RSS SyndicationTwitterFacebook
Rechercher

Les massacres d’Israël aux frontières et l’hypocrisie des droits de l’homme

La réaction de l’administration d’Obama aux massacres israéliens de manifestants palestiniens désarmés dimanche aux frontières d’Israël souligne l’hypocrisie de ceux qui attribuent des motivations humanitaires à la politique prédatrice de Washington dans la région.

Les troupes israéliennes ont tiré à balles réelles et dans un cas ont tiré d’un tank sur des Palestiniens qui manifestaient à la frontière avec la Syrie, le Liban, la Cisjordanie et Gaza. Des dizaines de milliers de personnes se sont jointes aux manifestations organisées pour commémorer le 63ième anniversaire de la Nakba (catastrophe en arabe). Nakba est le terme utilisé pour désigner la déclaration d’indépendance d’Israël et le nettoyage ethnique de masse qui a chassé 750 000 Palestiniens de chez eux en 1948.

Depuis lors le nombre de réfugiés palestiniens et de personnes déplacées à l’intérieur du pays a atteint 7,1 millions de personnes qui vivent sans droits et sans citoyenneté dans des pays arabes voisins et sous occupation israélienne à Gaza et en Cisjordanie ou qui sont des citoyens de seconde classe à l’intérieur même d’Israël.

Les manifestants affirmaient simplement leur "droit au retour" dans leurs maisons et sur leurs terres. C’est un droit qu’Israël soutenu par Washington leur a toujours catégoriquement dénié et auquel les leaders palestiniens nationalistes embourgeoisés de l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP) ne sont que trop prêts à renoncer dans les négociations.

Dimanche les troupes israéliennes ont ouvert le feu sur la clôture qui marque la frontière près de Maroun al-Ras au Liban tuant 10 réfugiés Palestiniens et en blessant 80 autres. Cinq Palestiniens de plus ont été tués et au moins 30 blessés dans le village de Majdal Shams à la frontière syrienne sur le plateau du Golan occupé par Israël.

Un autre Palestinien a été tué et au moins 86 civils ont été blessés quand les troupes israéliennes ont ouvert le feu avec des armes légères et avec des tanks sur une manifestation à la frontière à Beit Hannon au nord de la bande de Gaza. La police et l’armée a aussi attaqué les manifestants à Ramallah Bethlehem et Hébron. En tout 16 personnes ont été tuées et plus de 400 blessées - certaines d’entre elles sont dans un état critique.

A ceux qui l’interrogeaient sur la réaction d’Obama à cette répression sauvage, le porte parole en chef de la Maison Blanche Jay Carney a répondu en exprimant des "regrets" de pure forme pour "la perte de vies" et puis il s’est lancé dans une sorte d’apologie de la folie meurtrière d’Israël.

"Israël comme tous les pays a le droit d’empêcher qu’on traverse ses frontières sans autorisation" a dit Carney. "Ses voisins doivent faire en sorte que cela n’arrive pas."

Une phrase qui contient les mots "Israël, comme tous les pays" et "frontières" est un mensonge par définition. A la différence des autres pays, les frontières d’Israël ne cessent de changer de place à cause des agressions militaires d’une part et du développement pernicieux des colonies de l’autre. De plus ceux qui sont morts dimanche se trouvaient à l’intérieur du Liban, de la Syrie, de la Cisjordanie et de la bande de Gaza.

Puis au lieu de faire porter le blâme de ces effusions de sang sur l’armée et le gouvernement israéliens, Carney a accusé la Syrie d’en être le principal responsable.

"Nous désapprouvons totalement l’implication du gouvernement syrien dans les manifestations d’hier sur le plateau du Golan," a-t-il dit et il a ajouté : "une telle attitude est inacceptable et ne détournera pas notre attention de la répression actuelle des manifestants de son propre pays par le gouvernement syrien."

Ce raisonnement rappelle les arguments méprisables du gouvernement israélien pour justifier le meurtre et les blessures infligées à de manifestants désarmés dont la majorité a trouvé la mort à la frontière libanaise et non syrienne.

La question de savoir si le gouvernement de Bashar al-Assad a facilité l’accès des réfugiés palestiniens à travers la frontière militarisée du plateau du Golan pour détourner l’attention de sa propre répression sanglante de l’opposition interne n’est pas capitale en ce qui concerne les événements de dimanche.

L’héroïsme et la détermination qu’ont montré les jeunes Palestiniens en bravant les tanks et les balles pour faire valoir leurs droits nous rappelle les soulèvements révolutionnaires des jeunes et des travailleurs de Tunisie, d’Egypte, du Bahrein et d’autres pays du monde arabe. En affrontant l’état israélien ils manifestaient aussi leur méfiance vis à vis des régimes bourgeois arabes qui n’ont cessé de réprimer et trahir leurs peuples.

Au Liban, dimanche, les troupes libanaises ont aussi ouvert le feu sur des manifestants palestiniens pour les éloigner de la frontière. Et en Egypte, le régime militaire a envoyé des troupes et des policiers contre les milliers de personnes rassemblées devant l’ambassade israélienne au Caire en solidarité avec les Palestiniens. Les forces de sécurité ont envoyé des gaz lacrymogènes, ont tiré des balles de caoutchouc et des balles réelles et ont blessé des centaines de personnes.

La vérité c’est que Washington soutient la répression des régimes arabes réactionnaires et surtout il soutient l’oppression et la violence systématiques d’Israël contre le peuple palestinien.

La duplicité éhontée et l’hypocrisie de la politique étasunienne au Moyen Orient apparaîtra clairement la semaine prochaine. Obama fera un discours jeudi pour affirmer sa sympathie pour le "printemps arabe" -et dénoncera certainement par la même occasion la répression à laquelle se livrent les régimes de Kadhafi en Libye et d’Assad en Syrie.

Le lendemain il y aura une rencontre à la Maison Blanche avec le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu suivie d’un discours au Comité d’action politique américaine et israélienne (AIPAC), le principal lobby sioniste aux USA et on peut être sûr qu’il ne condamnera pas le fait de se servir d’armes automatiques et d’armes de tanks contre des réfugiés désarmés qui s’approchent de la frontière israélienne. Selon le porte parole de la Maison Blanche, le thème du discours à l’AIPAC sera "le lien indestructible entre les Etasuniens et les Israéliens et l’importance de cette relation."

Il est tout à fait clair que le moment ou le lieu que choisit Washington pour exprimer son intérêt dans les droits de l’homme n’a rien à voir avec des principes moraux universels mais bien plutôt avec des intérêts impérialistes.

Si un pays dont la politique ne convient pas aux objectifs géostratégiques des USA se livre à de la répression dans son pays -comme en Libye- cela sert de prétexte à une intervention impérialiste destinée à imposer un régime plus soumis à Washington et à assurer aux USA un meilleur contrôle des réserves de pétrole.

Mais si un autre pays qui est aligné sur les USA réprime dans le sang des civils désarmés, comme au Barhein ou comme en Israël, il reçoit un soutien tacite ou explicite de Washington.

En dépit du fait que "’les droits de l’homme" servent depuis longtemps de prétexte tout à fait hypocrite et mensonger à la guerre impérialiste, c’est précisément pour ce motif que toute une couche de soit-disant "libéraux" et "hommes de gauche" aux USA comme en Europe de l’ouest se sont ralliés à l’intervention de l’OTAN et des USA en Libye.

Juan Cole, professeur à l’université de Michigan en est un éminent représentant ; il utilise son blog Informed Comment (commentaires éclairés) pour promouvoir les soit-disant "rebelles" de Benghazi et célébrer les actions de leurs sponsors -le Pentagone et l’OTAN.

Lundi, Cole a posté un commentaire intitulé "le printemps arabe arrive en Israël" qui décrivait les meurtres aux frontières, récapitulait les crimes historiques de 1948 et condamnait la politique actuelle du gouvernement israélien. Il manquait toutefois quelque chose d’évident : il n’y avait aucune mention de l’aide financière et militaire massive des USA à Israël sans laquelle ces crimes contre les Palestiniens ne seraient pas possibles.

Il n’expliquait pas non plus pourquoi les USA se mobilisaient en faveur des "droits de l’homme" en Libye tout en soutenant des meurtres de masse et la répression en Israël.

Comme ils ont passé les deux derniers mois à défendre vigoureusement l’intervention impérialiste de l’OTAN et des USA en Libye, Cole et ceux de son espèce n’ont ni la crédibilité ni la détermination nécessaires pour s’opposer à la politique de Washington dans d’autres endroits de la région.

Les travailleurs et la jeunesse de Palestine entrent maintenant dans une nouvelle phase décisive de leur long et amer combat. Ils ne trouveront pas d’alliés parmi les gens soit-disant "de gauche" ni parmi les "libéraux" qui ont renié leur passé de pacifistes pour s’aligner sur l’impérialisme mais ils pourront s’appuyer sur les classes laborieuses qui se soulèvent partout au Moyen Orient -y compris en Israël- et sur celles des Etats-Unis et du monde entier.

Bill Van Auken

Pour consulter l’original : http://www.wsws.org/articles/2011/may2011/pers-m17.shtml

Traduction : D. Muselet

URL de cet article 13728
   
Même Thème
Israël, Les 100 pires citations
Jean-Pierre Bouché, Michel Collon
Ce livre contient 100 citations de dirigeants, stratèges et penseurs sionistes, des origines du mouvement jusqu’à aujourd’hui. À partir de ces citations, il s’agit pour les auteurs de faire une analyse à la fois documentée et ludique de la pensée sioniste à travers les années. Les auteurs montrent ainsi qu’il y a bien une pensée sioniste cohérente qui se perpétue à travers le temps. Le conflit israélo-palestinien ne vient pas de nulle part : il prend sa source au moment même où le projet (…)
Agrandir | voir bibliographie

 

"Bon, j’imagine que vous ne pouvez tout de même pas tuer vos subordonnés"

seule réponse fournie par les élèves d’une école de commerce de Philadelphie
lorsque le professeur demanda à ses élèves de lui donner un exemple de
comportement repréhensible dans une entreprise.

Cité par Serge Halimi, dans le Monde Diplomatique de février 2005, page 2

© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.