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Après l’échec aux régionales, une gauche à la dérive

Et maintenant, comment reconstruire à gauche ?

Le débat à gauche après les élections régionales. Avec les points de vue de Gaël Brustier, politologue 
et essayiste (1), Gérard Mauger, directeur 
de recherche émérite 
au CNRS, Stéphanie Roza, professeure de philosophie, Jean-Numa Ducange, maître de conférences en histoire à l’université de Rouen de philosophie, Pierre Mathiot, professeur 
de science politique, Sciences-Po Lille, Serge Regourd, directeur 
de l’Institut 
du droit 
de la culture 
et de la communication, Toulouse-I-Capitole et Pierre Khalfa, coprésident 
de la Fondation Copernic.

La pleine conscience de sa propre défaite
par Gaël Brustier, politologue 
et essayiste (1)

Les élections régionales ont révélé une rétractation électorale du PS sur le sud-ouest, la Bretagne et les idéopôles, c’est à-dire les métropoles connectées à la globalisation (Paris, Grenoble, Montpellier…). Elles ont aussi précisé le risque de progressive extinction de la gauche radicale, qui a disparu de plusieurs hémicycles régionaux. La tripartition des votes ne doit pas camoufler la possibilité d’une marginalisation possible de la gauche en France et une polarisation à droite de la vie de notre pays.

Les résultats électoraux sont souvent la traduction d’un rapport de force idéologique, de l’état de ce que l’on peut appeler, à l’instar d’Antonio Gramsci, le «  front culturel  ». La plongée de notre pays dans le processus d’intégration européenne et dans la globalisation, la montée des interdépendances entre les États et entre les hommes ont des effets sur la vision du monde de nos concitoyens. Parmi les autres déterminants du vote, la puissance de l’idéologie mêlant immigration, rejet de l’islam, peur du terrorisme, discours sécuritaires est incontestable dans ce scrutin. Elle se fait explication du monde et, dans les derniers mois et semaines, a travaillé l’électorat en profondeur. La «  crise des migrants  » avait servi de carburant dans d’autres scrutins récents en Autriche (profitant au FPÖ) et en Suisse (profitant notamment à l’UDC). Dans le même temps, l’affaire grecque a révélé une forme d’impréparation de la gauche radicale à affronter la coercition européenne. L’effet «  vote utile  » à gauche dans ce contexte n’est pas étonnant. Il permet un maintien du score des listes PS sans empêcher la rétraction sur quelques bastions de la gauche.

Une tentation de la social-démocratie française va être d’incarner un «  moindre mal  » en usant et abusant du vocabulaire républicain, en tentant par des alliances de centre droit de devenir le seul et dernier obstacle à un FN, dont on voit qu’il est encore rejeté, en l’état, par une majorité de Français. Partant du constat qu’elle devient structurellement minoritaire, cette gauche-là a la tentation de devenir un partenaire (inévitablement mineur) d’une alliance «  au centre  », c’est-à-dire avec des fragments de la droite non radicalisés, économiquement libéraux mais hostiles à l’accent mis sur l’identité par la droite de Nicolas Sarkozy. Cette stratégie consacrerait un déplacement de l’axe de notre vie politique à droite et n’empêcherait probablement pas une forme d’ethno-libéralisme de voir le jour.

Face à cette tentation, celle de construire une gauche idéale à côté de la gauche réelle n’a pas plus de chance de réalisation aujourd’hui que celle de faire un Parti socialiste idéal à côté du parti socialiste réel hier. Il ne s’agit plus désormais de faire un «  virage à gauche  ». Si la gauche est aujourd’hui structurellement minoritaire en France, elle doit prendre le temps de la critique et de l’analyse, pour se doter des outils lui permettant de devenir, un jour, majoritaire. C’est de la pleine conscience de sa propre défaite que la gauche, qu’elle soit radicale ou sociale-démocrate, peut tirer les ressorts de sa refondation, et transcender ses contradictions. C’est, au fond, ce qu’a entrepris Podemos en Espagne.

Au-delà des effets de mode, l’apport de Podemos au renouveau de la pensée stratégique doit être pleinement analysé. Que Podemos subisse un succès ou un échec relatif au regard de sa jeune histoire est relativement secondaire par rapport aux questions que soulèvent ses animateurs Pablo Iglesias et Inigo Errejon. Pour surmonter les difficultés de leur camp, ils ont quitté le sillage des vieux appareils, pour penser librement une stratégie alternative. Ils l’ont fait en analysant le système de pouvoir de l’Union européenne, l’évolution du système capitaliste, la modification des configurations sociales qui en découle, les nouvelles formes de coercitions et les possibles brèches dans le consentement dans lesquelles ils pouvaient s’engouffrer. Oui, tout est à repenser, tout est à refonder.

(1) Dernier ouvrage paru : À demain, Gramsci, Éditions du Cerf.

L’impératif de lisibilité impose la clarté
par Gérard Mauger, directeur 
de recherche émérite 
au CNRS

Suffit-il, pour lutter contre le FN et gagner «  la bataille des idées  », de prendre systématiquement le contre-pied de ce que disent ses porte-parole ? Au risque de décevoir, sinon d’indigner, je voudrais expliquer les raisons que j’ai d’en douter… Quand le FN dénonce «  l’UMPS  », faut-il vraiment tenter de réhabiliter le PS et feu l’UMP ? Il me semble qu’en l’occurrence le FN exprime le point de vue profane sur les partis politiques qui alternent au pouvoir en France, comme un peu partout en Europe (quand ils ne forment pas une «  grande coalition  ») : «  La gauche et la droite, c’est du pareil au même…  » Faut-il contredire une vérité de sens commun qui se trouve être aussi, grosso modo, une vérité «  objective  » et laisser au FN le monopole de l’opposition au «  système  » ?

De même, en un temps où l’expérience grecque est venue rappeler à ceux qui en doutaient encore qu’il n’y a pas d’expérience «  de gauche  » possible dans le cadre de l’Europe des traités, faut-il laisser au FN le monopole de l’opposition (apparente) à la construction européenne que dénonçait (victorieusement) «  la gauche de gauche  » au temps qui n’est pas si lointain du «  non au TCE  » ? Faut-il, au prétexte d’internationalisme, défendre l’internationale du capital, «  la concurrence libre et non faussée  », les menaces permanentes de délocalisation et la libre circulation des containers à travers le monde ?

Pour combattre le FN avec quelque chance d’être entendu par les profanes, il ne s’agit pas de sauver la mise du PS ou celle des «  Républicains  », mais de dénoncer leur uniformisation dans le cadre intangible des politiques néolibérales européennes. Ainsi devient-il possible (et audible) de dénoncer les faux-semblants d’un FN, vrai défenseur du capital et faux défenseur des travailleurs, aligné lui aussi, en dépit des apparences, sur l’UMPS.

Reste le troisième thème de prédilection du FN : la vindicte contre les «  cassoces  » c’est-à-dire, pêle-mêle, la délinquance et «  l’assistanat  » attribués à «  l’immigration  ». S’il ne s’agit évidemment pas, en la matière, d’endosser les propos du FN, comment engager «  la bataille des idées  » sans être assuré de la perdre ?

En un temps où les classes populaires, plus ou moins «  établies  », sont confrontées à «  l’insécurité sociale  » et dénoncent les «  jeunes des cités  » indistinctement supposés fauteurs d’«  insécurité  » et/ou les prétendus «  privilèges  » des immigrés, le vote FN renforce symboliquement la frontière qui les en démarque et conjure magiquement la menace d’une retombée toujours possible dans l’indignité et la misère. Sans «  blâmer les victimes  » ni sembler prendre le parti des «  mauvais pauvres  », on peut rappeler que les rodomontades contre «  la racaille  » ou «  les assistés  », qu’elles émanent de la famille Le Pen ou de Sarkozy, sont non seulement inefficaces pour lutter contre la délinquance ordinaire, mais détournent le sentiment d’injustice de sa cible : les inégalités obscènes que reproduit le cynisme illimité des classes dominantes et de leurs porte-parole politiques attitrés (des «  Républicains  » au Front national, sans oublier le Parti socialiste).

Prenant prétexte du «  nationalisme  » du FN et de la réhabilitation sarkozyste de «  l’identité nationale  », faut-il leur emboîter le pas et encourager chacun à afficher une «  identité culturelle  » irréductible ? Au motif que le FN revendique une «  laïcité  » qui sert de cache-misère à un racisme anti-arabe hérité de l’OAS, faut-il la lui abandonner ? Est-il si difficile d’être à la fois laïque et antiraciste, rationaliste et tolérant, de mettre en avant tout ce qui peut rassembler – une condition de classe partagée, exploitée et dominée – plutôt que ce qui sépare ?

L’impératif de lisibilité par les profanes (où se recrute le parti majoritaire de l’abstention) impose la clarté à toute tentative de reconstruction de la gauche.

Jean Jaurès, l’Humanité, le 10 mai 1912. « Quelle abjection dans cette propagande de la peur ! 
On lit sur les murs de Paris d’ignobles affiches qui apprennent au monde que toutes les boutiques sont forcées, que toutes les existences sont menacées, qu’au coin de toutes les rues le passant est guetté par le couteau d’un Apache. “Défendons-nous”, hallucinons les cerveaux, affolons les cœurs ; demandons à la société française de répudier toutes les lois humaines. »

Besoin de radicalité et rôle des mouvements sociaux
par Stéphanie Roza, professeure de philosophie et Jean-Numa Ducange, maître de conférences en histoire à l’université de Rouen.

Au lendemain des élections régionales, le Front de gauche n’est même pas en mesure de compter ses électeurs, parce que la division a conduit à un éclatement des listes et des sigles. Pour convaincre, encore faut-il exister ! Pendant ce temps, et quels qu’aient été les effets dudit «  front républicain  », le FN a encore gagné des électeurs entre les deux tours. Lui, du moins, est en mesure de les compter : 6,8 millions. Un record historique.

Une partie de la gauche de la gauche, pas plus qu’au premier tour, n’a pas su faire la différence et se poser en alternative à la gauche gouvernementale. Elle a emboîté le pas à la direction nationale du PS pour crier, une fois de plus, à la menace fasciste. Elle a été, pour certains de ses représentants, jusqu’à prétendre qu’un Christian Estrosi, notoirement connu pour ses positions grossièrement hostiles aux musulmans et ses appels du pied à l’électorat raciste, était un «  rempart  »… contre l’extrême droite. Donc jusqu’au point de défendre l’idée que la gauche avait raison de disparaître de certains conseils régionaux, de se priver de toute possibilité d’intervention dans ce cadre pendant toute une mandature, laissant le champ libre au FN et à une droite qui s’aligne de plus en plus sur ses thèmes et son message identitaire.

On ne peut prétendre incarner l’alternative sans analyse rationnelle des réalités politiques auxquelles le présent nous confronte. Par le passé, les adversaires les plus intelligents du PCF avaient su cesser de l’appeler «  le parti de Moscou  » une fois le temps du stalinisme passé. Pourquoi persister, contre l’évolution de la réalité elle-même, à miser sur la peur plutôt que sur l’intelligence collective en continuant de prétendre que le FN est un parti fasciste ou fascisant comme s’il était une pure réplique des partis des années 1930 ? Pourquoi continuer d’agiter un épouvantail qui ne convainc que les convaincus, et qui n’a jamais empêché l’extrême droite d’engranger toujours plus de succès ? Pourquoi contribuer à redorer le blason de partis discrédités aux yeux d’une partie croissante de l’électorat populaire, en leur prêtant des allures de résistants alors que la distance entre le populisme réactionnaire d’une Marine Le Pen et les discours sécuritaires de la droite sarkozyste se réduit un peu plus à chaque élection ? Plutôt que de postures moralisantes, la gauche radicale a besoin… de radicalité. Elle doit cesser d’être l’appendice politique désolant d’une gauche socialiste à qui les scores du FN servent à faire oublier ses propres renoncements. Elle doit commencer par l’exemple de l’indépendance politique, du courage, et pour cela, aussi, rompre avec les travers que les salariés de ce pays, son public privilégié, honnissent de plus en plus largement : le cumul des mandats, les arrangements politiciens, les compromissions de toutes sortes, la lutte des places. Elle doit miser sur les mouvements sociaux plutôt que sur les coalitions. S’attaquer à ces problèmes est la seule manière vraiment efficace de lutter contre la montée inexorable du FN. Il y a urgence.

Un chantier idéologique et organisationnel
par Pierre Mathiot, professeur 
de science politique, Sciences-Po Lille

À l’issue de vingt mois d’élections aux résultats pour le moins contrastés pour l’ensemble des forces de gauche, la question n’est plus de savoir s’il est nécessaire de reconstruire à gauche (ou de reconstruire la gauche) mais s’il est (encore) possible de le faire. Ce n’est en effet pas le moindre des paradoxes que de constater que François Hollande se trouve en situation de possible réélection en 2017, ce alors même que la gauche politique, dont il est issu, est dans une très profonde déliquescence idéologique, divisée, affaiblie par les revers électoraux et le départ de ses militants, incapable de voir émerger des dirigeants nouveaux, éloignée des milieux populaires, inaudible dans la jeunesse. À cet égard, il est malheureusement clair que la double perspective de la présidentielle et des législatives de 2017, ajoutée à la gestion des effets, tant matériels que politiciens, de l’actuelle séquence électorale, ne crée pas les conditions optimales pour qu’un examen de conscience doublé d’une réflexion innovante, et efficace électoralement, prenne corps dans les divers appareils partisans. Si l’on oublie tout de même un instant le poids des logiques (et des intérêts) propres aux organisations partisanes, il semble que deux chantiers au moins devraient être rapidement lancés.

Il faut lancer un chantier idéologique et programmatique. Il est peu de dire que la gauche est aujourd’hui fortement divisée lorsqu’il s’agit d’analyser la situation économique et sociale, d’envisager quelles politiques publiques devraient être mises en œuvre, de les hiérarchiser selon leur degré de priorité. Cette division est d’autant plus incompréhensible et démobilisatrice pour les citoyens qu’elle traverse plusieurs des partis de gauche. Il est impératif que les diverses forces de gauche soient capables de faire le point sur leurs désaccords et d’identifier aussi les lignes principales autour desquelles il pourrait être possible de construire une plateforme commune. Le souci de mon point de vue est moins de constater qu’il existe schématiquement aujourd’hui deux courants principaux de pensée à gauche que d’établir précisément sur quelles bases ils se fondent et se distinguent et autour de quels points ils sont en mesure, localement et nationalement, de s’entendre. Cette exigence est une urgence car les citoyens, à force de ne rien comprendre à ce qui s’échange sur les plateaux de télévision, s’éloignent, quand bien même ils font encore (mais pour combien de temps) l’effort de voter pour la gauche. Cette exigence repose aussi, me semble-t-il, sur la nécessité impérieuse de sortir des discours incantatoires et simplificateurs qui ne servent plus qu’à resserrer des rangs clairsemés. Cette exigence, enfin, suppose, simplement et fondamentalement, de poser la question de savoir ce que c’est qu’être de gauche en 2016 en rappelant peut-être que l’un des principes fondateurs de cette identité est le mouvement, la réforme, le changement de l’ordre des choses.

Il faut aussi ouvrir un chantier organisationnel. Le constat n’est pas nouveau mais il est de plus en plus lancinant : les partis politiques, du fait de leur inertie, constituent une partie du problème lorsqu’on parle de reconstruction. Si l’on met de côté la famille écologiste, dont les manières de faire partisanes sont à la fois originales mais génératrices d’ingouvernabilité interne, il faut accepter enfin de se dire clairement que le fonctionnement des partis, les logiques de leadership, l’influence extrême des professionnels de la politique et des permanents, agissent comme un répulsif de plus en plus puissant tant pour celles et ceux qui envisageraient de s’engager que pour les électeurs. Certes, la relance de la dynamique démocratique ne renvoie pas seulement à une réforme profonde des partis politiques, mais celle-ci doit en constituer l’un des fondements, pour chacun d’entre eux et sans doute en lien les uns avec les autres.

Le rassemblement et la lisibilité
par Serge Regourd, directeur 
de l’Institut 
du droit 
de la culture 
et de la communication, Toulouse-I-Capitole

Quand un universitaire, doté de fortes convictions dites «  de gauche  », se confronte pour la première fois de sa vie à une élection – tête de liste départementale du rassemblement « Nouveau monde en commun » pour la région Midi-Pyrénées-Languedoc-Roussillon – il est d’abord confronté à un constat implacable : «  C’est quoi la gauche aujourd’hui ?  », question – et parfois réponse désespérante – entendue des centaines de fois durant cette campagne.

Alors, avant même de construire de savants discours, d’échafauder de nouvelles grilles programmatiques, de recourir à de nouveaux paradigmes, il convient, humblement, de faire retour au réel, au quotidien de ceux pour qui la «  gauche  » est supposée faire sens. Retour en quelque sorte aux exigences les plus élémentaires de la praxis, selon Marx. Et, prosaïquement, nous voilà entravés déjà par un problème de vocabulaire, d’identification terminologique, qui constitue la condition même de toute communication. Or, qui oserait aujourd’hui soutenir que la communication n’est pas – hélas – au cœur de la politique ? Ou que la politique n’est pas, si souvent, réduite à une pure communication ?

Sur ce terrain de la communication – qui définit l’espace public – le vocable de «  gauche  » s’inscrit dans un champ lexical sursaturé et illisible pour le citoyen ordinaire : le Front de «  gauche  » comporte une composante, un Parti de «  gauche  ». La première règle épistémologique est, pourtant, que le même mot ne peut désigner le tout et une partie de ce tout. Mais le Parti socialiste est aussi un parti – le premier – de «  gauche  ». La deuxième règle épistémologique est, pourtant, que l’on ne peut être à la fois dehors et dedans. Pour faire bonne mesure, on ajoute le Parti radical «  de gauche  », et comme l’électeur de base ne comprend pas ces subtilités sémantiques, on le rassure en lui disant que la radicalité est ici modérée et ne relève évidemment pas «  de la gauche de la gauche  »… Raymond Devos et Boby Lapointe sont des génies du langage… pour faire rire. La duplication de leur jonglerie lexicographique dans l’ordre du politique engendre, à l’inverse, des larmes de désespérance.

Ne plus savoir ce que les mots veulent dire constitue, déjà, le premier symptôme de la maladie qui affecte la «  gauche  » et qu’il faut traiter d’urgence. Camus disait en substance que «  se tromper sur les mots, c’est ajouter au malheur du monde  ». L’absence d’identification qui résulte des polysémies ci-dessus évoquées rend la gauche illisible.

Ayant admis qu’une partie de celle-ci n’est plus réellement la gauche et qu’elle vise en réalité à opérer une recomposition politique avec une partie de la droite et du centre droit, il reste que «  la gauche de la gauche  » sera réduite à l’impuissance tant qu’elle continuera à cultiver la multitude de ses chapelles et à privilégier ce qui fragmente.

Lever de telles hypothèques mortifères, tel était le sens du large rassemblement constitué pour les élections régionales en Midi-Pyrénées-Languedoc-Roussillon, grâce à la lucidité et à l’intelligence politique de responsables comme l’écologiste Gérard Onesta et la communiste Marie-Pierre Vieu. Il ne s’agit, certes, que d’un fragile laboratoire, mais le rassemblement, l’unité, et donc la lisibilité et l’intelligibilité, constituent les premières conditions de reconstruction d’une gauche, qui devra elle-même déconstruire les amalgames et contradictions terminologiques : l’unité d’action corrigera la multiplicité des appellations. Encore la praxis !…

L’avenir de la gauche est en question
par Pierre Khalfa, coprésident 
de la Fondation Copernic

Le sursaut citoyen du second tour pour faire barrage au FN ne doit pas faire illusion. Certes, ce dernier échoue à s’emparer d’un certain nombre de régions, mais il continue de progresser, dépassant en nombre de voix celui de la présidentielle de 2012 alors même que la participation était moins importante à cette élection. La gauche, toutes composantes confondues, est à un niveau historiquement bas, et si le PS a pu sauver des régions, c’est avant tout grâce à des triangulaires. Le Front de gauche (FG), même allié dans certaines régions à EELV, n’a pas réussi à apparaître comme une alternative et enregistre au premier tour un de ses plus mauvais résultats.

Ces résultats reflètent l’état de la société française dans laquelle la xénophobie connaît un inquiétant développement, avec un recul des valeurs d’égalité et de solidarité, sur fond de désintégration sociale.

Pour les électeurs du FN, les questions économiques et sociales sont vues à travers le prisme de la recherche de boucs émissaires dont les immigrés, et en particulier les musulmans, sont aujourd’hui la figure la plus marquante. Les orientations du gouvernement Hollande-Valls participent activement d’un processus qui voit l’électorat de gauche déboussolé se désespérer chaque jour un peu plus.

Ce gouvernement vient d’ailleurs de donner une première réponse à la situation actuelle. C’est le refus de donner un coup de pouce au Smic. Alors même que le FN se nourrit de la désespérance sociale, le message est clair : on ne change pas une ligne qui perd. Cette orientation sur le plan économique et social s’est politiquement traduite dès dimanche soir par des appels appuyés à la droite «  républicaine  » pour que soit mis en place «  le cercle de la raison  », pour reprendre ici une formulation jadis employée par l’essayiste Alain Minc, regroupant libéraux de droite et de gauche.

S’il est peu probable que cette tentative, par ailleurs lourde d’un éclatement possible du PS, puisse voir le jour avant l’élection présidentielle de 2017, la question est aujourd’hui posée. C’est donc l’avenir de la gauche dans ce pays qui est en jeu, c’est-à-dire l’existence d’un mouvement politique portant les valeurs d’égalité, de solidarité, d’une gauche d’émancipation.

Le FG reste, malgré ses échecs et ses faiblesses, un point d’appui tant militant qu’électoral. Mais il est clair qu’il ne pourra à lui tout seul représenter une alternative politique. Les raisons en sont multiples (voir http://blogs.mediapart.fr/pierre-khalfa). Il faut en tirer les leçons et repartir de l’avant. Une reconfiguration du champ politique suppose de clarifier trois points.

Le premier renvoie aux orientations gouvernementales. Aucune proposition politique nouvelle à gauche ne peut naître sans s’opposer aux politiques néolibérales du gouvernement et à sa dérive néoconservatrice en matière de sécurité.

Mais, et c’est le deuxième point, on ne reconstruit pas l’espoir simplement en s’opposant. Il faut montrer qu’une société plus juste et plus égalitaire est non seulement nécessaire et bénéfique, mais réalisable, en articulant les solutions concrètes à un imaginaire qui permette de les envisager et d’emporter l’adhésion. Cela suppose, au-delà même du discours, s’appuyer sur les pratiques sociales émancipatrices qui voient le jour sur de nombreux terrains.

Conséquence de cette exigence – c’est le troisième point –, on ne construira pas une nouvelle donne politique à gauche par de simples manœuvres d’appareil.

Une refondation de la gauche ne peut être que l’objet d’un processus qui dépasse les forces politiques existantes, implique les citoyen-ne-s et s’appuie sur les mouvements sociaux réels. C’est dans ce cadre qu’il faudra notamment envisager la désignation d’une ou d’un candidat à l’élection présidentielle de 2017.

»» http://www.humanite.fr/et-maintenant-comment-reconstruire-gauche-592924
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