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Les leçons à tirer du face à face indo-chinois à la frontière (Counterpunch)
Gerry BROWN

L’affrontement entre la Chine et l’Inde à la jonction Donglang / Doklam (jonction de l’Inde, de la Chine et du Bouthan)*, a pris fin au bout de deux mois. Les deux camps ont crié victoire.

L’Inde a souligné le double retrait, ou retrait simultané, (elle a utilisé le terme euphémique de « désengagement ») des deux camps de la zone contrôlée par la Chine (également revendiquée par le Bhoutan) dans laquelle les troupes indiennes avaient fait intrusion. En ce qui concerne la Chine, elle a confirmé que les 50 derniers soldats indiens avaient quitté la région, sans dire que les troupes chinoises s’étaient aussi retirées. Ce que Pékin a dit, c’est qu’il continuerait à « maintenir une présence militaire et à patrouiller » la région, et à « ajuster et déployer » ses forces en fonction de la situation.

Si victoire il y a, elle réside dans le fait que les deux camps ont reculé devant une nouvelle escarmouche frontalière, après la guerre de 1962. C’est en soi une raison tout à fait suffisante de pousser un soupir de soulagement. La perspective que deux puissances nucléaires qui représentent à elles seules plus d’un tiers de la population mondiale, entrent en guerre était vraiment effrayante.

C’est aussi une victoire pour la multipolarité émergente. Le choc des deux titans, tous deux membres de BRICS, pourrait affaiblir, sinon détruire, les BRICS tel que nous le connaissons.

New Delhi avait besoin de se sortir rapidement de cette impasse sans perdre la face tout autant que Pékin. Les chutes de neige imminentes et la baisse des températures en dessous de zéro allaient bientôt rendre intenable la situation des troupes indiennes stationnées sur le plateau de l’Himalaya. Modi avait réclamé publiquement un double retrait et l’accord chinois était le meilleur qu’il pouvait espérer. Il savait probablement depuis le début que l’Empire du Milieu ne renoncerait pas à construire sa route dans la zone sous contrôle chinois.

En vérité, le chantier de la route chinoise avait servi de prétexte, de feuille de vigne, à l’incursion de l’Inde dans une zone sur laquelle elle n’a aucun droit. L’ambassadeur chinois à New Delhi avait prévenu l’Inde de la construction de la route à l’avance. L’Inde a fait semblant de l’ignorer et a pris prétexte du prétendu changement du statu quo pour empiéter sur le territoire chinois, en prétendant qu’il venait défendre le Bhoutan en vertu d’un traité qui la lie à ce pays. Des sources à Thimphou ont affirmé que New Delhi mentait. Le Bhoutan n’avait pas sollicité l’aide de l’Inde. Leur traité d’amitié n’est pas un traité de défense et il ne comporte pas d’engagement de défense mutuelle.

Il est devenu évident pour beaucoup de Bhoutanais que l’aventurisme militaire indien à Donglang / Doklam avait pour but de nuire aux relations sino-bhoutanes pour empêcher le parti pro-Pékin de remporter les élections au Bhoutan l’année prochaine. Exactement comme l’Inde avait réussi à le faire dans l’élection précédente, en 2013, en réduisant les subventions indiennes sur l’essence et le gaz domestique pour le Bhoutan.

Ce qui a mis Pékin particulièrement en colère, c’est que les Indiens sont entrés dans la zone contrôlée par les Chinois sur laquelle New Delhi n’a aucun droit, et cela à partir du secteur de Sikkim où la frontière a été établie par un traité entre Qing China et l’Inde britannique en 1890.

Tandis que l’arrivée du mauvais temps sur le plateau de l’Himalaya préoccupait les troupes indiennes qui y avaient fait incursion, ce qui inquiétait Pékin était que Modi joue les « abonnés absents » au sommet des BRICS qui se tiendra à Xiamen, en Chine, du 3 au 5 septembre. Cela constiturait un affront pour l’hôte chinois. La Chine attache beaucoup d’importance aux BRICS et à leur apparence d’unité. Pékin ne veut pas être vu comme celui qui a causé une fracture, et encore moins une rupture, entre les BRICS. Après plus de deux mois de bataille verbale à travers l’Himalaya, la Chine a fait la concession tactique de la onzième heure pour garantir le succès du sommet des BRICS.

On est enfin sorti de l’impasse de la frontière, en dépit des cris nationalistes, et même chauvins et bellicistes, de ceux qui ne font que jacasser dans les deux pays. Quelles leçons la Chine et le Bhoutan peuvent-elles tirer de cet incident ?

Les Bhoutanais, en particulier les jeunes générations qui veulent un développement économique, doivent prendre leur destinée entre leurs propres mains. Cela implique de ne pas se laisser intimider par les menaces de New Delhi et de voter pour le parti qui peut obtenir de la Chine l’aide, les investissements et les touristes dont le pays a besoin. C’est seulement à ce prix qu’ils pourront se libérer du handicap d’être un protectorat de facto de l’Inde. Et il y a actuellement une opportunité à saisir avec le boom de la construction de la nouvelle route de la soie.

Les Chinois doivent se préparer à payer le prix de leur objection de principe à l’entrée de l’Inde dans le groupe des Fournisseurs nucléaires**. Il lui faut aussi prendre la mesure, et agir en conséquence, de l’opportunisme de l’Inde en matière de politique étrangère. l’Inde se fiche des traités bilatéraux et des conventions internationales, tout autant que de son nouveau Statut de meilleur ami de l’Amérique***.

Cela complique et rend plus difficile la défense chinoise de ses plus de 4 000 km de frontière avec l’Inde. La surveillance par satellite en temps réel des troupes indiennes tout au long de la longue frontière ainsi que le déploiement d’une force de réaction rapide pour prévenir toute intrusion sont devenus nécessaires.

Gerry BROWN

Traduction : Dominique Muselet

 
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