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Palestine occupée : en parlant de génocide... Rappel !
Daniel VANHOVE

Si l’on peut se réjouir de voir (enfin) les grandes ONG et jusqu’aux institutions internationales prendre la mesure du drame incommensurable qu’essuie la population palestinienne depuis des décennies qu’elle vit une Nakba permanente, il faut néanmoins dénoncer leurs lenteurs administratives.

Ces fonctionnaires grassement rémunérés n’ont que trop tardé dans leur prise de conscience de l’étendue des dévastations et du malheur absolu qu’endurent une population assiégée de toutes parts, tant par le régime colonial d’apartheid, ses soutiens, son armée et ses colons, que par le peu de cas qu’en ont fait ces institutions prestigieuses ayant manqué à leurs devoirs élémentaires.

Il aura fallu l’incroyable détermination des factions de la résistance palestinienne, ayant bien compris qu’elle ne pouvait compter que sur elle-même, faite de sacrifices, de patience, de longues et prudentes préparations, et son coup de pied dans le guêpier sioniste le 7 octobre 2023 pour ébranler l’ensemble de la ‘communauté internationale’ et la réveiller de sa torpeur complice, pour qu’elle prenne enfin ses responsabilités face à un régime dont les pratiques ‘terroristes’ feraient passer celles de Daech et de l’E.I. pour quelques anodines escarmouches.

Je veux ici reprendre ce que j’écrivais il y a déjà plus de 15 ans sur le génocide en cours contre la population palestinienne, et que d’aucuns m’avaient dit que j’exagérais :

‘’Du racisme latent de tout esprit colonial

Finalement, devant tant de mauvaise foi, les buts poursuivis par les dirigeants d’Israël et leurs adeptes apparaissent au grand jour. L’objectif non avoué, mais que n’importe quel observateur peut aisément comprendre, de ces gouvernements successifs à Tel Aviv – ne s’embarrassant jamais d’appeler pour la formation de leur majorité une redoutable extrême-droite – est l’entièreté du territoire, sans son peuple arabe dont ils aimeraient se débarrasser, définitivement. Et tout est bon pour y parvenir : après avoir testé toutes les méthodes possibles pour éradiquer cette population arabe des lieux, leur transfert vers des pays voisins et même la stérilisation forcée des individus de sexe mâle sont parfois évoqués dans les enceintes parlementaires de la Knesset. Autres facettes de la « démocratie » à l’israélienne... A travers une politique des petits pas et du fait accompli, tout est mis en œuvre, méthodiquement, sournoisement, insidieusement, sans retenue puisque la ‘Communauté internationale’, à part ses habituelles déclarations mièvres et cauteleuses, regarde passivement l’agonie d’un peuple, sans prendre aucune mesure contraignante pour rappeler à l’Etat d’Israël ses devoirs en tant que seule « démocratie » dans la région... Quelle foutaise !

Ce dont il s’agit en Israël, n’est rien d’autre qu’une judéo-cratie pure et dure, dont les principes schizophrènes repris dans le projet sioniste si cher à Theodor Herzl (1), définissaient déjà le futur Etat comme foyer national réservé aux seuls juifs.

Le sionisme repose sur deux données fondamentales du judaïsme :

• une première donnée d’ordre religieux : le mythe biblique de la Terre promise pour un Peuple élu (ou autrement dit, le droit du sol)
• une seconde donnée d’ordre légal : la loi établissant la race juive (ou, autrement dit, le droit du sang, transmis par la mère seule)

Au départ, le terme « juif » désignait uniquement une appartenance religieuse. Mais au fil du temps, et singulièrement depuis les 19è et 20è siècles, cette notion s’est transformée en appartenance « r aciale ». Nombre d’Israéliens sont aujourd’hui athées mais néanmoins déclarés citoyens « juifs » par descendance maternelle. Nous sommes donc en présence d’un Etat fondé non sur les principes d’une Nation mais sur ceux d’une religion et d’une ethnie. Tant que cet esprit délétère animera la majorité dominante du pays – et ceux qui la soutiennent de l’extérieur – il est illusoire d’espérer la moindre avancée dans la perspective d’une vraie « démocratie », ainsi que dans une entente avec leurs voisins arabes et même au-delà. Quel Etat dans le monde peut-il se réclamer d’une appartenance religieuse ou ethnique pour revendiquer sa reconnaissance par l’ensemble de la Communauté internationale ? Quel archaïsme ! A-t-on vu le racisme prédominant en Afrique du Sud être soutenu par les Nations Unies ? On ne s’étonnera pas que le dernier gouvernement qui l’ait soutenu soit celui d’Israël, précisément !

Comment expliquer alors que perdure une situation d’un autre âge, où un Etat basé sur une ségrégation ethnique et qui en occupe un autre, continue à être soutenu par les Etats-Unis qui se proclament aux yeux du monde comme garants des valeurs « démocratiques », liberté, égalité et blablabla ! ?... Et la position européenne n’est pas moins ambiguë qui continue, d’année en année, à financer un Etat occupé, validant de la sorte cette inacceptable situation, en lieu et place de signifier à l’envahisseur son désaccord total avec sa politique d’occupation. Ces positions, aussi bien américaine qu’européenne, sont absurdes et démontrent qu’à terme elles ne sont pas tenables.

Par ailleurs, ces concepts dangereux véhiculent un racisme à plus d’un titre. Racisme – doublé comme toujours d’intégrisme et vice-versa – à peine déguisé (2). Inoculé dès le plus jeune âge, à chaque enfant. Entretenu à la maison. A l’école. A l’armée. Et alimenté tout au long de la vie par une majorité de médias aussi peu scrupuleux... que la plupart des nôtres. Lors de la guerre contre le Liban pendant l’été 2006, on a pu voir des enfants israéliens sous l’œil attentif et complaisant de leurs parents, dessiner et écrire des messages (dont on imagine aisément la teneur) sur les obus qui allaient par la suite être lancés contre les populations libanaises... Inconscience meurtrière d’adultes malades, qui par ces comportements éduquent leurs enfants dans une orientation criminelle, et à terme, en font... de nouveaux malades !

Les exemples de ce racisme rampant, suintant, exsudant ses poisons à chaque occasion sont accablants et les nombreux témoignages de ceux qui ont pu se rendre dans la région ces dernières années, vont tous dans le même sens. Aucun dirigeant politique extérieure, aucun diplomate, aucune chancellerie ne pourra s’abriter cette fois derrière le refrain bien connu : « On ne savait pas ! » Ayant la prétention de mener les affaires du monde, ils ont l’immense, l’écrasante responsabilité de ce qui se passe dans la région, et il faut leur rappeler sans cesse leurs manquements graves dans ce dossier, leur lamentable résignation, leur misérable abdication. N’importe quel citoyen épris de la plus élémentaire justice ne peut que condamner en termes clairs et sans la moindre ambiguïté, les dérives gravissimes du gouvernement, des colons et de l’armée d’Israël. Quels que soient les motifs incriminés.

Il est temps d’oser dire, d’oser qualifier du seul nom qui convienne à ces procédés, la nature de l’Etat d’Israël : un Etat raciste, pratiquant l’apartheid, le transfert de populations, le nettoyage ethnique ! Il est temps d’arrêter l’autocensure qui nous fait ergoter sur le terme approprié ou non, dès qu’il s’agit de parler des méthodes du gouvernement et de l’armée d’Israël. Et de dénoncer le lent génocide que subit depuis 60 ans, le peuple palestinien, sans avoir peur des mots (3).

Quoi d’étonnant, que des sensibilités s’exacerbent un peu partout, et jusque dans nos villes européennes ? Ceux qui soutiennent ce système devraient se poser la question de savoir s’ils n’avalisent pas au plus profond d’eux-mêmes l’une des pires « barbaries », dont ils se défendent bien et qu’ils s’empressent de dénoncer chez les autres... mais que leur adhésion à un tel système cautionne pourtant de manière implicite. Par leur silence complice, leur couardise, leur inertie et bien qu’ils s’en défendent – mais cela n’a rien de neuf – nos politiciens, nos diplomates et leurs médias-lèchent-bottes, importent le conflit chez nous et creusent activement le lit des extrémistes de tous bords.

Et si, dans ce dossier brûlant, certains éléments, quelques nuances, d’inavouables calculs échappent à l’entendement, au moins une chose est sûre : c’est que les jeunes arabes du Maroc, ou les musulmans d’Indonésie, très éloignés géographiquement du conflit du Moyen-Orient, ne peuvent comprendre la passivité de nos pays qui ont pourtant pour habitude d’(ab)user des « Droits de l’homme » à la moindre occasion, n’hésitant pas, pour certains, à brandir jusqu’au « Droit d’ingérence » !(4)... Ils comprennent par contre, sans problème aucun, l’injustice faite à leurs frères de Palestine, et sont en droit de s’interroger sur les raisons d’un tel deux poids deux mesures, dans notre traitement des évènements... Et ils ne peuvent dès lors que se sentir solidaires du peuple palestinien contre tout ce qui représentera et rappellera les valeurs iniques occidentales qui aujourd’hui président à la destinée du monde. Pas étonnant que les plus faibles d’entre eux se laissent influencer par des discours haineux vis-à-vis de l’Occident et que quelques uns franchissent le pas des camps d’entraînement au djihad... Puisque le Droit auquel nous n’avons de cesse de nous référer ni la Justice ne fonctionnent correctement, que reste-t-il aux yeux de ceux-là à part la violence aveugle ? Et d’ailleurs, ne l’utilisons-nous pas amplement, nous, quand il s’agit d’obtenir ce que nous convoitons chez autrui ! ?

Ce sont nos propres lâchetés qui alimentent les méfiances, les réticences, voire les résistances que nous qualifions de « terrorisme » chez les autres. Lâchetés qui fragilisent d’autant les valeurs d’une véritable « démocratie », et à terme, la paix que nous croyons définitivement acquise, à l’abri de nos boucliers de missiles.’’

Notes :

1. Fondateur du mouvement sioniste au Congrès de Bâle en 1897, qui écrivit lui-même « Mon programme est un programme colonial ».
2. Intégrisme = doctrine qui tend à maintenir la totalité d’un système, spécialement d’une religion (définition du Petit Robert)
3. Génocide = destruction méthodique d’un groupe ethnique (définition du Petit Robert)
Par ailleurs, dans la Convention des Nations Unies du 9 décembre 1948 pour la Prévention et la Répression du Crime de génocide, celui-ci s’entend lorsque l’un des actes ci-après, est commis dans l’intention de détruire, tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel :
a - Meurtre de membres du groupe ;
b - Atteinte grave à l’intégrité physique ou mentale de membres du groupe ;
c - Soumission intentionnelle du groupe à des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle ;
d - Mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe ;
e - Transfert forcé d’enfants du groupe à un autre groupe.
Sans le moindre risque de se tromper, l’occupant israélien est coupable de plusieurs de ces crimes.
4. Lire Impérialisme humanitaire par Jean Bricmont – Ed. Aden - 2006.

Daniel Vanhove -
La Démocratie Mensonge – 2008 – Ed. M. Pietteur – Extrait
10 avril 2024.

 
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