poignée de pétrodollars, l’État syrien, pourtant, est presque venu à bout. En restaurant la souveraineté nationale sur la majeure partie du territoire habité, cette courageuse armée de conscrits a infligé un camouflet à tous ceux qui rêvaient de remplacer la Syrie par une constellation d’entités confessionnelles.

Calomniée sans relâche par les propagandistes occidentaux, cette armée nationale a payé un lourd tribut pour libérer le sol de la patrie. Les faussaires du droit-de-l’hommisme avaient beau fabriquer des « faits » pour l’accabler, nous savions que les « rebelles modérés » chers à l’Occident avaient massacré les familles des fonctionnaires baasistes, et que ces horreurs étaient imputées par la presse occidentale à l’armée régulière. Et c’est au prix d’efforts surhumains que le peuple syrien, son État et son armée ont repoussé les milices terroristes jusque dans cette poche d’Idlib qui finira bien par tomber à son tour.

Victorieuse sur le plan militaire, forte du soutien populaire, la Syrie souveraine subit toujours les affres de l’embargo occidental, ajoutés aux séquelles de la guerre et à la destruction de solidarités familiales et communautaires malmenées par dix années de violence ininterrompue. Aussi l’acharnement des ennemis de la Syrie n’est-il pas seulement criminel : il est absurde. Après dix ans de guerre, le pays entrevoit enfin le bout du tunnel. Certains quartiers de Damas ou d’Alep renaissent, retrouvant le mode de vie d’antan. Les Russes ont joué un rôle déterminant dans la libération de la Syrie, et il est probable que les Chinois prendront leur part dans sa reconstruction. Washington, Londres, Paris et Ankara n’ont plus qu’une chose à faire : cesser d’exercer leur pouvoir de nuisance. Qu’ils passent la main, et laissent la Syrie tranquille. Mais l’impérialisme n’a pas l’habitude de lâcher le morceau, et la route sera sans doute longue avant le retour à la paix.

Bruno GUIGUE

(Les illustrations ont été ajoutées par LGS).

COMMENTAIRES  

16/03/2021 09:04 par Brigitte

Une campagne de propagande en Allemagne est repartie de plus belle : le "boucher", le "dictateur", le "tortionnaire" Assad qui dans ses prisons a fait torturer, tuer tous les prisonniers politiques, avec quantités de photos des morts prises dans les prisons syriennes. ça rappelle étrangement les photos des morts exposées par tous les médias comme preuve des faux charniers de Timisoara....).Ces procès en Allemagne de tous les syriens qui auraient participé à ces exactions (jugés coupables par avance) ne seraient-ils pas annonciateurs d’une légitimation d’une nouvelle offensive envers la Syrie par la communauté occidentale ?

Mais alors pourquoi donc, pourrait-on se demander naïvement, la communauté internationale n’a pas jugé bon de traduire devant la justice des Pinochet, des MBS, des Sarkozy, des Obama, des Bush, des Aussaresses et j’en passe pour crimes contre l’humanité ?

16/03/2021 11:37 par Paul

" La guerre en Syrie est une farce sanglante ". D’origine US, elle est soutenue par ses vassaux occidentaux comme la France, avec ses médias privés et " publics " ( France 5 ou Arte) , qui parlent de "régime" quand le pays déplait à l’empire des lobbys outre Manche. Une République dont les représentants sont légitimement élus, mais qui fait tache au milieu des états confessionnels. La récente attaque lancée par Biden dès son investiture assure la continuité pour contrôler le pays et surtout pomper son pétrole !

16/03/2021 12:27 par DD

Judicieuse colère contre la maffia impérialiste US et ses laquais dont l’UE, excellente mise au point contre la bête immonde et ses génocides, merci.

16/03/2021 12:32 par Paul

En complément de l’article de B.Guigue, cet excellent article aussi de AntiWar, paru pour le triste 10 ème anniversaire de l’opération "changement de régime" de l’OTAN en Syrie, qui a fait plus de 500.000 morts et des millions de déplacés .
https://www.zerohedge.com/geopolitical/ten-years-beginning-failed-regime-change-operation-against-syria

16/03/2021 12:55 par Triaire

En effet, Monsieur Guigue, cette guerre ménée par les occidentaux à ce pays est une honte et pire, une obscénité .Comment une propagande aussi mensongère peut elle marcher ?Faut il que les Occidentaux, très abimés par la consommation et les médias, aient perdu des millions de neurones....Ceci explique aussi leur mutisme devant leurs dirigeants fous..Ils sont à genoux .Honte à eux .

16/03/2021 13:47 par Auguste Vannier

Pourtant la narrative faussaire et propagandiste a bel et bien repris sur nos media, sans imagination ni mémoire puisque inchangée malgré tous les démentis.
Comment est-il possible que des professions que je persiste à nommer "intellectuelles", comme celles du journalisme peuvent-t-elles se prêter à cette grossière manipulation ?
Le plus grave, c’est que nos services publics d’information sont parmi les plus assidus à répéter en boucles la désinformation manifestement ordonnée par un gouvernement aux ordres US...
Merci donc à LGS et à B.Guigue .
Côté positif, les media mainstream continuent à se déconsidérer aux yeux de citoyens qui ont fait l’expérience des couvertures infâmes du mouvement des GJ et de la répression policière de toutes les manifestations .

16/03/2021 15:47 par Yannis

Juste remise en perspective. Mais pourquoi donner des gages à la manipulation par l’OSDH, structure pompeusement appelée "observatoire syrien des droits de l’hommes", domiciliée à Londres et animée par un exilé syrien ayant patte blanche pour aller serrer la pince de la reine des vampires british & soooo chic ?

Espérons donc que les Syriens et Syriennes s’en sortent comme ils peuvent, tout comme le peuple cubain. Il suffit de dire juste et de croiser les doigts...

16/03/2021 17:25 par Georges Olivier Daudelin

Très bon article de Monsieur Guigue. Merci.

16/03/2021 17:40 par Xiao Pignouf

Merci M. Guigue pour ce rappel face à la multiplication dans certains de nos médias d’articles mensongers jouant les Sainte-Nitouche et accusant presque les Russes du chaos que l’Occident y a mis. Cette faculté de repeindre en blanc la responsabilité des atlantistes me chatouille aux entournures. Votre article, c’est un peu le gratte-dos téléscopique qu’il me fallait.

16/03/2021 17:55 par Dandy

Foutre la paix à la Syrie, ce n’est pas dans le plan du Nouvel Ordre Mondial (NOM), ha ! zut, j’oubliais, le NOM n’existe pas, c’est juste un délire de complotiste, pardon, ça m’avait échappé.

16/03/2021 17:56 par Alamut

"Mais l’impérialisme n’a pas l’habitude de lâcher le morceau" dites-vous !
En effet, je suis assez inquiet de voir fleurir soudainement ces jours-ci sur les chaines mainstream plusieurs sujets carrément anti-syriens notamment concernant la "biographie" de Bachar al-Assad.

Il y a comme une préparation à "quelque chose" qui se profile....

La submersion des discours médicaux sur la Covid et leur utilisation par l’état cherche habilement à nous garrotter mentalement pour
qu’en cas d’accélération politico-guerrière personne ne bronche !
Les médecins (ces nouveaux prêtres ?) commencent à me "bassiner" sérieusement avec leurs discours soi-disant 100% scientifiques alors qu’ils gèrent au fond sans le dire la simple peur de la mort tout en nous considérant comme seulement des "sacs à virus" !

L’histoire nous montre que les médecins avec leur incurie culturelle politique et philosophique peuvent se prêter activement ou passivement à tous les excès sous couvert de "science".

On entre dans une nouvelle période de bio-pouvoir théorisé jadis par Michel Foucault concernant la gestion globale des populations.
Il y a de quoi avoir peur !

16/03/2021 20:42 par CAZA

Bonsoir
Ouf avec LGS et M Guigue on se sent moins seul .
Heureusement LGS n’est pas complètement Isolé
Voir les commentaires des lecteurs des merdias pas si crédules que cela .
Voir le journal de ce soir de TV Liberté ( conservateur catho ) qui donne la parole à M Blanchard de Chrétiens d’Orient .
Pour les acérébrés des chaînes d’info la cas est désespéré et il faut regarder ailleurs .

En lien "" de Médiapart : Une fuite de documents révèle une opération de propagande massive sur la Syrie "" 28 sept 2020 au cas où le lien serait inactif .
Tout est dit donc ( AL Jazeera , BBC ,Al Arabiya à la manoeuvre ) et les acteurs de la propagande actuelle ne sont pas des journalistes mais des escrocs et des complices de crimes .

La photo du début de l’article est vraiment représentative de ce qu’était la Syrie au début des années 2000 :
les enfants en campagne attendaient le bus pour aller à l’école
Aucune pauvreté visible ni de mendicité
Il régnait à Damas une ambiance très différente des autres capitales du Moyen Orient faite d’ insouciance et de légèreté ( véhicules avec klaxons musicaux et leds clignotants multicolores , restaurants bondés avec alcool ) sans influence ni tenue vestimentaire religieuse ( des cheveux féminins pas du tissu )
Bref le meilleur " régime " de la région si on compare aux dictatures des pays amis des assassins américains

.https://blogs.mediapart.fr/capucinesauvage/blog/280920/une-fuite-de-documents-revele-une-operation-de-propagande-massive-sur-la-syrie

16/03/2021 23:33 par Danael

C’est quand même hallucinant cette croisade sonore de la part des États-Unis et des grands médias occidentaux pour dénoncer le gouvernement syrien comme source de terrorisme international ! Cela me fait penser à leur nouvelle présentation de l’histoire du dernier conflit mondial associant communisme et nazisme. Bravo donc à Bruno Guigue pour sa persévérance à rétablir les faits. N’oublions pas que ces puissances impérialistes pratiquent couramment le double crime contre l’humanité par leur politique de sanctions sévères contre des peuples qui ont pourtant déjà subi de lourdes pertes suite à l’ ingérence guerrière de ces puissances.

17/03/2021 09:05 par Mediacideur

Si c’est pour remplacer la propagande par une autre quel intérêt ? Bruno Guigue touche souvent juste mais là il est trop partisan et indulgent pour Assad et le pouvoir syrien, et, en plus il nous donne la référence de... L’OSDH !!!

Mieux vaut aller lire L’Huma et l’article de Pierre Barbancey, toujours passionnant, bien informé et équilibré, que se faire chloroformer de la sorte.

Autre point de vue, celui d’une certaine Randa Kassis, vu sur RT il y a 2/3 jours et qu’on peut encore visionner sur leur fil d’actu

(dsl de casser l’ambiance)

17/03/2021 09:48 par mediacideur

L’article en question, de PB in L’Huma d’hier :

Syrie. Comment le peuple s’est fait voler sa révolution

Le slogan « Dignité et liberté », qui parcourait les premières manifestations il y a dix ans, a été tué dans l’œuf par la répression du pouvoir et les manœuvres des islamistes.

C’est peut-être, parmi les soulèvements qui ont éclaté en 2011, celui qui a le plus surpris. Alors que le tyran tunisien fuyait comme un voleur au mois de janvier de cette année-là, son homologue égyptien, Hosni Moubarak, n’allait pas tarder à tomber de son piédestal. En Libye, ça commençait à sentir le roussi pour le colonel Mouammar Kadhafi. Et pendant ce temps le président syrien, Bachar Al Assad s’amusait des déconvenues vécues par ces dirigeants. Il riait déjà lors d’un sommet des chefs d’État, lorsque Kadhafi, s’adressant à l’assistance – c’était à Damas, en 2008 – rappelait : « Saddam était l’ami des Américains mais ils l’ont pendu… vous ou plutôt moi, qui suis l’ami de États-Unis, ils peuvent décider, un jour, de me pendre. » Prémonitoire ! Mais pour Bachar Al Assad, soit par bravade, soit par aveuglement, tout cela ne le concernait pas. Erreur d’appréciation ! L’environnement régional a été très certainement l’étincelle qui a mis le feu aux poudres. Le mécontentement était profond en Syrie. Le pays venait de connaître plusieurs années consécutives de sécheresse, jetant les paysans dans une misère d’autant plus dure que le pouvoir appliquait dans le même temps une politique économique néolibérale en tout point conforme aux volontés du Fonds monétaire international Une table de loi sur laquelle est inscrit en lettres capitales le mot privatisation et, à sa suite, la suppression de bien des aides de l’État, à commencer par l’aide aux produits de première nécessité comme la farine, l’huile…
Des centaines de milliers de morts et des millions de réfugiés

Les premières manifestations sont plus d’ordre social que politique. Ce n’est que plus tard – le pouvoir pensant mater la révolte avec quelques coups de matraque, notamment dans la ville de Deraa – que les manifestations ont pris pour cible Bachar Al Assad et son pouvoir, que liberté et dignité sont devenues cri de ralliement, face à un pouvoir manifestement aveugle et sourd. En juin et juillet 2011, en reportage pour l’Humanité, nous avançons « Sur les routes brûlantes de la révolte syrienne ». Ce qui nous permet, de Damas à Idleb en passant par Lattaquié, de vérifier que pas une seule ville n’est épargnée par la révolte, à l’exception d’Alep pendant quelques mois encore. Faez Sara, écrivain, emprisonné de 2007 à 2010 puis en avril et mai 2011, nous expliquait alors : « La parole est en train de se libérer. » Malheureusement, le peuple syrien se sera fait voler sa révolution.

À l’été 2011, déjà, on parle d’armes qui entrent clandestinement dans le pays et l’armée syrienne est à la manœuvre notamment dans le Jamal Zawiyah et à Jisr al-Choghour, où des hommes masqués et armés, venus de la Turquie limitrophe, ont un temps occupé la ville avant de se retirer. Comme le soulignait l’avocat Anouar Al Bounni, un avocat des droits de l’homme qui venait de sortir de prison : « Cette ­répression empêche l’expression publique. Elle alimente les courants islamistes et pousse les gens à adopter des moyens non pacifiques. » Les comités de coordination locale, atout essentiel d’expression de la population dans cette renaissance inédite, ne reçoivent pourtant que très peu de soutien. La France, pousse à la création d’un front de l’opposition qui, en sous-main, est dominé par les islamistes tendance Frères musulmans, même si des figures laïques en sont l’expression publique. Les puissantes pétromonarchies du Golfe s’agitent et financent, voire font livrer des armes en toute discrétion. Les voix progressistes, fin 2012, n’apparaissent plus, noyées qu’elles sont dans le fleuve des stratégies des puissances régionales qui viennent mettre leur main dans ce drame humain. Au mépris de tout. Laurent Fabius, alors ministre des Affaires étrangères, qui estimait les militants du Front al-Nosra « faisaient du bon boulot sur le terrain ». Ne savait-il pas que le Front al-Nosra était l’appellation de la franchise syrienne d’al-Qaida ?

De même, alors que l’opposition soutenue par les Occidentaux refusait d’intégrer la revendication autonomiste kurde, ces mêmes Kurdes ont été laissés bien seuls face à l’organisation dite de l’« État islamique », plus connu sous son acronyme arabe, Daech. Les Unités de protection YPG et YPJ (les bataillons de femmes) ont pourtant infligé leur première grande défaite à ces djihadistes qui entendaient s’emparer de la ville de Kobané. L’Armée libre syrienne, bras militaire de l’opposition, dont le siège est en Turquie (!), malgré quelques combats, fait preuve de son incapacité.

À Paris, à Londres, à Washington, on affirmait que « le régime » n’en avait plus que pour quelques semaines. Dix ans après, des centaines de milliers de morts plus tard, au prix de la destruction de villes entières et des millions de réfugiés (en Turquie, au Liban, en Jordanie et en Irak notamment) et de déplacés internes, la situation est plus que jamais bloquée. Bachar Al Assad a sauvé son siège, grâce notamment à l’intervention de l’armée russe, des combattants du Hezbollah libanais et des milices pro-iraniennes, dont certaines venues d’Irak. L’opposition, elle, n’est plus que le pâle reflet d’elle-même, incapable de représenter réellement le peuple syrien dont elle est en réalité coupée depuis longtemps (si ce n’est depuis le début).

La Turquie soutient encore les pires djihadistes pour éradiquer l’expérience kurde au nord-est, basée sur le trait d’égalité entre les confessions, les communautés et les genres. À Idleb, qui est la province où l’on trouve sans doute la plus forte proportion de djihadistes issus de Daech et d’al-Qaida, la principale formation, Hayat Tahrir al-Cham, adepte des exécutions les plus terribles et d’un islam des plus rigoriste, veut changer de look (costume occidental à la place du kamis et du chèche). Il s’agit de paraître convenable, comme le souhaite le parrain turc. Aujourd’hui, Karim Pakradouni, homme politique libanais, fait ce constat amer : « Des années après que le monde entier a réclamé son départ et pensé qu’il serait renversé, ce même monde veut aujourd’hui se réconcilier avec lui. Assad a su jouer le temps long. » Désormais, les regards se tournent vers la présidentielle de l’été, simple formalité si ce n’est une mascarade. En 2012, plus de 100 pays reconnaissaient une « Coalition nationale des forces de la révolution et de l’opposition » comme unique représentant du peuple syrien, sans que celui-ci n’ait été consulté. Ce peuple syrien qui avait bâti sa révolte sur la liberté et la dignité, qu’il cherche encore et toujours.

17/03/2021 09:52 par mediacideur

Et l’interview de Randa Kassis sur RT, du 16 aussi

17/03/2021 10:21 par Assimbonanga

Danaël me fournit l’occasion d’une transition. Cela me fait penser à leur nouvelle présentation de l’histoire du dernier conflit mondial associant communisme et nazisme , dit-il. Hé bien justement, cette décision est saluée par un organe anti-communiste (ici blog).

Il se trouve que ce blog est résolument anti-chinois et pousse en avant une activiste nommée Gulbahar Haitiwaji qui se répand dans tous les médias français, Le Monde, Le Figaro, La Croix, France-Inter, et toutes les télés possibles.

Prévenez vos proches qui se laissent abuser comme Clémentine Autain, Rochdi Zem, Raphaël Glucksman ! On remarque une épidémie comploto-doutiste qui conduit chaque rebelle à perdre la raison, la pertinence, le sens de la mesure et de la justesse. Je vois des âmes en peine qui pourtant ont à leur actif des combats syndicaux, humanistes ou politiques, prêts à se mettre à genou devant le premier prédicateur venu (Je pense à une amie qui m’envoie des mails très surprenants) et dilapident leur pauvres forces en des visionnages de petits trouducs (Louis Fouché) ou de docteurs joyeux. On veut douter, dans une même bassine, du masque, du vaccin, du communisme, et, bien entendu, du personnage Mélenchon. D’anciennes bourgeoises qui ont viré de gauche durant leur vie active sont actuellement tirées par les pieds par des réminiscences de l’ordre de l’infantile, du retour aux origines. La vieillesse, seigneur, je vous passe la suite...

Gulbahar Haitiwaji a même écrit un livre. C’est la bonne méthode ! C’est le sésame. C’est la clé des plateaux de télévision qui peuvent ainsi recevoir l’auteure au motif irréfutable de la culture. ( Titre de "l’ouvrage" : Rescapée du goulag chinois. Premier témoignage d’une survivante ouïghoure)

Bon sang, puisqu’il y a search google, faites une petite recherche, les gens ! Pour Gulbahar Haitiwaji, vous pouvez survoler 12 pages vite-fait qui démontrent déjà l’hyper-activité de la dame, puis vous pouvez remarquer la tonalité people des interviews, plutôt bling-bling. Et enfin, ne manquez pas de lire la réplique de l’ambassade de Chine sur cette réfugiée politique d’un genre BCBG, réplique qui ne manque pas d’humour (forcée à se stériliser à 55 ans, wouarf).

Ce n’est pas parce que j’écoute Léa Salamé chaque matin que je suis contaminée par l’ingénuité de cette bonne amie de Carlos Ghosn et de Bernard Arnaud. Oh que non !

17/03/2021 11:38 par Gege

Cette diabolisation des pays , des « régimes » comme les nord Américains et leurs vassaux aiment les appeler, qui sont classés par les USA comme faisant partie de l’axe du mal , cette diabolisation ,´ permet de faire d’une pierre deux coups . Quelle aubaine de pouvoir jeter l’opprobre sur les opposants , dans les pays qui reprennent en cœur la propagande US , pour les discréditer . Comme c’est le cas en France , avec par exemple le Venezuelâaaaaaa ...!

17/03/2021 16:35 par Dandy

@mediacideur
Autrement dit l’Huma soutient le régime change en Syrie et joue le supplétif de l’impérialisme US et du camp occidental aligné derrière, d’ailleurs il a eu cette même position concernant la destruction de la Lybie. Personnellement je pense que le fait que la Syrie ne soit pas démantelée comme l’est actuellement la Lybie est une grande victoire du peuple syrien lui-même qui, quoi qu’on en dise, soutien massivement son président car il sait ou est son intérêt et il a massivement fait son choix entre les coupeurs de têtes anthropophage et Bachar. Point.

17/03/2021 19:04 par Manant

@ Tous (y compris au lecteur de l’Humanité qui ne sait pas encore que le printemps arabe est de fabrication étasunienne avec complicité active du Qatar et de l’Arabie saoudite, et semble aveugle sur le rôle déterminant de la Turquie… bref, passons aux choses sérieuses, plus dures que le plus dur granit : cet extrait d’un blogueur syrien célèbre portant le pseudonyme de Naram Serjoune :

« Le monde qui fête l’anniversaire de la guerre en Syrie (Happy Birthday to you… » et qui essaie de réduire notre esprit, notre moral et notre résistance et notre victoire… en en rajoutant en matière de sanctions et d’encerclement… et qui nous dit que nos pertes sont immenses en énumérant les morts, nos souffrances et le coût élevé des destructions… qui répète que le prix de notre rébellion est immense, que nous devions regretter… Mais, certes, si le prix de de la guerre est très élevé, et celui des destructions est véritablement énorme, le monde ne veut pas voir que nous avons fait de la terre syrienne la terre la plus précieuse sur terre ! Le monde y a été mis en échec. Nous avons dit que l’Amérique peut aller jusqu’à Mars et prétendre avoir mis les pieds sur la Lune, mais jamais elle ne peut descendre à Damas, ni mettre les pieds sur la place des Ommeyyades. »

17/03/2021 22:44 par CAZA

RE https://www.dailymotion.com/video/x7z23ui
Les 1ères photos manipulées c’est là

18/03/2021 13:30 par Palamède Singouin

Quand on lit l’édito de Sieffert dans Politis du 17/03, qui dit à peu près le contraire de ce qu’écrit ici Bruno Guigue, on se demande où est la vérité.

19/03/2021 05:34 par dandy

Il faut peut-être voir dans certains parti pris de la presse écrite, y compris celle dite de "gauche" (je met le terme entre guillemets car, a mon sens, il n’a plus grande signification aujourd’hui) de quelle façon celle-ci est tenue en laisse, je pense notamment aux subventions qu’elle reçoit de l’Etat : combien touche l’Huma chaque année pour rester en vie ?, idem pour Politis, et Denis Seiffert a sans doute conscience qu’à travers l’évolution des ses positionnements politique il défend son propre emploi.
Et oui, les idées et idéaux sont parfois (souvent ?) reliées à des puissances matérielles.

19/03/2021 15:09 par Auguste Vannier

La seule forme de vérité tangible c’est que des Syriens sont restés pour empêcher la colonisation islamiste et la prédation US Atlantiste. Ils ont résisté à une véritable "guerre mondiale". Il faut donc que le "régime" de ce pays ait un solide soutien de la plus grande partie de la population qui souffre et de ses conscrits qui combattent des mercenaires sans foi ni loi.
Ce n’est pas le témoignage d’un chirurgien syrien exilé à Paris et exhibé par Bruno Duvic sur France Inter qui devrait pouvoir nous faire douter.

20/03/2021 11:54 par Paul

Avec l’aide des " forces démocratiques syriennes " FDS, qui plaisent tant à nos gouvernants occidentaux , les US ont pompé 92 milliards de $ de brut en Syrie . De quoi faire qq économies sur le dos du " régime "....
https://www.zerohedge.com/geopolitical/syrian-oil-minister-estimates-us-has-pirated-92-billion-crude

(Commentaires désactivés)