Des droites au look de gauches

Les récentes manifestations de masses générées par les droites dans les pays les plus divers, montre leur capacité à s’approprier les symboles qu’auparavant elles dédaignaient, semant la confusion dans les rangs des gauches.

Le 17 février 2003, Patrick Tyler réfléchissait à ce qui se produisait dans les rues du monde dans une chronique du New York Times. «  Les énormes manifestations contre la guerre dans le monde entier cette fin de semaine sont un rappel qu’il existe toujours deux superpuissances sur la planète : les États-Unis et l’opinion publique mondiale. »

Regarde autour de toi et tu verras un monde en ébullition” écrivait l’éditeur étasunien Tom Engelhardt, éditeur du site TomDispatch. En effet, 10 ans après le célèbre article du Times, qui fit le tour du monde lors du mouvement contre la guerre, il n’y a quasiment pas un recoin de la planète qui ne soit en ébullition, en particulier depuis la crise de 2008.

On peut énumérer le Printemps Arabe qui a mis en déroute des dictateurs et parcourut une bonne partie du monde arabe ; Occupy Wall Street, le plus grand mouvement critique aux Etats-Unis depuis les années 60 ; les indignés grecs et espagnols qui cavalcadent sur les désastres sociaux provoqués par la méga spéculation. Aux mêmes moments, l’Ukraine, la Syrie, le Soudan du Sud, la Thaïlande, la Bosnie, la Turquie et le Venezuela sont affectés par des protestations, des mobilisations et des actions de rues de diverses tendances.

Un pays qui depuis des décennies n’avait plus connu de protestations sociales comme le Brésil s’attend à des manifestations pendant le Mondial après que 350 villes virent des troubles qui gagnaient les rues. Au Chili un puissant mouvement de la jeunesse étudiante s’est mis en place qui ne montre pas de signes de fatigue, et au Pérou un conflit autour de l’extractivisme qui ne s’apaise pas dure depuis des lustres.

Quand l’opinion publique atteint la force d’une superpuissance, les gouvernements ont comme pratique de l’écouter pour la surmonter, la manipuler, la canaliser dans des directions où elle sera plus maniable que dans la conflagration des rues, conscients de ce que la répression à elle seule n’obtient pas grand-chose. C’est pour cela que des savoirs qui avant étaient le monopole de la gauche, depuis les partis jusqu’aux syndicats, à présent se rencontrent chez des concurrents capables de mouvoir les masses à des fins opposées à celles auxquelles aspire la gauche.

Le style militant

Campement en Uruguay (2010) sous les auspices de l’Open Society Institute de George Soros.

Du 20 au 26 mars 2010 s’est réalisé dans le département uruguayen de Colonia un “Campement Latino-Américain de Jeunes Activistes Sociaux », dans la convocation duquel était annoncé “un espace d’échange horizontal” pour travailler à “une Amérique Latine plus juste et solidaire”. Parmi la bonne centaine d’activistes qui y participèrent aucun ne suspectait l’origine des fonds pour payer leur voyage et séjour, ni qui était en réalité derrière cette invitation.(Alai, 9 avril 2010, voir résumé en fin de texte Cómo el imperio expropia los saberes sociales)

Un jeune militant décida de mener une enquête pour savoir qui étaient ces Jeunes Activistes Sociaux qui organisaient une rencontre participative pour « commencer à construire une mémoire vive des expériences d’activisme social dans la région, apprendre les difficultés, identifier les bonnes pratiques locales utilisables au niveau régional, et maximiser l’étendue de la créativité et liens entre les protagonistes ».

Le résultat de ses investigations à travers les sites web lui permit de démontrer que le campement s’était déroulé sous les auspices de l’Open Society Institute de Georges Soros et d’autres institutions liées à celui-ci. Sa surprise fut grande parce que dans le campement se réalisèrent des réunions en cercles et des travaux collectifs avec de grandes feuilles de papier, ayant pour fond des whipalas (bannière indigène aux carrés de 7 couleurs des peuples andins. NdT) et autres bannières indigènes. Un décor et un style qui donnaient à penser qu’il s’agissait d’une rencontre de même nature que les Forums Sociaux et tant d’autres activités militantes qui emploient des symboles et manières de faire similaires. Certains des ateliers utilisaient des méthodes identiques à celle de l’éducation populaire de Paulo Freire (Pédagogue Brésilien, auteur de Pédagogie de l’Autonomie, ayant une grande pratique de l’alphabétisation des adultes dans le but de leur donner des outils de résistance à l’oppression. NdT) qu’habituellement, les mouvements anti systémiques sont les seuls à employer.

Ce qui est certain, c’est que ces quelques militants furent utilisés “démocratiquement” - puisque tous assurèrent qu’ils purent exprimer librement leurs opinions - pour des objectifs opposés à ceux pour lesquels ils avaient été convoqués. Cette formation de la fondation de Soros fut appliquée dans plusieurs ex républiques soviétiques, durant la « révolte » au Kirghizstan en 2010 et pendant la révolution orange en Ukraine en 2004.

Il est tout aussi certain que de nombreuses fondations et les plus diverses institutions envoient des fonds et des instructeurs à des groupes en affinité pour qu’ils se mobilisent et travaillent à faire tomber des gouvernements opposés à Washington. Dans le cas du Venezuela, ont été dénoncées à diverses reprises, des agences comme le Fond National Pour la Démocratie (NED sigle en anglais), crée par le Congrès des Etats-Unis pendant la présidence de Ronald Reagan. Ou la Fondation Espagnole D’analyse et Etudes Sociales (FAES) sous égide de l’ex président José Maria Aznar.

Nous sommes face à une réalité très complexe : comment l’art de la mobilisation de rue, en particulier celle destinée à faire tomber des gouvernements, a-t-il été récupéré par des forces conservatrices ?

L’art de la confusion

Le journaliste Rafael Poch décrit le déploiement des forces de la place Maidan de Kiev : “ Dans les moments les plus massifs, on pouvait compter quelques 70 000 personnes dans une ville de 4 millions d’habitants. Parmi eux, il y avait une minorité de quelques milliers, peut-être 4 ou 5 mille, équipés de casques, barres de fer, boucliers et battes pour affronter la police. Et dans ce collectif, il y avait un noyau dur de 1000 à 1500 personnes purement paramilitaires, disposés à mourir et à tuer qui représentaient une autre catégorie. Ce noyau dur a fait usage d’armes à feu  ». (la Vanguardia, 25 février 2014)

Cette disposition de forces pour le combat de rues n’est pas nouvelle. Au cours du temps, elle a été utilisée par des forces différentes, antagoniques, pour parvenir à des objectifs tout aussi différents. Le dispositif que nous avons pu observer en Ukraine se répète en partie au Venezuela, ou des groupes armés s’infiltrent dans des manifestations plus ou moins importantes, avec l’objectif de faire tomber un gouvernement, en générant des situations d’ingouvernabilité, et le chaos jusqu’à la réalisation de leur objectif.

La droite a tiré les leçons de la grande expérience insurrectionnelle de la classe ouvrière, principalement européenne, et des soulèvements populaires qui se sont succédé en Amérique Latine depuis le Caracazo de 1989. Une étude comparative entre ces deux moments devrait rendre compte des énormes différences entre les insurrections ouvrières des premières décennies du 20ème siècle, dirigées par des partis solidement organisés, et les soulèvements des secteurs populaires des dernières années de ce même siècle.

Dans tous les cas, les droites se sont montrées capables de créer un dispositif « populaire » comme celui que décrit Rafael Poch pour déstabiliser des gouvernements populaires en donnant l’impression que nous étions face à une mobilisation légitime qui finissait par faire tomber des gouvernements illégitimes malgré que ceux-ci aient été élus et conservent le soutien de secteurs importants de la population. A ce point, la confusion devient un art aussi décisif, que l’art de l’insurrection dominé auparavant par les révolutionnaires.

Venezuela : Grupos violentos en plena acción. Foto : AVN

Surfer sur la vague.

Un art fort similaire fut celui dont firent preuve les groupes conservateurs du Brésil durant les manifestations de juin. Alors que les premières marches ne reçurent quasiment aucune couverture médiatique, sauf pour mettre en évidence le « vandalisme » des manifestants, à partir du 13, quand des centaines de mille descendirent dans la rue, une inflexion se produit.

Les manifestations obtinrent les grands titres mais il se produit ce que la sociologue brésilienne Silvia Viana définit comme « une reconstruction de la narration” vers d’autres fins. Le thème du prix des transports fut relégué au second plan, les drapeaux du Brésil furent mis en avant ainsi que le slogan « A bas la corruption » qui ne figurait pas dans les rassemblements du départ (le Monde Diplomatique, 21 juin 2013). Les medias de masse firent aussitôt disparaître les mouvements qui avaient appelé à manifester et mirent en leur lieu et place les réseaux sociaux, allant jusqu’à criminaliser les secteurs les plus militants pour leur supposée violence, pendant que la violence policière restait au second plan.

De cette façon, la droite, qui au Brésil n’a pas de capacité de mobilisation, a tenté de s’approprier la mobilisation qui avait des objectifs (la dénonciation de la spéculation immobilière et des mega chantiers du mondial) qu’elle était loin de partager. «  Il est clair qu’il n’y a pas de lutte politique sans conflit pour des symboles » assure Viana,. Dans ce conflit symbolique, la droite, qui à présent emballe ses coups d’états de prétextes comme la « défense de la démocratie » apprend plus rapidement que ses adversaires.

- Raúl Zibechi, journaliste uruguayen, il écrit dans Brecha et La Jornada et est collaborateur de ALAI

Source espagnole :
Derechas con look de izquierda - América Latina en Movimiento

En prime un résumé de Cómo el imperio expropia los saberes sociales

Il y eu environs 120 jeunes qui participèrent à cette réunion des Jeunes Activistes Sociaux, accourus remplis d’espoirs. Sous la technique de l’Open Space, ils travaillèrent pendant plusieurs jours sur base des attentes des participants. Mais aucun résultat final ne vit le jour, parce que beaucoup de participants au fil des jours n’adhérèrent pas aux méthodes utilisées, et que se produisirent des sortes de désordres qui rendaient impossible pour les participants de se mettre d’accord pour la rédaction d’un document final.

L’annonce avait été alléchante (un espace d’échange horizontal” pour travailler à “une Amérique Latine plus juste et solidaire) et elle avait attiré des jeunes de tous le pays, de tout le continent, prêts à partager leur expérience pour en « construire la mémoire vive » (plus productif encore que les espionnages de la NSA, les militants et leurs pratiques, leurs objectifs se livrant eux-mêmes sur un plateau d’argent à ceux qui les combattent. NdT).

Les participants étaient venus avec d’autant plus d’enthousiasme que leur voyage et tous les frais sur place étaient pris en charge. Une « aubaine » dont le coût a été évalué à 150 mille dollars. Ce qui mis la puce à l’oreille d’un des participants - qui désire rester anonyme – il mena alors sont enquête : Qui finançait ce « projet horizontal entre pairs » ? Il découvrit alors en première ligne une série de Fondations et Organisations façades, en remontant il réalisa que toutes dépendaient où étaient liées avec l’Open Society Institute créé par George Soros, le multimillionnaire présent à tous les Forums Economiques Mondiaux qui a financé le syndicat Solidarnosc Lech Walesa en Pologne, la Révolution des Roses en Géorgie et la campagne présidentielle de Barack Obama, entre autres. Un fidèle défenseur du libéralisme économique qui se présente comme financier, investisseur et philanthrope.

En redescendant les liens il parvint à des organisations telles que Fondacion Nuevos Lideres, Jovenes Impresarios de Chile, Union Mundial, Tactical Technology Collective, entre autres. Toutes ces organisations défendent des lieux communs fort louables : défense de la démocratie, lutte contre la corruption et la défense des droits humains, mais en réalité la liberté qu’elles défendent est celle du Capital. Elles ont des contacts dans les hautes sphères de l’ONU, au Forum Économique Mondial de Davos, avec l’USAID (agence étasunienne – branche des services secrets US – de développement internationale), etc... Ils promeuvent des projets dans le Sud-est Asiatique, en Afrique et à présent en Amérique Latine.

Parmi ces organisations, Tactical Technology Collective mérite une mention à part puisque c’est cette organisation qui se dédie à former des activistes sociaux ayant la maîtrise des outils informatiques et de téléphonie mobile de réseaux, medias digitaux, et enregistrement de toutes les réunions (tss, tss... j’en ai vu débarquer un du genre, il avait aussi une maîtrise avérée pour canaliser les débats et imposer ses propres vues, exiger que tout soit filmé, quand il ne préparait pas tout simplement l’ordre du jour à respecter et les conclusions qui seraient imposées indépendament du contenu des débats. NdT).

Après s’être interrogé sur le but de l’introduction de ces méthodes sur le continent latino, en particulier sur le rôle qu’elles pourraient jouer au Venezuela ou Chávez déjà lance l’alerte sur l’utilisation subversive des réseaux sociaux (et dont nous avons des traces de la préparation de la tentative de « Révolution de Couleur » que vient d’essuyer le Venezuela qui remontent à cette même période NdT) Zibechi conclu :

En tout cas, cela vaut la peine de prendre le temps de réfléchir à cette manière dont les multinationales étudient patiemment les mouvements d’en bas et leur militants pour s’approprier leurs savoirs et leur manière de faire. (...) une bonne partie de ceux qi accoururent à cette réunion le firent plein de bonne volonté pensant qu’il s’agissait d’une rencontre de mouvements anti impérialistes, de base qui utilisaient les méthodes de l’éducation populaire dans leur travail. Démontrer que ceci fut organisé par le plus grand spéculateur financier de la planète - qui eut le pouvoir de briser la Banque d’Angleterre en 1992 et contribue à la chute des gouvernements anti impérialistes - montre jusqu’où ils peuvent aller quand il s’agit de maintenir leurs privilèges.

Zibechi (2010)

Traduction Anne Wolff

 http://les-etats-d-anne.over-blog.com/article-d-123003094.html

COMMENTAIRES  

26/03/2014 11:54 par Dominique

Nous pouvons aussi parler d’une certaine gauche qui a un look de droite.

Dans « Afrique, mère patiente de la révolution bolivarienne » http://www.legrandsoir.info/afrique-mere-patiente-de-la-revolution-bolivarienne.html la révolution bolivarienne nous rend attentif au fait qu’un partie de la gauche vénézuélienne s’est de fait alliée à la droite contre la révolution :

« Pour les historiens Mario Sanoja et Iraida Vargas-Arenas (1) : Après avoir fui la misère de leur Europe originelle, devenues élite sociale par la négation de l’Autre, ces communautés d’origine européenne voient soudain leur statut se banaliser et nourrissent une rage raciste décuplée contre Hugo Chávez. Mais quand les dirigeants de cette opposition (minoritaire dans les urnes à l’issue de scrutins validés internationalement) répètent « nous sommes la majorité », ils ne mentent pas. Ils réaffirment sincèrement leur vision du monde. Eux seuls appartiennent au genre humain, eux seuls peuvent être comptés. Ils sont donc, très logiquement, « majoritaires ».

Chez nous cette gauche-là existe aussi. Son racisme consiste à traiter toutes celles et ceux qui ne sont pas d’accord avec eux à choix d’antisémite, de "staliniste" ou de bourgeois, ceci sans aucune démonstration, et quand ils débâtent, ils sont toujours à coté du sujet, confondant matérialisme historique, c’est à dire analyse dialectique d’une situation donnée, avec récitation d’un théorie marxiste qu’ils ont figé dans la pierre du temps. Le plus caricatural de ces groupes est le CCI (Courant Communiste International) qui ont un site web internationalism.org. Leurs positions, sous couvert d’un marxisme qui est une négation pure et simple du marxisme sont systématiquement alignées sur celles des néocons. Par exemple sur Cuba, ils déclarent sur leur site http://fr.internationalism.org/forum/312/internationalistcomrade/5931/cuba#comment-3241

« J’ai été faire une petite recherche pour mes propres besoins sur Cuba, et j’ai trouvé des choses fort intéressantes ici :
http://forum.uniterre.com/ouvrir-les-yeux-sur-le-vrai-cuba-t2517.html

Le gars qui écrit n’a pas besoin d’être communiste pour raconter ce qu’il a vu à Cuba, et c’est visiblement du vécu. »

Sur le forum d’Uniterre, une agence de voyage, le gars qui lance le sujet déclare entre autre :

« Les Mac Do cubains (appelés Rapido) sont horribles, viande au soja, huile de vidange, frites en plastique, coca local sans gout etc.… au moins les nôtres sont bons ! »

Il a visiblement échappé à la sagacité des militants du CCI qu’il est impossible de résister à un tel régime fait d’huile de vidange et de frites en "plastique", et que Cuba est remplie de survivants très joyeux qui en redemandent.

Leurs prises de positions sont tellement extrêmes et caricaturale qu’ils ont même réussis à se faire censurer sur indymedia Paris. Ils se rattrapent sur indymedia Suisse romande où il n’y a quasiment pas de modération, et ils ont été jusqu’à copier-coller cette histoire de frites à l’huile de vidange.

On les voit aussi de temps en temps dans les manifs, où ils distribuent des tracts avec une introduction à leur marxisme dogmatique. En pratique, leurs seules actions consistent à squatter les sites et les manifs des autres pour y répandre leur prose qui nie systématiquement les luttes locales, que ce soit à l’étranger ou chez nous. Pour eux, les luttes ne sont à choix que des luttes entre impérialismes ou entre bourgeoisies locales et pas une d’entre elles ne mérite d’être soutenue. Ils appellent à la révolution mondiale tout en étant incapable de dire comment elle adviendra si personne ne lutte.

Leur clown de service s’est surpassé dernièrement sur un sujet qui parle d’Uniterre, une association de petits paysans proches de Via Campesina. http://ch.indymedia.org/fr/2014/03/91762.shtml
Sa réponse est un condensé de la haine qu’ils portent aux autres et à leurs luttes. En quelques phrases il appelle à la destruction de la petite paysannerie, sans relever que les multinationales et nos états capitalistes s’en charge déjà, mais à la place en disant que le capitalisme a démontré son obsolescence en étant incapable de faire disparaître cet archaïsme et que les prolétaires devront s’en charger. Et sans être solidaire avec les petits paysans qui luttent contre le capitalisme pour leur survie, il leurs demande d’être solidaire avec les ouvriers. En bon français cela s’appelle diviser pour régner et c’est le pilier de l’idéologie bourgeoise. Ces gens-là sont donc les néocons de la gauche.

Dans la même intervention, ce serait la faute des paysans du "Tiers-Monde" s’ils utilisent des produits chimiques interdit chez nous et pas des multinationales qui ne leur vendent rien d’autre, un milliard de paysans chinois ne sauraient même pas que d’autres pays existent (sic), et d’autres énormités comme mettre la pollution de l’agriculture sur la faute des petits paysans, lesquels sont les premiers à faire du bio, au lieu de parler des vrais responsables, les industriels et les états qui favorisent un système qui détruit la vie de la terre et la remplace par des produits chimiques, ou comme de faire croire que ce sont les petits paysans les premiers responsables de la disparition des forêts primaires en Amazonie, en Afrique et en Asie.

Il fait feu de tout bois et ne prouve que deux choses. D’abord il n’a pas peur de se couvrir de ridicule. Ensuite, des gens qui se réclament de la continuité des luttes passées et dont la seule participation aux luttes actuelles consiste à les squatter pour y diffuser une négation de ces luttes n’ont aucune légitimité, et leur pratique comme leur théorie ne sont que du négationnisme.

Marx comme Lénine ont dit à peu près la même chose sur l’internationalisme. Le socialisme ne sera possible que le jour où tous les principaux pays capitalistes seront devenus des pays révolutionnaires. Cela implique que l’internationalisme ne consiste pas à se désolidariser des luttes des autres qui font ce qu’ils peuvent dans la trame d’un capitalisme globalisé, mais d’abord à développer ici et maintenant nos propres luttes solidaires.

En pratique il ne faut pas non plus être naïf. Si une lutte contribue à la solidarité des luttes, elle doit être soutenue, si elle lutte contribue à la division des luttes, elle doit être au mieux ignorée, au pire combattue. La révolution bolivarienne a été porté au pouvoir par un gigantesque mouvement social de base, et depuis cette prise de pouvoir démocratique, ce mouvement de base et le pouvoir collaborent ensemble. Cela implique que malgré toutes les contradictions internes de la révolution bolivarienne, il s’agit d’abord d’un immense mouvement de solidarité qui doit être soutenu de toutes nos forces.

Quand aux mouvements comme le CCI et certains trotskystes (liste non exclusive) qui ne savent que se disputer entre eux et avec le reste de la gauche pour savoir laquelle de leurs théories est la bonne, et derrière ces multiples théories figées dans la pierre du temps et de leurs dogmes, quelle est l’avant-garde qui triomphera, ils ne font que contribuer à diviser la gauche et à la transformer en gauche de l’inaction. Où l’internationalisme du plus fort, car pendant ce temps les impérialistes en profitent pour avancer leurs pions. Comme le dit très bien l’article sur la révolution bolivarienne, ce sont souvent des universitaires qui au-delà de leurs divisions ne défendent que le monopole de la pensée de leur classe sociale, lesquels sont tout deux incompatibles avec une société révolutionnaire.

26/03/2014 17:00 par Anne Wolff

@ Dominique
Tous les textes que j’ai traduit et beaucoup de ceux que j’ai lu depuis le début du coup d’état au Venezuela me donnent des réponses à des questions que je me suis posées au cours de mes actions militantes et associatives concernant la manière dont la grande majorités des mouvements d’opposition de gauche étaient détournés de leur sens ou conduits vers une sorte d’épuisement sans avoir produit aucun acte concret de nature à mettre en question le Pouvoir.
Le terme Activisme et très illustratif en fait. Je n’ai pas connus les dernières grandes luttes sociales révolutionnaires, en Belgique, je dirais que c’est la grève des mineurs de 60-61, qui est la dernière grande manifestation du pouvoir ouvrier à la conquête de ces droits que nous perdons les uns après les autres. A l’époque on était militant. Activiste pour moi évoque des gens qui s’agitent sans résultats – sans parfois même formuler de revendication – ils sont là pour conserver les apparences d’une opposition démocratique.
Je participais à une réunion de préparation d’une action pour défendre le droit au logement à Bruxelles. Là, après avoir vu mettre de côté toute une série de propositions consistant en interpellations directes et demandant une réponse concrète des Pouvoirs (anti) Publics, des participants ce sont mis à discuter entre eux.
« Tu as aussi fait le stage ? » « Oui » « Une action se suffit à elle-même ? » « Oui »…
Ce qui donne en réalité des actions qui n’auront finalement d’autre but que de permettre de justifier de nouvelles demandes de subsides en disant qu’on a fait « quelque chose » et que cela a mobilisé autant d’employés pendant autant de temps, le tout enrobé dans le jargon émaillé des expressions consacrées. Quand j’ai traduit le texte de Zibechi, je me suis demandé qui avait organisé ce fameux stage.
En 5 années de participation au mouvement du Logement, le constat est récurrent. Une autre méthode est le pseudo-débat aux conclusions rédigées d’avance. Des commissions sont formées, le rapporteur est nommé par les organisateurs, et c’est lui qui formulera ses conclusions indépendamment du contenu des débats. Certains sujets sont tabous, comme l’application d’une loi de 1993 qui oblige les Pouvoirs Publics – en priorité – à disposition des personnes sans-abri. En 2010 elle avait été appliquée deux fois. Etc.
Il y a également les attributions de paroles sélectives, où certaines personnes sont systématiquement ignorées, transparentes, et ce sont souvent les personnes qui ont réellement quelque chose à dire, mais parfois des difficultés pour s’exprimer, comme justement des personnes sans abri en ce qui concerne le logement. Tu parles en tête à tête avec elles, ce qu’elles disent est cohérent, tape juste. Prises dans une réunion de professionnels qui les traitent avec une condescendance méprisante, elles finissent par se taire, et ne plus participer aux réunions.
Et dans toutes ces réunions tu retrouves certains «  Maîtres du Jeu  » dont tu finis toujours par te demander pour qui ils travaillent vraiment. Et comme nous avons été quelques-uns à nous poser indépendamment la question au sujet des mêmes, la question est pertinente.
C’était encore plus flagrant quand le mouvement des indignés a débarqué à Bruxelles. Des tas de gens intéressants et désireux de mener une action concrète ont été découragés, comme dans le texte ci-dessus. Des gens comme il en existe beaucoup, qui souvent ont fait partie de la gauche, s’en sont éloigné pas parce qu’ils avaient changé d’idéal, mais au contraire parce que la gauche ne leur paraissait pas ouvrir les bons chemins. Les Indignés leur apparaissait comme un espoir d’une renaissance débarrassées dles anciennes erreurs. Ce fut tout le contraire. J’avais parfois l’impression de me retrouver dans une réunion de la fin des 70, identique avec d’autres acteurs.
A l’époque, beaucoup, comme moi, ce sont retrouvés dans les mouvement écologistes naissants, avec l’illusion qu’une bonne écologie était un moyen fondateur pour établir une équité des rapports nord-sud tout en conservant, créant ou recréant des environnements de qualité. Pour l’écologie on sait…
Donc comme beaucoup je suis passée de gauche à l’écologie de gauche, puis comme beaucoup, j’ai vu ce courant là aussi prendre une drôle de tournure en contradiction avec ses objectifs avoués. Se concentrant souvent sur une théorie environnementaliste qui faisait l’impasse sur les questions politiques, en particulier celle du colonialisme dont l’abolition est une condition nécessaire à la réalisation de modèle de souveraineté alimentaire ()et populaire).

Ce qui est triste, c’est qu’avant que les partis écologistes se mettent au service du sauvetage du capitalisme et d’une écologie de taxes qui utilise la culpabilisation et la menace, la punition pour s’imposer, il y a eu un réel courant de sympathie et d’intérêt dans la population pour ce mouvement qui promettait de remettre le monde aux dimensions humaines.
Là c’est une autre stratégie de déconstruction de l’opposition de gauche qui entre en jeu.
L’une est l’infiltration-détournement.
L’autre est l’activation comme agitation insignifiante pseudo démocratique.
Ici c’est une autre des stratégies confusionniste du pouvoir, l’anticipation. Quand il est probable qu’un mouvement populaire spontané est sur le point d’apparaître, les structures destinées à le canaliser sont immédiatement mises en place.
C’est le cas des révolutions de couleurs. Dont on sait à présent qu’elles ont pour composantes un mouvement populaire spontané (figurant et chair à canon) instrumentalisé – parfois catalysé aussi selon les impératifs de l’agenda. Des leaders cybernétiques sont gracieusement fournit par la CIA avec formation et matériel, et tout et tout - et tout est systématiquement enregistré, hé - chargés de prendre la direction politique du mouvement (on en avait un modèle conforme pour les Indignés sorti du moule) ainsi que des personnes qui participeront au mouvement dans le but de l’orienter (des centaines de jeunes vénézuéliens ont été formés en Serbie par groupe de 10 depuis des années, d’autres à Miami, d’autres en Colombie), de le diriger et de l’empêcher de formuler des objectifs concrets destinés à mettre en place une souveraineté populaire. L’autre branche de ces « révolutions » est purement de nature paramilitaire, terroriste et issue de mouvement extrémistes de droite ou religieux, des professionnels ou professionnalisée (camps d’entraînement). Des mouvements paramilitaires et mercenaires ontologiquement fascistes, déshumanisés. Qui vont créer le chaos, entre sabotages des points vitaux du pays et provocations, et éventuellement ils vont profiter du chaos pour exterminer sélectivement les dirigeants parmi d’autres victimes destinées à illustrer la cruauté du gouvernement à renverser qui perdant les pédales tire dans le tas.
Les medias également jouent un rôle de toute première importance, ils opèrent la mise en scène de la révolution, créant les matrices destinées à l’opinion publique. En déformant certains faits, inventant et parfois fabriquant en studio, les ingrédients requis qui n’auraient pas été fournis par la réalité et en passant systématiquement sous silence ce qui contredit le scénario.
Au Venezuela, cela ne marche pas. Il n’y a pas eu de soulèvement spontané de la population. Au contraire c’est plus de 80%, près de 90 même selon certaines enquêtes qui sont opposés aux insurgés. Et donc il n’y a pas eu cette mobilisation destinée aux caméras qui a du être fabriquée de toutes pièces. Si cela trompe les européens, les latinos eux ne s’y sont pas laissé prendre. J’ai bien ri avec un article qui proposait aux opposants toute une panoplie de photos a utiliser dans les trucages au rebelles… en disant qu’ils en avait d’autres en réserve… la première qui date de 2002, montre un gars de dos qui ressemble vaguement à Maduro une flèche qui le désigne et la légende "Maduro en train de tirer sur le peuple"… Un autre expliquait comment faire un montage pour prouver que le gouvernement avait fait venir des taureaux de Cuba pour charger les manifestants…
Un autre rôle des médias sera d’opérer une substitution de leaders. Les leaders populaires des manifestations seront invisibilités au profit des leaders fournis en Kit par Washington ou acquis à leurs intérêts. Comme au Brésil où des foules immenses finissent par servir des intérêts contraires à ceux qu’elles défendent, parce que les slogans qui sont présenté par les médias ne sont pas les leurs, parce que les porte-paroles sont en fait extérieurs au mouvement de base.
Et toutes ces techniques, agitation sans but, récupération et détournement des mouvements de lutte sociale, révolutions préventives ou récupérées, de même que celles que nous décrit l’agent double Cubain Raúl Capoteconcernant les méthodes utilisées pour faire d’universités révolutionnaires des fabriques de réactionnaires, on les retrouve en action chez nous dans différentes recettes et cocktails…
Et l’Amérique Latine, intelligente, créative et révolutionnaire, est en train de nous fournir non seulement de précieuses analyses de ces phénomènes mais aussi des manières d’y réagir et de les contrer…
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